Déchéance des intérêts et vérification des créances dans un contrat de prêt.

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Déchéance des intérêts et vérification des créances dans un contrat de prêt.

La déchéance du droit aux intérêts contractuels est prononcée lorsque le créancier ne justifie pas avoir respecté son obligation de vérification préalable des incidents de paiement, conformément à l’article L. 311-37 du Code de la consommation, qui impose au prêteur de consulter le fichier des incidents de paiement (FICP) avant d’accorder un crédit. En l’espèce, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud-Rhône-Alpes n’a pas pu prouver qu’elle avait effectué cette vérification de manière conforme, ce qui a conduit à la perte de son droit aux intérêts. De plus, selon l’article 954 du Code de procédure civile, le juge ne peut statuer que sur les prétentions énoncées dans le dispositif, ce qui limite la possibilité de réclamation des intérêts si les conditions de leur attribution ne sont pas remplies.

L’Essentiel : La déchéance du droit aux intérêts contractuels est prononcée lorsque le créancier ne justifie pas avoir respecté son obligation de vérification préalable des incidents de paiement. En l’espèce, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud-Rhône-Alpes n’a pas pu prouver qu’elle avait effectué cette vérification de manière conforme, ce qui a conduit à la perte de son droit aux intérêts. Le juge ne peut statuer que sur les prétentions énoncées dans le dispositif, limitant ainsi la possibilité de réclamation des intérêts.
Résumé de l’affaire :

Ouverture de comptes et prêts

Au cours de l’année 2020, une institution financière a ouvert un compte de dépôt à vue pour un emprunteur et a consenti deux prêts personnels, l’un de 25 000 euros et l’autre de 20 000 euros, avec des modalités de remboursement spécifiques.

Mise en demeure et déchéance

Se prévalant d’échéances impayées, l’institution financière a mis en demeure l’emprunteur de régler la totalité des sommes dues avant de prononcer la déchéance des deux emprunts.

Assignation et jugement

L’institution financière a assigné l’emprunteur devant le juge des contentieux de la protection, qui a rendu un jugement déclarant l’action recevable, prononçant la déchéance du droit aux intérêts et condamnant l’emprunteur à payer la différence entre les sommes débloquées et les versements effectués.

Appel de la décision

L’institution financière a interjeté appel de ce jugement, demandant la réformation de la décision concernant la déchéance de son droit aux intérêts et le montant de la créance.

Motivations du jugement

Le tribunal a confirmé la déchéance du droit aux intérêts, estimant que l’institution financière n’avait pas respecté son obligation de vérification préalable. Il a également statué sur le montant de la créance, condamnant l’emprunteur à payer une somme précise au titre d’un des prêts.

Dépens et article 700

L’emprunteur a été condamné à supporter les dépens de l’instance, et le tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Conclusion de la cour

La cour a confirmé certaines décisions du tribunal tout en réformant d’autres, condamnant l’emprunteur à payer une somme spécifique à l’institution financière et déboutant celle-ci de ses autres demandes.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la déchéance du droit aux intérêts pour la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud-Rhône-Alpes ?

La déchéance du droit aux intérêts a été prononcée par le tribunal au motif que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud-Rhône-Alpes (la CRCAM) n’a pas respecté son obligation de vérification préalable, notamment en consultant le fichier des incidents de paiement (FICP).

Selon l’article L. 311-37 du Code de la consommation, « le prêteur doit s’assurer de la solvabilité de l’emprunteur avant de lui consentir un crédit ». Cette obligation de vérification est essentielle pour protéger les emprunteurs et garantir une pratique de crédit responsable.

Dans cette affaire, la CRCAM a produit des documents qui, bien que mentionnant des consultations du FICP, n’ont pas constitué une preuve suffisante de la réalisation de cette obligation. Le tribunal a donc confirmé la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt n° 73125742308, sans que la CRCAM ne conteste cette décision concernant le prêt n° 73124642185.

Quel est le principe de la détermination du montant de la créance dans le cadre de cette affaire ?

Le tribunal a condamné l’emprunteur à payer à la CRCAM « la seule différence éventuelle entre les sommes débloquées à son profit et ses versements, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ».

Cette décision s’appuie sur l’article 954 du Code de procédure civile, qui stipule que « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ». Cela signifie que le tribunal doit se limiter à examiner les demandes clairement formulées par les parties.

Dans ce cas, la CRCAM a demandé un montant précis au titre du prêt personnel n° 73125742308, mais le tribunal a jugé que les calculs complexes liés à la déchéance des intérêts ne lui incombaient pas. La CRCAM devait justifier les éléments de son calcul, ce qui a conduit à une révision du montant à payer par l’emprunteur.

Quel est le régime des dépens et l’application de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?

L’emprunteur, ayant succombé à l’instance, a été condamné à supporter les entiers dépens de première instance et d’appel, conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile. Cet article précise que « la partie perdante est condamnée aux dépens ».

Concernant l’application de l’article 700 du Code de procédure civile, qui permet à une partie de demander le remboursement de ses frais de justice, le tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu à application de ces dispositions. Cela signifie que, bien que la CRCAM ait gagné en partie, l’équité ne commandait pas d’accorder des frais supplémentaires à la partie gagnante.

Ainsi, le tribunal a confirmé la décision initiale en ce qui concerne les dépens et a statué qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer l’article 700, ce qui est une pratique courante lorsque les circonstances de l’affaire ne justifient pas une telle indemnisation.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/03015 – N°Portalis DBVH-V-B7H-I6OE

AB

JURIDICTION DE PROXIMITE D’ORANGE

04 juillet 2023

RG : 1122000244

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL SUD RHONE ALPES

C/

[E]

Copie exécutoire délivrée

le 27 février 2025

à Me Didier Adjedj

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2025

Décision déférée à la cour : jugement de la juridiction de proximité d’Orange en date du 04 juillet 2023, N°1122000244

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Alexandra Berger, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre

Mme Alexandra Berger, conseillère

Mme Audrey Gentilini, conseillère

GREFFIER :

Mme Audrey Bachimont, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 décembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 27 février 2025.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône-Alpes prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Didier Adjedj de la Selasu Ad Conseil Avocat, plaidant/postulant, avocat au barreau de Carpentras

INTIMÉ :

M. [G] [E]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6] (13)

[Adresse 4]

[Localité 5]

Assigné par PV 659 code de procédure civile le 16.11.2023

Sans avocat constitué

ARRÊT :

Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 27 février 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Au cours de l’année 2020, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud-Rhône-Alpes (la CRCAM) a consenti à M. [G] [E]’:

– suivant convention de compte du 28 mai 2020, l’ouverture en ses livres d’un compte de dépôt à vue n°8565360875.

– selon offre de crédit acceptée le 6 juin 2020, un prêt personnel n° 73124642185 substitué sous le n° 00002645409 d’un montant de 25 000 euros au TEAG de 3,182’% remboursable en 72 mensualités de 381,38 euros,

– selon offre de crédit acceptée le 11 juillet 2020, un second prêt personnel n° 73125742308 substitué sous le n° 00002703055 d’un montant de 20 000 euros au TEAG de 3,182’%, remboursable en 72 mensualités de 305,10 euros,

Se prévalant d’échéances impayées et d’un solde débiteur persistant, elle a, par lettre recommandée du 15 avril 2022, mis en demeure son client d’en régler la totalité avant de prononcer la déchéance du terme des deux emprunts par lettre recommandée du 23 mai 2022.

Par acte du 7 février 2023, elle l’a assigné devant le juge des contentieux de la protection d’Orange qui par jugement réputé contradictoire du 4 juillet 2023,

– a déclaré son action recevable,

– a prononcé la déchéance de son droit aux intérêts au titre des deux prêts et du compte-courant

– a condamné M. [G] [E] à lui payer la seule différence éventuelle entre les sommes débloquées à son profit et les versements effectués, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement au titre des deux prêts et du compte-courant

– a dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– a rappelé que la décision est exécutoire de plein droit ;

– a condamné M. [G] [E] aux dépens de l’instance.

La société CRCAM Sud Rhône Alpes a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 25 septembre 2023.

Par ordonnance du 5 septembre 2024, la procédure a été clôturée le 2 décembre 2024 et l’affaire fixée à l’audience du 16 décembre 2024 pour être mise en délibéré au 27 février 2025.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 14 décembre 2023, la CRCAM Sud Rhône-Alpes demande à la cour

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance de son droit aux intérêts et en ce qu’il a limité la condamnation de M. [E] au paiement de la seule différence entre les sommes débloquées à son profit et les versements effectués, avec intérêts au taux légal,

Statuant à nouveau

– de condamner celui-ci au paiement de la somme de 22 834 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2022, date du dernier arrêté de compte au titre du prêt N° 73125742308,

Subsidiairement, et en tout état de cause

– de condamner M. [G] [E] à lui payer la somme de’:'(sic)

– au titre du prêt de 25 000 euros’: (sic)

– au titre du prêt de 20 000 euros’: (sic)

– au titre du solde débiteur du compte courant’: (sic)

En tout état de cause

– de le condamner au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

M. [G] [E] n’a pas constitué avocat. La déclaration d’appel lui a été signifiée le 13 novembre 2023 selon les modalités prévues 659 du code procédure civile.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.

MOTIVATION

*déchéance du droit aux intérêts

Pour déchoir la requérante de son droit aux intérêts contractuels au titre des trois contrats souscrits, le tribunal a jugé qu’elle ne justifiait pas avoir respecté son obligation de vérification préalable en consultant le fichier des incidents de paiement (FICP).

L’appelante soutient qu’elle justifie avoir accompli cette formalité pour le prêt personnel N° 73125742308 substitué sous le N° 00002703055 d’un montant de 20 000 euros.

Elle produit à cet effet la photocopie en noir et blanc de deux captures d’écran illisbiles, ainsi que deux documents mentionnant qu’elle a effectuée des consultations obligatoires du FICP effectuées le 06 juin et le 07 juillet 2020, avec les références de ses demandes.

Cependant malgré la concordance relative des dates de ces consultations éventuelles et des dates de conclusion des prêts concernés, elle ne peut ainsi se constituer une preuve à elle-même.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a prononcé la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt n° 73125742308 substitué sous le N° 00002703055 d’un montant de 20 000 euros, l’appelante ne formant aucune demande de réformation de ce jugement en ce qui concerne la déchéances de son droit aux intérêts du prêt personnel n° 73124642185 substitué sous le N° 00002645409 d’un montant de 25 000 euros.

*montant de la créance

Le tribunal a condamné M. [E] à payer à la requérante ‘la seule différence éventuelle entre les sommes débloquées à son profit et ses versements, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des deux prêts et du compte courant’ ;

il a jugé que les calculs complexes liés à la déchéance du droit aux intérêts ne lui incombaient pas, qu’aucune pièce ne lui permettait d’y procéder et que la banque devait justifier préalablement des éléments de son calcul auprès de son contractant.

L’appelante soutient que le jugement n’est pas exécutable.

Elle allègue produire les éléments nécessaires à la vérification de sa créance.

Au terme de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Peu importe donc que des prétentions chiffrées figurent dans les motifs des conclusions de l’appelante et la cour n’est saisie d’aucune demande concernant les sommes éventuellement dues au titre du compte-courant et du second prêt..

En l’espèce, l’appelante demande au titre du prêt personnel n° 73125742308 substitué sous le n° 00002703055 de 20 000 euros selon décompte après déchéance pour la période du 17 août au 8 septembre 2022 de :

– 21 109,61 au titre du capital restant dû,

– 35,63 euros au titre des intérêts,

– 1 688,76 euros d’indemnité forfaitaire,

soit un total de 22 834 euros.

En conséquence, le jugement est réformé sur ce point et l’intimé condamné à payer à la CRCAM la somme de 22 798,37 euros, déduction faite des intérêts arrêtés au jour de la déchéance du terme, à l’appelante au titre du prêt personnel n° 73125742308 substitué sous le n° 00002703055, avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2022, date de la mise en demeure.

*dépens et article 700

Succombant à l’instance, l’intimé est condamné à en supporter les entiers dépens de première instance et d’appel en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité ne commande pas ici de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Se déclare non saisie d’aucune demande concernant les sommes éventuellement dues par M. [E] à la CRCAM Sud Rhône-Alpes au titre du solde de son compte-courant N°8565360875 et au titre du solde du contrat de prêt n° 73124642185 substitué sous le n° 00002645409,

Confirme le jugement en ce qu’il a déchu la CRCAM Sud Rhône-Alpes de son droit aux intérêts au titre :

– de la convention de compte courant du 28 mai 2020 n°8565360875.

– des contrats de prêt du 6 juin 2020 n° 73124642185 substitué sous le n° 00002645409 et du 11 juillet 2020, n° 73125742308 substitué sous le n° 00002703055,

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne M. [G] [E] à payer la somme de 22 834 euros à la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône-Alpes au titre du solde restant dû du prêt personnel n° 73125742308 substitué sous le N° 00002703055 pour un montant de 20 000 euros,

Déboute la société Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel Sud-Rhône Alpes de ses autres demandes,

Y ajoutant,

Condamne M. [G] [E] aux entiers dépens de première instance et d’appel,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


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