Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Corruption passive : la prescription de l’action publique et ses implications.
→ RésuméUn dirigeant d’entreprise a formé un pourvoi contre un arrêt de la cour d’appel de Paris, qui l’a condamné pour corruption passive à deux ans d’emprisonnement, dont dix-huit mois avec sursis, ainsi qu’à une amende de 50 000 euros. Cette condamnation faisait suite à des faits survenus alors qu’il exerçait ses fonctions de maire. Il lui était reproché d’avoir accepté un prix minoré pour l’acquisition d’un appartement en échange d’une modification du plan d’occupation des sols de sa commune.
Initialement, le tribunal correctionnel avait constaté la prescription de l’action publique, ce qui a conduit le ministère public à interjeter appel de cette décision. Dans le cadre de l’examen des moyens, le pourvoi a contesté l’arrêt en ce qu’il a écarté l’exception de prescription. Il a été soutenu que, dans le cas d’infractions occultes, le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où les actes délictueux sont révélés. La déclaration faite par le dirigeant à la haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) en février 2014 aurait permis de mettre en lumière des conditions d’acquisition de l’appartement qui pouvaient susciter des soupçons sur la régularité de l’opération. Ainsi, il a été argumenté que le point de départ de la prescription devait être fixé à cette date, ce qui aurait conduit à la prescription de l’infraction en février 2017, avant le premier acte interruptif de prescription. Toutefois, la cour d’appel a rejeté cette argumentation, considérant que la connaissance par certaines autorités publiques de faits susceptibles de constituer des infractions n’était pas déterminante pour établir la prescription. En conséquence, la chambre criminelle de la Cour de cassation a décidé de ne pas admettre le pourvoi, confirmant ainsi la décision de la cour d’appel. |
Cour de cassation, 2 avril 2025, N° Pourvoi 24-81.052
Chambre criminelle
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Formation restreinte hors RNSM/NA
N° W 24-81.052 F-D
N° 00447
SL2
2 AVRIL 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 AVRIL 2025
M. [K] [M] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 2-13, en date du 24 janvier 2024, qui, pour corruption passive, l’a condamné à deux ans d’emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis et 50 000 euros d’amende.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et associés, avocat de M. [K] [M], et les conclusions de M. Crocq, avocat général, après débats en l’audience publique du 5 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [K] [M] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour corruption passive. Il lui était reproché d’avoir, alors qu’il était maire, accepté de bénéficier d’un prix minoré sur l’acquisition d’un appartement en échange d’une modification du plan d’occupation des sols de sa commune.
3. Les juges du premier degré ont constaté la prescription de l’action publique.
4. Le ministère public a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a écarté l’exception de prescription de l’action publique, alors « qu’en matière d’infractions occultes ou dissimulées, le délai de prescription de l’action publique ne commence à courir, lorsque les actes irréguliers ont été dissimulés ou accomplis de manière occulte, qu’à partir du jour où ils sont apparus et ont pu être constatés dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique ; que la déclaration faite par [K] [M], le 3 février 2014, à la haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a permis de mettre en lumière une acquisition d’appartement à des conditions prétendument avantageuses, pouvant attirer la suspicion sur la parfaite régularité de l’opération ; que cette déclaration a donc permis de révéler d’éventuels faits délictueux mettant la HATVP dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique ; que dès lors, le point de départ de la prescription ne peut être fixé qu’au 3 février 2014 ; qu’en conséquence, l’éventuelle infraction se prescrivait le 3 février 2017 antérieurement au premier acte interruptif de prescription datée du 28 février 2017 ; qu’en écartant malgré cela le moyen tiré de l’acquisition de la prescription de l’action publique motif pris de ce qu’« il importe peu que certaines autorités publiques aient pu avoir connaissance de faits susceptibles de constituer des infractions, la cour d’appel a méconnu l’article 8 du code de procédure pénale. »
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