Cour d’appel de Paris, 26 mars 2025, RG n° 24/00100
Cour d’appel de Paris, 26 mars 2025, RG n° 24/00100

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Créance subrogée : validation et condamnation des frais.

Résumé

La présente affaire oppose deux sociétés, la société Iod Seafoods, spécialisée dans le négoce et la transformation de produits alimentaires, et la société Okeanos, active dans le négoce et le courtage de produits de la mer. Le 25 juillet 2022, la société Okeanos a émis une facture d’un montant de 25 408,62 euros à la société Iod Seafoods, qui n’a pas été réglée à son échéance du 30 août 2022. La société Okeanos a ensuite mobilisé cette créance auprès de la société Crédit mutuel Factoring (CMF), qui a procédé à son paiement et a été subrogée dans les droits de la société Okeanos.

Face à l’absence de paiement, le CMF a mis en demeure la société Iod Seafoods par lettres recommandées en septembre 2022, sans obtenir de réponse. Le 20 février 2023, le CMF a assigné la société Iod Seafoods devant le tribunal de commerce de Paris. Le 4 mai 2023, ce tribunal a ouvert une liquidation judiciaire simplifiée de la société Iod Seafoods, désignant la société civile Athéna, représentée par un liquidateur judiciaire, pour gérer la procédure.

Le 6 juin 2023, le CMF a déclaré sa créance au passif de la société Iod Seafoods pour un montant total de 27 448,62 euros. Cependant, par jugement du 2 novembre 2023, le tribunal a débouté le CMF de sa demande de fixation de créance, estimant qu’il ne justifiait pas de l’opposabilité de sa subrogation au débiteur. Le CMF a interjeté appel de ce jugement, demandant l’infirmation de la décision et la fixation de sa créance au passif de la société Iod Seafoods.

En appel, la cour a infirmé le jugement initial, fixant la créance du CMF à 25 408,62 euros et condamnant la société Athéna, en qualité de liquidateur judiciaire, à payer 800 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens.

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRÊT DU 26 MARS 2025

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/00100 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CIVMQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Novembre 2023 – tribunal de commerce de Paris 7ème chambre – RG n° 2023014104

APPELANTE

S.A. CREDIT MUTUEL FACTORING

[Adresse 6]

[Localité 5]

N° SIREN : 380 307 413

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELARL TBA, avocat au barreau de Paris, toque : P0241

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-Christophe NIEWIADUNSWI de la SELARL ROULOT DROUOT associés, avocat au barreau de Paris, toque : P535

INTIMÉES

Madame [Z] [O] membre de la SELARL ATHENA, liquidateur à la liquidation judiciaire de la société IOS SEAFOODS, fonction à laquelle elle a été nommée par jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 26 mai 2023

[Adresse 2]

[Localité 4]

non constituée

S.A.S. IOD SEAFOODS

[Adresse 1]

[Localité 3]

N° SIREN : 843 020 058

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

non constituée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Vincent BRAUD, président de chambre entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Vincent BRAUD, président de chambre

Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère

Mme Laurence CHAINTRON, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

– réputé contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Vincent BRAUD, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Iod Seafoods est une société de négoce et transformation de produits alimentaires. La société Okeanos est une société de négoce, courtage de produits de la mer.

La société Okeanos a facturé (FA1671) la société Iod Seafoods le 25 juillet 2022 pour un montant de 25 408,62 euros toutes taxes comprises. Elle a mobilisé cette créance auprès de la société Crédit mutuel Factoring (ci-après CMF), et en a été payée par le CMF, qui a donc été subrogé dans les droits de la société Okeanos et qui, de ce fait détient une quittance subrogative sur cette facture.

Ladite facture n’a pas été réglée à son écheance du 30 août 2022.

Le 16 septembre 2022, par lettre recommandée avec accusé de réception, le CMF mettait en demeure la société Iod Seafoods de lui régler les sommes qu’il estimait lui être dues. En l’absence de réponse, elle réitérait cette démarche le 30 septembre 2022, en vain.

Par exploit en date du 20 février 2023, en application des dispositions de l’article 659 du code de procédure civile, et par procès-verbal en date du 6 mars 2023, en application des dispositions de l’articIe 653 du même code, le CMF a assigné la société Iod Seafoods devant le tribunal de commerce de Paris.

Le 4 mai 2023, le tribunal de commerce de Paris prononçait l’ouverture de la liquidation judiciaire simplifiée de la société Iod Seafoods et désignait la société civile Athéna prise en la personne de maître [Z] [O] en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 6 juin 2023 le CMF a déclaré ses créances au passif de la société Iod Seafoods pour un montant de 27 448,62 euros.

Par acte de dénonciation de procédure avec assignation, signifié le 9 juin 2023, le CMF a assigné la société civile Athéna prise en la personne de maître [Z] [O] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Iod Seafoods.

Par jugement réputé contradictoire en date du 2 novembre 2023, le tribunal de commerce de Paris a :

‘ Dit la demande de la société Crédit mutuel Factoring régulière et recevable ;

‘ Débouté la société Crédit mutuel Factoring de voir fixer sa créance au passif de la société Iod Seafoods ;

‘ Condamné la société Crédit mutuel Factoring aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 euros dont 11,60 euros de taxe sur la valeur ajoutée.

En substance, le tribunal a jugé que la demanderesse ne justifiait de l’opposabilité au débiteur cédé de sa subrogation dans les droits de la société Okeanos, ni par la facture litigieuse, qui ne mentionne pas ladite subrogation, ni par aucun courrier.

Par déclaration du 12 décembre 2023, la société Crédit mutuel Factoring a interjeté appel du jugement en ce qu’il a : « Vu l’article 455 alinéa 2 du CPC, -DEBOUTE la SA CREDIT MUTUEL FACTORING de voir fixer sa créance au passif de la société IOD FACTORING ; -CONDAMNE la SA CREDIT MUTUEL FACTORING aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 € dont 11,60 € de TVA. et plus généralement en toutes ses dispositions non visées au dispositif, faisant grief à la SA CREDIT MUTUEL FACTORING ».

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 12 janvier 2024, la société anonyme Crédit mutuel Factoring demande à la cour de :

INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de PARIS le 2 novembre 2023 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu’il a débouté la société CREDIT MUTUEL FACTORING de sa demande de fixation de créance au passif de la société IOD SEAFOODS.

Statuant à nouveau,

DEBOUTER la société IOD SEAFOODS et la SELARL ATHENA, prise en la personne de Maître [Z] [O], es qualités de liquidateur judiciaire de la société IOD SEAFOODS, de leurs contestations éventuelles.

FIXER la créance de la société CREDIT MUTUEL FACTORING au passif de la société IOD SEAFOODS à la somme de 27.448,62 € se décomposant comme suit :

‘ 25.408,62 € en principal,

‘ 40,00 € au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement ;

‘ 2.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, majoré des entiers dépens de l’instance.

EMPLOYER les dépens en frais de procédure collective.

Les conclusions d’appelant ont été signifiées à domicile le 17 janvier 2024 à maître [Z] [O], membre de la société d’exercice libéral à responsabilité limitée Athéna, liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Iod Seafoods, et le 22 janvier 2024 suivant procès-verbal de recherches infructueuses à la société par actions simplifiée Iod Seafoods, qui n’ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 décembre 2024 et l’audience fixée au 30 janvier 2025.

CELA EXPOSÉ,

Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

L’article 1346-1 du code civil dispose :

« La subrogation conventionnelle s’opère à l’initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d’une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur.

« Cette subrogation doit être expresse.

« Elle doit être consentie en même temps que le paiement, à moins que, dans un acte antérieur, le subrogeant n’ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement. La concomitance de la subrogation et du paiement peut être prouvée par tous moyens. »

La société Crédit mutuel Factoring justifie en l’espèce de sa qualité de créancier subrogé par la production de :

‘ la quittance subrogative et sa liste de factures annexée,

‘ la facture no FA1671 et la lettre de voiture attestant de la livraison des marchandises,

‘ le relevé de compte courant prouvant le paiement subrogatoire (pièce no 4 de l’appelante).

En application de l’article 1346-5, alinéa premier, du même code, la subrogation ne peut être opposée au débiteur que si elle lui a été notifiée ou s’il en a pris acte.

La loi ne prescrit aucune forme pour l’information délivrée au débiteur.

Comme l’a constaté le tribunal, les lettres recommandées des 16 et 30 septembre 2022 envoyées à la société Iod Seafoods par la société Crédit mutuel Factoring ne font pas expressément mention de la subrogation de celle-ci dans les droits de la société Okeanos (pièces nos 5 et 6 de l’appelante). En revanche, la subrogation a été valablement notifiée à la société Iod Seafoods par l’assignation délivrée le 20 février 2023 à la requête de la société Crédit mutuel Factoring.

Quoi qu’il en soit, il n’est pas allégué que la société Iod Seafoods se serait acquittée de la facture litigieuse entre les mains de la société Okeanos.

La société Crédit mutuel Factoring est ainsi fondée à voir fixer sa créance au passif de la société Iod Seafoods à la somme en principal de 25 408,62 euros. N’y sera pas ajoutée celle de 40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement due en application des articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce, parce que cette indemnité n’est pas mentionnée sur la facture no FA1671 en violation de l’article L. 441-9 du même code.

Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. La société Athéna ès qualités en supportera donc la charge.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1o À l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2o Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.

La somme allouée au titre du secundo ne peut être inférieure à la part contributive de l’État majorée de 50 %.

Sur ce fondement, la société Athéna sera condamnée ès qualités à payer à la société Crédit mutuel Factoring la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles.

LA COUR,

 


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