Diffamation sur Twitter ?

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Diffamation sur Twitter ?

L’Essentiel : Une élue EELV a poursuivi un auteur de Tweet pour diffamation, l’accusant de ne pas avoir remboursé un prêt. Selon l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, la diffamation implique une allégation portant atteinte à l’honneur d’une personne. Cependant, les propos tenus dans le Tweet ont été jugés non diffamatoires, car ils exprimaient un différend financier et utilisaient le terme « escroquée » de manière vague. L’analyse a révélé que les propos ne constituaient pas une imputation d’un fait précis, mais plutôt une opinion sur le comportement de l’élue, sans caractère diffamatoire.

Suite à la mise en ligne d’un Tweet considéré comme diffamatoire, une élue EELV en a poursuivi l’auteur pour  diffamation. L’élue en cause se présentait à la fois comme écrivaine, engagée politiquement, ayant été élue sous l’étiquette « Europe Ecologie Les Verts » au conseil municipal du 17 ème arrondissement de la ville de Paris, et investie dans diverses associations caritatives ainsi que dans la lutte contre le tabagisme. Elle indiquait  par ailleurs, être toujours restée très discrète sur sa vie privée, s’exposant rarement dans les journaux et sur la scène publique en dehors de ses apparitions professionnelles et de ses prises de position politiques.

Absence de diffamation

L’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ; il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure – caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait – et, d’ autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée.

L’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises.

La diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent.

Dette non réglée et diffamation

En l’occurrence, l’auteur du Tweet expliquait que l’élue EELV lui avait emprunté de l’argent et ne l’a jamais remboursé, l’expression employée par celle-ci « je ne suis pas la seule qu’elle a escroquée » ne faisant que traduire, sous une forme imagée et raccourcie, propre au réseau social Twitter, l’existence d’un différend financier.

Les propos poursuivis ont été analysés en prenant en compte le contexte dans lequel ils s’inséraient : l’auteur ne reprochait pas à l’élue de l’avoir « escroquée » au sens pénal de ce terme, mais de ne pas lui avoir remboursé un prêt; l’emploi du terme « escroquée » dans le tweet reproduit à deux reprises n’est pas de nature à établir en lui seul le caractère diffamatoire des propos, l’auteur utilisant à l’évidence cette expression dans un sens vague et générique et pour exprimer son opinion sur le comportement de l’élue. Il résulte de l’ensemble de ces considérations que les propos poursuivis ne présentent pas un caractère diffamatoire.

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce que la diffamation selon la loi française ?

La diffamation, selon l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, est définie comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne ou d’un corps.

Pour qu’il y ait diffamation, il doit s’agir d’un fait précis, qui peut être prouvé ou contesté. Cela signifie que la personne accusée doit avoir la possibilité de défendre son honneur en prouvant la véracité de l’allégation.

Il est important de noter que la diffamation se distingue de l’injure, qui est une expression outrageante sans imputation de fait, et de l’expression d’opinion, qui ne peut pas être prouvée comme vraie ou fausse.

Ainsi, la diffamation nécessite un cadre factuel précis, tandis que les opinions et les jugements de valeur relèvent d’un débat d’idées.

Quels critères sont utilisés pour apprécier la diffamation ?

L’appréciation de la diffamation ne se fait pas selon les perceptions subjectives de la personne visée, mais sur des critères objectifs.

Cela implique d’examiner la réprobation générale que l’allégation pourrait susciter dans la société. Les propos diffamatoires doivent être évalués en fonction de leur impact sur l’honneur et la considération de la personne, en tenant compte des normes morales communément admises.

De plus, il est essentiel d’analyser le contexte dans lequel les propos ont été tenus. Cela inclut à la fois le contenu des déclarations et le cadre dans lequel elles s’inscrivent, ce qui peut influencer leur interprétation.

Ainsi, la diffamation est une question complexe qui nécessite une évaluation minutieuse des circonstances entourant les propos incriminés.

Comment le cas de l’élue EELV illustre-t-il la question de la diffamation ?

Dans le cas de l’élue EELV, l’auteur du Tweet a affirmé qu’elle lui avait emprunté de l’argent sans jamais le rembourser.

L’expression « je ne suis pas la seule qu’elle a escroquée » a été interprétée comme une allusion à un différend financier, plutôt qu’à une accusation criminelle.

L’analyse des propos a révélé que l’auteur ne prétendait pas que l’élue avait commis une escroquerie au sens pénal, mais qu’elle n’avait pas remboursé un prêt.

L’utilisation du terme « escroquée » dans ce contexte était vague et générique, servant à exprimer une opinion sur le comportement de l’élue plutôt qu’à établir un fait diffamatoire.

Ainsi, les propos en question n’ont pas été jugés diffamatoires, car ils ne remplissaient pas les critères légaux requis pour une telle accusation.

Quelles sont les implications de cette affaire pour la liberté d’expression ?

Cette affaire soulève des questions importantes concernant la liberté d’expression et les limites de celle-ci dans le cadre des réseaux sociaux.

La décision de ne pas considérer les propos comme diffamatoires souligne l’importance de protéger les opinions et les critiques, même lorsqu’elles sont formulées de manière imagée ou exagérée.

Il est crucial de trouver un équilibre entre la protection de l’honneur des individus et le droit à la libre expression des idées.

Les réseaux sociaux, en particulier, offrent une plateforme où les opinions peuvent être partagées rapidement et largement, ce qui peut parfois mener à des malentendus ou à des interprétations erronées.

Ainsi, cette affaire rappelle que la liberté d’expression doit être préservée, tout en veillant à ce que les accusations diffamatoires ne soient pas tolérées.


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