Cour d’appel de Paris, 12 mars 2025, RG n° 24/10699
Cour d’appel de Paris, 12 mars 2025, RG n° 24/10699

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Publicité des débats et validité contractuelle : enjeux et conséquences professionnelles.

Résumé

Rejet de la demande de huis clos

Dans cette affaire, le tribunal a d’abord rejeté la demande d’un dirigeant d’entreprise visant à écarter la publicité des débats. Le bâtonnier arbitre a estimé que la nature de l’affaire ne justifiait pas un huis clos, soulignant qu’aucun risque de violation de la vie privée n’était avéré. Le dirigeant a contesté cette décision, arguant que la divulgation de certaines pièces et de son adresse personnelle portait atteinte à son intimité. Cependant, la cour a confirmé le principe de publicité des débats, considérant que le dirigeant n’avait pas démontré de préjudice.

Nullité du contrat de collaboration

Le dirigeant a demandé la nullité de son contrat de collaboration, soutenant qu’il était entaché d’un vice de consentement. Il a affirmé que sa collaboratrice, alors en congé de maternité, avait profité de sa situation de faiblesse pour le pousser à signer un nouveau contrat. En revanche, la collaboratrice a soutenu que c’était le dirigeant qui avait trompé ses collaborateurs sur sa capacité à contracter. La cour a conclu que le dirigeant n’avait pas prouvé l’existence d’un vice de consentement, fragilisant ainsi sa demande.

Régularité du contrat de collaboration

Le dirigeant a également contesté la régularité du contrat, arguant qu’il ne prévoyait pas de période d’essai, ce qui serait contraire aux règles de la profession. La collaboratrice a rétorqué que cette absence était dans son intérêt. La cour a jugé que le contrat était valide et que son application ne pouvait être remise en cause par l’absence d’une période d’essai, confirmant ainsi la régularité de la relation de travail.

Rupture du contrat et conséquences financières

Concernant la rupture du contrat, la cour a constaté que celle-ci était imputable au dirigeant, qui n’a pas réussi à prouver qu’il s’agissait d’une démission de la collaboratrice. En conséquence, le tribunal a validé les demandes de la collaboratrice concernant les honoraires dus et les indemnités pour les droits à repos non pris, totalisant une somme significative à la charge du dirigeant.

Dommages et intérêts

Le bâtonnier a également accordé des dommages et intérêts à la collaboratrice pour le préjudice moral et financier subi suite à la rupture brutale du contrat. Le dirigeant a contesté cette indemnisation, mais la cour a confirmé que les conditions de la rupture étaient objectivement fautives et ont causé un préjudice à la collaboratrice.

Condamnation aux dépens

Enfin, le tribunal a condamné le dirigeant à payer les dépens ainsi qu’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la collaboratrice, confirmant ainsi la décision du bâtonnier. La cour a ordonné la jonction des deux affaires en cours, consolidant ainsi le traitement de cette affaire complexe.

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 13

ARRÊT DU 12 MARS 2025

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/10699 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CJSRL et N° RG 24/14043

Décision déférée à la Cour : Décision du 28 Mai 2024 -Bâtonnier de l’ordre des avocats de PARIS

APPELANT

Monsieur [H] [C]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Comparant

Assisté de Maître Martine VALOT FOREST, avocat au barreau de PARIS, toque : B0883, substituée par Maître Florence GLEYZE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ

Madame [M] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Non comparante

Représentée par Maître Alexandre CORATELLA de la SELEURL AGILAW, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Janvier 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de Chambre

Madame Estelle MOREAU, Conseillère

Madame Nicole COCHET, Magistrate Honoraire juridictionnel

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Michelle NOMO

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 12 mars 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de Chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

Mme [M] [Y] a été recrutée en tant que collaboratrice au sein de la Selarl [C] et associés le 12 mai 2021.

La Selarl ayant fait l’objet d’une liquidation le 5 janvier 2023, un nouveau contrat de collaboration à effet au 27 février 2023 a été conclu avec M. [C], celui-ci entendant poursuivre son exercice professionnel en son nom personnel.

Mme [Y] a perçu pour février et mars 2023 les sommes qui lui étaient dues, sur la base contractuelle d’une rétrocession mensuelle de 6000 euros HT, outre une somme de 3 850 euros.

Puis, M. [C] ayant été sanctionné le 23 mars 2023 par cette cour d’une interdiction temporaire d’exercice de 18 mois dont 6 assortis du sursis, effective à date de la notification de l’arrêt advenue le 19 avril suivant, il a été mis fin le 17 avril 2023 au contrat de Mme [Y].

Celle-ci, après avoir recherché en vain une conciliation devant la commission de règlement des difficultés d’exercice, a saisi le 5 février 2024 la juridiction du bâtonnier d’une demande d’arbitrage pour voir qualifier les conditions de son départ – rupture fautive du contrat par M. [C] selon elle, démission volontaire de sa part selon M. [C] – et obtenir le règlement des sommes qu’elle considère lui être dues.

Par décision du 28 mai 2024, le bâtonnier, après avoir rejeté la demande de huis clos présentée par M. [C] et celle de Mme [Y] tendant à voir écarter des débats comme irrecevable une attestation de M.[K] [N], a jugé les conditions de la rupture de la collaboration de Mme [Y] intervenue le 17 avril 2023 à l’initiative de M. [C] fautives et non conformes aux dispositions du contrat signé et du Règlement intérieur national des avocats (RIN) et a en conséquence :

– condamné M. [C] à verser à Mme [Y]

– une somme de 21 400 euros HT au titre de la rétrocession d’honoraires due, soit 25 680 euros TTC,

– une somme de 1 900 euros HT au titre de ses repos rémunérés non pris, soit 2280 euros TTC,

– une somme de 1 000 euros au titre du préjudice économique et financier né de l’inexécution du RIN et du contrat de collaboration en lien avec le délai de prévenance,

– une somme de 3 000 euros au titre de la rétention abusive de la rétrocession d’honoraires due,

– une somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral subi,

– débouté Mme [Y] de sa demande d’indemnisation au titre d’un préjudice réputationnel et de sa demande d’octroi d’une astreinte,

– condamné M. [C] à verser à Mme [Y] une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Réparant une discordance entre les chiffres figurant aux motifs et ceux du dispositif de cette décision, un arrêté rectificatif du 3 juin 2024 a ramené à 2 000 euros pour chacune le montant des deux condamnations indemnitaires prononcées en réparation d’une part de la rétention abusive de rétrocession d’honoraires, d’autre part du préjudice moral subi.

Par lettres recommandées des 3 et 10 juin 2024, M. [C] a fait appel de l’une et l’autre de ces deux décisions.

Dans les conclusions communiquées le 30 octobre 2024 et visées par le greffe le 15 janvier 2025 qu’il développe oralement à l’audience, M. [C] demande à la cour, par infirmation de la décision dont appel,

In limine litis, de

– ordonner que les débats soient évoqués en huis clos, hors débat public,

– déclarer recevables les attestations de M.[K] [N],

Sur le fond, de débouter Mme [Y] de ses demandes,

A titre principal, de juger son consentement vicié, et en conséquence juger nul le contrat de collaboration du 9 février 2023,

A titre subsidiaire, de

– juger ce même contrat non conforme aux dispositions du RIN en ce qu’il n’a pas prévu de période d’essai,

– juger qu’une période d’essai devait s’appliquer s’agissant d’une clause rendue obligatoire par le RIN qui régit les relations entre avocats,

– juger que la période d’essai ne saurait être inférieure à deux mois, le contrat du 12 mai 2021 constituant un précédent eu égard à la commune intention des parties,

– juger que le départ de Mme [Y] le 17 avril 2023 est intervenu pendant cette période d’essai,

En conséquence, de juger qu’aucune indemnité n’est due, et subsidiairement que seul le délai réduit de 8 jours est applicable,

En conséquence, de :

– juger la facture du 5 mai 2023 fausse en son quantum et la ramener à 4 080 euros TTC,

– juger la facture du 29 septembre 2023 nulle et non avenue,

– rejeter toute demande au titre du repos non pris,

– débouter Mme [Y] de l’intégralité de ses demandes au titre des préjudices allégués,

– la débouter de sa demande d’astreinte et d’article 700 du code de procédure civile,

– ordonner la décision à intervenir opposable à Me [F] mandataire liquidateur,

– condamner Mme [Y] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans les conclusions communiquées le 23 décembre 2024 et visées par le greffe le 15 janvier 2025 qu’elle soutient oralement à l’audience, Mme [Y] demande à la cour

In limine litis,

– de rejeter la demande de M. [C] visant à écarter la publicité des débats,

Sur le fond, de

– le débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer les deux décisions dont appel en leurs dispositions,

Et statuant à nouveau, de

A titre principal,

– débouter M.[C] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire, de

– requalifier sa relation de travail avec M. [C] en contrat à durée indéterminée soumis en toutes ses dispositions à la convention collective nationale des avocats et de leur personnel du 20 février 1979 étendue par l’arrêté du 13 novembre 1979,

– le condamner au paiement de l’intégralité des arriérés de salaires et indemnités de congé payés,

– ordonner la remise des documents de fin de contrat,

– le condamner à prendre en charge l’intégralité des cotisations professionnelles qu’elle a indûment versées pour la période du 9 février 2023 au 17 juillet 2023,

En tout état de cause, de

– condamner M. [C] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’artcile 700 du code de procédure civile

– le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour

Ordonne la jonction des deux affaires enrôlées sous les numéros RG 24/10699 et 24/14043,

Rejette la demande de non publicité des débats formée par M. [H] [C],

Confirme la décision du 28 mai 2024 rectifiée par la décision du 3 juin 2024 en toutes ses dispositions,

Condamne M. [H] [C] aux dépens d’appel,

Le condamne à payer à Mme [M] [Y] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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