Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Reims
Thématique : Exécution contractuelle et obligations réciproques : enjeux et conséquences.
→ RésuméRésumé de l’affaire :
La SAS [Localité 16] International Consult, spécialisée dans l’intermédiation et la commercialisation de poteaux métalliques, a contracté avec la SAS Capelle, qui exerce des activités de transport routier. Un devis daté du 13 avril 2022 a été accepté pour le transport de 144 poteaux métalliques, pour un montant total de 44 760 euros TTC. Après plusieurs échanges concernant les sites de livraison, la société Capelle a mis en demeure la société [Localité 16] International Consult de régler des factures impayées s’élevant à 50 124 euros. En réponse, la société [Localité 16] International Consult a également mis en demeure la société Capelle, demandant un avoir correspondant aux factures impayées. Faute de règlement, le tribunal de commerce de Troyes a ordonné le paiement de la somme due par la société [Localité 16] International Consult. Cette dernière a formé opposition à l’ordonnance, et le tribunal a finalement statué en sa faveur en mars 2024, annulant l’ordonnance initiale et condamnant la société [Localité 16] International Consult à payer la somme de 50 124 euros, ainsi qu’une indemnité de 3 000 euros. La société [Localité 16] International Consult a interjeté appel, contestant la légitimité des factures et invoquant des manquements contractuels de la part de la société Capelle. Elle a demandé une compensation de ses créances et a formulé des demandes reconventionnelles pour préjudice matériel, moral et perte de chance, totalisant 469 013,77 euros. En réponse, la société Capelle a demandé la confirmation du jugement initial et a contesté les allégations de la société [Localité 16] International Consult, arguant que les prestations avaient été correctement exécutées. Le tribunal a finalement confirmé le jugement, rejetant les demandes de la société [Localité 16] International Consult et condamnant celle-ci aux dépens d’appel. |
ARRET N°
du 25 mars 2025
N° RG 24/00571
N° Portalis DBVQ-V-B7I-FPFY
SAS [Localité 16]
INTERNATIONAL
CONSULT
c/
SAS CAPELLE
Formule exécutoire le :
à :
la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES
la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRET DU 25 MARS 2025
APPELANTE :
d’un jugement rendu le 12 mars 2024 par le tribunal de commerce de TROYES,
La société [Localité 16] INTERNATIONAL CONSULT, société par actions simplifiée immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de TROYES sous le numéro 814.198.529, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié de droit au siège :
[Adresse 4],
[Localité 1],
Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD, avocat au barreau de REIMS (SCP DELVINCOURT- CAULIER RICHARD -CASTELLO AVOCATS ASSOCIES), avocat postulant et par Me Pierre-Antoine JOUDELAT, avocat au barreau de l’AUBE (SELAS FIDAL), avocat plaidant,
INTIMEE :
La société CAPELLE, société par actions simplifiée, immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de NIMES sous le numéro 308.148.691, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3],
Représentée par Me Florence SIX, avocat au barreau de REIMS (SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES), avocat postulant, et Me Ivan CORVAISIER, avocat au barreau de VERSAILLES (SELARL CORVAISIER AVOCATS ASSOCIES), avocat plaidant,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
Madame PILON, conseillère, et Madame POZZO DI BORGO, conseillère, ont entendu les plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées. Elles en ont rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre,
Madame Sandrine PILON, conseillère,
Madame Anne POZZO DI BORGO, conseillère,
GREFFIER :
Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier lors des débats,
et Madame Jocelyne DRAPIER, greffier lors de la mise à disposition,
DEBATS :
A l’audience publique du 11 février 2025, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 mars 2025,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 25 mars 2025 et signé par Madame Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre, et Madame Jocelyne DRAPIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSE DU LITIGE :
La SAS [Localité 16] International Consult est spécialisée dans l’inter-médiation, le négoce et la commercialisation de poteaux métalliques en parallèle d’une activité de conseil.
La SAS Capelle exerce une activité de transports routiers de marchandises de toute nature, de location de véhicules et matériels, de transports exceptionnels, au niveau national et international.
Selon devis du 13 avril 2022, elle a proposé à la SAS [Localité 16] International Consult des prestations de transport, après importation du Maroc, de poteaux métalliques (candélabres) de son agence située à [Localité 14] (Hérault) vers différents sites de la société Orange, cliente de cette dernière.
Il a été prévu une livraison sur 24 sites de 144 poteaux de 8 mètres de longueur par site pour un montant de 44 760 euros TTC.
Le devis a été accepté par mail du 14 avril 2022.
Par courriel du 10 mai 2022, la société Capelle a indiqué le prix de ses prestations en réponse à la demande de sa cocontractante qui lui avait communiqué par mail du même jour une nouvelle liste de sites à livrer.
Plusieurs échanges ont eu lieu ensuite entre les deux sociétés concernant les lieux et le nombre de poteaux objet des livraisons.
Par courrier recommandé du 16 septembre 2022, la société Capelle a mis en demeure la société [Localité 16] International Consult de lui régler la somme de 50 124 euros au titre des factures laissées impayées.
Par lettre recommandée du 19 septembre 2022, cette dernière société, par l’intermédiaire de son conseil, a mis en demeure à son tour la société Capelle de lui accorder un avoir d’un montant correspondant au montant des factures restant à régler.
Faute de règlement des factures, par ordonnance du 27 octobre 2022, signifiée le 2 décembre 2022, le président du tribunal de commerce de Troyes, faisant droit à la demande de la société Capelle, a enjoint à la société [Localité 16] International Consult de lui payer la somme de 50 124 euros en principal outre intérêts et frais.
Par courrier reçu au greffe le 19 décembre 2022, la société [Localité 16] International Consult a formé opposition à l’ordonnance.
Par jugement du 12 mars 2024, le tribunal de commerce de Troyes a :
– reçu la société [Localité 16] International Consult en son opposition,
– mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer du 27 octobre 2022,
– dit que le jugement se substitue à celle-ci,
– déclaré la SAS Capelle recevable et partiellement fondée,
– débouté la société [Localité 16] International Consult de toutes ses demandes,
– condamné celle-ci à payer à la société Capelle la somme de 50 124 euros au titre de la totalité des factures laissées impayées et la somme de 3 000 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au paiement des frais et dépens taxables de l’instance,
– liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 60,22 euros dont 10,04 euros de TVA.
Par déclaration du 10 avril 2024, la société [Localité 16] International Consult a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions transmises par la voie électronique le 14 juin 2024, elle demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
– infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
– juger qu’elle est légitime à s’opposer au règlement d’une somme de 40 219,92 euros en application du principe de l’exception d’inexécution,
– juger que les sommes dues par elle au titre des factures réclamées par la société Capelle ne peuvent être supérieures à 9 904,08 euros,
sur ses demandes reconventionnelles,
– condamner la société Capelle à lui verser la somme de 325 281,14 euros en réparation de son préjudice matériel, celle de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral et celle de 128 732,3 euros en réparation de sa perte de chance, soit la somme de 469 013,77 euros,
sur la compensation des créances respectives,
– juger que les dettes respectives des deux sociétés doivent être compensées,
à titre principal,
– juger que la somme de 9 904,08 euros doit se compenser avec celle de 469 013,77 euros qui lui est due,
– condamner la société Capelle à lui verser la somme de 459 109,69 euros en réparation de son préjudice matériel,
à titre subsidiaire,
– juger que la somme de 50 124 euros qu’elle doit se compenser avec celle de 469 013,77 euros qui lui est due,
– condamner la société Capelle à lui verser la somme de 418 889,77 euros en réparation de son préjudice matériel,
en tout état de cause,
– condamner la société Capelle à lui verser la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure pénale et aux entiers dépens.
Au soutien du rejet de la demande en paiement de la société intimée elle expose que :
– cette dernière n’a pas exécuté les prestations de chargement et déchargement convenues telles qu’elles résultent du tableau de commandes les liant, le devis retenu pour asseoir sa condamnation concernant des sites et dates de livraison différents de ceux objet du litige,
– ces prestations incombaient à la société intimée, qui les lui a facturées, sans qu’elle puisse lui opposer une clause limitative de responsabilité sauf à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties,
– la prestation de chargement en cause n’est pas soumise aux obligations applicables au contrat de transport de sorte que l’absence de réserves écrites sur les lettres de voiture, qui ne sont établies que pour dénoncer des avaries ou pertes partielles, ne peut être retenue pour attester de la bonne exécution de la prestation,
– le règlement des factures par sa cliente Orange ne délégitime pas son refus de régler les siennes à la société intimée.
Elle fait valoir être en conséquence bien fondée à s’opposer au règlement des factures compte tenu des manquements graves de la société Capelle à ses obligations contractuelles lesquels ont considérablement impacté son activité et celle de son client unique, la société Orange, qui a décidé d’arrêter ses commandes du fait de la mauvaise qualité des prestations réalisées.
Elle affirme subir un préjudice matériel consécutif à la perte de poteaux, à la nécessité de recourir à un autre transporteur, à la perte de son client principal, et lié aux gains manqués. Elle argue également de sa perte de chance de réaliser un chiffre d’affaires et une marge brute avec la société Orange et de ne pas contracter avec la société Capelle qui lui ouvre droit à indemnisation.
Aux termes de ses conclusions transmises par la voie électronique le 11 septembre 2024, la SAS Capelle demande à la cour de :
– confirmer le jugement,
– débouter la société [Localité 16] International Consult de toutes ses demandes,
en conséquence,
– la condamner à lui verser la somme de 50 124 euros au titre de la totalité des factures laissées impayées,
à titre subsidiaire,
– condamner celle-ci à lui verser une somme de 31 167,91 euros,
en tout état de cause,
– la condamner à lui verser la somme de 7 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux frais et dépens taxables de l’instance.
Elle affirme que la société appelante échoue à démontrer le caractère suffisamment grave de son inexécution contractuelle relevant que :
– la liste, émise par la société appelante, sur laquelle elle se fonde, n’est pas contractualisée et n’a été suivie d’aucun accord en retour de sa part,
– l’absence de réserves et la présence de la signature de la société appelante, donneur d’ordres, sur les lettres de voiture prouvent la bonne exécution de sa prestation de transport,
– conformément à la clause insérée dans le devis, parfaitement valide et opposable à l’appelante, la prestation de chargement des camions se fait sous la seule responsabilité du client, de sorte qu’aucun manquement à ce titre ne peut être retenu à son encontre,
– elle n’était légalement et contractuellement tenue par aucun délai de livraison, le programme établi sur ce point unilatéralement par l’appelante n’ayant qu’une simple valeur opérationnelle.
Elle expose que la réalité des préjudices dont l’appelante demande la réparation n’est pas établie et observe qu’aucun élément de nature comptable permettant de les chiffrer n’est produit.
Elle fait valoir enfin que, seule l’appelante étant débitrice, aucune compensation entre les sommes dues par chaque partie ne peut être prononcée.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 21 janvier 2025 et l’affaire a été renvoyée pour être plaidée à l’audience du 11 février 2025.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Condamne la société [Localité 16] International Consult aux dépens d’appel ;
Condamne la société [Localité 16] International Consult à payer à la société Capelle la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
La déboute de sa demande formée à ce titre.
Le greffier, La présidente de chambre,
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