Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Rupture brutale de relations commerciales dans l’audiovisuel : le licenciement économique pris en compte
→ RésuméContexte des sociétés impliquéesLa SAS Tout sur l’Ecran Productions (TSE) est une société de production audiovisuelle fondée par Mme [W] [N] et M. [Z] [B]. La SAS Ruq Productions, quant à elle, a été créée par l’animateur M. [S] [H] et se spécialise dans la création et la diffusion d’émissions télévisées. La SARL Little Bros représente les intérêts de M. [H] et est dirigée par son agent, M. [L] [A]. Relations contractuelles et évolutionEntre 2001 et 2010, TSE et Ruq ont signé plusieurs contrats pour la production d’émissions destinées à France 2, avec TSE comme producteur et Ruq comme animateur. L’émission « On n’est pas couché », animée par M. [H], a été diffusée de 2006 à 2020. À partir de 2009, les relations se sont transformées en partenariat avec des contrats de coproduction, impliquant également Little Bros, qui percevait une commission. Fin de l’émission et rupture des relationsM. [H] a annoncé en avril 2020 qu’il ne souhaitait pas reconduire l’émission pour la saison 2020/2021, ce qui a conduit France Télévisions à décider de ne pas renouveler le programme. Suite à cette annonce, Little Bros a informé TSE que la fin de l’émission entraînait la cessation de leur relation avec Ruq. La dernière émission a été diffusée le 3 juillet 2020. Litiges et procédures judiciairesEn avril 2021, Ruq et Little Bros ont assigné TSE pour le paiement de provisions liées à des factures impayées. TSE a ensuite contre-assigné, demandant des dommages pour rupture brutale de la relation commerciale. Le tribunal a rendu un jugement en juin 2022, ordonnant la jonction des procédures et statuant sur les demandes des parties. Décisions du tribunalLe tribunal a déclaré recevables les demandes de TSE et a condamné Ruq à verser des dommages-intérêts pour la perte de marge et les licenciements économiques. Ruq et Little Bros ont été condamnés à payer diverses sommes à TSE, tandis que TSE a également été condamnée à verser des montants à Ruq et Little Bros. Les parties ont ensuite fait appel de ce jugement. Appels et conclusions finalesRuq a demandé l’infirmation du jugement, arguant que la rupture n’était pas brutale et que TSE ne pouvait pas s’attendre à la poursuite de leur relation. Little Bros a également contesté certaines condamnations. TSE a interjeté un appel incident, demandant des indemnités plus élevées. Les conclusions finales ont été rendues en septembre 2024, confirmant certaines décisions tout en modifiant d’autres, notamment en ce qui concerne les indemnités pour licenciements économiques. |
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRÊT DU 17 JANVIER 2025
(n° , 25 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/13998 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGHNL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Juin 2022 -Tribunal de Commerce de PARIS
APPELANTES
S.A.S. RUQ PRODUCTIONS
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 4]
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 404 724 379
Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
Assistée de Me Léon DEL FORNO et de Me Charles MERVEILLEUX, avocats au barreau
S.A.R.L. LITTLE BROS
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 6]
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 533 363 453
Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
Assistée de Me Marie DEBIEN, avocate au barreau de PARIS, substituant Me Céline ASTOLPHE, avocate au barreau de PARIS
INTIMÉE
SAS TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 5]
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 419 931 605
Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
Assistée de Me Olivier CHAPPUIS, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 19 Septembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de ;:
Denis ARDISSON, Président de chambre
Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, conseillère,
CAROLINE GUILLEMAIN, conseillère, chargée du rapport,
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Damien GOVINDARETTY
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCEDURE
;
La SAS Tout sur l’Ecran Productions (la société ;TSE) est une société de production de programmes audiovisuels. Elle a été fondée par Mme [W] [N] et M. [Z] [B], qui continuent à l’animer.
La SAS Ruq Productions (la société Ruq) est une société de production audiovisuelle fondée par l’animateur M. [S] [H], qui a pour objet la création, la diffusion, la présentation et l’animation d’émissions télévisées.
La SARL Little Bros est une société de production artistique représentant les intérêts de M. [H]. Elle est représentée par M. [L] [A], l’agent de M. [H].
Durant les années 2001 à 2010, les parties ont conclu de nombreux contrats à durée déterminée ayant pour objet la production de programmes télévisuels destinés à être diffusés sur les chaînes du service public, notamment la chaîne de télévision France 2. La société TSE était alors le producteur des émissions, dont elle confiait l’animation à la société Ruq, en contrepartie d’une rémunération.
Tel était notamment le cas de l’émission intitulée « ;On n’est pas couché ;», animée par M. [S] [H], qui devait être diffusée sur la chaîne France 2 pour une première saison, à compter de l’année 2006/2007, jusqu’à une quatorzième saison, ayant pris fin à l’issue de l’année 2019/2020.
A compter de l’année 2009, la relation entre les parties s’est muée en partenariat. Pour chaque saison, la société TSE et la société Ruq signaient ainsi des contrats de coproduction des émissions, prévoyant une répartition des recettes. L’ensemble de ces contrats, à durée déterminée, était, par ailleurs, conclu en présence de la société Little Bros, qui percevait une commission sur les montants revenant à la société Ruq.
M. [H] n’a pas souhaité reconduire la production de l’émission « ;On n’est pas couché ;» pour la saison 2020/2011, ce qu’il a confirmé dans une interview publiée, le 18 avril 2020, dans le journal Le Parisien, en annonçant que celle-ci prendrait fin dès le mois de juin 2020.
Immédiatement après cette annonce publique, la société France Télévision a, par courriels du 21 avril 2020, informé Mme [N] et M. [H] qu’elle prenait acte de la volonté exprimée par ce dernier, et qu’elle prenait la décision de ne pas renouveler le programme pour la saison 2020/2021, compte tenu du caractère indissociable de l’émission avec la personnalité de son présentateur.
Par courriels en date des 24 et 30 avril 2020, M. [A] a indiqué à la société TSE que la fin de l’émission « ;On n’est pas couché ;», qui constituait alors le seul programme commun des coproducteurs, impliquait la fin de la relation avec la société Ruq.
La dernière émission a été diffusée sur la chaîne de télévision France 2, le 3 juillet 2020. Ce même jour, la société France Télévisions a annoncé que M. [H] animerait, à compter de la prochaine saison, une nouvelle émission intitulée « ;On est en direct ;», le samedi, en seconde partie de soirée.
Suivant exploit du 21 avril 2021, les sociétés Ruq et Little Bros ont fait assigner la société TSE devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, en paiement de provisions correspondant au solde de plusieurs factures.
Aux termes d’une ordonnance rendue le 19 mai 2021, le président du tribunal a dit n’y avoir lieu à référé et a renvoyé l’affaire devant la formation collégiale du tribunal, afin qu’il soit statué sur le fond.
Par actes du 12 mai 2021, la société TSE a assigné, à son tour, la société Ruq et la société Little Bros devant le tribunal de commerce de Paris, à l’effet d’obtenir leur condamnation à l’indemniser du préjudice résultant de la rupture brutale d’une relation commerciale établie, ainsi que le paiement de plusieurs créances liées à l’apurement des comptes de coproduction de l’émission.
;
Par jugement en date du 20 juin 2022, le tribunal a :
Ordonné la jonction des procédures,
Déclaré recevables les demandes de la société TSE,
Débouté la société Ruq de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Condamné la société Ruq à verser à la société TSE la somme de 780.340 € à titre de dommages-intérêts, en compensation de la perte de marge sur coûts variables du fait de l’insuffisance du préavis de rupture,
Condamné la société Ruq à verser à la société TSE la somme de 219.375 € en indemnisation des licenciements économiques causés par la brutalité de la rupture,
Condamné la société Ruq à payer à la société TSE la somme de 617.337,27 € HT,
Condamné la société Little Bros à payer à la société TSE la somme de 24.693,50 ;€ ;HT,
Condamné la société TSE à payer à la société Ruq la somme de 167.573,17 € HT,
Condamné la société TSE à payer à la société Little Bros la somme de 5.371,21 ;€ ;HT,
Ordonné la compensation entre les créances réciproques des parties,
Débouté la société TSE de sa demande visant à enjoindre sous astreinte à la société Ruq et la société Little Bros de lui fournir un état de toutes les exploitations secondaires de l’émission « ;On n’est pas couché ;»,
Condamné in solidum la société Ruq et la société Little Bros à payer à la société TSE globalement la somme de 30.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
Condamné in solidum la société RUQ et la société Little Bros aux dépens.
;
Les sociétés Ruq et Little Bros ont formé appel du jugement, par déclaration du 21 juillet 2022.
;
Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats, le 19 janvier 2023, la société TSE a interjeté un appel incident.
;
Dans ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique, le 4 juillet 2024, la SAS Ruq Productions demande à la Cour, au visa des articles L. 442-1, II, du code de commerce, 1240 du code civil, et 564, 566 et 567 du code de procédure civile, de :
« ;
Déclarer l’appel de la société Ruq Productions recevable ;
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 20 juin 2022 sauf en ses dispositions ne causant pas grief à l’appelante ;
Sur la rupture brutale des relations commerciales
Juger que la société Tout Sur l’Ecran Productions ne pouvait pas légitimement s’attendre à la poursuite de sa relation commerciale avec la société Ruq Productions, et que celle-ci n’était donc pas établie ;
Juger que, en prévenant la société Tout Sur l’Ecran Productions le 24 avril 2020 d’un arrêt des relations le 30 juin 2020, la société Ruq Productions lui a accordé un préavis suffisant, et que la rupture n’était donc pas brutale ;
Juger que les actes de la société Ruq Productions ne sont pas la cause du préjudice dont la société Tout Sur l’Ecran Productions réclame l’indemnisation, dont la consistance n’est pas établie ;
En conséquence,
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 20 juin 2022 en ce qu’il a condamné la société Ruq Productions à payer à la société Tout Sur l’Ecran Productions les sommes de 780.340 euros au titre de sa perte de marge sur coûts variables et de 219.375 euros au titre des licenciements économiques qu’elle a effectués ;
Et, statuant à nouveau,
Débouter la société Tout Sur l’Ecran Productions de l’ensemble de ses demandes sur le fondement de l’article L. 442-1 II du Code de commerce ;
A titre subsidiaire,
Limiter l’indemnisation de la société Tout Sur l’Ecran Productions au titre de la perte de marge à la somme de 56.144 euros par mois de préavis ;
Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 20 juin 2022 en ce qu’il a limité l’indemnisation de la société Tout Sur l’Ecran Productions au titre du coût des licenciements économiques à la somme de 219.375 euros ;
En tout état de cause,
Débouter la société Tout Sur l’Ecran Productions de son appel incident sur l’indemnisation accordée au titre de la perte de marge et des coûts de licenciements économiques ;
Sur l’apurement des comptes de coproduction
Juger que les recettes perçues par la société Tout Sur l’Ecran Productions au titre des émissions Best Of devaient être partagées pour moitié avec la société Ruq Productions en application du contrat de coproduction ;
En conséquence,
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 20 juin 2022 en ce qu’il a condamné la société Ruq Productions à payer à la société Tout Sur l’Ecran Productions la somme de 611.288,99 euros HT et en ce qu’il a débouté la société Ruq Productions de ses demandes à hauteur de 95.670,08 euros HT ;
Le confirmer pour le surplus ;
Et, statuant à nouveau,
Débouter la société Tout Sur l’Ecran Productions de ses demandes de restitution des sommes versées à la société Ruq Productions au titre des émissions Best Of ;
Condamner la société Tout Sur l’Ecran Productions à payer à la société Ruq Productions la somme de 263.243,25 euros HT au titre de ses factures impayées, avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2020, date de la mise en demeure ;
Déclarer recevables les demandes formées par la société Ruq Productions en cause d’appel ;
Condamner la société Tout Sur l’Ecran Productions à payer à la société Ruq Productions la somme de 212.912 euros HT au titre du solde positif de la marge de coproduction pour la saison 2019/2020 de l’Émission ;
Condamner la société Tout Sur l’Ecran Productions à payer à la société Ruq Productions la somme de 96.096 euros HT au titre de sa quote-part sur les revenus tirés des émissions Best Of pour la saison 2019/2020 de l’Émission ;
Condamner la société Tout Sur l’Ecran Productions à produire à la société Ruq Productions le détail des recettes qu’elle a retirées des exploitations secondaires des programmes coproduits au cours des exercices 2020, 2021, 2022 et 2023 ;
A titre subsidiaire,
Déclarer la société Tout Sur l’Ecran Productions irrecevable en sa demande portant sur le livre « On préfère encore en rire » ;
En tout état de cause,
Débouter la société Tout Sur l’Ecran Productions de son appel incident sur l’apurement des comptes de coproduction ;
En tout état de cause
Débouter la société Tout Sur l’Ecran Productions de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Ordonner la compensation entre les sommes dues par la société Ruq Productions à la société Tout Sur l’Ecran Productions et les sommes dues par la société Tout Sur l’Ecran Productions à la société Ruq Productions ;
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 20 juin 2022 en ce qu’il a condamné la société Ruq Productions à payer à la société Tout Sur l’Ecran Productions la somme de 30.000 au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner la société Tout Sur l’Ecran Productions à payer à la société Ruq Productions la somme de 50.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de première instance et d’appel. » ;
;
Dans ses dernières conclusions, transmises par voie électronique, le 19 avril 2023, la SARL Little Bros demande à la Cour, sur le fondement des articles 564,566 et 567 du code de procédure civile, de :
«- Infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a condamné LITTLE BROS à reverser les sommes dues au titre des Best Of à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS pour les saisons 2015/2016, 2016/2017 et 2017/2018 pour un montant de 24.451,57 euros HT ;
– Infirmer le jugement en ce qu’il a limité la condamnation de TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer à LITTLE BROS la somme de 5.371,21 HT au titre des factures impayées et en ce qu’il a débouté LITTLE BROS de ses demandes à hauteur de 3.826,80
euros HT ;
– Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum LITTLE BROS et RUQ PRODUCTIONS à payer à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure ;
– Confirmer le jugement en ce qu’il a reconnu que le coût des licenciements ne devait pas être intégré dans le bilan de coproduction pour la saison 2019/2020 rendant la marge positive ;
– Confirmer le jugement en ce qu’il a reconnu que LITTLE BROS était redevable envers TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS de la somme de 241,93 euros HT au titre des vidéo-clips ;
Statuant à nouveau :
‘ Sur l’apurement des comptes de coproduction :
‘ Débouter TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS de ses demandes de restitution des sommes versées à LITTLE BROS au titre des émissions Best Of pour les saisons 2015/2016, 2016/2017 et 2017/2018 ;
‘ Condamner TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer à LITTLE BROS la somme de 24.451,57 euros HT au titre des Best-of pour les saisons 2015/2016, 2016/2017 et 2017/2018 ;
‘ Condamner TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer à LITTLE BROS, la somme de 9.198,01 euros HT, au titre des factures impayées, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date d’exigibilité de chaque facture ;
‘ Donner acte à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS qu’elle ne conteste pas les factures de LITTLE BROS à hauteur de 5.371,21 euros, somme augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date d’exigibilité de chaque facture ;
‘ Ordonner la compensation entre les sommes dues par TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à LITTLE BROS et les sommes dues par LITTLE BROS à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS ;
‘ Sur les demandes liées à la marge positive et aux Best-of de la saison 2019/2020 :
‘ Déclarer recevables les demandes formées par LITTLE BROS en cause d’appel ;
‘ Condamner TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer à LITTLE BROS, la somme de 8.516,50 euros HT, au titre de la marge non perçue pour la saison 2019/2020 de l’émission ;
‘ Condamner TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer à LITTLE BROS, la somme de 3.696 euros HT, au titre de la quote-part des Best of non perçus pour la saison 2019/2020 de l’émission ;
‘ Condamner à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à produire à LITTLE BROS le détail des ventes du catalogue et des recettes qu’elle a retirées des émissions coproduites avec RUQ PRODUCTIONS au cours des exercices 2020, 2021 et 2022 ;
‘ Débouter TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS de sa demande de condamnation de LITTLE BROS à lui verser, au titre du solde négatif du compte de coproduction du programme ONPC saison 2019/2020 la somme de 7.492,29 euros HT ainsi que de sa demande subsidiaire de condamnation supplémentaire à hauteur de 1.598,08 euros TTC ;;
En tout état de cause :
‘ Débouter TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS de son appel incident ;
‘ Débouter TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS de l’ensemble de ses demandes fins et prétentions ;
‘ Condamner TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer à LITTLE BROS la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
‘ Condamner TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS aux entiers dépens de la procédure. ;»
Dans ses dernières conclusions, transmises par voie électronique, le 27 août 2024, la SAS Tout sur l’Ecran Productions demande à la Cour de :
« I- SUR LA RUPTURE BRUTALE DES RELATIONS COMMERCIALES ETABLIES
Vu l’article L. 442-1, II du Code de commerce, ;
– CONFIRMER en son principe le jugement rendu le 20 juin 2022 par le Tribunal de commerce de Paris, en ce qu’il a jugé que la société RUQ PRODUCTIONS avait brutalement rompu sa relation commerciale établie avec la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS et en ce qu’il a condamné RUQ PRODUCTIONS à indemniser TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS au titre de la perte de marge sur coûts variables qu’elle a subie du fait de l’insuffisance du préavis de rupture et au titre du coût des licenciements économiques causés par la brutalité de la rupture ;
Recevant TOUT SUR L’ECRAN en son appel incident de ces chefs,
– INFIRMER le jugement entrepris du chef de la durée du préavis de rupture et du chef du quantum des dommages-intérêts alloués à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS au titre de la perte de marge sur coûts variables et du coût des licenciements économiques ;
Statuant à nouveau,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 1.693.928 euros à titre de dommages-intérêts, en compensation de la perte de marge sur coûts variables subie par la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS du fait de l’insuffisance du préavis de rupture ;
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 460.267,24 euros à titre de dommages-intérêts complémentaires, en indemnisation du coût des licenciements économiques auxquels TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS a été contrainte de procéder du fait de la brutalité de la rupture (étant entendu que le coût des licenciements supporté par TOUT SUR L’ECRAN s’est élevé au final à 905.378,74 euros et que RUQ PRODUCTIONS, en sa qualité de coproducteur, est censée supporter ces frais des licenciements à hauteur de 445.111,50 euros dans le cadre de l’apurement des comptes de la coproduction de l’émission « On n’est pas couché ») ;
II – SUR L’APUREMENT DES COMPTES DE LA COPRODUCTION DE L’EMISSION « ON N’EST PAS COUCHE » (ONPC)
Vu notamment les articles 6 et 7.3 des contrats de coproduction entre les parties,
1/ sur les créances de TOUT SUR L’ECRAN envers RUQ et LITTLE BROS
Recevant TOUT SUR L’ECRAN en son appel incident de ce chef,
– INFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS de ses demandes envers les sociétés RUQ PRODUCTIONS et LITTLE BROS au titre de leur contribution à la perte de 389.599,34 euros HT résultant du bilan de coproduction de la dernière saison (2019/2020) du programme ONPC ;
Statuant à nouveau,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 224.768,85 euros TTC (187.307,37 euros HT), au titre du solde négatif du compte de coproduction du programme ONPC sur la saison 2019/2020 ;
– CONDAMNER la société LITTLE BROS, au même titre, à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 8.990,75 euros TTC (7.492,29 euros HT) ;
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 733.546,79 euros TTC (611.288,99 euros HT), au titre de la restitution des sommes que TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS lui avait indûment versées concernant les Best of de l’émission ONPC ;
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société LITTLE BROS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 29.341,89 euros TTC (24.451,57 euros HT), au titre de la restitution des sommes que TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS lui avait indûment versées concernant les Best of de l’émission ONPC ;
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 7.257,93 euros TTC (6.048,28 euros HT), au titre de la refacturation des droits de diffusion des vidéoclips diffusés en 2018 dans l’émission « On n’est pas couché » ;
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société LITTLE BROS, au même titre, à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 290,32 euros TTC (241,93 euros HT) ;
Ajoutant au jugement entrepris,
– ASSORTIR les condamnations allouées à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS, des chefs précédents, des intérêts légaux à compter du 12 janvier 2021 ;
Recevant TOUT SUR L’ECRAN en son appel incident de ce chef,
– INFIRMER le jugement entrepris en qu’il a rejeté la demande de TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS relative à la communication des recettes perçues par RUQ PRODUCTIONS et LITTLE BROS au titre du livre « On préfère encore en rire » ;
Statuant à nouveau et à titre reconventionnel,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser la somme forfaitaire de 100.000 euros à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS, au titre de sa quote-part sur les recettes secondaires tirées du livre « On préfère encore en rire » ;
2/ sur les créances invoquées par RUQ envers TOUT SUR L’ECRAN
– DONNER ACTE à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS qu’elle ne conteste pas la facture RUQ n°2005040 du 29 mai 2020 de 8.484,96 euros TTC (7.707,80 euros HT) et la facture RUQ n°2005042 du 29 mai 2020 de 3.249,26 euros TTC (2.707,72 euros HT) ;
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que la facture RUQ n°2005041 du 29 mai 2020 de 264.205,78 euros TTC (220.171,48 euros HT) n’était due qu’à hauteur de 149.401,68 euros TTC (124.501,40 euros HT) ;
Recevant TOUT SUR L’ECRAN en son appel incident de ce chef,
– INFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à payer la facture RUQ n°2005046 du 30 juin 2020 d’un montant de 39.951,90 euros TTC (33.293,25 euros HT) ;
Statuant à nouveau,
– DEBOUTER la société RUQ PRODUCTIONS de sa demande de paiement au titre de sa facture n°2005046, qui est indue dans sa totalité ;
– DEBOUTER la société RUQ PRODUCTIONS de l’ensemble des demandes reconventionnelles qu’elle a formées en cause d’appel ;
3/ sur les créances invoquées par LITTLE BROS envers TOUT SUR L’ECRAN
– DONNER ACTE à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS qu’elle ne conteste pas la facture LITTLE BROS n°20026 du 10 juin 2020 de 129,97 euros TTC (108,31 € HT) et la facture LITTLE BROS n°20027 du 10 juin 2020 de 339,41 euros TTC (282,84 € HT) ;;
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que la facture LITTLE BROS n°20025 du 10 juin 2020 de 10.568,23 euros TTC (8.806,86 euros HT) n’était due qu’à hauteur de 5.976,07 euros TTC (4.980,06 euros HT) ;
– DEBOUTER la société LITTLE BROS de l’ensemble des demandes reconventionnelles qu’elle a formées en cause d’appel ;
III – SUR LES DEMANDES SUBSIDIAIRES DE TOUT SUR L’ECRAN
Recevant TOUT SUR L’ECRAN en ses demandes subsidiaires et y faisant droit,
Si la Cour estime que TOUT SUR L’ECRAN n’est pas fondée à réclamer la restitution des sommes versées au titre des Best of de l’émission « On n’est pas couché »,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS une indemnité complémentaire de 254.709 euros (en plus de la somme précitée de 1.693.928 euros), en compensation de la perte supplémentaire de marge sur coûts variables subie par la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS tenant compte des recettes des Best of de l’émission « On n’est pas couché » ;
Si la Cour estime que TOUT SUR L’ECRAN n’était pas fondée à intégrer les coûts des licenciements économiques dans le bilan de coproduction de la dernière saison (2019/2020) du programme ONPC,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 905.378,74 euros (au lieu de la somme précitée de 460.267,24 euros), en indemnisation de la totalité du coût des licenciements économiques auxquels TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS a été contrainte de procéder du fait de la brutalité de la rupture des relations commerciales établies ;
Si la Cour estime que TOUT SUR L’ECRAN ne pouvait pas procéder à la compensation de la facture RUQ n°2005046 du 30 juin 2020 de 39.951,90 euros TTC dans le cadre du bilan de la dernière saison (2019/2020) du programme ONPC, auquel cas son résultat négatif passe de -389.599,34 € HT à -458.849,34 € HT, soit 550.619,21 € TTC,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS, au titre de sa contribution au solde du compte de coproduction de la saison 2019/2020, à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN la somme supplémentaire de 39.951 euros TTC (en plus de la somme de 224.768,85 euros TTC) ;
– CONDAMNER la société LITTLE BROS, au titre de sa contribution au solde du compte de coproduction de la saison 2019/2020, à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN la somme supplémentaire de 1.598,08 euros TTC (en plus de la somme de 8.990,75 euros TTC) ;
IV ‘ EN TOUT ETAT DE CAUSE
– ORDONNER la compensation entre les sommes dues par RUQ PRODUCTIONS à TOUT SUR L’ECRAN et les sommes dues par TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à RUQ PRODUCTIONS ;
– ORDONNER la compensation entre les sommes dues par LITTLE BROS à TOUT SUR L’ECRAN et les sommes dues par TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS à LITTLE BROS ;;
– DEBOUTER les sociétés RUQ PRODUCTIONS et LITTLE BROS de l’ensemble de leurs demandes, fins, moyens et prétentions ;
Ajoutant au jugement entrepris,
– CONDAMNER la société RUQ PRODUCTIONS à verser à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 6.648 euros, en remboursement des émoluments prélevés par l’huissier sur les sommes saisies sur le compte bancaire de RUQ PRODUCTIONS, conformément à l’article A 444-32 du Code de commerce ;
– CONDAMNER la société LITTLE BROS à verser à TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS la somme de 2.414,77 euros, en remboursement des émoluments prélevés par l’huissier sur les sommes saisies sur le compte bancaire de LITTLE BROS, conformément à l’article A 444-32 du Code de commerce ;
– CONDAMNER in solidum les sociétés RUQ PRODUCTIONS et LITTLE BROS à verser à la société TOUT SUR L’ECRAN PRODUCTIONS, en cause d’appel, la somme de 60.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– CONDAMNER in solidum les sociétés RUQ PRODUCTIONS et LITTLE BROS aux entiers dépens d’appel, avec distraction au profit de la Selarl BDL Avocats, conformément à l’article 699 du Code de procédure civile. » ;
;
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties susvisées quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens respectifs.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 5 septembre 2024
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la Cour, sauf en ce qu’il a condamné la SAS Ruq Productions à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions la somme de 219.375 € en indemnisation des licenciements économiques,
STATUANT A NOUVEAU,
CONDAMNE la SAS Ruq Productions à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions la somme de 452.689,07 € en indemnisation du coût des licenciements économiques,
;
Y AJOUTANT,
CONDAMNE la SAS Ruq Productions à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions les intérêts au taux légal sur la somme de 611.288,99 € HT à compter du 12 janvier 2021,
CONDAMNE la SARL Little Bros à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions les intérêts au taux légal sur la somme de 24.451,57 € HT à compter du 12 janvier 2021,
CONDAMNE la SAS Ruq Productions à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions les intérêts au taux légal sur la somme de 6.048,28 € HT à compter du 12 janvier 2021,
CONDAMNE la SARL Little Bros à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions les intérêts au taux légal sur la somme de 241,93 € HT à compter du 12 janvier 2021,
CONDAMNE la SAS Tout sur l’Ecran Productions à payer à la SAS Ruq Productions les intérêts au taux légal sur la somme de 167.573,17 € à compter du 21 décembre 2020,
CONDAMNE la SAS Tout sur l’Ecran Productions à payer à la SAS Ruq Productions la somme de 212.912 € HT au titre du solde positif de la marge de coproduction pour la saison 2019/2020 de l’émission « ;On n’est pas couché ;»,
CONDAMNE la SAS Tout sur l’Ecran Productions à payer à la SARL Little Bros les intérêts au taux légal sur la somme de 5.371,21 € HT à compter de la date d’exigibilité des factures correspondantes,
CONDAMNE la SAS Tout sur l’Ecran Productions à payer à la SARL Little Bros la somme de 8.516,50 € HT au titre de la marge de coproduction pour la saison 2019/2020,
CONDAMNE la SAS Ruq Productions et la SARL Little Bros aux dépens de l’appel, dont distraction au profit de la SELARL BDL Avocats,
;
CONDAMNE la SAS Ruq Productions et la SARL Little Bro à payer à la SAS Tout sur l’Ecran Productions la somme de ;20.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE les parties de leurs autres demandes.
;
LE GREFFIER ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ;LE PRESIDENT
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