Le contrat à prix forfaitaire, tel que défini par l’article 1791 du Code civil, impose que l’entrepreneur s’engage à réaliser des travaux pour un prix global et définitif, sans possibilité de modification du prix en raison de variations dans les quantités de travaux réalisés. En cas de non-réalisation de prestations spécifiées, comme le terrassement dans le rocher au brise-roche hydraulique, le maître d’ouvrage est en droit de retenir des sommes correspondant à des travaux non effectués, justifiant ainsi une diminution du prix convenu. De plus, selon l’article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés ont force obligatoire entre les parties. Concernant les pénalités de retard, l’article L.441-10 du Code de commerce stipule que les conditions de règlement doivent préciser les pénalités applicables en cas de retard, et en l’absence de stipulations contraires, les intérêts au taux légal sont dus à compter de la date de la dernière demande de paiement. Enfin, l’article 1799-1 du Code civil impose au maître de l’ouvrage de garantir le paiement des sommes dues à l’entrepreneur lorsque celles-ci dépassent 12 000 euros, mais cette garantie ne s’applique que si le montant restant dû est supérieur à ce seuil.
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L’Essentiel : Le contrat à prix forfaitaire engage l’entrepreneur à réaliser des travaux pour un prix global, sans modification en raison de variations. En cas de non-réalisation de prestations, le maître d’ouvrage peut retenir des sommes correspondant à des travaux non effectués. Les contrats légalement formés ont force obligatoire. Les pénalités de retard doivent être précisées dans les conditions de règlement, et en l’absence de stipulations, des intérêts au taux légal sont dus. Le maître de l’ouvrage doit garantir le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent 12 000 euros.
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Résumé de l’affaire :
Exposé du litige et de la procédureLa société civile de construction vente a confié le lot terrassement à une entreprise de travaux publics suivant un marché de travaux. Le marché a été conclu pour un prix ferme, modifié par avenant. Les travaux ont été réceptionnés avec réserves, mais le montant a été contesté. L’entreprise de travaux a assigné la société civile devant le tribunal pour régler les sommes litigieuses. Jugement du tribunalLe tribunal a condamné la société civile à payer une somme pour des retenues injustifiées, ordonné la capitalisation des intérêts, et débouté l’entreprise de ses autres demandes. La société civile a été condamnée aux dépens et l’exécution provisoire a été ordonnée. Appel de l’entreprise de travauxL’entreprise a relevé appel, demandant la réformation du jugement sur plusieurs points, notamment le montant des sommes dues et des pénalités. Elle a également demandé des intérêts et une garantie de paiement. Demande de la société civile en appelLa société civile a demandé la confirmation du jugement pour certaines sommes et l’infirmation pour ses demandes reconventionnelles. Elle a également demandé des pénalités de retard et des frais irrépétibles. Motifs du jugementLe tribunal a confirmé que la société civile n’était pas fondée à retenir une partie du prix pour des non-conformités non réservées. La retenue pour travaux non réalisés a été jugée justifiée. Les pénalités de retard ont également été validées, et le jugement a été confirmé sur ces points. Sommes dues et intérêtsLes retenues opérées par la société civile ont été validées, et il a été établi que la société civile devait un solde au titre du marché. Les intérêts au taux légal ont été ajoutés à la condamnation. Garantie de paiementLa demande de garantie de paiement a été rejetée, car le montant restant dû était inférieur au seuil requis. Le jugement a été confirmé sur ce point. Autres demandesLe jugement a été confirmé concernant les dépens et les frais irrépétibles. La société civile, partie perdante, a été condamnée aux dépens d’appel. ConclusionLa cour a confirmé le jugement du tribunal, condamnant la société civile à payer le solde des travaux avec intérêts, et a débouté les parties du surplus de leurs demandes. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique des retenues effectuées par le maître d’ouvrage sur le montant des travaux ?Les retenues effectuées par le maître d’ouvrage, en l’occurrence la société Chateaubriand 70, reposent sur des dispositions contractuelles et légales. Selon l’article 1103 du code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». Cela signifie que les parties sont tenues de respecter les termes de leur contrat. Dans le cas présent, la société Chateaubriand 70 a justifié ses retenues en se basant sur des travaux non réalisés par la société Pigeon TP, notamment la prestation de terrassement dans le rocher au brise roche hydraulique (BRH). Le tribunal a constaté que cette prestation n’avait pas été réalisée, ce qui a permis à la société Chateaubriand 70 de retenir une somme de 18 962,50 euros. De plus, l’article 4.3 du CCAP stipule que « il appartient toujours à l’Entreprise en retard de faire la preuve de sa non-responsabilité », ce qui renforce la position du maître d’ouvrage dans le cadre de la retenue pour pénalités de retard. Ainsi, la société Pigeon TP n’ayant pas prouvé que le retard n’était pas de sa responsabilité, la retenue de 7 888,59 euros pour pénalités de retard a été validée. Quel est le régime des pénalités de retard en vertu du contrat ?Les pénalités de retard sont régies par les dispositions contractuelles et par le code civil. L’article 4.4.1 du CCAP prévoit l’application d’une pénalité de 1/500ème du montant du marché par jour de retard sur la livraison. Cela signifie que si l’entrepreneur ne respecte pas les délais convenus, il s’expose à des pénalités financières. Dans cette affaire, le contrat stipulait une date de fin des travaux au 19 avril 2019, qui a été décalée au 14 juin 2019. La réception des travaux a finalement eu lieu le 19 novembre 2019, entraînant un retard de 158 jours. La société Pigeon TP a reconnu ce retard, mais a tenté de justifier qu’il était dû à des circonstances qui ne lui étaient pas imputables. Cependant, le tribunal a constaté qu’elle n’avait pas apporté la preuve de sa non-responsabilité. Ainsi, la société Chateaubriand 70 a pu valider la retenue de 7 888,59 euros au titre des pénalités de retard, conformément aux stipulations contractuelles. Quel est le montant des sommes dues par le maître d’ouvrage à l’entrepreneur ?Le montant des sommes dues par le maître d’ouvrage à l’entrepreneur est déterminé par le décompte général des travaux. Selon les éléments présentés, le montant global du marché s’élève à 177 783,60 euros TTC. La société Chateaubriand 70 a déjà réglé à la société Pigeon TP la somme de 146 910,10 euros. Les retenues opérées par la société Chateaubriand 70, qui ont été validées par le tribunal, comprennent 18 962,50 euros pour travaux non réalisés et 7 888,59 euros pour pénalités de retard. En conséquence, le solde dû par la société Chateaubriand 70 à la société Pigeon TP est de 4 022,41 euros. Ce montant a été confirmé par le tribunal, qui a ordonné le paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2019, conformément aux dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce. Quel est le régime de la garantie de paiement dans le cadre des marchés de travaux ?La garantie de paiement est régie par l’article 1799-1 du code civil, qui stipule que le maître de l’ouvrage doit garantir à l’entrepreneur le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent le seuil de 12 000 euros. Cette garantie peut être demandée par l’entrepreneur à tout moment, même en cours d’exécution des travaux. Dans le cas présent, la société Pigeon TP a demandé une garantie de paiement, mais le tribunal a constaté que le montant restant dû était inférieur à 12 000 euros. Par conséquent, il a jugé qu’il n’y avait pas lieu de faire droit à cette demande de garantie de paiement. Le tribunal a donc confirmé que, compte tenu des retenues validées et du montant restant dû, la demande de garantie de paiement ne pouvait être acceptée, conformément aux dispositions légales applicables. |
ARRÊT N° 57
N° RG 24/00139
N° Portalis DBVL-V-B7I-UM7Y
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 27 FEVRIER 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : M. Alain DESALBRES, Président de chambre,
Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Jean-Pierre CHAZAL, lors des débats, et Madame Françoise BERNARD, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 Janvier 2025, devant Monsieur Philippe BELLOIR, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 27 Février 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
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APPELANTE :
S.A.S. PIGEON TP LOIRE ANJOU
prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, [Adresse 3]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Christophe HENRION, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
SCCV CHATEAUBRIAND 70
société civile de construction vente prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 1]
Représentée par Me François PROCUREUR, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
Dans le cadre de la construction d’un immeuble situé [Adresse 4] à [Localité 2] (44), la société civile de construction vente Chateaubriand 70 a confié le lot terrassement à la société Pigeon TP Loire Anjou suivant marché de travaux du 7 février 2018.
Le marché a été conclu pour un prix ferme, global et forfaitaire fixé à la somme de 142 000 euros HT, soit 170 400 euros TTC, modifié ensuite par avenant.
Les travaux ont été réceptionnés le 19 novembre 2019, avec réserves qui ont été levées.
Le montant des travaux a été contesté de part et d’autre sans que les parties ne parviennent à trouver d’accord.
Suivant exploit du 2 mars 2020, la société Pigeon TP Loire Anjou a assigné la société Chateaubriand 70 devant le tribunal judiciaire de Nantes aux fins de règlement des sommes litigieuses.
Par jugement du 27 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Nantes a :
– condamné la société Chateaubriand 70 à payer à la société Pigeon TP Loire Anjou la somme de 5 250,36 euros TTC au titre des retenues injustifiées sur les non-conformités en paiement du solde des travaux découlant du contrat,
– ordonné la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
– débouté la société Pigeon TP Loire Anjou de sa demande en paiement de l’indemnité forfaitaire de 40 euros,
– débouté la société Pigeon TP Loire Anjou de ses demandes au titre de la garantie de financement,
– débouté la société Chateaubriand 70 de sa demande en paiement,
– condamné la société Chateaubriand 70 aux dépens,
– rejeté les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– ordonné l’exécution provisoire.
La société Pigeon TP Loire Anjou a relevé appel de cette décision par acte du 9 janvier 2024, enregistré le 10 janvier 2024.
Dans ses dernières écritures du 3 janvier 2025, la société Pigeon TP Loire Anjou demande à la cour de :
– réformer le jugement en ce qu’il :
* a condamné la société Chateaubriand 70 à lui payer la seule somme de 5 250,36 euros TTC au titre des retenues injustifiées sur la non conformité en paiement du solde des travaux découlant du contrat,
* l’a déboutée de sa demande en paiement de l’indemnité forfaitaire de 40 euros,
* l’a déboutée de ses demandes formées au titre de la garantie de financement,
* a rejeté les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– le confirmer pour le surplus,
Statuant à nouveau
– dire et juger que le décompte général des travaux s’élève à la somme de 148 153 euros HT soit 177 783,60 euros TTC,
– dire et juger que les sommes qui lui sont dues s’élèvent à 30 873,50 euros,
– condamner la société Chateaubriand 70 à lui payer la somme de 30 873,50 euros TTC au principal au titre du solde des travaux découlant du contrat,
– condamner la société Chateaubriand 70 à lui payer l’indemnité forfaitaire de 40 euros correspondant aux frais de recouvrement de la facture impayée,
– assortir cette condamnation des intérêts retard au taux prévu à l’article L.441-6 devenu L.441-10 du code de commerce à compter du 14 février 2020, ou à compter du 14 décembre 2019 et jusqu’à complet paiement,
– ordonner la capitalisation des intérêts un an après la date d’exigibilité de la créance,
– condamner la société Chateaubriand 70 à lui délivrer une garantie stipulée à son profit conforme aux dispositions de l’article 1791 du code civil pour le montant de 30 873,50 euros et à en apporter justification, et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard,
– débouter la société Chateaubriand 70 de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions dirigées contre elle,
– condamner la société Chateaubriand 70 à lui payer la somme de 4 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et 4 000 euros pour la procédure d’appel,
– condamner la même aux dépens de première instance et d’appel,
Aux termes de ses dernières écritures du 10 décembre 2024, la société Chateaubriand 70 demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à régler à la société Pigeon TP Loire Anjou la seule somme de 5 250,36 euros TTC,
– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les autres prétentions de la société Pigeon TP Loire Anjou,
– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté ses demandes reconventionnelles et l’a condamnée aux dépens,
Statuant à nouveau,
– débouter la société Pigeon TP Loire Anjou de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner la société Pigeon TP Loire Anjou à lui payer la somme de 32 935,90 euros à titre de pénalités de retard sur l’exécution des travaux litigieux,
– assortir cette condamnation des intérêts au taux légal depuis le 14 juin 2019 avec anatocisme,
– condamner la société Pigeon TP Loire Anjou à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,
– condamner la même aux dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2025.
A titre liminaire, il sera observé comme en première instance que la SCCV Chateaubriand 70 reconnaît qu’elle n’était pas fondée à retenir une partie du prix en raison de non-conformités apparentes et qui n’ont pas été réservées lors de la réception. Aussi, les déductions des sommes de 3 120 euros pour reprise du trottoir ; 1 983,60 euros pour retenue remblai voile Sud-Est et 146,76 euros pour retenue sur permission de voirie n’étaient pas justifiées, faute d’avoir été mentionnées dans le procès-verbal de réception. Le tribunal a jugé dans ses conditions que la société Pigeon TP était créancière de la société la SCCV Chateaubriand 70 à hauteur de 5 250,36 euros. Ce point n’est pas contesté en appel.
Sur la retenue de 18 962,50 euros au titre de la prestation de terrassement dans le rocher au brise roche hydraulique (BRH)
Au soutien de son appel la société Pigeon TP fait valoir essentiellement que la nature forfaitaire du marché et la réception sans réserve ne permettent pas à la société la SCCV Chateaubriand 70 de procéder à la retenue de la somme de travaux non réalisés (BRH).
La société la SCCV Chateaubriand 70 réplique que la prestation de terrassement dans le rocher au BRH n’a pas été accomplie par la société Pigeon TP et que la non-réalisation de la prestation litigieuse constitue une moins-value de plus de 12% sur le prix du marché et constitue, de ce fait, un bouleversement de l’économie du contrat.
Le marché à forfait est le contrat par lequel l’entrepreneur s’engage, en contrepartie d’un prix précisément globalement et définitivement fixé d’avance à effectuer des travaux dont la nature et la consistance sont nettement définies.
Le prix étant fixé définitivement, le maître de l’ouvrage ne peut exiger une diminution du prix au motif que les quantités mises en oeuvre pour réaliser l’ouvrage auraient été moindres que celles initialement indiquées et, parallèlement, l’entrepreneur ne peut exiger un supplément de prix s’il est trompé sur l’importance des travaux nécessaires pour réaliser l’ouvrage.
Il est constant que dans l’hypothèse où les travaux finalement réalisés sont inférieurs à ceux qui étaient prévus au titre du plan arrêté et convenu, l’entrepreneur ne peut prétendre bénéficier du prix prévu.
Aux termes de sa dernière facture du 29 octobre 2019, la société Pigeon TP a sollicité de la SCCV Chateaubriand 70 le paiement de 18 962,50 euros HT au titre de plus value pour terrassement dans le rocher au BRH forte puissance, conformément à ce qui était prévu dans son devis du 11 décembre 2017.
Or, comme l’a justement relevé le tribunal, la société Pigeon TP ne conteste pas que cette prestation n’a pas été réalisée, de sorte que, nonobstant l’absence de réserves, la retenue pratiquée par le maître de l’ouvrage à hauteur de 18 962,50 euros est justifiée.
Par ailleurs, la non-réalisation de la prestation litigieuse par la société Pigeon TP représente une moins-value de plus de 12% sur le prix du marché et constitue, de ce fait, un bouleversement de l’économie du contrat. Dès lors, le prix forfaitairement convenu entre les parties doit être minoré.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la retenue au titre des pénalités de retard
Le tribunal a validé la retenue effectuée par la société la SCCV Chateaubriand 70 pour une somme de 7 888,59 euros à l’encontre de la société Pigeon TP au titre des pénalités de retard sur la réalisation de la voirie d’accès privé en bicouche.
L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Les dispositions de l’article 4.3. du CCAP indique qu’« il est entendu qu’il appartient toujours à l’Entreprise en retard de faire la preuve de sa non-responsabilité, chaque entreprise retardataire étant présumée responsable de son retard si elle n’apporte pas la preuve du contraire. Le délai global fixé par le Maître d’Ouvrage pour l’exécution des travaux a un caractère absolu et représente une condition essentielle du Marché. Il en est de même pour le planning d’exécution détaillé contractuel établi en début de chantier qui ne pourra déroger au délai global fixé ».
Et l’article 4.4.1 du CCAP prévoit l’application d’une pénalité de 1/500ème du montant du marché par jour de retard sur la livraison.
En l’occurrence, le marché de travaux convenu entre les parties, signé le 7 février 2018, prévoit une date contractuelle de fin de travaux au 19 avril 2019. Ce planning a été décalé au 14 juin 2019.
Si la société Pigeon TP ne conteste pas la réalité de ce retard, elle indique qu’il est dû à des circonstances qui ne lui en sont pas imputables. Il résulte toutefois, des pièces produites qu’elle n’en rapporte pas la preuve. Au contraire, il ressort du compte rendu n°67 du 1er juillet 2019 (page 6) que dans les observations « sur le planning Marche/Retard », il est indiqué dans la colonne « Responsabilité de l’entreprise » pour le terrassement et les travaux VRD, confiés à la société Pigeon TP, des retards qui lui sont imputables.
Dans ces conditions, la réception des travaux de la société Pigeon TP est intervenue le 19 novembre 2019.
Il sera rappelé, contrairement à ce que soutient la société Pigeon TP, que la réception de l’ouvrage même sans réserve ne vaut pas renoncement du maître de l’ouvrage à son droit de réclamer des indemnités de retard.
Les travaux auraient dû être achevés et la réception prononcée le 14 juin 2019, toutefois la
réception du lot de la société Pigeon TP a été repoussée au 19 novembre 2019 dès lors que ses travaux n’étaient pas terminés. Il en a résulté un retard de 158 jours sur le planning contractuel.
Le 11 février 2020, la SCCV Chateaubriand 70 a adressé à la société Pigeon TP un décompte général définitif faisant état des retenues suivantes :
– 18 962,50 euros au titre de travaux non réalisés,
– 7 888,59 euros au titre de pénalités de retard,
– 3 120 euros pour reprise trottoir,
– 1 983,60 euros pour retenue remblai,
– 146,76 euros pour retenue sur permission de voirie.
Comme l’a relevé le tribunal, il est constant que ce décompte général et définitif est de nature contractuelle.
Au cas présent, la société la SCCV Chateaubriand 70 a retenu une somme de 7 888,59 euros au titre de pénalités en raison du retard pris par la société Pigeon TP dans l’exécution de ses travaux. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a validé cette retenue effectuée par la société la SCCV Chateaubriand 70 pour cette somme de 7 888,59 euros.
Sur les sommes dues
Il résulte de ce qui précède que les retenues invoquées, dans les limites de l’appel, par la la SCCV Chateaubriand 70 sont justifiées.
Il n’est pas contesté :
– que le montant global du marché est de 177 783,60 euros TTC,
– que la SCCV Chateaubriand 70 a réglé à la société Pigeon TP la somme de 146 910,10 euros,
– que les retenues opérées par la SCCV Chateaubriand 70 et examinées ci-avant sont validées pour les sommes de 18 962,50 euros et 7 888,59 euros.
La SCCV Chateaubriand 70 doit donc au titre du solde du marché à la société Pigeon TP la somme de 4 022,41 euros. Elle sera condamnée à son paiement par voie d’ajout.
Concernant les intérêts, la société Pigeon TP réclame l’application de l’article L.441-6 du code de commerce dans sa version applicable au 15 juin 2017, qui dispose « Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal, ce taux est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l’année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l’année en question. Pour le second semestre de l’année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l’année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire ».
Or le contrat et la facture n°19101061 du 29 octobre 2019 ne stipulent aucune pénalité en cas de retard de paiement.
En conséquence, les intérêts au taux légal sont dus à compter de la dernière demande soit du 29 octobre 2019. Ils seront ajoutés au jugement.
Le jugement est confirmé en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts.
Sur la garantie de paiement
Par application de l’article 1799-1 du code civil, le maître de l’ouvrage qui conclut un marché de travaux privés visé au 3° de l’article 1779 (contrat de louage avec des architectes, entrepreneurs d’ouvrage ou techniciens par suite d’études, devis ou marchés) doit garantir à l’entrepreneur le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent le seuil de 12 000 euros.
Il est constant que cette garantie de paiement dont la forme dépend du mode de financement des travaux, peut être demandée par l’entrepreneur à tout moment, même en cours d’exécution des travaux tant que le marché n’est pas soldé. Elle porte sur le prix convenu au titre du marché initial ou sur un nouveau montant qui doit résulter d’un accord des parties, déduction faite des acomptes versés.
L’objet du présent litige porte sur le solde du paiement du marché forfaitaire régularisé par les parties.
Cependant, ce débat n’est pas de nature à justifier le rejet de la demande de garantie de paiement.
En l’occurrence, l’assiette de la garantie de paiement doit être fixée sur la base du marché initial de 177 783,60 euros TTC dont il convient de déduire les sommes réglées pour un montant total de 146 910,10 euros TTC et les retenues, précédemment validées par la Cour, de 18 962,50 euros au titre de travaux non réalisés, et de 7 888,59 euros au titre de pénalités de retard.
De ce fait, compte tenu du montant d’une créance restant due inférieure à 12 000 euros, c’est à juste titre que le tribunal a considéré qu’il n’y avait pas lieu de faire droit à la demande de garantie de paiement. Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
Le jugement sera confirmé dans ses dispositions ayant statué sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance.
La SCCV Chateaubriand 70 , partie perdante en appel, sera condamnée aux dépens d’appel. L’équité commande de ne pas faire application des dispositions au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La Cour,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Nantes du 27 septembre 2023;
Y ajoutant
Constate que le décompte général des travaux s’élève à la somme de 177 783,60 euros TTC,
Condamne la SCCV Chateaubriand 70 à payer à la SASU Pigeon TP Loire Anjou la somme de 4 022,41 euros TTC en paiement du solde des travaux avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2019 ;
Déboute les parties du surplus des demandes,
Condamne la SCCV Chateaubriand 70 aux dépens d’appel.
Le Greffier, Le Président,
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