Licenciement : Justifications et Insuffisance Professionnelle

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Licenciement : Justifications et Insuffisance Professionnelle

Licenciement pour cause réelle et sérieuse

L’article L. 1232-1 du Code du travail stipule que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Cette exigence implique que l’employeur doit démontrer que les motifs invoqués pour le licenciement sont fondés sur des faits objectifs et vérifiables.

Notification du licenciement

Conformément à l’article L. 1232-6 du même code, l’employeur est tenu de notifier le licenciement par lettre recommandée avec avis de réception, en précisant les motifs de la décision. Cette formalité est essentielle pour garantir le droit du salarié à une information claire sur les raisons de son licenciement.

Appréciation des motifs de licenciement

L’article L. 1235-1 du Code du travail confère au juge le pouvoir d’apprécier la régularité de la procédure de licenciement ainsi que le caractère réel et sérieux des motifs invoqués. En cas de doute, celui-ci doit profiter au salarié, ce qui souligne l’importance de la charge de la preuve qui incombe à l’employeur.

Précision des motifs de licenciement

L’article L. 1235-2 précise que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent être précisés par l’employeur, mais ne peuvent être modifiés. La lettre de licenciement fixe les limites du litige concernant les motifs de licenciement, et l’absence de demande de précisions de la part du salarié ne prive pas le licenciement de sa cause réelle et sérieuse.

Insuffisance professionnelle

Pour qu’une insuffisance professionnelle soit considérée comme une cause réelle et sérieuse de licenciement, elle doit être établie par des éléments précis et objectifs, ayant des répercussions sur le fonctionnement de l’entreprise. L’insuffisance professionnelle ne doit pas être confondue avec une faute disciplinaire, qui implique une intention délibérée.

Charge de la preuve

La charge de la preuve de l’insuffisance professionnelle est partagée, mais le risque de la preuve incombe à l’employeur. Le juge doit examiner l’ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, qui circonscrit le champ du litige et lie les parties.

Comportement inapproprié et impact sur l’entreprise

Le comportement inapproprié d’un salarié, tel qu’un comportement agressif ou dénigrant envers des partenaires ou collègues, peut constituer une insuffisance professionnelle. Les attestations et éléments de preuve doivent corroborer les allégations de l’employeur pour établir que ce comportement nuit au bon fonctionnement de l’entreprise.

Conséquences de l’absence de mise en garde

L’absence de mise en garde préalable de la part de l’employeur ne peut pas être invoquée par le salarié pour contester un licenciement pour insuffisance professionnelle, si les faits reprochés sont suffisamment établis et documentés.

L’Essentiel : L’article L. 1232-1 du Code du travail stipule que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. L’employeur doit démontrer que les motifs invoqués sont fondés sur des faits objectifs. La notification du licenciement doit se faire par lettre recommandée, précisant les motifs. L’article L. 1235-1 confère au juge le pouvoir d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel des motifs. L’insuffisance professionnelle doit être établie par des éléments précis.
Résumé de l’affaire : Dans cette affaire, une salariée, occupant le poste de responsable comptable et financier au sein de la société à responsabilité limitée (SARL) L’Atelier du Laser, a été licenciée pour cause réelle et sérieuse. Le licenciement a été notifié par courrier recommandé le 3 janvier 2022, après un entretien préalable tenu le 23 décembre 2021. La salariée a contesté ce licenciement en saisissant le conseil de prud’hommes de Valence le 13 avril 2022, demandant la requalification de son licenciement et des indemnités.

Le jugement rendu le 22 novembre 2022 a confirmé la validité du licenciement, déboutant la salariée de toutes ses demandes et la condamnant aux dépens. La décision a été notifiée aux parties, et la salariée a interjeté appel. Dans ses conclusions, elle a demandé à la cour d’appel de réformer le jugement en déclarant son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de condamner la SARL à lui verser des dommages et intérêts.

De son côté, la SARL L’Atelier du Laser a demandé la confirmation du jugement de première instance, arguant que le licenciement était justifié par des insuffisances professionnelles, notamment des comportements inappropriés vis-à-vis des fournisseurs et du cabinet comptable. La cour d’appel a examiné les éléments de preuve fournis par les deux parties, notamment des attestations de salariés et des échanges de courriels.

Finalement, la cour a confirmé le jugement de première instance, considérant que les comportements de la salariée avaient nui au bon fonctionnement de l’entreprise, et a rejeté sa demande de requalification de licenciement. La salariée a été condamnée aux dépens d’appel, sans application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique du licenciement pour cause réelle et sérieuse ?

Le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, conformément à l’article L. 1232-1 du Code du travail. Cet article stipule que :

« Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. »

Cela signifie que l’employeur doit apporter des éléments concrets et objectifs pour justifier la décision de licenciement.

En outre, l’article L. 1232-6 précise que la notification du licenciement doit être faite par lettre recommandée avec avis de réception, énonçant les motifs invoqués par l’employeur.

Ainsi, la lettre de licenciement doit comporter des motifs suffisamment clairs pour permettre au salarié de comprendre les raisons de son licenciement.

Quel est le rôle du juge dans l’appréciation des motifs de licenciement ?

Le juge a pour mission d’apprécier la régularité de la procédure de licenciement ainsi que le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, comme le stipule l’article L. 1235-1 du Code du travail. Cet article indique que :

« Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. »

Il est également précisé que si un doute subsiste, il profite au salarié. Cela signifie que le juge doit examiner attentivement les éléments de preuve présentés par les deux parties et trancher en faveur du salarié en cas d’incertitude.

Quel est le contenu requis dans la lettre de licenciement ?

La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, conformément à l’article L. 1235-2 du Code du travail. Cet article précise que :

« Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur. »

Cela signifie que l’employeur ne peut pas modifier les motifs, mais peut les préciser. La lettre de licenciement fixe les limites du litige concernant les motifs de licenciement.

En cas d’insuffisance de motivation, si le salarié n’a pas demandé de précisions, cela ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse, mais ouvre droit à une indemnité limitée à un mois de salaire.

Quel est le critère d’appréciation de l’insuffisance professionnelle ?

Pour qu’une insuffisance professionnelle soit considérée comme une cause réelle et sérieuse de licenciement, elle doit être établie par des éléments précis et objectifs, comme le stipule la jurisprudence.

L’insuffisance professionnelle doit avoir des répercussions sur le fonctionnement de l’entreprise et ne doit pas être confondue avec une faute disciplinaire.

La charge de la preuve est partagée, mais le risque de la preuve incombe à l’employeur, ce qui signifie que c’est à lui de démontrer que l’insuffisance professionnelle est avérée.

Quel impact a la preuve des comportements inappropriés sur le licenciement ?

Les comportements inappropriés, tels que des attitudes désagréables ou agressives, peuvent justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle si ces comportements nuisent au bon fonctionnement de l’entreprise.

Dans le cas présent, l’employeur a produit des attestations et des courriels qui démontrent que la salariée adoptait un comportement inadapté vis-à-vis du cabinet comptable et du service des paies.

Ces éléments, corroborés par des témoignages, permettent de conclure que l’insuffisance professionnelle de la salariée a eu un impact négatif sur l’entreprise, justifiant ainsi le licenciement.

Quel est le régime des dépens et des frais irrépétibles dans cette affaire ?

La décision de première instance concernant les dépens et les frais irrépétibles a été confirmée, ce qui signifie que la partie perdante, en l’occurrence la salariée, est condamnée à payer les dépens d’appel.

L’article 700 du Code de procédure civile stipule que :

« La partie qui perd peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. »

Cependant, dans cette affaire, il a été décidé de ne pas faire application de ces dispositions, ce qui signifie que la salariée ne recevra pas d’indemnité pour ses frais d’avocat.

C1

N° RG 22/04284

N° Portalis DBVM-V-B7G-LTH4

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SARL CABINET ISABELLE ROUX

Me Guillaume ALLIX

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 25 MARS 2025

Appel d’une décision (N° RG 22/00102)

rendue par le conseil de prud’hommes – formation paritaire de Valence

en date du 22 novembre 2022

suivant déclaration d’appel du 01 décembre 2022

APPELANTE :

Madame [D] [L]

née le 31 Mars 1965 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Isabelle ROUX de la SARL CABINET ISABELLE ROUX, avocat au barreau de Valence

INTIMEE :

S.A.S. L’ATELIER DU LASER prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Guillaume ALLIX, avocat au barreau de Valence

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, conseillère faisant fonction de présidente,

Mme Gwenaelle TERRIEUX, conseillère,

M. Frédéric BLANC, conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 06 janvier 2025,

Mme Gwenaelle TERRIEUX, conseillère en charge du rapport et Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, conseillère faisant fonction de présidente, ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistées de Mme Fanny MICHON, greffière, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées.

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 25 mars 2025, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 25 mars 2025.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [L] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 26 août 2019 par la société à responsabilité limitée (SARL) L’Atelier du Laser, en qualité de responsable comptable et financier, statut agent de maitrise, niveau V, échelon 1, coefficient 305.

La convention collective de la métallurgie Drôme et Ardèche est applicable.

Par courrier en date du 16 décembre 2021, la SARL L’Atelier du Laser a convoqué Mme [L] à un entretien préalable, fixé au 23 décembre 2021.

Par courrier recommandé en date du 3 janvier 2022, la SARL L’Atelier du laser a notifié à Mme [L] son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

C’est dans ces conditions que Mme [L] a saisi le conseil de prud’hommes de Valence par requête en date du 13 avril 2022, aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.

Par jugement du 22 novembre 2022, le conseil de prud’hommes de Valence a :

– dit que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [L] était fondé,

– débouté Mme [L] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté la SARL L’Atelier du Laser de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [L] aux dépens de l’instance.

La décision a été notifiée aux parties par courriers recommandés distribués le 28 novembre 2022 à Mme [L] et à la SARL L’Atelier du Laser.

Mme [L] en a interjeté appel.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2024, Mme [L] demande à la cour d’appel de :

 » Déclarer recevable et fondée Mme [L] en son appel de la décision rendue le 22 novembre 2022 par le conseil de prud’hommes de Valence,

Y faisant droit,

Réformer le jugement sus énoncé et daté en ce qu’il a dit et jugé que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [L] était fondé et l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes.

Et statuant à nouveau,

– qualifier le licenciement pour cause réelle et sérieuse en rupture dépourvue de cause réelle et sérieuse.

– condamner la SARL L’Atelier du Laser à payer :

* dommages et intérêts pour perte d’emploi : 8 648 euros nets de CSG et CRDS

– condamner la SARL L’Atelier du Laser à payer une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

– Vu les dispositions de l’article R.1454-28 du Code du travail, fixer la moyenne des 3 derniers mois de salaire à la somme de 2 471 euros.  »

Par conclusions notifiées par voie électronique le 24 mai 2023, la SARL L’Atelier du Laser demande à la cour d’appel de :

 » Confirmer le jugement rendu le 22 novembre 2022 par le Conseil de Prud’hommes de Valence en ce qu’il a :

– dit que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [L] est fondé,

– débouté Mme [L] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné Mme [L] aux dépens de l’instance,

Condamner Mme [L] à payer la somme de 2 000 € à la société Atelier du Laser au titre de l’article 700 du CPC.  »

La clôture de l’instruction a été prononcée le 03 décembre 2024.

L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 06 janvier 2025, a été mise en délibéré au 25 mars 2025.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI

Sur la contestation du licenciement

Premièrement, l’article L. 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Selon l’article L 1232-6 du même code, lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.

Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

L’article L. 1235-1 du même code prévoit que le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Selon l’article L 1235-2 du même code, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L. 1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d’Etat.

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.

A défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en application de l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.

Ainsi, en application de ces dispositions, l’employeur ne peut pas modifier ou compléter les motifs indiqués dans la lettre de licenciement, mais seulement les préciser dans les conditions prévues par l’article L. 1235-2.

Deuxièmement, la lettre de licenciement devra, pour être suffisamment motivée, énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, cette exigence étant satisfaite lorsque la lettre de licenciement mentionne l’insuffisance professionnelle.

Pour constituer une cause réelle et sérieuse de rupture, l’insuffisance professionnelle doit être établie par des éléments précis, objectifs, ayant des répercussions sur la marche ou le fonctionnement de l’entreprise, constitués non par une violation des obligations résultant du contrat de travail mais par une mauvaise exécution par le salarié de ses obligations caractérisée, notamment, par des erreurs, des omissions ou par un volume de travail insuffisant.

L’insuffisance professionnelle est exclusive de toute faute disciplinaire supposant une intention délibérée.

En la matière, la charge de la preuve est partagée, mais le risque de la preuve incombe à l’employeur, le doute profitant au salarié.

Si le juge n’est pas tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s’expliquer sur les pièces qu’il entend écarter, il lui appartient néanmoins d’examiner l’ensemble des griefs invoqués dans la lettre de rupture, laquelle circonscrit le champ du litige et le lie.

Il ressort de la lettre de licenciement en date du 03 janvier 2022 que l’employeur reproche à Mme [L] une insuffisance professionnelle liée à :

– un comportement et un positionnement inappropriés vis-à-vis du cabinet comptable prestataire, notamment le 02 décembre 2021,

– un comportement et un positionnement inadapté vis-à-vis des salariés de l’entreprise,

– le non-respect de l’obligation de confidentialité, notamment en matière de rémunération d’une autre salariée,

– une attitude désagréable et des difficultés relationnelles avec les fournisseurs.

D’abord, la lecture de la lettre de licenciement établit que les reproches formulés à l’encontre de Mme [L] relèvent, selon les termes de l’employeur, de  » lacunes relationnelles « , sans que le licenciement prononcé ne s’analyse en un licenciement de nature disciplinaire.

Dès lors, la prescription de deux mois prévue par l’article L 1332-4 du code du travail, évoquée par la salariée dans ses écritures, sans qu’elle n’en tire pour autant aucune conséquence, ne s’applique pas aux faits opposés au titre d’une insuffisance professionnelle.

Ensuite, Mme [L] invoque l’imprécision de la lettre de licenciement, sans pour autant avoir demandé de précisions sur les motifs de son licenciement, et alors que l’employeur ne l’a pas fait spontanément.

En outre, le motif est suffisamment précis dès lors que la lettre de licenciement vise l’insuffisance professionnelle.

Il ressort des pièces produites que Mme [L] occupait un emploi de responsable comptable et financière, ses fonctions étant définies par l’article 5 de son contrat de travail comme suit, sans que la liste soit limitative :

– faire, étudier, signaler, solutionner et proposer,

– gérer la facturation : préparation, saisie, envoi, suivi, recouvrement,

– gérer le suivi des encours clients et fournisseurs, et l’accroissement des charges,

– gérer la trésorerie,

– être en charge de la comptabilité clients et fournisseurs, en lien avec l’expert-comptable,

– mettre en place, suivre et analyser les tableaux de bord de gestion : ressources humaines, comptabilité et gestion financière,

– être en charge de la gestion administrative du personnel : préparation de la paie, tenir à jour les dossiers individuels administratifs pour chaque salarié,

– gérer les achats divers : assurances, gaz, électricité, télécom,

– prise en charge des aspects juridiques de la société avec notre prestataire extérieur.

D’une première part, sur le grief relatif aux relations de Mme [L] avec les fournisseurs, l’employeur se contente d’affirmer dans la lettre de licenciement et dans ses écritures que la salariée adoptait une attitude désagréable, et que les fournisseurs lui faisaient part de difficultés, sans expliciter ni l’attitude reprochée, ni les difficultés alléguées, ni les fournisseurs concernés, et sans arguer ni justifier d’aucun élément susceptible de caractériser une insuffisance professionnelle à leur égard.

Ce fait n’est pas retenu.

D’une deuxième part, sur l’insuffisance professionnelle de la salariée au titre de son obligation de confidentialité, l’employeur rappelle qu’en application de l’article 13 de son contrat de travail, la salariée est soumise à une obligation de confidentialité portant sur l’organisation, les méthodes, la clientèle, le personnel, les produits, les partenaires et les projets de la société et du groupe, et en général, sur tout renseignement à caractère commercial, financier, juridique ou technique concernant la société et le groupe.

Et dans la lettre de licenciement, l’employeur reproche à Mme [L] d’avoir  » manqué de discernement en divulguant à un salarié des informations personnelles (primes et acomptes) en présence de ses collègues de travail « .

Mais l’employeur n’objective pas la réalité de ce fait. En effet, il produit uniquement :

– une attestation de M. [G], responsable commerce et achats, indiquant notamment que  » [D] a divulgué le salaire de ma conjointe ([C] [I] également employé de l’Atelier du Laser) devant tous nos collègues se servant de moi comme messager pour un problème rencontré avec elle « ,

– une attestation de M. [K], directeur général, indiquant qu’alors que Mme [I] venait d’être arrêtée pour son congé maternité le 08 novembre 2021, Mme [L] a interpelé M. [G] devant lui et trois autres salariés, en évoquant les problèmes personnels de Mme [I] et en divulguant son salaire, de sorte que  » tout le monde s’est senti mal à l’aise « .

Ainsi, la cour relève d’une part que M. [G] est un salarié soumis à un lien de subordination, mais aussi le conjoint de la personne visée, avec laquelle il indique que Mme [L] avait un problème, de sorte que son attestation doit être appréciée avec prudence, et d’autre part, que M. [K] est directeur général de l’entreprise, et le signataire du courrier de licenciement.

Dès lors, ces deux seules attestations, qui ne sont corroborées par aucun autre élément, et notamment aucune attestation des autres salariés présents, ne suffit pas à déterminer que Mme [L] a manqué de respecter son obligation de confidentialité.

Ce fait n’est pas retenu.

D’une troisième part, sur le comportement inadapté adopté vis-à-vis des autres salariés de l’entreprise, la lettre de licenciement mentionne le fait que la salariée adopte un positionnement et une autorité qui ne sont pas ceux de sa fonction, prenant pour exemple le fait que Mme [L]  » n’hésitez pas à interpeler vos collègues de travail en leur rappelant par exemple que vous êtes au-dessus d’eux donc que vous pouvez décider de leur payer ou non leur salaire à la fin du mois « .

Mais pour objectiver ce fait, contesté par la salariée, l’employeur produit :

– une attestation de M. [G] affirmant que  » elle tenait aussi des propos (qui ne nous faisaient pas rire) du type : je peux décider de te payer ou pas à la fin du mois « ,

– une attestation de Mme [I] indiquant que Mme [L] avait annoncé sa grossesse à la hiérarchie, alors qu’elle ne voulait pas encore l’annoncer.

Or, la cour constate que :

– seul M. [G], salarié de l’entreprise soumis à un lien de subordination, évoque le fait mentionné dans le courrier de licenciement, sans qu’aucun autre élément ni attestation ne vienne corroborer la réalité de ce fait, ni les circonstances de sa commission,

– le fait évoqué par Mme [I] n’est pas visé par l’employeur dans le courrier de licenciement, outre qu’il ne relève pas d’un positionnement déplacé de la salariée eu égard à ses fonctions, et qu’il n’est en tout état de cause étayé par aucun autre élément objectif.

Dès lors, l’employeur ne saurait reprocher à Mme [L] un positionnement inadapté vis-à-vis de ses collègues de travail, au titre d’une insuffisance professionnelle.

Ce fait n’est pas retenu.

En revanche, d’une quatrième part, l’employeur objective le fait que Mme [L] adoptait un comportement inapproprié et agressif vis-à-vis du cabinet comptable prestataire, ainsi que du service des paies, ce qui a nui au bon fonctionnement de l’entreprise.

D’abord, le courrier de licenciement vise des échanges de courriel intervenus le 01 décembre 2021, lesquels sont produits aux débats, et aux termes desquels Mme [L] questionne le cabinet comptable sur l’origine d’une écriture de  » régularisation  » effectuée à la demande du dirigeant de la société.

Si le contenu des courriels de Mme [L] ne met pas en évidence un ton agressif, il en ressort cependant son insistance, puisqu’en dépit de la réponse précise du cabinet comptable, lui indiquant qu’elle n’avait pas à connaître le motif de cette écriture, et qu’  » un coup de téléphone cordial est préférable à des emails cela permet de mieux comprendre les tenants et les aboutissants sans animosité « , Mme [L] sollicitait pourtant à nouveau des justifications par écrit.

Surtout, l’employeur objective que ce comportement s’inscrivait dans un contexte de tension avec le cabinet comptable, lequel est établi par deux attestations provenant de salariés de ce cabinet :

– M. [R], expert-comptable, indique ainsi que  » Au cours des relations de travail existantes entre la Société Atelier du laser et notre cabinet d’expertise comptable, Mme [D] [L] se comportait habituellement de manière désagréable avec nos équipes et moi-même.

Elle remettait, par exemple, fréquemment en cause, de façon antipathique notre travail, entre autres, sur des sujets ne la concernant pas. (‘)

Cela a généré une ambiance délétère qui a eu des conséquences néfastes sur notre collaboration avec la Société Atelier du Laser  » ,

– M. [M], assistant comptable, indique lui aussi que  » ma relation avec Mme [L] était très compliquée tout au long de cette période. En effet, la communication avec Mme [L] était très difficile, lors de nos échanges téléphoniques, Mme [L] n’hésitait pas à lever la voix et s’énerver avant même de comprendre la situation ou la source d’erreur. Cette relation rendait la réalisation de notre mission plus compliquée à réaliser surtout lors de la demande des documents qui sont nécessaires à l’établissement du bilan de la société car Mme [L] avait tendance à dépasser les limites des tâches qui lui sont accordées « .

Et l’employeur produit des courriels écrits par la salariée elle-même à d’autres salariés de l’entreprise, lesquels corroborent l’animosité de la salariée à l’égard de ce cabinet comptable, qu’elle dénigre dans les termes suivants :

– courriel adressé à M. [K] et Mme [N], salariée de la société l’Atelier du Laser, le 09 décembre 2021 :  » Je sais que ce cabinet comptable ne veut plus travailler avec moi, je comprends mieux pourquoi ». C’est toujours désagréable pour ces  » sachants  » de se faire  » rétorquer  » par une comptable de base ! « ,

– et en réponse à Mme [N], qui lui indiquait que si le cabinet comptable n’était pas au niveau  » je pense que leur difficulté à travailler avec toi est plus sur la forme que sur le fond « , Mme [L] lui répondait encore :  » C’est vrai que depuis cet été, avec le contrôle fiscal ou ils n’ont pas assuré un caramel, le bilan qu’ils ont fait trainer, plus ton coaching et la nouvelle organisation comptable et financière, j’ai un peu bousculé junior (référence à Monsieur [M]) qui est  » un peu mou du genou  » à mon goût. Quant à senior (référence à Monsieur [R]), je n’ai aucun rapport avec lui.

Mais comme dans la vraie vie, il est plus facile de trouver un coupable, c’est plus facile, (sur le papier) de me mettre sur la touche « .

Et le comportement de la salariée est aussi attesté par Mme [H], manager paie, laquelle indique que  » Son attitude dans la relation de travail était souvent pressante : délai pour avoir un retour sur les paies, modifications urgentes après traitement des paies, régularisations à calculer pour parfois quelques euros. (‘)

Cette attitude entrainait de l’appréhension en amont même du traitement des demandes et rendait notre collaboration moins performante. J’avais beau traiter le dossier avec beaucoup d’attention, il y avait toujours un point à soulever ou une explication à donner afin qu’elle maîtrise tout « .

En outre Mme [L] ne peut soutenir que ces attestations ne formulent pas de faits précis, alors que les courriels produits permettent de préciser les circonstances dans lesquelles elle a adopté un comportement inapproprié à l’égard du service comptable au début du mois de décembre 2021, dans un contexte de tension déjà existant de par son comportement, tel que rappelé dans les attestations produites.

Enfin, Mme [L] affirme qu’elle travaillait depuis 4 ans pour la SARL l’Atelier du Laser sans avoir fait l’objet d’une mise en garde, alors qu’elle ne justifie pas de l’ancienneté alléguée, le seul contrat de travail produit aux débats étant daté du 26 août 2019, et que ses courriels précités révèlent qu’elle avait bien été alertée sur les difficultés avec le cabinet comptable.

Dès lors, il résulte de l’ensemble de ces éléments que Mme [L] adoptait une posture inadaptée voire dénigrante ou agressive vis-à-vis du cabinet comptable prestataire, ou du service des paies de l’entreprise, tous deux exprimant le fait que cette attitude impactait leurs conditions de travail, de sorte qu’il est établi que cette insuffisance professionnelle nuisait au bon fonctionnement de l’entreprise.

Par suite, la demande de Mme [L] de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera donc rejetée, et ce par confirmation du jugement entrepris, de même que sa demande indemnitaire.

Sur les demandes accessoires

Il convient de confirmer la décision de première instance s’agissant des dépens et des frais irrépétibles.

Mme [L], partie perdante, est condamnée aux dépens d’appel.

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :

– dit que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [L] était fondé,

– débouté Mme [L] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté la SARL L’Atelier du Laser de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [L] aux dépens de l’instance ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [D] [L] aux dépens d’appel ;

DIT n’y avoir à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Mme Hélène Blondeau-Patissier, conseillère faisant fonction de présidente, et par Mme Fanny Michon, greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière, La conseillère faisant fonction de présidente,


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