Tribunal judiciaire de Bordeaux, 20 février 2025, RG n° 23/05678
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 20 février 2025, RG n° 23/05678

Type de juridiction : Formation / Enseignement

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : Exclusion scolaire : une sanction justifiée face à des manquements avérés.

Résumé

Contexte de l’affaire

Dans cette affaire, un étudiant, désigné ici comme un demandeur, a été admis à un institut de formation en soins infirmiers. Au cours de sa dernière année, il a exprimé des préoccupations concernant ses notes, ce qui a conduit à une série de convocations et à un sentiment d’épuisement. Finalement, il a été exclu de l’institut pour une durée de cinq ans en raison d’absences répétées et d’une accusation de tricherie.

Demande de contestation

Le demandeur a contesté la décision d’exclusion en saisissant le tribunal pour obtenir son annulation. Il a demandé la réadmission à l’institut, des dommages-intérêts pour préjudice moral et matériel, ainsi que la communication de son dossier scolaire. Il a soutenu que la procédure d’exclusion était irrégulière, arguant qu’il n’avait pas reçu de rapport motivé et qu’il n’avait pas été entendu par l’instance compétente.

Arguments de la défenderesse

La défenderesse, représentée par une fondation, a demandé le rejet des demandes du demandeur. Elle a soutenu que l’exclusion était justifiée par des absences non justifiées et un incident de tricherie. La fondation a affirmé que la procédure suivie était conforme aux règles en vigueur et que les droits du demandeur avaient été respectés tout au long du processus disciplinaire.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué en faveur de la défenderesse, rejetant les demandes du demandeur. Il a confirmé la légitimité de la décision d’exclusion, considérant que la sanction était proportionnée aux manquements disciplinaires. De plus, le tribunal a condamné le demandeur à verser une somme à la défenderesse au titre des frais de justice, tout en le déboutant de ses demandes de dommages-intérêts et de communication de son dossier.

N° RG 23/05678 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YARH
PREMIÈRE CHAMBRE
CIVILE

97Z

N° RG 23/05678 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YARH

Minute

AFFAIRE :

[T] [O]

C/

Fondation [6] – MSP DE [Localité 7]

Exécutoires délivrées
le
à
Avocats : la SELAS FPF AVOCATS
Me Khadim THIAM

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 20 FEVRIER 2025

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors du délibéré :

Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente,
Madame Patricia COLOMBET, Vice-Présidente,
Monsieur Ollivier JOULIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

David PENICHON, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 16 Janvier 2025 conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JOULIN Ollivier, magistrat chargé du rapport, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte dans son délibéré.

JUGEMENT:

Contradictoire
Premier ressort,
Par mise à disposition au greffe,

DEMANDEUR :

Monsieur [T] [O]
né le 23 Juin 2000 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 2]

Représenté par Me Khadim THIAM, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

N° RG 23/05678 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YARH

DEFENDERESSE :

LA MAISON DE SANTE PROTESTANTE DE [Localité 7]
Fondation [6] dont le siège social est :
[Adresse 1]
[Localité 3]
Prise en la personne de son représentant légal, Monsieur [F] [V], domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Maître François PETIT de la SELAS FPF AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

Monsieur [O] a été admis à l’Institut de Formation Nightingale [6] le 29 juin 2018 où il reçu une formation dispensée sur 3 années.

Alors qu’il se trouvait en dernière année il a considéré que les notes qu’il obtenait n’était pas à la mesure de son investissement personnel, ce qui l’a affecté et a suscité des demandes auprès de l’équipe pédagogique, de nombreuses convocations provoquaient chez lui une sensation d’épuisement.

Il faisait finalement l’objet d’une décision d’exclusion définitive de 5 ans au motif qu’il se serait absenté 14 fois au cours de l’année 2024 et rendu coupable de tricherie pendant une évaluation.

Il a contesté cette décision et a saisi le Tribunal afin de la faire annuler.

***

Au terme de ses dernières conclusions déposées le 14 février 2024 Monsieur [O] sollicite de voir :

ANNULER la décision d’exclusion notifiée le 14 mars 2023 par laquelle la directrice de l’institut de formation en soins infirmiers du centre hospitalier [6] a prononcé son exclusion définitive de cet institut pour une durée de 5 ans ;

ENJOINDRE à l’IFNB de le réadmettre au sein dudit institut de formation le jour de la notification du présent jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

A défaut, RÉEXAMINER la situation personnelle de Monsieur [O] CONDAMNER le Centre hospitalier [6] à verser à Me [Y] une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens et ceux compris sur l’éventuelle exécution,

CONDAMNER l’IFNB à verser à M. [O] la sommes de 10. 000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation des préjudices moral et matériel subis ;

ENJOINDRE à l’IFNB de lui communiquer l’original de son entier dossier scolaire et pédagogique ainsi que les notes des examens du semestre, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à l’expiration d’un délai de quinze jours suivant le prononcé de la décision à intervenir,

Au soutien de sa demande il expose que la procédure d’exclusion est irrégulière au regard des dispositions des articles 15 et 16 de l’arrêté du 21 avril 2007 qui prévoient que le dossier de l’étudiant, accompagné d’un rapport motivé du directeur, est transmis au moins sept jours calendaires avant la réunion de cette section. L’étudiant reçoit communication de son dossier dans les mêmes conditions que les membres de la section. La section entend l’étudiant, qui peut être assisté d’une personne de son choix. L’étudiant peut présenter devant la section des observations écrites ou orales ; or en l’espèce il n’y a pas eu de rapport motivé, le dossier qui lui a été communiqué n’en comporte aucun et il n’est pas justifié qu’un tel rapport ait été communiqué avant la séance. Il a en outre été convoquée devant la seule directrice et non pas devant le Conseil Pédagogique seul compétent pour prononcer son exclusion;

Le juste équilibre entre les parties et le principe de l’égalité des armes principes consacrés par la Cour européenne des droits de l’homme conduisent à considérer une violation de ses droits et à en tirer la conséquence de la nullité de la procédure disciplinaire.

En outre la mesure d’exclusion est disproportionnée en ce qu’elle n’est fondée que sur quelques absences – justifiées par des séances de consultation chez un psychologue à la suite du décès de sa grand-mère – et d’une supposée tentative de fraude à un examen, laquelle n’est pas établie. Cette décision l’empêche de prétendre au diplôme d’infirmier diplômé d’État pendant une durée déraisonnable de cinq années.

La mesure disciplinaire l’a lourdement touché il se trouve affecté d’un syndrome dépressif au regard de l’injustice qu’il estime devoir supporter, il réclame 10.000 € de dommages-intérêts au titre du préjudice subi.

***

Par conclusions déposées le 23 mai 2024 La MAISON DE SANTÉ PROTESTANTE DE [Localité 7], Fondation reconnue d’utilité publique, dont le siège est sis [Adresse 1] [Adresse 8] [Localité 3], agissant poursuites et diligences en la personne de son président, Monsieur [F] [V] sollicite de voir débouter Monsieur [O] de ses demandes et de mettre à sa charge une indemnisé de 2.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle rappelle que L’institut de formation en soins infirmiers Florence Nightingale [6] (ci-après IFNB) est rattaché à la Fondation [6], établissement de droit privé.

Elle relève que l’étudiant admis au bénéfice du désistement d’un autre candidat, a présenté un niveau faible, un manque de concentration et de rigueur ne lui permettant pas de valider certaines unités d’évaluation et stages professionnels, il a été reçu régulièrement par l’équipe afin de chercher des remèdes à ses difficultés, néanmoins il manquait toujours d’assiduité, ne justifiant pas de ses absences. Enfin il était surpris lors d’une session de rattrapage avec des notes posées sur ses genoux, la surveillante de l’épreuve confisquait ces notes et établissait un procès-verbal d’incident, l’étudiant reconnaissait la tricherie dans un écrit adressé à la directrice de l’établissement.

Il était convoqué à un entretien le 2 février 2023 et avisé de la saisine de la section compétente qui était réunie le 9 mars 2023, la sanction a été prise d’une exclusion de cinq ans et notifiée à l’intéressé le 14 mars 2023.

L’intéressé a saisi le tribunal administratif d’une contestation, le tribunal administratif s’est déclaré incompétent pour en connaître, l’instance a été reprise devant le Tribunal judiciaire.

Elle soutient que la procédure est régulière, celle-ci respecte les dispositions des articles 21 à 33 de l’arrêté du 21 avril 2007 relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation
paramédicaux, applicable aux instituts de formation publics et privés, autorisés par le président du conseil régional pour la préparation des diplômes d’État d’infirmier : l’étudiant a été convoqué devant la directrice qui lui a notifié ses droits puis sa décision de le renvoyer devant l’instance disciplinaire, cette instance a été saisie par un courrier motivé rappelant d’une part les faits de tricherie et d’autre part les absences injustifiées (14 absences entre le 14 novembre 2022 et le 10 janvier 2023), les droits de l’étudiant ont été respectés, il a été informé des faits motivant la convocation de la section disciplinaire, un délai de quinze jours calendaires lui a été laissé pour préparer sa défense, il a été informé de son droit à la consultation de son dossier et à l’assistance devant la section et a été en mesure de s’expliquer lors de la séance au cours de laquelle il a reconnu les faits.

La sanction est proportionnée au manquements disciplinaires (absences injustifiées et tricherie) et la section s’est légitimement inquiétée par les justifications de l’étudiant, qui expliquait s’être senti « acculé », ce qui questionnait sur l’attitude qu’il pourrait adopter en tant que soignant dans un contexte de stress et de pression.

Il n’existe donc aucun motif d’annulation de la sanction, en l’absence de faute de l’institut de formation aucune condamnation à dommages-intérêts ne saurait être appliquée

PAR CES MOTIFS

STATUANT par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort.

DÉBOUTE Monsieur [O] de sa demande d’annulation de la décision d’exclusion notifiée le 14 mars 2023 par laquelle la section disciplinaire de l’institut de formation en soins infirmiers du centre hospitalier [6] a prononcé son exclusion définitive de cet institut pour une durée de 5 ans ;

DÉBOUTE Monsieur [O] de sa demande de transmission de l’original de son dossier pédagogique et de ses notes du trimestres ainsi que de sa demande de retrait de la décision d’exclusion dudit dossier.

DÉBOUTE Monsieur [O] de sa demande de dommages-intérêts.

CONDAMNE Monsieur [O] à verser la somme de 1.000 € à La MAISON DE SANTÉ PROTESTANTE DE [Localité 7], Fondation reconnue d’utilité publique, dont le siège est sis [Adresse 1] [Adresse 8] [Localité 3] sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNE Monsieur [O] aux entiers dépens.

La présente décision est signée par Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente, et David PENICHON, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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