Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Thématique : Droit d’accès aux documents sociaux en société civile : enjeux de prescription et de conservation.
→ RésuméUn gérant a été révoqué de ses fonctions sans juste motif et a assigné la SCI SAMSUN ainsi que ses associés devant le tribunal judiciaire de Bordeaux. Il conteste la validité d’une assemblée générale extraordinaire et demande la remise de documents sociaux détenus par la nouvelle gérante. En réponse, la SCI SAMSUN et la gérante ont formulé une demande reconventionnelle pour obtenir des documents comptables et des justificatifs de convocations d’assemblées générales.
Le gérant a ensuite soulevé une fin de non-recevoir, arguant que la demande de communication de documents antérieurs à 2017 était prescrite selon l’article 2224 du code civil. Il a soutenu que le droit de communication des associés ne pouvait pas être exercé de manière rétroactive et que l’obligation d’archivage ne se confondait pas avec ce droit. En réponse, la SCI SAMSUN et la gérante ont contesté cette irrecevabilité, affirmant que le droit des associés à la communication des documents sociaux n’était pas limité aux éléments de l’année en cours. Ils ont demandé au juge de débouter le gérant de sa demande d’irrecevabilité et de le condamner aux dépens. Le tribunal a rappelé que, selon l’article 1855 du code civil, les associés ont le droit d’obtenir la communication des documents sociaux au moins une fois par an, ce qui inclut les documents des années antérieures. La demande de la gérante a donc été jugée recevable, et la fin de non-recevoir du gérant a été rejetée. En conséquence, le tribunal a condamné le gérant à verser une somme aux défenderesses pour couvrir leurs frais irrépétibles et a renvoyé l’affaire à une audience ultérieure pour d’autres conclusions. |
N° RG 22/00986 – N° Portalis DBX6-W-B7F-WE7H
INCIDENT
RME
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
1ERE CHAMBRE CIVILE
N° RG 22/00986 – N° Portalis DBX6-W-B7F-WE7H
Minute
AFFAIRE :
[I] [E]
C/
S.C.I. SAMSUN, [P] [E], [N] [E], [G] [E], [W] [E], [U] [E]
Exécutoire Délivrée
le :
à
Avocats : la SAS DELTA AVOCATS
Me Jean-françois MORLON
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
Le SEPT AVRIL DEUX MIL VINGT CINQ
Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente
Juge de la Mise en Etat de la 1ERE CHAMBRE CIVILE,
Assistée de David PENICHON, Greffier.
Après débat à l’audience publique du 17 février 2025
ORDONNANCE :
Réputée contradictoire, susceptible d’appel dans les conditions prévues à l’article 795 du Code de Procédure Civile,
Premier ressort,
Par mise à disposition au greffe,
Vu la procédure entre :
DEMANDEUR A L’INCIDENT DEMANDEUR AU PRINCIPAL
Monsieur [I] [E]
né le [Date naissance 5] 1960 à [Localité 7] (TURQUIE)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représenté par Me Jean-françois MORLON, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
DEFENDERESSES A L’INCIDENT
DEFENDERESSES AU PRINCIPAL
S.C.I. SAMSUN
[Adresse 4]
[Localité 6]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
Madame [P] [S] veuve [E]
née le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 7] (TURQUIE)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentées par Maître Fernando SILVA de la SAS DELTA AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
Monsieur [N] [E]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
Monsieur [G] [E]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
Monsieur [W] [E]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
Madame [U] [E]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
DÉFENDEURS À L’INCIDENT
TOUS DÉFAILLANTS
EXPOSE DU LITIGE
Considérant qu’il a été révoqué sans juste motif de ses fonctions de gérant, M. [I] [E] a, par actes du 18 janvier 2022, fait assigner la SCI SAMSUN et ses associés, MM. [N], [G] et [W] [E] et Mmes [P] [S] veuve [E] et [U] [E] devant le tribunal judiciaire de Bordeaux en nullité de l’assemblée générale extraordinaire du 16 décembre 2019 ainsi que des 17 résolutions qui ont été adoptées, en indemnisation et afin d’enjoindre sous astreinte à Mme [S] veuve [E] de lui remettre tous les documents sociaux qu’elle détient depuis qu’elle a été désignée en qualité de gérante.
Par conclusions notifiées le 22 novembre 2022, la SCI SAMSUN et Mme [S] veuve [E] ont formé, au fond, une demande reconventionnelle tendant à la condamnation sous astreinte M. [I] [E], à communiquer :
– l’ensemble des comptes annuels (bilan, compte de résultat et annexes) de la SCI SAMSUN depuis l’exercice clos au 31/12/2012 jusqu’au 31/12/2016 ;
– les justificatifs des convocations régulières des associés, les feuilles de présences, ainsi que les procès-verbaux des assemblées générales d’approbation des comptes pour les exercices clos au 31/12/2012 jusqu’au 31/12/2016 ;
– l’ensemble des pièces comptables qui en a permis l’établissement, et notamment celles justifiant du montant inscrit à son compte courant d’associé.
Par conclusions d’incident notifiées par RPVA le 16 décembre 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé complet des moyens développés, M. [I] [E] demande au juge de la mise en état de déclarer la SCI SAMSUN et Mme [S] veuve [E] irrecevables en leur demande de communication d’éléments et de les condamner in solidum aux dépens de l’incident ainsi qu’à la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Il soutient qu’en application de l’article 2224 du code civil, la demande de communication d’éléments antérieurs au 22 novembre 2017, soit cinq années avant la date de notification des conclusions le 22 novembre 2022 formulant la demande de communication de ces pièces, est prescrite.
Il rétorque à ses adversaires que la demande des associés de sociétés civiles d’obtenir communication annuelle des documents sociaux formulée de manière rétroactive, lorsque ce droit de communication n’a pas été exercé année par année, se heurte à la prescription de l’article 2224 du code civil. Il fait également valoir que l’obligation d’archivage (de caractère décennal) ne se confond pas avec le droit de communication de tout associé qui est soumis à la prescription générale de l’article 2224 du code civil.
Par conclusions d’incident notifiées par RPVA le 14 juin 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé complet des moyens développés, la SCI SAMSUN et Mme [S] veuve [E] demandent au juge de la mise en état de débouter M. [I] [E] de sa demande d’irrecevabilité de leur demande reconventionnelle de communication d’éléments comptables et de le condamner aux entiers dépens ainsi qu’à la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour s’opposer à la fin de non-recevoir tirée de la prescription de leur demande reconventionnelle, elles font valoir que le droit des associés d’obtenir la communication des livres et documents sociaux prévu aux termes de l’article 1855 du code civil n’est pas limité aux éléments comptables de l’année en cours de sorte que leur demande de communication d’éléments comptables n’entre pas dans le champ d’application de l’article 2224 du code civil.
MM. [N], [G], [W] [E] et Mme [U] [E] n’ont pas constitué avocat.
PAR CES MOTIFS
Le juge de la mise en état,
– REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande reconventionnelle de la SCI SAMSUN et de Mme [S] veuve [E] en production des documents concernant la gestion de la société civile pour les exercices clos au 31 décembre 2012 jusqu’au 31 décembre 2016 ;
– CONDAMNE M. [I] [E] à payer, ensemble, à la SCI SAMSUN et à Mme [S] veuve [E] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 19 JUIN 2025 pour les conclusions des défenderesses;
– RESERVE les dépens.
La présente décision est signée par Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente, et David PENICHON, Greffier.
LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT
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