Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Cautionnement et prescription : enjeux de la subrogation dans les relations contractuelles.
→ RésuméContexte de l’AffaireLa présente affaire concerne un contrat de brasseur conclu le 9 mars 2012 entre une société brasserie et une société de holding. Dans le cadre de ce contrat, la société brasserie s’est portée caution d’un prêt de 120 465 euros accordé par une banque à la société de holding, en échange de l’engagement de cette dernière à s’approvisionner auprès de la brasserie. Prêts et CautionsLe même jour, la société de holding a souscrit un prêt de 120 465 euros auprès de la banque, ce prêt étant garanti par un nantissement sur le fonds de commerce d’une autre société ainsi que par plusieurs cautions personnelles. Une des cautions, une personne physique, s’est engagée à rembourser les sommes dues si la société de holding ne s’exécutait pas. Procédures JudiciairesEntre 2014 et 2015, plusieurs sociétés, dont la société de holding et une autre société, ont été placées en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire. Les liquidations ont été clôturées pour insuffisance d’actif. En 2022, la banque a reconnu avoir reçu des paiements de la société brasserie pour des échéances impayées et a subrogé cette dernière dans ses droits contre la caution. Demande de RemboursementLe 31 mai 2022, la société brasserie a mis en demeure la caution de rembourser une somme de 112 988,45 euros. Suite à l’inaction de la caution, la société brasserie a assigné cette dernière devant le tribunal judiciaire de Paris en octobre 2022. Jugement du TribunalLe tribunal a rendu un jugement le 29 février 2024, déboutant la société brasserie de toutes ses demandes et condamnant cette dernière aux dépens, ainsi qu’à verser une somme à la caution au titre des frais de justice. Appel de la DécisionLa société brasserie a interjeté appel de cette décision, demandant l’infirmation du jugement et le remboursement de la somme due par la caution. En réponse, la caution a soutenu que l’action de la société brasserie était prescrite. Arguments sur la PrescriptionLa caution a fait valoir que le délai de prescription de cinq ans avait commencé à courir à partir du paiement effectué par la société brasserie en 2015. La société brasserie a rétorqué que la prescription avait été interrompue par la déclaration de créance au passif de la société de holding. Décision de la CourLa cour a jugé que l’action en paiement de la société brasserie était irrecevable en raison de la prescription, confirmant ainsi le jugement de première instance. La cour a également débouté la société brasserie de sa demande fondée sur la subrogation aux droits de la banque et a condamné cette dernière à payer des frais à la caution. |
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 6
ARRET DU 12 MARS 2025
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/06454 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CJGT7
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Février 2024 – tribunal judiciaire de Paris 9ème chambre 3ème scetion – RG n° 22/12840
APPELANTE
S.A.S. KARLSBRAU CHR
[Adresse 2]
[Localité 3]
N°SIREN : 493 965 115
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque : K0148
Ayant pour avocat plaidant Me Thomas-denis BONZY de la SELARL GUMUSCHIAN ROGUET BONZY POLZELLA, avocat au barreau de Grenoble, toque : B25
INTIMÉE
Madame [Y] [P]
née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 6]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de Paris, toque : P0480
Ayant pour avocat plaidant Me Elodie MADAR, avocat au barreau de Paris, toque : A0469, substituée à l’audience par Me Dyna GIUILI COHEN, avocat au barreau de Paris,toque : A0469
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laurence CHAINTRON,conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère
Mme Laurence CHAINTRON, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marc BAILLY, président de chambre, et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par convention en date du 9 mars 2012, la société La Compagnie du Clain et la société Karlsbrau CHR ont conclu un contrat dit ‘de brasseur’ aux termes duquel la société Karlsbrau CHR (brasserie) s’est portée caution d’un prêt d’un montant de 120 465 euros consenti par l’établissement bancaire CIC Est à La Compagnie du Clain, en contrepartie de quoi La Compagnie du Clain s’est engagée à s’approvisionner auprès de la société Karlsbrau CHR.
Le même jour, par acte séparé, la société La Compagnie du Clain a souscrit auprès de l’établissement bancaire CIC Est, un prêt d’un montant de 120 465 euros.
Ce prêt cautionné par la société Karlsbrau CHR a été également garanti par un nantissement sur le fonds de commerce de la société Les Archives, ainsi que par quatre cautions personnelles.
C’es ainsi que par acte sous seing privé du 14 mars 2012, Mme [Y] [P] s’est portée caution solidaire de la société La Compagnie du Clain dans la limite de la somme de 144 558 euros, pour une durée de 85 mois, et s’est engagée à rembourser à la Brasserie les sommes dues sur ses revenus et ses biens si la société Compagnie du Clain n’y satisfaisait pas elle-même. Elle était donc sous caution de la caution.
Par jugement du 24 avril 2014, la société Les Archives a été mise en redressement judiciaire, puis par jugement du 7 novembre 2014, elle a bénéficié d’un plan de cession au profit de la société Archeum, avant d’être mise en liquidation judiciaire le 17 mars 2015.
La holding, la société La Compagnie du Clain a fait l’objet d’un redressement judiciaire le 12 juin 2014, puis d’une liquidation judiciaire le 14 avril 2015.
La société Le Meteo a fait l’objet d’un redressement judiciaire le 24 avril 2014, puis d’un plan de cession par jugement du 9 septembre 2014, converti en liquidation judiciaire le 7 octobre 2014.
Les liquidations judiciaires des sociétés Les Archives et Le Meteo ont finalement été clôturées pour insuffisance d’actif.
Selon quittance subrogative du 9 février 2022, le CIC Est a reconnu avoir reçu de la société Karlsbrau CHR la somme de 112 988,64 euros correspondant aux échéances impayées des années 2013 à 2017 et a subrogé la société Karlsbrau CHR dans ses droits à l’encontre du débiteur principal.
Le 31 mai 2022, le conseil de la société Karlsbrau CHR, Bastille Avocat, a adressé un courrier à Mme [P] la mettant en demeure de procéder au remboursement de la somme de 112 988,45 euros entre les mains de sa cliente sous 30 jours.
Par exploit d’huissier du 13 octobre 2022, la société Karlsbrau CHR a fait assigner Mme [P] devant le tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir le remboursement de cette somme.
Par jugement contradictoire rendu le 29 février 2024, le tribunal judiciaire de Paris a :
– débouté la société Karlsbrau CHR de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné la société Karlsbrau CHR aux entiers dépens ;
– condamné la société Karlsbrau CHR à payer à Mme [Y] [P] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration d’appel du 28 mars 2024, la société Karlsbrau CHR a relevé appel de cette décision.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 octobre 2024, la société Karlsbrau CHR demande, au visa des articles 1250 et suivants et 1343-2 du code civil, à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 29 février 2024 en ce qu’il a :
– débouté la société Karlsbrau CHR de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné la société Karlsbrau CHR aux entiers dépens ;
– condamné la société Karlsbrau CHR à payer à Mme [Y] [P] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Et, statuant à nouveau :
– déclarer recevable et non prescrite l’action de la société Karlsbrau CHR,
– condamner Mme [P] à lui payer une somme de 112 988,45 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 mai 2022,
– ordonner la capitalisation des intérêts dus en application de l’article 1343-2 du code civil,
– débouter Mme [P] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
– condamner Mme [P] à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 octobre 2024, Mme [P] demande, au visa des articles 1154 ancien, 1250 ancien, 1251 ancien,1344-1, 2224 et 2314 du code civil, des articles L. 622-26 et L. 622-24 du code de commerce et des articles 699 et 700 du code de procédure civile, à la cour de :
A titre principal
– juger la société Karlsbrau CHR recevable mais mal fondée en son appel ;
– débouter la société Karlsbrau CHR de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– réformer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 29 février 2024 ;
Et statuant à nouveau :
– juger prescrite l’action de la société Karlsbrau CHR ;
A titre subsidiaire
-confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 29 février 2024 en ce qu’il a :
-débouté la société Karlsbrau CHR de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné la société Karlsbrau CHR aux entiers dépens ;
– condamné la société Karlsbrau CHR à payer à Mme [Y] [P] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
En tout état de cause
– débouter la société Karlsbrau CHR de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la société Karlsbrau CHR aux entiers dépens ainsi qu’à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 17 décembre 2024 et l’audience de plaidoirie fixée au 16 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS,
REFORME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 29 février 2024 ;
DÉCLARE irrecevable comme prescrite l’action en paiement de la société Karlsbrau CHR à l’encontre de Mme [Y] [P] ;
DÉBOUTE la société Karlsbrau CHR de sa demande fondée sur sa subrogation aux droits de la société CIC Est ;
CONDAMNE la société Karlsbrau CHR à payer la somme de 2 000 euros à Mme [Y] [P] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Karlsbrau CHR aux entiers dépens d’appel ;
REJETTE toute autre demande.
Le greffier Le président
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