Tribunal judiciaire de Bordeaux, 7 avril 2025, RG n° 24/01956
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 7 avril 2025, RG n° 24/01956

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : Expertise judiciaire ordonnée pour évaluer des désordres techniques liés à une vente immobilière.

Résumé

Par acte de commissaire de justice en date du 09 septembre 2024, un acheteur et un co-acheteur ont assigné une vendeuse devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, sollicitant la désignation d’un expert conformément à l’article 145 du code de procédure civile. Les acheteurs soutiennent avoir acquis, par acte authentique du 16 mai 2022, une maison à usage d’habitation, accompagnée d’une attestation de conformité du Service Public de l’Assainissement Collectif. Cependant, dès octobre 2022, ils ont constaté des désagréments tels que des odeurs nauséabondes et des problèmes d’humidité, révélant la présence d’une fosse septique toujours en service. Malgré le pompage de cette fosse, la vendeuse a refusé d’indemniser les acheteurs pour les travaux nécessaires à la mise en conformité, ce qui les a conduits à invoquer la garantie des vices cachés.

En réponse, la vendeuse a demandé le rejet des demandes des acheteurs et leur condamnation à lui verser une somme au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Elle a affirmé n’avoir eu aucune connaissance de la fosse septique avant la vente, arguant que la maison était raccordée au réseau collectif d’assainissement depuis 1980, comme l’indiquait l’attestation de conformité. Elle a également contesté la nécessité d’une expertise judiciaire, affirmant que les acheteurs avaient déjà shunté la fosse.

Le juge des référés a statué sur la demande d’expertise, considérant qu’il existait un motif légitime pour établir la preuve des faits en litige. Il a ordonné une mesure d’expertise pour examiner les désordres allégués, sans préjuger des responsabilités. Les frais de consignation ont été laissés à la charge des acheteurs, et l’expert a été désigné pour mener à bien cette mission.

TRIBUNAL JUDICIAIRE

DE [Localité 9]

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

54G

Minute

N° RG 24/01956 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZN2P

5 copies

EXPERTISE

GROSSE délivrée
le 07/04/2025
à la SELARL CABINET TARAVEL FOGLIA
Me Fabien FRANCESCHINI

COPIE délivrée
le 07/04/2025
à

2 copies au service expertise

Rendue le SEPT AVRIL DEUX MIL VINGT CINQ

Après débats à l’audience publique du 03 Mars 2025

Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Par Sandra HIGELIN, Vice-Présidente au tribunal judiciaire de BORDEAUX, assistée de Céline GABORIAU, Greffier.

DEMANDEURS

Madame [H] [T] [B] [G]
née le 02 Juin 1977 à [Localité 13]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Monsieur [O] [D] [J] [V]
né le 09 Janvier 1980 à [Localité 12]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Tous deux représentés par Maître Aurélie FOGLIA-RAPEAU de la SELARL CABINET TARAVEL FOGLIA, avocats au barreau de BORDEAUX

DÉFENDERESSE

Madame [Y] [N] [T] [R] épouse [W]
[Adresse 11]
[Adresse 4]
[Localité 8]

Représentée par Maître Fabien FRANCESCHINI, avocat au barreau de BORDEAUX

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte de commissaire de justice délivré le 09 septembre 2024, Madame [H] [G] et Monsieur [O] [V] ont fait assigner Madame [Y] [R], épouse [W] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de voir désigner un expert au visa de l’article 145 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières écritures, Madame [H] [G] et Monsieur [O] [V] ont maintenu leur demande.

Ils exposent avoir, selon acte authentique du 16 mai 2022, acquis de Madame [R] une maison à usage d’habitation sise [Adresse 3], et précisent qu’était annexée à l’acte une attestation de conformité délivrée par le Service Public de l’Assainissement Collectif et de la Gestion des eaux pluviales de [Localité 9] indiquant que le raccordement au réseau public d’aissainissement de la parcelle était conforme à la réglementation. Ils exposent avoir pourtant constaté, dès le mois d’octobre 2022, des odeurs nauséabondes dans la partie arrière de la maison au droit des WC et de la chambre des enfants outre des problèmes d’humidité et avoir découvert que la maison comporte une fosse septique toujours en service, enterrée sous l’habitation principale. Ils indiquent avoir fait procéder au pompage de la fosse et précisent que les services de [Localité 9] Métropole leur ont octroyé un délai de 12 mois afin d’effectuer les travaux de mise en conformité. Ils ajoutent que si Madame [R] a pris en charge les frais de pompage, elle a refusé de verser une indemnité à titre de dommages et intérêts relative aux travaux de remise en état des lieux qui sont rendus nécessaires à la mise en conformité du système, mais également au titre de leur préjudice de jouissance. Ils considèrent que sa responsabilité étant susceptible d’être recherchée sur le fondement de la garantie des vices cachés, ils sont bien fondés à obtenir l’organisation d’une expertise judiciaire.

En réplique, Madame [R] a conclu au rejet de l’intégralité des demandes formulées par Madame [G] et Monsieur [V] ainsi qu’à leur condamnation à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle affirme au soutien de ses prétentions qu’elle n’avait aucune connaissance d’une fosse septique avant la vente puisque la maison était déjà raccordée au réseau collectif d’assainissement de sorte que les eaux usées s’évacuent depuis 1980 dans le tout à l’égout, ce que démontre d’ailleurs l’attestation de conformité éditée le 27 janvier 2022 par le service public d’assainissement de [Localité 9] METROPOLE. Elle ajoute que la mesure d’expertise judiciaire est inutile alors que les consorts [V]/[G] lui ont affirmé avoir shunté la fosse sceptique, opération pour laquelle elle leur a d’ailleurs versé la somme de 5.000 euros.

L’affaire, évoquée à l’audience du 03 mars 2025, a été mise en délibéré au 07 avril 2025.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, statuant publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire, en premier ressort,

Vu l’article 145 du Code de procédure civile,

ORDONNE une mesure d’expertise, tous droits et moyens des parties réservés, et commet pour y procéder :

Monsieur [A] [L] ;
[Adresse 5]
[Localité 7]
Tél : [XXXXXXXX01]
[Courriel 10]

DIT que l’expert répondra à la mission suivante :

– se rendre sur les lieux en présence des parties et de leurs conseils ou après les avoir dûment convoquées ; se faire communiquer, dans le délai qu’il estimera utile de fixer, tous documents et pièces qu’il jugera nécessaires à l’exercice de sa mission, et notamment la citation, ainsi que tous documents contractuels, techniques et administratifs se rapportant à l’immeuble litigieux, et notamment le rapport de diagnostic annexé à l’acte de vente ; visiter les lieux et les décrire ;

– vérifier si les désordres allégués dans l’assignation, les conclusions, et les pièces auxquelles elles se réfèrent existent et dans ce cas, les décrire en indiquant leur nature ainsi que, si faire se peut, la date de leur apparition,

– préciser l’importance de ces désordres, en indiquant les parties de l’ouvrage qu’ils affectent, en spécifiant tous éléments techniques permettant d’apprécier s’il s’agit d’éléments constitutifs ou d’éléments d’équipement faisant corps ou non, de manière indissociable avec des ouvrages de viabilité, de fondations, d’ossature, de clos ou de couvert ;

– donner aux juges du fond tous éléments concernant la date de la construction et des éventuels travaux ayant pu être réalisés avant la vente par Madame [Y] [R], épouse [W]  ;

– pour chacun des désordres constatés, donner aux juges du fond tous éléments techniques et de fait permettant de déterminer si, et pour quelles raisons, ce désordre pouvait ou non être ignoré de Madame [Y] [R], épouse [W] au moment de la vente,

– de façon plus générale, donner aux juges du fond tous éléments techniques et de fait permettant de dire si, et pour quelles raisons, l’immeuble est ou non atteint de vices cachés non décelables par un profane,

– préciser si les désordres constatés sont susceptibles de compromettre la solidité de l’ouvrage ou de le rendre impropre à sa destination ,

– dans l’affirmative, dire si ces désordres sont d’ores et déjà apparents dans leur intégralité et, à défaut, fournir tous éléments techniques permettant d’apprécier le délai approximatif probable d’apparition totale ou partielle de cette atteinte à la solidité ou à la destination de l’ouvrage,

– rechercher la cause des désordres en précisant, pour chacun des désordres, s’il y a eu vice du matériau, malfaçons dans l’exécution, vice de conception, défaut ou insuffisance dans la direction ou le contrôle ou la surveillance, défaut d’entretien ou de tout autre cause,

– procéder, au besoin en recourant à l’avis d’un sapiteur, à l’estimation de l’éventuelle moins value résultant des vices affectant l’immeuble,

– dans les mêmes conditions, procéder, en tenant compte des désordres constatés, à l’estimation de l’immeuble acquis par Madame [H] [G] et Monsieur [O] [V]

– de façon plus générale donner tous éléments techniques et de fait permettant au juge de déterminer les responsabilités éventuelles encourues ainsi que les préjudices subis par Madame [H] [G] et Monsieur [O] [V] en proposant une base d’évaluation,

– indiquer les travaux propres à remédier aux désordres et vices constatés, en évaluer le coût hors-taxes et TTC, et la durée, en communiquant au besoin aux parties en même temps que son pré-rapport, des devis et propositions chiffrées concernant les travaux envisagés, et ce, en enjoignant les parties de formuler leurs observations écrites dans le délai d’un mois suivant la date de cette communication,

– constater l’éventuelle conciliation des parties sans manquer dans ce cas d’en aviser le juge chargé du contrôle des expertises;

– établir une note de synthèse et la communiquer aux parties et les inviter à formuler leurs dires et observations récapitulatifs dans un délai de deux mois pour ce faire, et répondre aux dires et observations formulés dans ce délai;

RAPPELLE QUE, en application de l’article 276 du code de procédure civile, les observations et dires précédents dont les termes ne seraient pas sommairement repris dans les dires récapitulatifs, seront réputés abandonnés par les parties,

INVITE l’expert à signaler aux parties dans le délai de deux mois à compter de la première réunion d’expertise, les intervenants à la construction dont la présence aux opérations lui semblerait utile,

DIT que l’expert ne pourra recueillir l’avis d’un autre technicien que dans une spécialité distincte de la sienne, et qu’il pourra recueillir des informations orales ou écrites de toutes personnes, sauf à ce que soient précisés leur nom, prénom, adresse, et profession ainsi que, s’il y a lieu, leur lien de parenté ou d’alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d’intérêt avec elles,

FIXE à la somme de 4.000 € la provision que Madame [H] [G] et Monsieur [O] [V] devront consigner par virement sur le compte de la Régie du Tribunal Judiciaire de Bordeaux avec la mention du numéro PORTALIS située en haut à gauche sur la première page de l’ordonnance de référé dans le délai de 2 mois, faute de quoi l’expertise pourra être déclarée caduque,

DIT que l’expert doit établir un devis prévisionnel, l’ajuster en tant que de besoin en fonction de l’évolution de l’expertise, et veiller à ce que la somme consignée corresponde toujours aux coûts prévisibles de l’expertise, au besoin en demandant des consignations complémentaires,

DIT que l’expert devra déposer son rapport en un seul exemplaire au greffe du tribunal judiciaire, dans le délai de 10 mois suivant la date de la consignation,

REJETTE toutes autres demandes,

DIT que Madame [H] [G] et Monsieur [O] [V] conserveront provisoirement les frais de la présente procédure, sauf à les inclure dans leur éventuel préjudice global.

La présente décision a été signée par Sandra HIGELIN, Vice-Présidente, et par Céline GABORIAU, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

 


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