Validité des clauses résolutoires et identification des parties contractantes dans un bail commercial

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Validité des clauses résolutoires et identification des parties contractantes dans un bail commercial

L’Essentiel : Le 15 mai 2018, la société PERFIA a signé un bail commercial avec CONFORT LINE, alors en cours de constitution. Le 23 mai 2024, PERFIA a délivré un commandement de payer pour des loyers impayés, invoquant la clause résolutoire. Le 9 septembre 2024, la SCI MICHELET a assigné CONFORT LINE en référé pour résiliation du bail et expulsion. Lors de l’audience du 10 octobre 2024, le juge a constaté l’absence d’immatriculation de CONFORT LINE, rendant le commandement de payer invalide. En conséquence, les demandes de la SCI MICHELET ont été rejetées, et celle-ci a été condamnée aux dépens.

Constitution du bail commercial

Le 15 mai 2018, la société PERFIA, agissant pour le compte de la SCI MICHELET, a conclu un bail commercial avec la société CONFORT LINE, qui était en cours de constitution. Ce bail concernait des locaux situés à une adresse précise.

Commandement de payer

Le 23 mai 2024, PERFIA a délivré un commandement de payer à CONFORT LINE, invoquant la clause résolutoire du contrat pour un montant principal de 2.325,68 euros, en raison de loyers impayés.

Assignation en référé

Le 9 septembre 2024, la SCI MICHELET a assigné en référé Monsieur [X] [I], représentant CONFORT LINE, pour obtenir la constatation de la résiliation du bail, l’expulsion de la société, et le paiement de diverses sommes dues, y compris des arriérés de loyers et des pénalités.

Audience et absence du défendeur

Lors de l’audience du 10 octobre 2024, la SCI MICHELET a affirmé que CONFORT LINE n’avait jamais été immatriculée, justifiant ainsi l’assignation de Monsieur [X] [I]. Ce dernier, régulièrement assigné, n’a pas comparu.

Analyse des motifs de la décision

Le juge a examiné la demande en se basant sur le code de procédure civile et le code de commerce. Il a noté que le commandement de payer n’était pas valide, car il n’indiquait pas que PERFIA agissait en tant que mandataire de la SCI MICHELET, et que CONFORT LINE n’avait pas d’existence juridique en raison de son absence d’immatriculation.

Conclusion de la décision

En raison des contestations sérieuses concernant la régularité du commandement de payer et la détermination du débiteur, le juge a rejeté les demandes de la SCI MICHELET. Celle-ci a été condamnée aux dépens et a dû supporter ses propres frais irrépétibles. La décision a été rendue exécutoire par provision au Palais de Justice de Bobigny le 21 novembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la régularité du commandement de payer délivré par la société PERFIA ?

Le commandement de payer a été délivré par la société PERFIA, mais il est essentiel de noter que cette dernière n’a pas mentionné qu’elle agissait en qualité de mandataire de la SCI MICHELET.

Selon l’article L. 145-41 du code de commerce, “toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.”

En l’espèce, le commandement de payer a été délivré sans respecter cette exigence de mentionner la qualité de mandataire, ce qui soulève des questions sur sa validité.

De plus, la SCI MICHELET a indiqué que la société CONFORT LINE n’avait jamais été immatriculée, ce qui remet en question l’existence juridique de cette dernière et, par conséquent, la légitimité du commandement de payer.

Ainsi, la régularité du commandement de payer est contestée, car il n’est pas établi que la société PERFIA avait le droit d’agir au nom de la SCI MICHELET, ce qui pourrait entraîner la nullité du commandement.

Quelles sont les conséquences de l’absence d’immatriculation de la société CONFORT LINE ?

L’absence d’immatriculation de la société CONFORT LINE a des conséquences juridiques significatives. En effet, selon l’article 1832-2 du code civil, “la société acquiert la personnalité juridique par son immatriculation au registre du commerce et des sociétés.”

Cela signifie que tant que la société CONFORT LINE n’est pas immatriculée, elle n’a pas d’existence juridique et ne peut donc pas être considérée comme un débiteur légal.

Dans le cas présent, la SCI MICHELET a assigné Monsieur [X] [I] en tant que représentant de la société CONFORT LINE, mais sans que cette dernière ait été immatriculée, cela soulève des questions sur la validité de l’assignation.

En conséquence, les demandes de la SCI MICHELET, qui reposent sur l’existence d’une société non immatriculée, sont fragiles et peuvent être rejetées pour ce motif.

Comment la clause résolutoire est-elle appliquée dans ce litige ?

La clause résolutoire stipule que le contrat est résilié de plein droit un mois après la délivrance d’un commandement de payer demeuré infructueux.

L’article L. 145-41 du code de commerce précise que “la clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.”

Dans cette affaire, le commandement de payer a été délivré, mais il est contesté en raison de la régularité de la procédure et de l’absence d’immatriculation de la société CONFORT LINE.

Si le commandement de payer est jugé irrégulier, la clause résolutoire ne pourra pas être appliquée, et la résiliation du bail ne pourra pas être constatée.

Ainsi, la SCI MICHELET ne pourra pas obtenir l’expulsion de la société CONFORT LINE, car la condition préalable à l’application de la clause résolutoire n’est pas remplie.

Quelles sont les implications de la non-comparution de Monsieur [X] [I] ?

La non-comparution de Monsieur [X] [I] a des implications sur le déroulement de la procédure. Selon l’article 472 du code de procédure civile, “si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond.”

Cela signifie que le juge peut statuer sur le fond de l’affaire même en l’absence du défendeur. Cependant, le juge ne peut faire droit à la demande que si elle est régulière, recevable et bien fondée.

Dans ce cas, la SCI MICHELET a formé des demandes à l’encontre de la société CONFORT LINE, qui n’a pas d’existence juridique en raison de son absence d’immatriculation.

Ainsi, même si Monsieur [X] [I] ne comparaît pas, les demandes de la SCI MICHELET peuvent être rejetées sur la base de l’irrégularité de la procédure et de l’absence de fondement juridique.

En conclusion, la non-comparution de Monsieur [X] [I] ne suffit pas à garantir le succès des demandes de la SCI MICHELET, qui doivent être fondées sur des éléments juridiques solides.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
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Chambre 1/Section 5
N° du dossier : N° RG 24/01531 – N° Portalis DB3S-W-B7I-ZSOJ

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 21 NOVEMBRE 2024
MINUTE N° 24/03115
—————-

Nous, Madame Anne BELIN, Première Vice-Présidente, au Tribunal judiciaire de BOBIGNY, statuant en référés, assistée de Madame Tiaihau TEFAFANO, Greffière,

Après avoir entendu les parties à notre audience du 10 octobre 2024 avons mis l’affaire en délibéré et avons rendu ce jour, par mise à disposition au greffe du tribunal en application des dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile, la décision dont la teneur suit :

ENTRE :

La SCI MICHELET,
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Raphaël MORALI de la SELEURL MORALI AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : E0481

ET :

Monsieur [X] [I],
exploitant les locaux situés au [Adresse 2], sous l’enseigne “CONFORT LINE”

non comparant, ni représenté

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EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 15 mai 2018, la société PERFIA, représentant la SCI MICHELET, a consenti à la société CONFORT LINE, société par actions simplifiée en cours de constitution, représentée par Monsieur [X] [I], un bail commercial portant sur des locaux situés à [Adresse 3].

Le 23 mai 2024, la société PERFIA a fait délivrer à la société CONFORT LINE un commandement de payer visant la clause résolutoire du contrat pour un montant en principal de 2.325,68 euros.

Par acte du 9 septembre 2024, la SCI MICHELET a fait assigner en référé devant le président de ce tribunal Monsieur [X] [I], exerçant sous l’enseigne CONFORT LINE, pour :
constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail ;ordonner l’expulsion de la société CONFORT LINE et de tout occupant de son chef avec l’assistance de la force publique si besoin, si elle ne libère pas les lieux dans la quinzaine de la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;voir autoriser la séquestration du mobilier ;condamner la société CONFORT LINE à lui payer à titre provisionnel :une somme de 2.744,84 euros arrêtée au 8 juillet 2024, représentant les arriérés de loyers, charges et accessoires,une somme de 274,48 euros à titre de clause pénale,une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer majoré de 50%,outre la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens, y compris le coût du commandement de payer.
L’affaire a été appelée à l’audience du 10 octobre 2024.

À l’audience, la SCI MICHELET sollicite le bénéfice de son acte introductif d’instance. Elle indique que la société CONFORT LINE n’a jamais été immatriculée, et que c’est pour cette raison qu’elle a assigné Monsieur [X] [I], signataire du contrat.

Régulièrement assigné, Monsieur [X] [I] n’a pas comparu.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions de la partie demanderesse, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance.

MOTIFS

Selon l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Aux termes de l’article L. 145-41 du code de commerce, “toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge”.

En l’espèce, le bail stipule qu’à défaut de paiement d’un terme du loyer à son échéance, le contrat est résilié de plein droit un mois après la délivrance d’un commandement de payer demeuré infructueux.

Toutefois, il convient de relever d’une part que le commandement a été délivré par la société PERFIA, sans qu’il soit mentionné qu’elle agit en qualité de mandataire de la SCI MICHELET, à la société CONFORT LINE alors que la bailleresse indique que la formalité de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés n’a jamais été accomplie, et qu’elle n’avait dès lors aucune existence juridique.

Par ailleurs, il a été assigné Monsieur [I], alors que toutes les demandes sont formées à l’encontre de la société CONFORT LINE.

En outre, la SCI MICHELET considère que Monsieur [I] reprend les engagements de la société CONFORT LINE non immatriculée, alors qu’aucune disposition contractuelle ne prévoit un tel transfert d’obligations.

Enfin, à supposer que Monsieur [I] doive être considéré comme le preneur, il est relevé que ce n’est pas à lui que le commandement de payer a été signifié.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments plusieurs contestations sérieuses tenant en particulier à la détermination du débiteur du loyer et des charges, et à la régularité du commandement de payer. Il n’y aura dès lors lieu à référé sur les demandes formées par la société MICHELET.

La SCI MICHELET, succombant, sera condamnée aux dépens et devra conserver la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

Rejetons les demandes de la SCI MICHELET ;

Condamnons la SCI MICHELET à supporter la charge des dépens et de ses frais irrépétibles ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.

AINSI JUGÉ AU PALAIS DE JUSTICE DE BOBIGNY, LE 21 NOVEMBRE 2024.

LA GREFFIERE
LA PRÉSIDENTE


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