Cour d’appel de Versailles, 2 avril 2025, RG n° 23/00110
Cour d’appel de Versailles, 2 avril 2025, RG n° 23/00110

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Versailles

Thématique : Prescription de l’action en responsabilité dans un investissement immobilier.

Résumé

La société Petit lac Pinéa, gérée par la société Kaufman et Broad Développement, a réalisé une opération de construction d’une résidence de tourisme. La société Gutman V a acquis un appartement et un emplacement de stationnement dans cette résidence par un contrat de réservation en novembre 2006, suivi d’un acte authentique de vente en février 2007. Les lots ont été livrés en avril 2008, mais des défauts, notamment concernant la piscine, sont apparus par la suite.

En mai 2013, un avenant au bail commercial a été signé, réduisant le loyer en raison des problèmes rencontrés. Cependant, la société MNV, exploitante de la résidence, a cessé de payer les loyers, entraînant une succession d’autres exploitants, dont certains ont été placés en liquidation judiciaire. Invoquant un manquement à l’obligation d’information et de conseil de la part de la société Petit lac Pinéa, la société Gutman V a assigné cette dernière en justice en août 2019 pour obtenir réparation de divers préjudices.

Le tribunal de grande instance de Nanterre a déclaré l’action de la société Gutman V irrecevable pour cause de prescription, considérant que le préjudice, lié à une perte de chance de ne pas contracter, avait commencé à courir dès la date de l’acte authentique ou à la livraison du bien. En conséquence, la société Gutman V a été condamnée à verser des frais à la société Petit lac Pinéa.

La société Gutman V a fait appel, soutenant que le délai de prescription devait être fixé à une date ultérieure, mais la société Petit lac Pinéa a maintenu que l’action était prescrite. Le jugement a été confirmé, et la société Gutman V a été condamnée à payer des frais supplémentaires. La cour a ainsi statué sur la prescription de l’action en responsabilité et sur les obligations d’information et de conseil du vendeur.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30Z

Chambre commerciale 3-1

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 AVRIL 2025

N° RG 23/00110 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VTO4

AFFAIRE :

S.A.R.L. GUTMAN V.

C/

S.N.C. PETIT LAC PINEA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Novembre 2022 par le tribunal judiciaire de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 19/08583

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Ivan CORVAISIER

Me Sylvie MAIO

TJ NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX AVRIL DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.R.L. GUTMAN V.

RCS Alençon n° 399 260 140

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Ivan CORVAISIER de la SELARL CORVAISIER AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 37 et Me Mickaël COHEN de la SELARL Cabinet Cohen, Plaidant, avocat au barreau de Paris

APPELANTE

****************

S.N.C. PETIT LAC PINEA

RCS Nanterre n° 439 548 082

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie MAIO, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 163 et Me Rafaël SCHNEIDER & Me Olivier BANCAUD de la SELARL ATTIQUE AVOCATS, Plaidant, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C0301

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Janvier 2025 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente chargée du rapport, et Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère,

Madame Bérangère MEURANT, Conseillère,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSE DU LITIGE

La société Petit lac Pinéa est une société en nom collectif spécialisée dans le secteur de l’activité de location de logements, dont le gérant est la société Kaufman et Broad Développement. Elle a mené, en qualité de maître d’ouvrage non réalisateur, une opération de construction d’une résidence de tourisme située à [Localité 5].

La société Gutman V a pour objet social « l’acquisition et l’exploitation de tout ou partie d’un établissement hôtelier ». Dans le cadre d’un investissement, elle a, le 6 novembre 2006, conclu avec la société Petit lac Pinéa un contrat de réservation préalable à une vente en l’état futur d’achèvement portant sur un appartement et un emplacement de stationnement situés dans cette résidence de tourisme, un projet de bail commercial conclu avec la société MNV, future exploitante de la résidence, étant annexé à ce contrat de réservation.

Le 27 février 2007, l’acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement a été signé par les sociétés Gutman V et Petit lac Pinéa. Les lots ont été livrés en avril 2008.

Un défaut affectant la piscine de la résidence est apparu.

Un avenant au bail commercial stipulant une réduction de loyer a été conclu, selon le jugement, le 6 mai 2013.

La société MNV a cependant cessé de payer les loyers et, après son départ de la résidence, plusieurs sociétés se sont succédées dans l’exploitation des locaux : la société Mandelieu resort en février 2015 puis la société Splash hôtels France en novembre 2015 mais qui a été placée en liquidation judiciaire le 6 février 2018 et, d’avril à octobre 2018, la SCI Zénitude Invest Immo, cessionnaire du fonds de commerce dans le cadre de la liquidation.

Invoquant un manquement de la société Petit lac Pinéa à son devoir d’information et de conseil sur la nature, la portée et les risques de l’investissement souscrit, la société Gutman V l’a assignée, par acte du 8 août 2019, devant le tribunal de grande instance de Nanterre en réparation de différents préjudices.

Par jugement du 18 novembre 2022, le tribunal a déclaré irrecevable l’action de la société Gutman V car prescrite et l’a condamnée à payer à la société Petit lac Pinéa la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Le tribunal a considéré que le préjudice invoqué étant constitué d’une perte de chance de ne pas contracter, le délai de prescription avait commencé à courir le 27 février 2007, date de l’acte authentique, ou, au plus tard, à la date de livraison du bien intervenue en avril 2008 ou encore à la date de conclusion de l’avenant au bail commercial du 6 mai 2013 sans qu’aucun élément nouveau ne permette de retarder le point de départ du délai de prescription, la société Gutman V ayant procédé à un choix éclairé d’investissement.

Par déclaration du 5 janvier 2023, la société Gutman V a fait appel de ce jugement et , par dernières conclusions n° 2 remises au greffe et notifiées par RPVA le 29 octobre 2024, elle demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de la déclarer recevable et non prescrite en son action, de condamner la société Petit lac Pinéa à lui payer, à titre de dommages-intérêts, les sommes correspondant à 50 % du prix de vente et des intérêts et frais d’assurance du prêt, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, et, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 6.000 euros ainsi qu’aux dépens.

Par dernières conclusions n° 3 remises au greffe et notifiées par RPVA le 4 novembre 2024, la société Petit lac Pinéa demande à la cour de débouter la société Gutman V de l’ensemble de ses demandes, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à titre subsidiaire et sur le fond de débouter la société Gutman V de l’ensemble de ses demandes, en tout état de cause de condamner la société Gutman V à lui verser la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 7 novembre 2024.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société Gutman V à payer à la société Petit lac Pinéa la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Gutman V aux dépens d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier La Présidente

 


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