Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Nancy
Thématique : Inopposabilité et présomption d’imputabilité : Clarifications sur la prise en charge des accidents du travail
→ RésuméFaits
Le 27 décembre 2018, un conducteur routier, en tentant d’éviter un véhicule, a été victime d’un accident de la circulation, entraînant une luxation trapézo-métarpienne de la main gauche. La société employeur a déclaré cet accident à la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône, qui a pris en charge les soins et les arrêts de travail du salarié, initialement fixés du 28 décembre 2018 au 14 juillet 2019. La date de consolidation de l’état de santé du salarié a été reportée à plusieurs reprises, en raison d’une rechute survenue en juin 2020. Procédure Le 11 avril 2023, la société a contesté la prise en charge des arrêts de travail et des soins devant la commission médicale de recours amiable de la caisse, qui a implicitement rejeté cette contestation. La société a alors saisi le tribunal judiciaire d’Épinal, qui a rendu un jugement le 3 avril 2024, déclarant la société recevable dans son recours et infirmant la décision de la caisse. Ce jugement a été notifié à la caisse, qui a interjeté appel le 6 mai 2024. Prétentions et moyens La caisse demande à la cour d’infirmer le jugement du tribunal d’Épinal, arguant que ce dernier a méconnu l’objet du litige en prononçant l’inopposabilité de la décision de prise en charge. La société, quant à elle, demande la confirmation du jugement, tout en sollicitant une expertise médicale pour vérifier la justification des soins et arrêts de travail. Décision La cour a infirmé le jugement du tribunal d’Épinal, déclarant opposable à la société la prise en charge des soins et arrêts de travail jusqu’à la date de consolidation. La société a été condamnée aux dépens, tant en première instance qu’en appel. |
ARRÊT N° /2025
SS
DU 26 MARS 2025
N° RG 24/00964 – N° Portalis DBVR-V-B7I-FLQJ
Pole social du TJ d’EPINAL
24/134
03 avril 2024
COUR D’APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE
SECTION 1
APPELANTE :
Organisme CPAM DES BOUCHES DU RHONE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
Service contentieux – secteur Juridictions
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Madame [O] [J], régulièrement munie d’un pouvoir de représentation
INTIMÉE :
Société [4] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
[Adresse 6]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Xavier BONTOUX de la SAS BDO AVOCATS LYON, avocat au barreau de LYON – Dispense de comparution
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats, sans opposition des parties
Président : Mme BOUC
Siégeant en conseiller rapporteur
Greffier : Madame RIVORY (lors des débats)
Lors du délibéré,
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue en audience publique du 03 Décembre 2024 tenue par Mme BOUC, magistrat chargé d’instruire l’affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Corinne BOUC, présidente, Jérôme LIZET, président assesseur et Dominique BRUNEAU, conseiller, dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 12 Février 2025 ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 26 Mars 2025 ;
Le 26 Mars 2025, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS
Selon formulaire du 28 décembre 2018, la S.A.S.U. [4] (la société) a complété une déclaration d’accident du travail concernant M. [W] [L]-[C], conducteur routier depuis le 24 avril 2018, victime d’un accident de la circulation en voulant éviter un véhicule le 27 décembre 2018, qui lui a causé une luxation trapézo-métarpienne de la main gauche.
Par décision du 14 janvier 2019, la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône (la caisse) a informé son employeur de la prise en charge de cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.
M. [W] [L]-[C] a été placé en arrêt de travail du 28 décembre 2018 au 14 juillet 2019.
La date de consolidation a été initialement fixée au 15 juillet 2019, avec poursuite des soins, reportée au 9 septembre 2029, suite au recours du salarié et expertise technique médicale.
Une rechute a eu lieu le 3 juin 2020 pour arthrodèse consolidée le 19 mars 2021, avec fixation d’une incapacité permanente partielle à 13 %, pour un ‘déficit de force de préhension de la main gauche non dominante, perte de force musculaire du pouce et déficit d’extension et de flexion du poignet gauche modéré’.
Le 11 avril 2023, la société a contesté la décision de prise en charge de l’ensemble des arrêts de travail (197 jours) et soins prescrits à M. [L]-[C] au titre de l’accident du travail du 27 décembre 2018 devant la commission médicale de recours amiable de la caisse, et a désigné un médecin aux fins de recevoir le rapport médical établi par le médecin conseil de la caisse.
Le 5 septembre 2023, la société a contesté la décision implicite de rejet de ladite commission devant le pôle social du tribunal judiciaire d’Épinal.
Par jugement du 3 avril 2024, le tribunal judiciaire d’Épinal a :
– déclaré la société [4] recevable en son recours ;
– infirmé la décision du 14 janvier 2019 de la CPAM des Bouches du Rhône ;
– déclaré inopposable à la société [4] la décision du 14 janvier 2019 de la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône de prise en charge de l’accident du travail de M. [W] [L]-[C] en date du 27 décembre 2018 au titre de la législation des risques professionnels ;
– condamné la CPAM des Bouches du Rhône aux dépens.
Ce jugement a été notifié à la caisse par lettre recommandée dont l’accusé de réception est revenu avec la date du 8 avril 2024.
Par courrier reçu à la cour le 6 mai 2024, la caisse a interjeté appel de ce jugement.
Suivant conclusions reçues au greffe le 14 novembre 2024, la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône demande à la cour de :
– la recevoir en ses conclusions ;
– infirmer le jugement d’inopposabilité rendu le 3 avril 2024 par le tribunal judiciaire d’Epinal, pôle social ;
Statuant à nouveau,
– constater in limine litis qu’au regard de l’étendue de la saisine initialement introduite par la société, le tribunal judiciaire d’Epinal ‘ pôle social a prononcé l’inopposabilité de la décision du 14 janvier 2019 prenant en charge l’accident du travail dont a été victime M. [L]-[C] le 14 décembre 2018 en méconnaissance des article 4 et 5 du code de procédure civile et de la présomption d’imputabilité de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
– constater en outre que le tribunal judiciaire d’Epinal ‘ pôle social a à tort sanctionné d’inopposabilité le non-respect de l’article R. 142-8-3 du code de la sécurité sociale, lequel n’est assorti d’aucune sanction ;
Vu la continuité de soins et de symptômes jusqu’à la consolidation du 9 septembre 2019,
– déclarer opposable à la société [4], jusqu’à la consolidation du 9 septembre 2019, la prise en charge de l’ensemble des soins et arrêts de travail rattachés à l’accident du travail dont a été victime M. [L]-[C] le 14 décembre 2018 ;
– débouter la société [4] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Suivant conclusions reçues au greffe le 2 décembre 2024, la S.A.S.U. [4] demande à la cour de :
– Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 avril 2024 par le tribunal judiciaire d’Épinal ;
À titre subsidiaire,
– Ordonner, avant dire droit, une expertise médicale judiciaire sur pièces aux frais avancés de la caisse ou de l’employeur, le litige intéressant les seuls rapports caisse/employeur, afin de vérifier la justification des soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse au titre de l’accident du 27 décembre 2018 déclaré par M. [L]-[C] ;
– Renvoyer l’affaire à une audience ultérieure pour qu’il soit débattu du contenu du rapport d’expertise et juger inopposables à la société [4] les prestations prises en charge au-delà de la date réelle de consolidation et celles n’ayant pas de lien direct, certain et exclusif avec l’accident du 27 décembre 2018 déclaré par M. [L]-[C].
Pour l’exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées reprises oralement à l’audience.
Appelée à l’audience du 3 décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 12 février 2025, prorogé au 26 mars 2025.
PAR CES MOTIFS
La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
Infirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 avril 2024 par le tribunal judiciaire d’Épinal ;
Statuant à nouveau,
Déboute la S.A.S.U [4] de toutes ses demandes ;
Déclare opposable à la S.A.S.U [4] jusqu’à la consolidation du 9 septembre 2019, la prise en charge de l’ensemble des soins et arrêts de travail rattachés à l’accident du travail dont a été victime M. [L]-[C] le 14 décembre 2018 ;
Condamne la S.A.S.U. [4] aux dépens de première instance ;
Y ajoutant,
Condamne la S.A.S.U. [4] aux dépens d’appel.
Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Et signé par Madame Corinne BOUC, Présidente de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE
Minute en huit pages
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