Prolongation de la rétention administrative : validation des diligences administratives.

·

·

Prolongation de la rétention administrative : validation des diligences administratives.

L’article L 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile impose à l’administration de justifier avoir effectué toutes les diligences utiles pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger. En cas de contestation de la prolongation de la rétention administrative, le juge judiciaire ne peut se prononcer sur le titre administratif d’éloignement ni sur le choix du pays de destination, conformément à la jurisprudence établie. L’article 813-10 du même code précise que si l’étranger ne fournit pas d’éléments permettant d’apprécier son droit de circulation ou de séjour, des vérifications peuvent être effectuées après information du procureur de la République, et les données biométriques ne peuvent être mémorisées que si l’étranger ne dispose pas d’un droit de circulation ou de séjour à l’issue de la retenue.

L’Essentiel : L’article L 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers impose à l’administration de justifier avoir effectué toutes les diligences utiles pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger. En cas de contestation de la prolongation de la rétention administrative, le juge judiciaire ne peut se prononcer sur le titre administratif d’éloignement ni sur le choix du pays de destination. L’article 813-10 précise que des vérifications peuvent être effectuées si l’étranger ne fournit pas d’éléments permettant d’apprécier son droit de circulation ou de séjour.
Résumé de l’affaire :

Contexte de la rétention administrative

Un étranger, né le 15 mai 1996 au Maroc, a été placé en rétention administrative par le préfet du Nord le 18 décembre 2024 pour exécution d’une mesure d’éloignement vers son pays d’origine. Aucune contestation de cette décision n’a été formulée.

Prolongation de la rétention

Le tribunal judiciaire de Lille a ordonné le 21 décembre 2024 une prolongation de la rétention administrative pour 26 jours. L’étranger a fait appel de cette décision le 23 décembre 2024, demandant son annulation.

Arguments de l’appelant

L’appelant a soulevé deux moyens : l’irrégularité de la consultation des fichiers biométriques et l’insuffisance des diligences administratives pour organiser son éloignement.

Examen de l’irrégularité de la consultation des fichiers

Le tribunal a constaté que la consultation des fichiers FAED, EURODAC, VISABIO et SNBA avait été effectuée conformément à la loi, sans irrégularité, et que les droits de l’étranger n’avaient pas été atteints.

Insuffisance des diligences administratives

Concernant l’insuffisance des diligences, le tribunal a rappelé que le juge ne peut pas se prononcer sur le choix du pays de destination. Il a jugé que l’administration avait effectué toutes les démarches nécessaires pour réduire la période de rétention.

Décision finale

L’appel a été déclaré recevable, mais l’ordonnance de prolongation de la rétention a été confirmée. La décision a été notifiée aux parties concernées et les dépens ont été laissés à la charge de l’État.

Q/R juridiques soulevées :

Sur l’irrégularité de la consultation des fichiers FAED, EURODAC, VISABIO et SNBA

Selon l’article 813-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

« Si l’étranger ne fournit pas d’éléments permettant d’apprécier son droit de circulation ou de séjour, les opérations de vérification peuvent donner lieu, après information du procureur de la République, à la prise d’empreintes digitales ou de photographies pour établir la situation de cette personne.

Les empreintes digitales et photographies sont collectées en vue de l’établissement du droit de circuler ou de séjourner de l’étranger et ne peuvent être mémorisées et faire l’objet d’un traitement automatisé en application du 3° de l’article L. 142-1 que s’il apparaît, à l’issue de la retenue, que l’étranger ne dispose pas d’un droit de circulation ou de séjour. »

Il ressort du procès-verbal de consultation de fichiers biométriques en date du 17 décembre 2024 à 18h40, que le brigadier chef de police, dûment habilité, a indiqué « après information du procureur de la République compétent » avoir procédé à la prise d’empreintes digitales et de photographies pour la consultation des fichiers mis à disposition du Ministère de l’Intérieur.

Dès lors, la simple mention de l’information au procureur de la République suffit, aucune irrégularité n’est à relever.

Outre le fait que le résultat de la consultation du FAED et SNBA est négatif, aucune atteinte aux droits de l’étranger n’est démontrée et que la consultation du fichier Visabio ne requiert aucune prise d’empreintes.

Au surplus, ce fichier n’est alimenté que par le ministère des Affaires Étrangères.

Ainsi, aucune irrégularité relative au défaut d’information du procureur de la République ne se trouve en l’espèce caractérisée du fait de la consultation des fichiers susnommés.

Il convient dès lors de rejeter l’exception de nullité de la procédure.

Sur l’insuffisance de diligences pour organiser l’éloignement

Il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d’éloignement de l’étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.

Il ressort de l’article L 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’administration doit justifier avoir effectué toutes les « diligences utiles » suffisantes pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger.

Il résulte de la procédure que l’administration a effectué l’ensemble des diligences utiles et suffisantes en l’espèce, puisqu’elle a effectué une demande de routing à destination du Maroc le 18 décembre 2024 à 14h50, l’intéressé étant en possession d’un passeport en cours de validité.

Outre le fait qu’il n’appartient pas au juge judiciaire de statuer sur le choix du pays de destination opéré par l’administration, il ressort du procès-verbal du 17 décembre 2024 à 18h25 que, sur demande de la préfecture du Nord, les policiers ont interrogé le Centre de Coopération Policière et Douanière en Italie sur la situation de l’intéressé.

Ce dernier a été déclaré inconnu en Italie, sans antécédent judiciaire ni permis de séjour, mais possédant une adresse, sans qu’il soit mentionné qu’il dispose d’un droit au séjour.

La consultation de la borne Eurodac n’a pas fait apparaître qu’il était demandeur d’asile en Italie, malgré ses dires.

Le moyen est donc rejeté.

En l’attente d’une réponse à cette diligence, utile et suffisante en l’espèce, la prolongation du placement en rétention administrative de l’intéressé est justifiée au regard de l’article L742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Conformément au droit communautaire, aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d’être relevé d’office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.

Pour le surplus, la cour considère que c’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l’article 955 du code de procédure civile que le premier juge a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention en l’attente du vol sollicité.

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 24/02545 – N° Portalis DBVT-V-B7I-V55S

N° de Minute : 2516

Ordonnance du mardi 24 décembre 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [D] [U]

né le 15 Mai 1996 à [Localité 3] (MAROC)

de nationalité Marocaine

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]

dûment avisé, absent (refus de se présenter à l’audience – PV du 24/12/2024)

représenté par Me Valérie BIERNACKI, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d’office

INTIMÉ

M. LE PREFET DU NORD

dûment avisé, absent non représenté

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d’appel de Douai : non comparant

MAGISTRATE DELEGUEE : Danielle THEBAUD, conseillère à la cour d’appel de Douai désignée par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assistée de Valérie MATYSEK, adjointe administrative faisant fonction de greffière

DÉBATS : à l’audience publique du mardi 24 décembre 2024 à 13 h 30

Les parties comparantes ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le mardi 24 décembre 2024 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialement les articles R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l’ordonnance du juge du tribunal judiciaire de LILLE en date du 21 décembre 2024 rendue à 15h32 à l’encontre de M. [D] [U] prolongeant sa rétention administrative ;

Vu l’appel interjeté par Maître Olivier CARDON venant au soutien des intérêts de M. [D] [U] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 23 décembre 2024 à 13h12 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;

Vu l’audition des parties, les moyens de la déclaration d’appel et les débats de l’audience ;

EXPOSE DU LITIGE

M. [D] [U], né le 15 Mai 1996 à [Localité 3] (MAROC), de nationalité Marocaine a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par M. le préfet du Nord le 18 décembre 2024 à 14h20 pour l’exécution d’un éloignement vers pays de nationalité au titre d’une mesure d’obligation de quitter le territoire français délivrée le même jour par la même autorité.

Aucun recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative n’a été déposé au visa de l’article L 741-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

‘ Vu l’article 455 du code de procédure civile,

‘ Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Lille en date du 21 décembre 2024 à 15h32, ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l’intéressé pour une durée de 26 jours,

‘ Vu la déclaration d’appel de M. [D] [U] du 23 décembre 2024 à 13h12 sollicitant l’infirmation de l’ordonnance dont appel, et le rejet de la prolongation de la mesure de rétention.

Au soutien de sa déclaration d’appel l’appelant reprend les moyens développés devant le premier juge :

– irrégularité de la consultation des fichiers en ce que la parquet n’a pas été avisé de la consultation des fichiers FAED, EURODAC, VISABIO et SNBA,

– insuffisance des diligences de l’administration, en ce qu’elle a saisie les autorités marocaines d’un laissez-passer consulaire sans avoir formalisé de demande de réadmission vers l’Italie.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le moyen tiré de l’irrégularité de la consultation des fichiers FAED, EURODAC, VISABIO et SNBA

Selon l’article 813-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

« Si l’étranger ne fournit pas d’éléments permettant d’apprécier son droit de circulation ou de séjour, les opérations de vérification peuvent donner lieu, après information du procureur de la République, à la prise d’empreintes digitales ou de photographies pour établir la situation de cette personne. Les empreintes digitales et photographies sont collectées en vue de l’établissement du droit de circuler ou de séjourner de l’étranger et ne peuvent être mémorisées et faire l’objet d’un traitement automatisé en application du 3° de l’article L. 142-1 que s’il apparaît, à l’issue de la retenue, que l’étranger ne dispose pas d’un droit de circulation ou de séjour. »

Il ressort du procès-verbal de consultation de fichiers biométriques en date du 17 décembre 2024 à 18h40, qui fait foi jusqu’à preuve contraire, que le brigadier chef de police [C] [T], dûment habilité, a indiqué « après information du procureur de la république compétent » avons fait procéder à la prise d’empreintes digitales et de photographies pour la consultation des fichiers mis à disposition du Ministère de l’Intérieur. Dès lors, la simple mention de l’information au procureur de la République suffit, aucune irrégularité n’est à relever, outre le fait que le résultat de la consultation du FAED, et SNBA est négatif, aucune atteinte aux droits de l’étranger n’est démontrée et que la consultation du fichier Visabio ne requiert aucune prise d’empreintes. Au surplus ce fichier n’est alimenté que par le ministère des Affaires Étrangères.

Ainsi, aucune irrégularité relative au défaut d’information du procureur de la République ne se trouve en l’espèce caractérisée du fait de la consultation des fichiers susnommés.

Il convient dès lors de rejeter l’exception de nullité de la procédure.

Sur le moyen tiré de l’insuffisance de diligences pour organiser l’éloignement

Il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d’éloignement de l’étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.

Il ressort de l’article L 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’administration doit justifier avoir effectué toutes les ‘diligences utiles’ suffisantes pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger.

Il résulte de la procédure que l’administration a effectué l’ensemble des diligences utiles et suffisantes en l’espèce, puisqu’elle a effectué, une demande de routing à destination du Marcoc le 18 décembre 2024 à 14h50, l’interessé était en possession d’un passeport en cours de validité.

Outre, le fait qu’il n’appartient pas au juge judiciaire de statuer sur le choix du pays de destination opéré par l’administration, il ressort du procès-verbal du 17 décembre 2024 à 18h25, que sur demande de la préfecture du Nord, les policiers ont interrogé le Centre de Coopération Policière et Douanière de [Localité 2] en Italie, sur la situation de l’intéressé en Italie, qui leur a indiqué qu’il était inconnu en Italie, « pas d’antécédent judiciaire, ni permis de séjour », mais qu’il y possédait une adresse, sans qu’il soit mentionné qu’il y dispose d’un droit au séjour, et que la consultation de la borne Eurodac n’a pas fait apparaître qu’il était demandeur d’asile en Italie, malgré ses dires.

Le moyen est rejeté.

En l’attente d’une réponse à cette diligence, utile et suffisante en l’espèce, la prolongation du placement en rétention administrative de l’intéressé est justifiée au regard de l’article L742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Conformément au droit communautaire, aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d’être relevé d’office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.

Pour le surplus, la cour considère que c’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l’article 955 du code de procédure civile, que le premier juge et a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention en l’attente du vol sollicité.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS l’appel recevable ;

CONFIRMONS l’ordonnance entreprise.

DISONS que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l’appelant, à son conseil et à l’autorité administrative ;

LAISSONS les dépens à la charge de l’Etat.

Valérie MATYSEK,

adjointe administrative faisant fonction de greffière

Danielle THEBAUD, conseillère

N° RG 24/02545 – N° Portalis DBVT-V-B7I-V55S

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE 2516 DU 24 Décembre 2024 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Pour information :

L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le mardi 24 décembre 2024 :

– M. [D] [U]

– l’interprète

– l’avocat de M. [D] [U]

– l’avocat de M. LE PREFET DU NORD

– décision notifiée à M. [D] [U] le mardi 24 décembre 2024

– décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître Valérie BIERNACKI le mardi 24 décembre 2024

– décision communiquée au tribunal administratif de Lille

– décision communiquée à M. le procureur général :

– copie au juge du tribunal judiciaire de LILLE

Le greffier, le mardi 24 décembre 2024

N° RG 24/02545 – N° Portalis DBVT-V-B7I-V55S


Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?

Merci pour votre retour ! Partagez votre point de vue, une info ou une ressource utile.

Chat Icon