Responsabilité partagée dans la gestion des contrats de service public.

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Responsabilité partagée dans la gestion des contrats de service public.

L’article 1103 du code civil stipule que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, établissant ainsi le principe de l’effet obligatoire des contrats. En matière de fourniture d’eau, l’article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales impose au service d’eau de notifier l’abonné en cas d’augmentation anormale de la consommation, définie comme excédant le double de la consommation moyenne. L’article L. 111-2 du code de la consommation impose également au professionnel de fournir au consommateur les caractéristiques essentielles du service avant la conclusion du contrat. En cas de litige, il incombe au prestataire de prouver qu’il a respecté ses obligations d’information, conformément à l’article L. 111-2. De plus, l’article R. 2224-19-9 du même code prévoit une majoration de 25 % des redevances en cas de non-paiement dans un délai de trois mois suivant la mise en demeure. Ces dispositions législatives encadrent les obligations des parties dans le cadre des contrats de fourniture d’eau et les conséquences en cas de non-respect de ces obligations.

L’Essentiel : L’article 1103 du code civil établit le principe de l’effet obligatoire des contrats. En matière de fourniture d’eau, l’article L. 2224-12-4 impose au service d’eau de notifier l’abonné en cas d’augmentation anormale de la consommation. L’article L. 111-2 du code de la consommation exige que le professionnel fournisse les caractéristiques essentielles du service avant la conclusion du contrat. En cas de litige, le prestataire doit prouver qu’il a respecté ses obligations d’information.
Résumé de l’affaire :

Contexte de l’affaire

La communauté de communes Terres de Camargue a désigné la Société de Distribution d’Eaux Intercommunales (SDEI) comme fermier du service de l’eau potable en 2003. En 2010, la SDEI a été absorbée par la société Lyonnaise des Eaux de France, qui a ensuite émis une facture pour la fourniture d’eau potable à un occupant d’un logement.

Événements clés

En 2018, un mandataire de la société Distribution Casino France a informé les propriétaires d’un report de congé pour travaux, confirmant le paiement des loyers jusqu’à mars 2019. Un état des lieux de sortie a été signé en avril 2019. En octobre 2019, la société Suez Eau France a mis en demeure l’occupant de payer une facture impayée, mais a été déboutée d’une injonction de payer en novembre 2019.

Procédures judiciaires

En mai 2020, la société Suez Eau France a assigné l’occupant et la société Distribution Casino France en garantie. En octobre 2022, le tribunal a condamné l’occupant à verser une somme partielle et a ordonné à la société Distribution Casino France de garantir l’occupant. La société Suez Eau France a interjeté appel en décembre 2022.

Ouverture de la procédure de sauvegarde

En octobre 2023, une procédure de sauvegarde a été ouverte à l’égard de la société Distribution Casino France, suivie d’une assignation en intervention forcée par l’occupant en juin 2024.

Prétentions des parties

La société Suez Eau France demande l’infirmation du jugement et le paiement de sommes dues par l’occupant, tandis que l’occupant conteste les montants et demande des restitutions. La société Distribution Casino France demande également l’infirmation du jugement en ce qui concerne ses obligations envers l’occupant.

Motivations du tribunal

Le tribunal a jugé que l’occupant était toujours titulaire du contrat d’abonnement à l’eau, n’ayant pas prouvé sa résiliation. Il a également noté que la société Suez Eau France n’avait pas démontré l’envoi effectif de la facture contestée. La société Suez Eau France a été tenue de prouver qu’elle avait informé l’occupant d’une surconsommation d’eau.

Décisions finales

Le tribunal a condamné l’occupant à payer une somme pour la consommation d’eau et a fixé la créance de l’occupant envers la société Distribution Casino France. Les dépens ont été mis à la charge de l’occupant, qui doit également payer des frais à la société Suez Eau France et à la société Distribution Casino France.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la créance de la société Suez Eau France sur l’occupant du logement ?

La créance de la société Suez Eau France sur l’occupant du logement repose sur le contrat d’abonnement pour la fourniture d’eau potable et l’assainissement, souscrit par l’occupant en sa qualité de gérant mandataire.

Selon l’article 1103 du code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». En l’espèce, l’occupant a souscrit un contrat d’abonnement, ce qui l’engage à payer les factures émises par le fournisseur d’eau.

Le tribunal a constaté que l’occupant s’était acquitté de ses factures jusqu’à celle du 3 juillet 2019, d’un montant de 34 697,87 euros.

Il a également été établi que l’occupant n’a pas démontré avoir résilié le contrat d’abonnement, ce qui le rend responsable des paiements dus jusqu’à la résiliation effective du contrat.

Quel est le rôle de l’article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales dans cette affaire ?

L’article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales stipule que « dès que le service d’eau potable constate une augmentation anormale du volume d’eau consommé par l’occupant d’un local d’habitation, il en informe sans délai l’abonné ».

Cet article précise que l’augmentation est considérée comme anormale si elle excède le double du volume d’eau moyen consommé. L’abonné n’est pas tenu au paiement de la part de la consommation excédant ce double, s’il présente une attestation de réparation d’une fuite ou demande une vérification du compteur dans un délai d’un mois.

Dans cette affaire, la société Suez Eau France devait prouver qu’elle avait informé l’occupant de l’augmentation anormale de consommation. Le tribunal a jugé que la société ne justifiait pas de l’envoi effectif de la facture du 3 juillet 2019, ce qui a conduit à une limitation de sa créance.

Quel est l’impact de l’article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales sur la demande de pénalité ?

L’article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales prévoit qu’en cas de défaut de paiement dans un délai de trois mois à compter de la présentation de la quittance et dans les quinze jours d’une mise en demeure, la redevance est majorée de 25 %.

Le tribunal a débouté la société Suez Eau France de sa demande de pénalité, considérant qu’elle ne justifiait ni de l’envoi de la facture litigieuse ni d’une mise en demeure conforme.

L’appelante a soutenu que la pénalité devait s’appliquer uniquement sur les sommes dues au titre de l’assainissement. Cependant, le tribunal a confirmé que le courrier d’huissier du 10 octobre 2019 ne constituait pas une mise en demeure valide, ce qui a conduit à la confirmation du jugement en ce qui concerne la pénalité.

Quel est le principe de l’effet relatif des contrats et comment s’applique-t-il dans cette affaire ?

Le principe de l’effet relatif des contrats, énoncé dans l’article 1199 du code civil, stipule que « les contrats ne créent d’obligations qu’entre les parties ». Dans cette affaire, la société Distribution Casino France a soutenu qu’elle n’était pas responsable des obligations contractuelles de l’occupant, car ce dernier était le seul titulaire du contrat d’abonnement.

L’occupant a affirmé que la société Distribution Casino France devait garantir ses obligations, car elle était responsable de la consommation d’eau après la remise des clés. Cependant, le tribunal a jugé que l’occupant n’avait pas résilié le contrat d’abonnement, ce qui le rendait responsable des paiements dus, indépendamment de la situation avec la société Distribution Casino France.

Quel est le rôle de l’article 700 du code de procédure civile dans cette décision ?

L’article 700 du code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés pour la défense de ses droits.

Dans cette affaire, le tribunal a condamné l’occupant à verser à la société Suez Eau France la somme de 1 500 euros, y compris les frais de la requête en injonction de payer, ainsi qu’à la société Distribution Casino France la somme de 750 euros.

Cette décision est fondée sur le principe que la partie qui succombe doit supporter les frais de l’instance, conformément à l’article 700, ce qui a été appliqué par le tribunal dans le cadre de la répartition des dépens.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/04139 – N°Portalis DBVH-V-B7G-IVG4

ID

TJ DE NIMES

27 octobre 2022

RG :20/02697

SAS SUEZ EAU FRANCE

C/

[N]

S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE

Copie exécutoire délivrée

le 27 février 2025

à :

Me Caroline Deixonne

Me Aline Jolivet

Me Jean-Michel Divisia

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 27 FEVRIER 2025

Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 27 octobre 2022, N°20/02697

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre

Mme Alexandra Berger, conseillère

Mme Audrey Gentilini, conseillère

GREFFIER :

Mme Audrey Bachimont, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 janvier 2025, où l’affaire a été mise en délibéré au 27 février 2025.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

INTIMÉE À TITRE INCIDENT :

La Sas SUEZ EAU FRANCE

prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité

[Adresse 18],

[Adresse 18]

[Localité 5]

Représentée par Me Karine Gardier de la Scp Trias, Verine, Vidal, Gardier Leonil, plaidante, avocate au barreau de Montpellier

Représentée par Me Caroline Deixonne, postulante, avocate au barreau de Nîmes

INTIMÉS :

M. [R] [N]

né le 06 février 1968 à [Localité 17] (07)

[Adresse 9]

[Localité 1]

Représenté par Me Aline Jolivet, plaidante/postulante, avocate au barreau de Nîmes

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale n° C-30189-2023-182 du 19 mars 2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Nîmes)

La Sas DISTRIBUTION CASINO FRANCE

RCS de Saint-Etienne n°428 268 023

Direction juridique immobilière – Service aux branches, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par Me Jean-Michel Divisia de la Scp Coulomb Divisia Chiarini, postulant, avocat au barreau de Nîmes

Représentée par Me Christofer Claude de la Selas Realyze, plaidant, avocat au barreau de Paris

PARTIES INTERVENANTES :

La Selarl FIDES

prise en la personne de Me [L] [T], en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société Distribution Casino France, domicilié en cette qualité

[Adresse 10]

[Localité 11]

Assignée à personne le 13 juin 2024

sans avocat constitué

La Scp d’administrateurs judiciaires [O] & ROUSSELET, prise en la personne de Me [H] [O], pris en qualité de commissaire à l’exécution du plan à la procédure de sauvegarde de la société Distribution Casino France, domicilié en cette qualité

[Adresse 6]

[Localité 12]

Assignée à étude le 13 juin 2024

sans avocat constitué

ARRÊT :

Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 27 février 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Selon délibération du conseil communautaire de la communauté de communes Terres de Camargue du 11 juin 2003, la Société de Distribution d’Eaux Intercommunales (SDEI) a été désignée en qualité de fermier du service de l’eau potable pour cette communauté, et le contrat définissant ses prestations approuvé.

Selon procès-verbal d’assemblée générale extraordinaire du 30 juin 2010 déposé le 30 juillet 2010 au greffe du tribunal de commerce de Lyon a été constatée la fusion-absorption de la SDEI par la société Lyonnaise des Eaux de France qui a émis le 20 octobre 2012 au nom de M. [R] [N] une ‘facture-contrat’ pour la fourniture en eau potable, la collecte et le traitement des eaux usées d’une maison à [Adresse 4] louée à ses propriétaires selon bail signé le 24 septembre 2012 et mise à sa disposition par la société Distribution Casino France dont il a à compter du 23 septembre 2011 occupé les fonctions de gérant mandataire non salarié.

Le 3 décembre 2018 la société Foncia mandataire de la société Distribution Casino France a sollicité les propriétaires ‘afin de leur faire part du report du congé initialement fixé au 9 novembre dernier à la date du 31 mars 2019′, aux fins de réalisation de travaux de remise en état. Elle leur a confirmé le paiement des loyers jusqu’au 31 mars 2019 et demandé la remise en route de l’électricité afin de pouvoir faire réaliser l’entretien de la chaudière à ses frais.

Un état des lieux de sortie a été signé le 2 avril 2019.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 octobre 2019 la société Suez Eau France venant aux droits de la société Lyonnaise des Eaux a mis en vain M. [R] [N] en demeure de payer une facture d’un montant de 34 687,87 euros émise le 3 juillet 2019 puis été déboutée le 13 novembre 2019 par le juge du tribunal judiciaire de Privas d’une requête en injonction de payer déposée le 25 octobre 2019 aux mêmes fins.

Elle a alors par acte du 22 mai 2020 assigné celui-ci et appelé le 8 juillet 2021 la société Distribution Casino France en garantie devant le tribunal judiciaire de Nîmes qui, après jonction des deux instances, par jugement contradictoire du 27 octobre 2022 :

– a condamné M. [R] [N] à lui verser la somme de 1 528,51 euros, avec intérêts au taux légal à compter de sa décision,

– l’a déboutée du surplus de ses demandes,

– a condamné la société Distribution Casino France à relever et garantir M. [R] [N] de la condamnation prononcée à son encontre et à lui payer la somme de 456 euros au titre des provisions versées par lui,

– a débouté M. [R] [N] du surplus de ses demandes,

– a condamné la société Distribution Casino France aux dépens et à verser à la société Suez Eau France la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– l’a déboutée ainsi que M. [R] [N] de leurs demandes au même titre,

– a rappelé que sa décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

La société Suez Eau France a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 décembre 2022.

Un procédure de sauvegarde a été ouverte à l’égard de la société Distribution Casino France par jugement du 25 octobre 2023 du tribunal de commerce de Paris qui a le 26 février 2024 arrêté un plan de sauvegarde accéléré.

Par acte du 13 juin 2024, M. [R] [N] a assigné en intervention forcée la Selarl Fides, prise en la personne de Me [T], en qualités de mandataire judiciaire de cette société ainsi que la Scp [O] & Rousselet, prise en la personne de Me [O], en qualité de commissaire à l’exécution de son plan de sauvegarde.

L’affaire a fait l’objet de plusieurs déplacements d’audience et de demandes de renvoi pour transaction.

Par ordonnance du 19 septembre 2024, la procédure a été clôturée le 6 janvier 2025 et l’affaire fixée à l’audience du 20 janvier 2025.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 21 mars 2023, la société Suez Eau France demande à la cour :

– d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il l’a déboutée du surplus de ses demandes,

Statuant à nouveau

– de condamner M. [R] [N] à lui payer les sommes de :

– 34 757,16 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2019, date de la lettre de mise en demeure,

– 3 833,80 euros au titre de la pénalité de l’article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales,

– 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, y compris ceux de la procédure d’injonction de payer,

– de le débouter de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– de débouter la société Distribution Casino France de ses demandes formulées à son encontre.

L’appelante soutient que le recours entre M. [N] et la société Distribution Casino France, tiers au contrat conclu encore en vigueur après son départ des lieux de ce dernier en juin 2018, ne lui est pas opposable.

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 4 septembre 2023, M. [R] [N] demande à la cour’:

– de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il l’a débouté du surplus de ses demandes,

Statuant à nouveau

– de juger que les échéances versées par provision, à hauteur de 570 euros et le solde créditeur antérieur de 181,51 euros viendront en déduction des sommes dues à la société Suez Eau France,

– de condamner la société Distribution Casino France à lui payer la somme de 570 euros en restitution des provisions payées en ses lieu et place,

– de débouter les société Suez Eau France et Distribution Casino France de toutes leurs demandes plus amples ou contraires,

– de les condamner in solidum aux entiers dépens et au paiement de la somme de 3 000 euros au visa des articles 37 et 75 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 dont Me Aline Jolivet pourra poursuivre personnellement le recouvrement en renonçant à la part contributive de l’Etat en application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 20 juin 2023, la société Distribution Casino France représentée par les organes de la procédure collective dont elle fait l’objet demande à la cour :

– d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il :

– l’a condamnée à relever et garantir M. [N] des condamnations prononcées à son encontre,

– l’a condamnée à payer à M. [N] la somme de 456 euros au titre des provisions déjà versées par ce dernier à la Sas Suez Eau France,

– l’a condamnée à verser à la Sas Suez Eau France la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,

– l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de le confirmer pour le surplus,

A titre subsidiaire

– de confirmer que sa garantie sera limitée à la somme de 1 528,51 euros,

– de condamner M. [N] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.

MOTIVATION

*créance de la société Suez Eau France sur M. [R] [N]

Pour condamner M. [R] [N] à payer à la société Suez Eau France la seule somme de 1 528,51 euros représentant la part inférieure au double de sa consommation moyenne, le tribunal a d’abord déduit de la facture du 20 octobre 2012 qu’il était le souscripteur du contrat de fourniture d’eau potable et d’assainissement du logement litigieux, et constaté qu’il s’était d’ailleurs régulièrement acquitté de ses factures jusqu’à celle du 3 juillet 2019 d’un montant de 34 697,87 euros.

Il a ensuite dit qu’il appartient à l’usager d’un service de distribution de l’eau qui invoque l’inexactitude d’une facturation établie à partir du relevé de son compteur d’apporter la preuve d’une erreur de relevé, d’un dysfonctionnement du compteur ou de toute autre anomalie, ce que M. [N] ne faisait pas, alors qu’il n’apparaissait nullement qu’il ait informé la société Suez Eau France de son déménagement ni procédé à la résiliation ou au transfert de son contrat.

Il a rappelé les dispositions des articles L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales et L.111-2 du code de la consommation et jugé que la mention ‘le paiement de cette facture-contrat vaut accusé de réception du réglement du service par le client’ portée sur la facture-contrat du 20 octobre 2012 ne démontrait pas à elle seule que les conditions contractuelles avaient été portées à sa connaissance ni qu’il en avait pris connaissance et acceptées.

Il a enfin jugé que la société Suez Eau France ne justifiait pas de l’envoi effectif de la facture du 3 juillet 2019.

L’appelante soutient qu’elle a satisfait à son obligation d’informer son abonné d’une surconsommation anormale et des démarches à effectuer pour bénéficier d’une remise en annexant, à la facture du 3 juillet 2019, un courrier précisant les démarches effectuées et en lui transmettant à nouveau ces informations par téléphone ; qu’elle ne saurait être tenue responsable de son changement d’adresse non divulgué ni des dysfonctionnements imputables aux services de la Poste ; que les conditions nécessaires à la majoration prévue à l’article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales sont donc réunies ; qu’il incombe à l’abonné de rapporter la preuve d’une erreur de relevé, d’un dysfonctionnement du compteur ou de toute autre anomalie ; que le montant des sommes dues correspondant principalement à la facture du 3 juillet 2019 doit être actualisé au regard des deux factures émises les 20 février et 9 juin 2020 produites aux débats.

L’intimé réplique que comme jugé par le tribunal la seule présence sur la facture-contrat de la mention ‘Le paiement de cette facture-contrat vaut accusé de réception du règlement du service par le client ‘ ne suffit pas à établir la preuve que les conditions contractuelles ont été portées à sa connaissance et qu’il les a acceptées ; que l’appelante ne démontre pas la réalité de la consommation d’eau objet de la facture du 3 juillet 2019 et ne justifie ni de l’envoi, ni de la réception de la lettre d’information prévue à l’article L. 2224-12-4 III bis du code général des collectivités territoriales, que le seul et unique courrier d’huissier du 10 octobre 2019 ne constitue pas une quittance au sens de l’article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales, et qu’il incombait à l’appelante, informée dès le 18 juillet 2019 de son changement d’adresse, d’interrompre la fourniture d’eau et de résilier le contrat de sorte que les factures émises postérieurement ne peuvent donner lieu à paiement.

Aux termes de l’article 1103 du code civil les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Le logement a ici été mis par la société Distribution Casino France qui en était locataire à la disposition de son gérant mandataire M. [R] [N] qui en sa qualité d’occupant a souscrit auprès de la société Lyonnaise des Eaux devenue Suez Eau France un contrat d’abonnement pour la fourniture d’eau potable et l’assainissement.

Faute pour lui de démontrer à quelle date il a résilié ce contrat, il en est resté titulaire nonobstant la résiliation du contrat de bail par la société Distribution Casino France au 3 avril 2019 date de l’état des lieux de sortie et même nonobstant le fait que cette société a été remise en possession des clefs de ce logement au plus tard le 8 août 2018, et que le congé a été notifié pour le 9 novembre 2018.

Selon l’article L111-2 du code de la consommation en vigueur du 25 juillet 2010 au 14 juin 2014 ici applicable,

I. – Tout professionnel prestataire de services doit avant la conclusion du contrat et, en tout état de cause, lorsqu’il n’y pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du service.

II. – Le professionnel prestataire de services doit mettre à la disposition du consommateur ou lui communiquer, de manière claire et non ambiguë, les informations suivantes :

– nom, statut et forme juridique, adresse géographique de l’établissement, coordonnées permettant d’entrer en contact rapidement et de communiquer directement avec lui ;

– le cas échéant, le numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ;

– si son activité est soumise à un régime d’autorisation, le nom et l’adresse de l’autorité l’ayant délivrée ;

– s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification

– (…)

– les conditions générales, s’il en utilise ;

– le cas échéant, les clauses contractuelles relatives à la législation applicable et la juridiction compétente ;

– le cas échéant, l’existence d’une garantie après-vente non imposée par la loi ;

– (…).

Tout professionnel prestataire de services doit également communiquer au consommateur qui en fait la demande les informations complémentaires suivantes :

– (…)

– les informations sur les conditions de recours à des moyens extrajudiciaires de règlement des litiges, lorsque ces moyens sont prévus par un code de conduite, un organisme professionnel ou toute autre instance.

III. – (…)

IV. – (…)

V. – En cas de litige sur l’application des I et II du présent article, il appartient au prestataire de prouver qu’il a exécuté ses obligations.

Il incombe en conséquence ici à la société Suez Eau France de démontrer qu’elle a rempli son obligation contractuelle d’information à l’égard de son abonné.

Elle produit à cet effet la ‘facture-contrat’ du 20 octobre 2012 émise à son nom mentionnant ‘MESSAGES Le paiement de cette facture-contrat vaut accusé de réception du règlement du service par le client’ ainsi que le règlement du service de l’eau potable mis en vigueur au 1er juillet 2003 par la SDEI.

Ce règlement prévoit en son article 3 que tout client souhaitant bénéficier des prestations fournies par le service des eaux doit souscrire un contrat d’abonnement, accompagné du présent réglement qui régit les modalités de fourniture d’eau et précise les obligations réciproques entre abonné et service des eaux ; que ce contrat peut prendre la forme d’une facture-contrat ; que la signature de la demande d’abonnement ou le paiement de la facture-contrat entraîne l’acceptation de ses dispositions.

Sans préjudice du caractère abusif d’une telle clause au sens de l’article L.132-1 du code de la consommation en vigueur du 03 juillet 2010 au 01 juillet 2016 ici applicable aux termes duquel ‘Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.(…)

Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies.

Sans préjudice des règles d’interprétation prévues aux articles 1156 à 1161,1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d’une clause s’apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat. Il s’apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l’exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l’une de l’autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites.

L’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans lesdites clauses.

Les dispositions du présent article sont d’ordre public.’,

la société Suez Eau France ne rapporte pas la preuve par la production de la seule ‘facture-contrat’ du 20 octobre 2012 qu’elle a porté le réglement du service de l’eau applicable à la connaissance de son abonné.

En effet, nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, comme il résulte ici de l’articulation entre la remise d’une facture censée constituer accusé de réception d’un réglement de service qui prévoit lui-même ce mode de preuve de sa remise.

Par ailleurs, selon l’article L. 2224-12-4 III bis du code général des collectivités territoriales en vigueur du 19 mai 2011 au 29 décembre 2019 ici applicable,

‘Dès que le service d’eau potable constate une augmentation anormale du volume d’eau consommé par l’occupant d’un local d’habitation susceptible d’être causée par la fuite d’une canalisation, il en informe sans délai l’abonné. Une augmentation du volume d’eau consommé est anormale si le volume d’eau consommé depuis le dernier relevé excède le double du volume d’eau moyen consommé par l’abonné ou par un ou plusieurs abonnés ayant occupé le local d’habitation pendant une période équivalente au cours des trois années précédentes ou, à défaut, le volume d’eau moyen consommé dans la zone géographique de l’abonné dans des locaux d’habitation de taille et de caractéristiques comparables.

L’abonné n’est pas tenu au paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne s’il présente au service d’eau potable, dans le délai d’un mois à compter de l’information prévue au premier alinéa du présent III bis, une attestation d’une entreprise de plomberie indiquant qu’il a fait procéder à la réparation d’une fuite sur ses canalisations.

L’abonné peut demander, dans le même délai d’un mois, au service d’eau potable de vérifier le bon fonctionnement du compteur. L’abonné n’est alors tenu au paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne qu’à compter de la notification par le service d’eau potable, et après enquête, que cette augmentation n’est pas imputable à un défaut de fonctionnement du compteur.

A défaut de l’information mentionnée au premier alinéa du présent III bis, l’abonné n’est pas tenu au paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne.

Les redevances et sommes prévues par le premier alinéa de l’article L. 2224-12-2 sont calculées en tenant compte de la consommation facturée.’

La société Suez Eau France produit les factures émises au nom de M. [N] de juillet 2013, 2014 et 2015, juin 2016, juillet 2017, juillet 2018 et 3 juillet 2019 de respectivement

date

consommation

facturée en m3

montant TTC

acompte

solde

16/07/2013

169

432,56 euros

450 euros

– 17,44 euros

08/07/2014

117

324,47 euros

743,44 euros

– 418,97 euros

10/07/2015

85

253,08 euros

336 euros

– 82,92 euros

08/06/2016

202

489,48 euros

242 euros

247,46 euros

11/07/2017

189

796,29 euros

828 euros

215,75 euros

20/07/2018

36

560,31 euros

1 023 euros

– 246,94 euros

03/07/2019

8 384

35 267,87 euros

570 euros

34 697,87euros

Constatant entre le relevé du 20 juillet 2018 et celui du 3 juillet 2019 une augmentation anormale du volume d’eau consommé excédant le double du volume d’eau moyen consommé par l’abonné pendant une période équivalente au cours des trois années précédentes, la société Suez Eau France devait en informer sans délai celui-ci et il lui incombe de démontrer qu’elle a satisfait à cette obligation.

Selon l’article R. 2224-20-1 II. du code général des collectivités territoriales en vigueur depuis le 01 juillet 2013 ici applicable, lorsque le service d’eau potable constate une augmentation anormale de consommation au vu du relevé de compteur enregistrant la consommation d’eau effective de l’abonné, il en informe l’abonné par tout moyen et au plus tard lors de l’envoi de la facture établie d’après ce relevé. Cette information précise les démarches à effectuer pour bénéficier de l’écrêtement de la facture prévu au III bis de l’article L. 2224-12-4.

L’appelante produit la copie d’un courrier simple daté du 3 juillet 2019 adressé à M. [R] [N] [Adresse 4].

La preuve que l’abonné a été régulièrement informé de l’augmentation anormale de consommation d’eau constatée entre le 20 juillet 2018 et le 3 juillet 2019 ainsi que des démarches à effectuer pour bénéficier de l’ecrêtement de la facture est donc ici rapportée et le jugement est infirmé en ce qu’il a limité la créance de la société Suez Eau France en conséquence.

M. [N] ne justifiant pas devant la cour avoir procédé à la résiliation du contrat d’abonnement aux services de la société Suez Eau France, et alors que les factures de relance des 20 février et 9 juin 2020 lui ont été adressées à sa nouvelle adresse [Adresse 7], la créance de cette société à son égard doit en effet être actualisée comme celle-ci le demande à la somme de 34 697,87 euros au titre de la consommation d’eau.

*pénalité

Pour débouter la société Suez Eau France de sa demande à ce titre le tribunal a jugé qu’elle ne justifiait ni de l’envoi de la facture litigieuse ni d’avoir mis en demeure son abonné par lettre recommandée avec accusé de réception.

L’appelante excipe de l’article R.2224-19-9 du code général des collectivités territoriales et soutient que cette pénalité doit ici s’appliquer sur les seules sommes dues au titre de l’assainissement et du traitement des eaux usées soit selon la facture litigieuse impayée la somme de 15 325,20 euros.

Selon les articles R. 2224-19 et suivants de ce code, tout service public d’assainissement, quel que soit son mode d’exploitation, donne lieu à la perception de redevances d’assainissement (…).

Le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’établissement public compétent pour tout ou partie du service public d’assainissement collectif ou non collectif institue une redevance d’assainissement pour la part du service qu’il assure et en fixe le tarif.

Lorsqu’un abonné bénéficie d’un écrêtement de la facture d’eau potable dans les conditions prévues par les articles L. 2224-12-4 et R. 2224-20-1, les volumes d’eau imputables aux fuites d’eau sur la canalisation après compteur n’entrent pas dans le calcul de la redevance d’assainissement. Ces volumes d’eau sont évalués en fonction de la différence entre le volume d’eau dont l’augmentation anormale a justifié l’écrêtement de la facture d’eau potable et le volume d’eau moyen consommé déterminé dans les conditions prévues au premier alinéa du III bis de l’article L. 2224-12-4.

Lorsque la consommation d’eau est calculée de façon forfaitaire, en application du troisième alinéa du I de l’article L. 2224-12-4, la redevance d’assainissement peut être également calculée forfaitairement.

Selon les article R.2224-19-7 et 8 du même code, le recouvrement, à l’exclusion des procédures contentieuses, des redevances pour consommation d’eau et des redevances d’assainissement collectif et non collectif peut être confié à un même organisme qui en fait apparaître le détail sur une même facture.

La facturation des sommes dues par les usagers est faite au nom du titulaire de l’abonnement à l’eau, à défaut au nom du propriétaire du fonds de commerce, à défaut au nom du propriétaire de l’immeuble.

Toutefois, la part de la redevance d’assainissement non collectif qui porte sur le contrôle de la conception, de l’implantation et de la bonne exécution des installations est facturée au propriétaire de l’immeuble.

Enfin selon l’article R.2224-19-9 invoqué à défaut de paiement dans un délai de trois mois à compter de la présentation de la quittance et dans les quinze jours d’une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la redevance est majorée de 25 %.

L’appelante ne justifie ici que de l’envoi à son abonné par la Scp Laurence Lavigne-Sandrine Ducout, huissiers de justice associés à [Localité 5], d’un courrier référencé 8690706/LA/310 ayant pour objet ‘Suez Eau France/ [N] [R]’ daté du 10 octobre 2019 et de son accusé de réception du 12 octobre 2019 par son destinataire.

Ce courrier est ainsi libellé ‘je viens de recevoir de SAS SUEZ EAU FRANCE le dossier visé en référence aux fin de recouvrement :

Impayé facture eau (décompte joint ) 34 757,16

Intérêts acquis Pour mémoire

Frais de procédure 17,36 euros

Vous devez 34 774,52 euros

Je compte sur votre règlement sous 48 heures

A défaut je me verrai dans l’obligation de prendre un titre exécutoire vous condamnant au paiement (sic)’.

Le décompte mentionné comme joint n’a pas été versé aux débats devant la cour.

Ne comportant pas de décompte de nature en particulier à isoler dans la somme réclamée celles sur lesquelles seulement la pénalité demandée était susceptible d’être appliquée, ce courrier ne constitue pas la mise en demeure prévue par le texte invoqué et le jugement est confirmé de ce chef.

*appel en garantie de la société Distribution Casino France

Pour condamner la société Distribution Casino France à relever et garantir M. [N] de la condamnation prononcée à son encontre le tribunal a jugé qu’il résultait des pièces produites que celui-ci lui avait remis les clés du logement litigieux le 16 juin 2018 et qu’elle ne contestait pas avoir été jusqu’au 31 mars 2019 l’occupante des lieux objet de la facturation litigieuse

Il a par ailleurs condamné cette société à lui rembourser la somme de 456 euros correspondant aux provisions versées pendant sa période d’occupation.

M. [N] soutient que la société Distribution Casino France est seule à l’origine de la consommation d’eau objet de la facture litigieuse ; qu’il ne peut à ce titre lui être reproché de ne pas avoir procédé à la résiliation du contrat après la remise des clés à cette société qui lui laissait ce logement à titre gracieux, qu’en s’abstenant de s’assurer de la reprise du contrat de fourniture d’eau à son compte dès la restitution des clés de son logement, cette société, locataire, a engagé sa responsabilité civile délictuelle à son égard.

La société Distribution Casino France réplique que conformément au principe de l’effet relatif des contrats, il incombait à son gérant mandataire, seul titulaire du contrat d’abonnement en eau, d’entreprendre les démarches nécessaires en vue de sa résiliation après la restitution des lieux, qu’elle conteste avoir occupé après son départ ainsi que d’y avoir réalisé de quelconques travaux ; que tenant la faute exclusive de celui-ci dans la réalisation de son propre préjudice, elle ne saurait tenue de le relever et garantir d’aucune somme mise à sa charge.

Aux termes de l’article 1240 du code civil tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage l’oblige à réparation.

Il incombe à M. [N] de démontrer, outre le préjudice résultant de la créance de la société Suez Eau France à son égard, le lien de causalité direct entre la faute qu’il impute à la société Distribution Casino France et ce préjudice.

Il verse aux débats, outre les seules pages de son livret de famille relatives à la naissance de ses trois enfants [M], [X], [U] et [B], l’attestation de décès de [Z] [N] née le 13 juillet 1970 (nom de jeune fille non renseigné) survenu à [Localité 15] le 13 mars 2017, une attestation du 1er septembre 2017 du groupe Casino aux termes de laquelle

‘- [R] et [Z] [N] ont travaillé dans notre société en qualité de co-gérants mandataires non salarié (sic) du 23/09/2011 au 16/02/2015. Sur cette période (ils) ont occupé un logement de fonction mis gracieusement à leur disposition pour l’exploitation de notre succursale située [Adresse 13] au [Localité 14] (30) conformément à leur contrat de co-gérnace mandataire non salariée

– [Z] [N] a travaillé en qualité de co-gérante mandataire non salariée du 17/02/2015 au 13/03/2017 avec sa fille Mme [P].

[R] [N] a travaillé en qualité (de) gérant mandataire non salarié intérimaire seul du 17/02/2015 au 10/03/2017

Sur cette dernière période [Z] [N] a occupé un logement de fonction mis gracieusement à sa disposition pour l’exploitation de notre succursale située [Adresse 13] au [Localité 14] (30) conformément à son contrat de co-gérance mandataire non salariée : [R] [N] ayant occupé avec son épouse, à titre exceptionnel et gracieusement ce même logement de fonction.’

et une attestation non conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile comme non accompagnée de la carte nationale d’identité de son auteur M. [G] [D], manager commercial à l’époque chez Distribution Casino France datée du 1er juillet 2020 dans laquelle il atteste ‘avoir récupéré le 16 juin 2018 les clefs de la villa située au [Adresse 4] que M. [N] [R] occupait et d’avoir déposé (celles-ci) au bureau de la direction commerciale situé [Adresse 16]’.

Il verse également une décision de rejet de la Direction départementale de la Cohésion sociale du Gard du 15 mars 2018 aux termes de laquelle ‘le groupe Casino a, suite à la rupture du contrat de gérance mandataire non salariée en date du 10 mars 2017, laissé à titre exceptionnel la jouissance du logement de fonction de son épouse décédéé le 13 mars 2017 (à M. [N]) dans l’attente pour lui de trouver un nouveau logement (…) L’absence de mobilisation du requérant a obligé le groupe Casino à lui notifier par lettre recommandée avec AR le 17 janvier 2018 une mise en demeure de libérer le logement dans les plus brefs délai avant poursuites judiciaires (…)’.

La société Casino produit de son côté un échange de courriels avec la société Foncia d’où il résulte en effet que son manager a restitué les clefs du logement comme attesté par M. [G] [D], et que cette société a adressé aux propriétaires du logement un courrier recommandé lui notifiant le congé le 8 août 2018 avec un préavis de 3 mois soit au 9 novembre 2018.

Elle produit aussi le courrier adressé par Foncia aux propriétaires sollicitant le report du congé fixé au 9 novembre 2018 à la date du 31 mars 2019, ‘la raison de ce report étant la réalisation des travaux de remise en état du logement’, lui confirmant le paiement des loyers jusqu’à cette date, et lui demandant la remise en route de l’électricité aux fins de réalisation de l’entretien de la chaudière.

Alors qu’elle a sollicité des propriétaires du logement loué pour lequel elle avait donné congé ‘le rétablissement de l’électricité’ ce qui démontre que le contrat distinct à cet égard avait été résilié, le fait de ne pas avoir vérifié le sort du contrat distinct d’abonnement au service de l’eau potable et d’assainissement des eaux usées constitue une faute qui lui est imputable.

Cette faute, qui a entraîné l’envoi par la société Suez à M. [N] à l’adresse à laquelle la société Casino ne pouvait ignorer qu’il ne résidait plus depuis juin 2018 de la facture litigieuse nécessairement relative à une surconsommation qui ne peut lui être imputable, présente un lien de causalité direct avec son préjudice.

Toutefois, d’une part [Z] [N] décédée le 13 mars 2017 ne peut pas être l’épouse de M. [R] [N], et il ne le démontre d’ailleurs pas, d’autre part le seul fait d’avoir restitué les clefs du logement à la société Casino n’a pas entraîné de facto la résiliation de son contrat d’abonnement souscrit auprès de la société Suez Eau France, non-résilitation dont sa propre faute est directement à l’origine.

Les fautes respectives de la société Distribution Casino France et de M. [R] [N] ayant chacune contribué dans des proportions équivalentes à la production du dommage, celle-là doit le relever et garantir de sa condamnation à l’égard de la société Suez Eau France à hauteur de la moitié de la facture impayée soit la somme de 17 348,93 euros, créance qui est fixée au dispositif de cet arrêt à la procédure collective dont elle fait l’objet.

La condamnation de M. [N] à l’égard de la société Suez Eau France produit intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 octobre 2019, et sa créance de 17 348,93 euros à l’égard de la société Distribution Casino France à compter du présent arrêt.

*autres demandes

M. [N] qui succombe principalement doit supporter les dépens de l’entière instance.

Il est condamné à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– à la société Suez Eau France la somme de 1 500 euros, y compris les frais de la requête en injonction de payer, les frais de mise en demeure et les frais de relance d’un montant de 59,29 euros

– à la société Distribution Casino France représentée par la Scp [O] & Rousselet, prise en la personne de Me [O], commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde accélérée la somme de 750 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Nîmes du 27 octobre 2022 (n°RG 20/02697) saut en ce qu’il a débouté la société Suez Eau France de sa demande au titre de la majoration prévue à l’article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales,

Statuant à nouveau

Condamne M. [R] [N] à payer à la société Suez Eau France la somme de 34 697,87 euros au titre de la consommation d’eau au titre de l’abonnement souscrit le 10 octobre 2012 pour le logement [Adresse 3],

Dit que cette somme porte intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 octobre 2019,

Fixe la créance de M. [R] [N] à la procédure collective dont fait l’objet la société Distribution Casino France à la somme de 17 348,93 euros,

Dit que cette somme porte intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Y ajoutant,

Condamne M. [R] [N] aux dépens de l’entière instance,

Le condamne à payer :

– à la société Suez Eau France la somme de 1 500 euros, y compris les frais de la requête en injonction de payer, les frais de mise en demeure et les frais de relance d’un montant de 59,29 euros,

– à la Scp [O] & Rousselet, prise en la personne de Me [O], commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde accélérée de la société Distribution Casino France la somme de 750 euros.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


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