Remises obtenues par les agences de publicité : attention à la loi Sapin

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Remises obtenues par les agences de publicité : attention à la loi Sapin

L’Essentiel : L’affaire opposant la société Cap Vital santé à Media Pub met en lumière les implications de la loi Sapin sur les remises accordées par les agences de publicité. Selon l’article 20 de cette loi, tout rabais doit être mentionné sur la facture et ne peut être conservé par l’intermédiaire sans stipulation contractuelle. Cap Vital a accusé Media Pub de retenir des remises et de facturer des commissions excessives. Cependant, le tribunal a rejeté ses demandes, considérant que les comportements fautifs de Media Pub n’étaient pas des contreparties indues, confirmant ainsi le jugement initial et condamnant Cap Vital aux dépens.

En application de l’article 20 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, tout rabais ou avantage tarifaire de quelque nature que ce soit accordé par le vendeur doit figurer sur la facture délivrée à l’annonceur et ne peut être conservé en tout ou partie par l’intermédiaire qu’en vertu d’une stipulation expresse du contrat de mandat.

Cependant, les faits de détournements de commissions ou de fonds imputés à une agence de publicité sur le fondement de la loi Sapin trouvent leur cause et leur objet dans un comportement fautif ou une manoeuvre accomplis à l’insu du client et ne constituent par conséquent pas des contreparties indues à un ‘avantage’ que l’agence aurait obtenu ou tenté d’obtenir de sa cocontactante, tel qu’il est prohibé par l’article L. 442-6, I, 1er érigé au nombre des pratiques restrictives de concurrence du livre IV du code de commerce, de sorte que cette disposition est sans application au litige.

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne un litige entre la société Cap Vital santé et la société Media Pub, qui a été jugé par le tribunal judiciaire de Paris en janvier 2022. Le tribunal a reconnu sa compétence pour traiter le litige et a débouté Cap Vital de ses demandes de condamnation à l’égard de Media Pub. Cap Vital a interjeté appel du jugement. Les parties ont présenté des conclusions demandant des dommages et intérêts, des condamnations et des indemnités. La cour a demandé des observations sur la recevabilité de certaines demandes. Les parties ont transmis leurs observations.

Les points essentiels

Exposé des faits

La société Cap Vital commercialise du matériel médical via un réseau de distribution de 250 points de vente et un site Web. Elle a conclu un contrat avec la société Media Pub pour des services de communication et de publicité.

Fin de la relation commerciale

En septembre 2019, Cap Vital a mis fin à son contrat avec Media Pub, l’accusant de retenir des remises de la société Media Post et de facturer des prestations avec des taux de commission élevés.

Assignation en justice

Cap Vital a assigné Media Pub devant le tribunal de commerce de Paris pour violation de la loi Sapin et du code de commerce, réclamant une indemnisation de 343.137,94 euros.

Procédure en première instance

En première instance, Cap Vital a renoncé à poursuivre Media Pub sur d’autres fondements que ceux du code de commerce, ce qui a affecté sa recevabilité dans sa demande.

Responsabilité de Media Pub

Cap Vital a tenté de prouver que Media Pub avait enfreint l’article L. 442-6 du code de commerce en facturant des commissions injustifiées, mais le tribunal a rejeté cette demande.

Confirmation du jugement

La cour a confirmé le rejet de la demande de Cap Vital, a rejeté l’abus de procédure et a condamné la société aux dépens et aux frais irrépétibles.

Les montants alloués dans cette affaire: – La société Cap Vital santé est condamnée aux dépens
– La société Cap Vital santé est condamnée à payer à M. [E] [H] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Réglementation applicable

– Code de commerce
– Code civil
– Loi n°93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (loi Sapin)

Article L. 442-1, I, 1° du code de commerce:
« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, d’obtenir ou de tenter d’obtenir d’un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. »

Article L. 442-6, I, 1er du code de commerce:
« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, d’obtenir ou de tenter d’obtenir d’un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. »

Article 20 de la loi n°93-122 du 29 janvier 1993:
« Tout rabais ou avantage tarifaire de quelque nature que ce soit accordé par le vendeur doit figurer sur la facture délivrée à l’annonceur et ne peut être conservé en tout ou partie par l’intermédiaire qu’en vertu d’une stipulation expresse du contrat de mandat. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Arnaud GUYONNET de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS
– Me Justine GRANDMAIRE, avocate au barreau de PARIS
– Me Martine CHOLAY, avocat au barreau de PARIS
– Me Romuald COHANA, avocat au barreau de PARIS

Mots clefs associés & définitions

– Cour
– Société Cap Vital
– Contrat
– Société Media Pub
– Mandat
– Communication
– Publicité
– Liquidation judiciaire
– Tribunal de commerce
– Violation de la loi Sapin
– Code de commerce
– Pratiques restrictives de concurrence
– Dommages et intérêts
– Abus de procédure
– Dépens
– Frais irrépétibles
– Cour: Instance judiciaire chargée de rendre la justice
– Société Cap Vital: Nom d’une entreprise
– Contrat: Accord entre deux parties qui crée des obligations légales
– Société Media Pub: Nom d’une entreprise spécialisée dans la publicité
– Mandat: Autorisation donnée à une personne pour agir au nom d’une autre
– Communication: Transmission d’informations entre individus ou groupes
– Publicité: Promotion d’un produit ou service à travers différents moyens de communication
– Liquidation judiciaire: Procédure permettant de mettre fin à l’activité d’une entreprise en difficulté financière
– Tribunal de commerce: Juridiction spécialisée dans les litiges commerciaux
– Violation de la loi Sapin: Infraction aux règles de transparence et de lutte contre la corruption dans les marchés publics
– Code de commerce: Ensemble des lois régissant les activités commerciales
– Pratiques restrictives de concurrence: Comportements anti-concurrentiels visant à limiter la concurrence sur un marché
– Dommages et intérêts: Somme d’argent versée à une victime pour compenser un préjudice subi
– Abus de procédure: Utilisation déloyale des voies judiciaires pour obtenir un avantage injuste
– Dépens: Frais engagés lors d’une procédure judiciaire
– Frais irrépétibles: Frais non remboursables liés à une procédure judiciaire

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 mai 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/04961
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRÊT DU 17 MAI 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/04961 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFNNQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Janvier 2022 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2019063546

APPELANT

S.C.A. CAP VITAL SANTE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 391 006 814

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Justine GRANDMAIRE, avocate au barreau de PARIS

INTIME

Me [E] [H]

es qualité de liquidateur judiciaire de la société SARL MEDI@PUB

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Martine CHOLAY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0242

Assistée de Me Romuald COHANA, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 Mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Denis ARDISSON, Président de chambre, en charge du rapport,

Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, conseillère,

CAROLINE GUILLEMAIN, conseillère,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
Vu le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 24 janvier 2022 qui a :

– reconnu sa compétence pour traiter le litige,

– débouté la société Cap Vital santé (‘Cap Vital’) de ses demandes de condamnation formées à l’égard de la société Media Pub et de fixation au passif des sommes correspondantes au passif de la liquidation judiciaire,

– débouté la société Media Pub de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamné la société Cap Vital à payer à la société Media Pub la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

– condamné la société Cap Vital aux dépens.

Vu l’appel du jugement interjeté le 4 mars 2022 par la société Cap Vital santé ;

* *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 8 mars 2024 pour la société Cap Vital santé aux fins d’entendre en application de l’article L. 442-6, I, 1° (ancienne rédaction) du code commerce, de la loi n°93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite loi Sapin, et des articles 1240 et 1984 et suivants du code civil :

– infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Cap Vital de toutes ses demandes de condamnation formées à l’encontre du liquidateur de Media Pub, tendant à obtenir la réparation du préjudice subi par la société Cap Vital en raison des comportements fautifs commis par société Media Pub et pour procédure abusive et aux fins de fixation au passif de la liquidation judiciaire des sommes correspondantes, condamné la société Cap Vital , outre aux entiers dépens, à verser à la société Media Pub, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles,

– débouter le liquidateur judiciaire de la société Media Pub de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions et de son appel incident,

– condamner la société Media Pub à indemniser la société Cap Vital au titre du préjudice subi du fait de la violation des dispositions de la loi Sapin et des dispositions de l’article L. 442-6, I, 1 du code de commerce,

– fixer au passif de la société Media Pub, pour la somme de 343.137,94 euros au profit de la société Cap Vital au titre du préjudice subi par la société Cap Vital du fait des pratiques mises en ouvre par la société Media Pub consistant à avoir perçu des commissions sans contrepartie,

– fixer au passif de la société Media Pub les intérêts sur la somme de 343.137,94 euros due à la société Cap Vital à compter de la signification de l’assignation à la société Media Pub,

– condamner M. [H] en qualités de liquidateur judiciaire de la société Media Pub à verser la somme de 25.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

* *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 8 mars 2023 pour M. [E] [H] en sa qualité de liquidateur de la société Media Pub afin d’entendre, en application des articles 6 et 9 du code de procédure civile, 20 et 25 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, 8 du code de procédure pénale, 112-2 du code pénal et L. 442-1 du code de commerce :

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Cap Vital de l’intégralité de ses demandes,

– infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [H] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts,

– déclarer infondées l’ensemble des demandes de la société Cap Vital,

– débouter la société Cap Vital de l’ensemble de ses demandes,

– condamner la société Cap Vital à payer une indemnité de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamner la société Cap Vital à verser la somme de 25.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société Cap Vital aux entiers dépens.

* *

Par message transmis le 2 avril 2024, la cour a demandé aux parties leurs observations ‘sur la question de la recevabilité de la demande de la société Cap Vital tendant à fixer la créance au passif de la société Media Pub sur la constatation de la violation de loi Sapin en contemplation de la renonciation de la société Cap Vital à cette demande devant les premiers juges, combinée avec l’effet dévolutif de l’appel régi par l’article 561 et suivants du code de procédure civile’.

Vu les observations transmises le 26 avril 2024 pour la société Cap Vital ;

Vu les observations transmises le 22 avril 2024 pour société Media Pub ;
SUR CE, LA COUR,

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs conclusions ainsi qu’au jugement.

Il sera ainsi succinctement rapporté que la société Cap Vital commercialise du matériel médical au travers d’un réseau de distribution de 250 points de vente et qu’elle anime notamment au moyen d’un site Web.

Par contrat du 3 janvier 2013, la société Cap Vital a convenu avec la société Media Pub, agence de communication et de publicité, un contrat à durée indéterminée par lequel elle lui a confié, moyennant une rémunération forfaitaire annuelle, les missions suivantes : conseil général en communication, stratégie de communication, pige institutionnelle et concurrentielle, prestations de ‘Community management’ et organisation de la convention annuelle de société Cap Vital.

Le 3 janvier 2017, les parties ont convenu d’un nouveau mandat pour une durée de cinq ans stipulant à son article 10 les missions d’achats d’espaces publicitaires ainsi que différents travaux pour des impressions publicitaires dont la société Media Pub a confié l’exécution à la société Media Post.

Par lettre du 25 septembre 2019, la société Cap Vital a dénoncé à la société Media Pub la fin de leur relation commerciale avec effet immédiat aux motifs qu’elle a conservé des remises que la société Media Post lui avait concédées et qu’elle a facturé des prestations Media Post assorties de taux de commission ‘aberrants’.

Par acte délivré aussi le 25 septembre 2019, la société Cap Vital a assigné la société Media Pub devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de ‘constater les pratiques mises en ouvre par la société Media Pub en violation des dispositions de la loi n°93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques dite ‘loi Sapin », de ‘constater la violation parla société Media Pub des dispositions à titre principal, de l’article L. 442-1, I, 1° du code de commerce’ et ‘à titre subsidiaire, de l’article L. 442-6, I, 1° du Code de commerce’ et de ‘fixer au passif de la société Media Pub pour la somme de 343.137,94 euros en réparation du préjudice’.

Par ailleurs, le tribunal de commerce d’Auxerre a prononcé le 3 février 2020 la liquidation judiciaire de la société Media Pub et désigné M. [H] en qualité de liquidateur.

1. Sur la recevabilité de la demande tirée du mandat et du droit commun de la responsabilité civile

En réponse à la question posée par la cour et pour conclure à la recevabilité de sa demande de condamnation de la société Media Pub sur le fondement des violations de la loi Sapin, dont l’application est d’ordre public, et des articles 1984 et suivants du code civil, ou 1382, devenu 1240 du code civil, la société Cap Vital estime que les premiers juges ont par erreur déduit qu’elle renonçait à ses demandes, alors qu’elle soutenait dans ses conclusions déposées devant eux que, page 13 : ‘Il résulte de ce qui précède que MEDIA PUB a manifestement violé les dispositions de l’article 20 de la loi du 29 janvier 1993 : (i) d’une part en facturant à CAP VITAL SANTE une commission injustifiée (le contrat de mandat conclu entre MEDIA PUB et CAP VITAL SANTE ne prévoit aucun droit à commission au profit de MEDIA PUB sur les prestations accomplies à 100% par MEDIA POST et refacturées par MEDIA PUB à CAP VITAL SANTE) ; (ii) d’autre part en percevant de la part de MEDIA POST une remise dont elle n’a pas informé MEDIA PUB et qu’elle n’a donc pas répercuté à CAP VITAL SANTE’ ; et page 21 : ‘Il est demandé au Tribunal de constater que MEDIA PUB a violé les dispositions de loi n°93-122 du 29 janvier 1993 (…). En conséquence, il est demandé au tribunal de céans de condamner MEDIA PUB à indemniser CAP VITAL SANTE à hauteur du préjudice subi par cette dernière et, donc de la condamner à payer la somme de 343.137,94 euros avec intérêts à compter de la signification de l’assignation à MEDIA PUB.’

Au demeurant, aux termes de leurs motifs sur ces écritures ainsi de ceux du dispositif des conclusions de la société Cap Vital dans le quel elle demandait de ‘constater les pratiques mises en oeuvre par la société Media Pub en violation de la loi Sapin’, les premiers juges ont pertinemment relevé, sans être contredit que :

‘la société Cap Vital a précisé que les condamnations qu’elle demande de prononcer sont formulées au seul titre du code de commerce (article L. 442-1- I -1° du nouveau code de commerce, demande principale, ou article L442 – 6-l-1° de l’ancienne version du même code- demande subsidiaire)’, qu’elle a fait ‘valoir que, son action ayant été engagée au visa des articles L442-1-I-1° du code de commerce (nouvelle rédaction), ou L442-6-I-1° (ancienne rédaction)’ et que ‘dans ses écritures et durant l’audience, Cap Vital Santé développe en détail les dispositions de la loi Sapin, et les sanctions, pénales, qui lui sont attachées ; mais elle a bien précisé, tant dans ses écritures que durant l’audience, que la demande de condamnation qu’elle a formée à I’encontre de Media Pub est fondée non pas sur les dispositions de ladite loi Sapin, mais sur les dispositions précitées du code de commerce’.

Il en résulte la preuve qu’en première instance, la société Cap Vital a, en toute connaissance de cause, unilatéralement et irrévocablement abdiqué son droit de poursuivre le liquidateur de la société Media Pub sur le fondement des articles 1984 et suivants du code civil ou 1382, devenu 1240 du code civil, ce que les premiers juges ont implicitement retenu pour déduire que la société Cap Vital ne soutenait pas de prétentions de ce chef pour décider qu’ils n’avaient pas à examiner les violations de la loi Sapin imputée à la Media Pub.

En conséquence de cette renonciation, la société Cap Vital n’a plus intérêt à agir sur ces fondements et n’est par conséquent plus recevable dans cette demande.

2. Sur le bien fondé du droit des pratiques restrictives de concurrence

Aux termes de l’article L. 442-6, I, 1er du code de commerce en vigueur jusqu’au 26 avril 2019, il est disposé que :

Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, d’obtenir ou de tenter d’obtenir d’un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d’une opération d’animation ou de promotion commerciale, d’une acquisition ou d’un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins, du rapprochement d’enseignes ou de centrales de référencement ou d’achat ou de la rémunération de services rendus par une centrale internationale regroupant des distributeurs. Un tel avantage peut également consister en une globalisation artificielle des chiffres d’affaires, en une demande d’alignement sur les conditions commerciales obtenues par d’autres clients ou en une demande supplémentaire, en cours d’exécution du contrat, visant à maintenir ou accroître abusivement ses marges ou sa rentabilité.

Pour voir infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la responsabilité de la société Media Pub recherchée sur le fondement de l’article L. 442-6, I, 1er précité, la société Cap Vital fait grief à l’agence publicitaire de lui avoir facturé, hors convention de mandat, des commissions à valoir sur des prestations que la société Media Post lui avait facturées, pour le compte de l’annonceur, à l’occasion de neuf opérations entre 2015 et 2018 et pour le montant total de 343.137,94 euros, ceci en violation de la prescription de l’article 20 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques disposant que :

Tout rabais ou avantage tarifaire de quelque nature que ce soit accordé par le vendeur doit figurer sur la facture délivrée à l’annonceur et ne peut être conservé en tout ou partie par l’intermédiaire qu’en vertu d’une stipulation expresse du contrat de mandat.

Cependant, les faits de détournements de commissions ou de fonds imputés à la société Media Pub sur le fondement de la loi Sapin trouvent leur cause et leur objet dans un comportement fautif ou une manoeuvre accomplis à l’insu de la société Cap Vital et ne constituent par conséquent pas des contreparties indues à un ‘avantage’ que la société Media Pub aurait obtenu ou tenté d’obtenir de sa cocontactante, tel qu’il est prohibé par l’article L. 442-6, I, 1er érigé au nombre des pratiques restrictives de concurrence du livre IV du code de commerce, de sorte que cette disposition est sans application au litige et pour ce motif, substitué à ceux des premiers juges, la décision sera confirmée en ce qu’elle a rejeté de ce chef, la demande en fixation de dommages et intérêts.

3. Sur l’abus de procédure, les dépens et les frais irrépétibles

Il ne se déduit pas des termes et de la conduite du litige, la preuve que celui-ci a dégénéré en abus, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts soutenue de ce chef par le liquidateur.

La société Cap Vital succombant à l’action, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a tranché les dépens et les frais irrépétibles et statuant de ces chefs en cause d’appel, elle sera aussi condamnée aux dépens et à payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,

DÉCLARE irrecevable la demande de la société Cap Vital santé fondée sur les articles 1382, devenu 1240 du code civil, 1984 du code civil et de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 ;

CONFIRME le jugement en l’état de toutes ses dispositions déférées,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Cap Vital santé aux dépens ;

CONDAMNE la société Cap Vital santé à payer à M. [E] [H] en sa qualité de liquidateur de la société Media Pub à payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de l’affaire entre Cap Vital santé et Media Pub ?

L’affaire concerne un litige entre la société Cap Vital santé, spécialisée dans la commercialisation de matériel médical, et la société Media Pub, une agence de communication et de publicité.

Le tribunal judiciaire de Paris a été saisi en janvier 2022 pour traiter ce litige, où Cap Vital a accusé Media Pub de pratiques commerciales déloyales, notamment de retenir des remises et de facturer des commissions élevées.

En septembre 2019, Cap Vital a mis fin à son contrat avec Media Pub, ce qui a conduit à une assignation en justice pour violation de la loi Sapin et du code de commerce, avec une demande d’indemnisation de 343.137,94 euros.

Quelles ont été les décisions du tribunal en première instance ?

En première instance, le tribunal a reconnu sa compétence pour traiter le litige et a débouté Cap Vital de ses demandes de condamnation à l’égard de Media Pub.

Cap Vital a renoncé à poursuivre Media Pub sur d’autres fondements que ceux du code de commerce, ce qui a affecté la recevabilité de sa demande.

Le tribunal a également rejeté la demande de Cap Vital concernant les commissions injustifiées, confirmant ainsi que Media Pub n’avait pas violé les dispositions du code de commerce.

De plus, Cap Vital a été condamnée à payer 5.000 euros à Media Pub au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Quels sont les articles de loi pertinents dans cette affaire ?

Les articles de loi pertinents dans cette affaire incluent l’article 20 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, qui stipule que tout rabais ou avantage tarifaire doit figurer sur la facture et ne peut être conservé par l’intermédiaire qu’en vertu d’une stipulation expresse du contrat de mandat.

De plus, l’article L. 442-1, I, 1° du code de commerce engage la responsabilité de toute personne obtenant un avantage disproportionné par rapport au service rendu.

L’article L. 442-6, I, 1er du code de commerce, qui traite des pratiques restrictives de concurrence, est également central dans cette affaire, car il prohibe l’obtention d’avantages sans service commercial correspondant.

Quels ont été les arguments de Cap Vital dans sa demande ?

Cap Vital a soutenu que Media Pub avait facturé des commissions injustifiées sur des prestations réalisées par Media Post, ce qui violait les dispositions de la loi Sapin et du code de commerce.

Elle a demandé au tribunal de constater ces pratiques et de condamner Media Pub à indemniser Cap Vital pour le préjudice subi, chiffré à 343.137,94 euros.

Cap Vital a également affirmé que Media Pub avait conservé des remises qui auraient dû être répercutées, ce qui constituait une violation des obligations contractuelles et légales.

Quelles ont été les conséquences financières pour Cap Vital suite au jugement ?

Suite au jugement, la société Cap Vital santé a été condamnée à payer les dépens, ainsi qu’une somme de 5.000 euros à M. [E] [H], liquidateur de Media Pub, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Cela signifie que Cap Vital a non seulement perdu son action en justice, mais a également été contrainte de supporter les frais liés à la procédure, ce qui représente une perte financière significative pour l’entreprise.

Cette décision souligne les risques financiers associés à des litiges commerciaux, en particulier lorsque les demandes sont jugées non fondées par le tribunal.

Qui étaient les avocats impliqués dans cette affaire ?

Les avocats impliqués dans cette affaire étaient :

– Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de Paris, représentant Cap Vital santé.
– Me Justine GRANDMAIRE, également avocate au barreau de Paris, assistante de Me Guyonnet.
– Me Martine CHOLAY, avocat au barreau de Paris, représentant Media Pub.
– Me Romuald COHANA, également avocat au barreau de Paris, assistante de Me Cholay.

Ces avocats ont plaidé pour leurs clients respectifs tout au long de la procédure judiciaire, apportant des arguments et des preuves pour soutenir leurs positions.


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