Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Nancy
Thématique : Exonération de la C3S sur les transferts intracommunautaires : enjeux et conditions.
→ RésuméLe 26 mars 2025, la Cour a rendu un arrêt concernant une affaire impliquant la société [5] et l’URSSAF Provence Alpes Côtes d’Azur. La société [5] avait demandé, par courrier du 10 mai 2021, la restitution de sommes qu’elle estimait avoir indûment versées au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) pour les années 2018 à 2020. Elle contestait que la part de son chiffre d’affaires correspondant à des transferts intracommunautaires de stocks devait être incluse dans l’assiette de la C3S, totalisant ainsi 523.874 euros.
L’URSSAF a rejeté cette demande par une décision du 4 novembre 2021. La société a alors saisi la commission de recours amiable, qui a également rejeté sa demande le 23 février 2022. En réponse, la société [5] a porté l’affaire devant le tribunal judiciaire d’Épinal, qui, par jugement du 20 mars 2024, a annulé la décision de l’URSSAF et ordonné le remboursement des sommes versées, en considérant que la réglementation française était contraire à la législation européenne. L’URSSAF a interjeté appel de ce jugement le 12 avril 2024, demandant notamment un sursis à statuer en attendant des décisions de la Cour de cassation sur des affaires similaires. Dans ses conclusions, l’URSSAF a également proposé que la société [5] puisse déduire la valeur des biens non vendus sous certaines conditions. La société [5] a réagi en demandant à la Cour de confirmer le jugement de première instance et de constater l’absence de mécanisme de déduction dans la réglementation française. L’affaire a été plaidée le 3 décembre 2024 et mise en délibéré, avec une décision de la Cour prévue pour le 26 mars 2025. La Cour a finalement décidé de surseoir à statuer, en attendant les arrêts de la Cour de cassation sur des questions similaires. |
ARRÊT N° /2025
SS
DU26 MARS 2025
N° RG 24/00857 – N° Portalis DBVR-V-B7I-FLIW
Pole social du TJ d’EPINAL
22/108
20 mars 2024
COUR D’APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE
SECTION 1
APPELANTE :
URSSAF PROVENCE-ALPES-COTE D’AZUR prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
Recouvrements C3S
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
S.A.S.. [5] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Angélique JEANNEY de la SELAS FIDAL, avocat au barreau d’EPINAL
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats, sans opposition des parties
Président : Mme BOUC
Siégeant en conseiller rapporteur
Greffier : Madame RIVORY (lors des débats)
Lors du délibéré,
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue en audience publique du 03 Décembre 2024 tenue par Mme BOUC, magistrat chargé d’instruire l’affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Corinne BOUC, présidente, Jérôme LIZET, président assesseur et Dominique BRUNEAU, conseiller, dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 12 Février 2025 ;puis à cette date le délibéré a été prorogé au 26 Mars 2025 ;
Le 26 Mars 2025, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
Faits, procédure, prétentions et moyens
La société [5] est assujettie à la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), recouvrée par l’URSSAF. PACA.
Par courrier du 10 mai 2021, la société [5] a sollicité de l’URSSAF PACA la restitution des sommes qu’elle estime avoir indûment versées au titre de la C3S 2018 à 2020 au motif que la part du chiffre d’affaires correspondant à des transferts intracommunautaires de stocks ne doit pas rentrer dans l’assiette, pour les montants suivants :
– 125.305 € au titre de la C3S 2018 ;
– 195.930 € au titre de la C3S 2019 ;
– 202.639 € au titre de la C3S 2020 ;
Soit un total de 523.874 euros.
Par décision du 4 novembre 2021, l’URSSAF a refusé de faire droit à cette demande.
Le 3 janvier 2022, la société a contesté ce refus devant la commission de recours amiable de l’URSSAF qui, par décision du 23 février 2022, a rejeté sa demande de remboursement.
Le 14 juin 2022, la société a contesté cette décision devant le pôle social du tribunal judiciaire d’Épinal.
Par jugement du 20 mars 2024, le tribunal judiciaire d’Épinal a :
– déclaré la société [5] recevable en son recours ;
– dit n’y avoir lieu à surseoir statuer ;
– dit que la réglementation française, applicable au titre des années 2018, 2019 et 2020 ne comportait pas de mécanisme permettant la déduction de la valeur des biens de l’assiette de la C3S et de la contribution additionnelle, lorsque les biens sont destinés à être vendus dans l’autre État membre ou ont été acheminés dans l’État membre d’origine sans avoir été vendus ;
– dit qu’elle était contraire à la législation européenne qui prohibe les taxes d’effet équivalent à un droit de douane ;
En conséquence,
– annulé la décision de rejet rendue par l’URSSAF PROVENCE ALPES COTES D’AZUR le 4 novembre 2021 ;
– ordonné le remboursement par l’URSSAF PROVENCE ALPES COTES D’AZUR à la société [5] des contributions indument versées au titre des années 2018, 2019 et 2020 pour un montant total de 523 874 euros au principal ainsi que des majorations correspondantes ;
– dit que les sommes à restituer à la société [5] produiront intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande de remboursement adressée le 10 mai 2021, et seront capitalisées dans les conditions de l’article 1154 devenu l’article 1343-2 du code civil ;
– condamné l’URSSAF PROVENCE ALPES COTES D’AZUR à rembourser à la société [5] la somme de 523 874 euros au principal ainsi que les majorations et intérêts correspondants ;
– débouté l’URSSAF PROVENCE ALPES COTES D’AZUR de l’ensemble de ses demandes ;
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;
– condamné l’URSSAF PROVENCE ALPES COTES D’AZUR à verser à la société [5] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civil ;
– condamné aux entiers dépens.
Ce jugement a été notifié à l’URSSAF PACA par lettre recommandée dont l’accusé de réception a été signé le 27 mars 2024.
Par lettre recommandée envoyée le 12 avril 2024, l’URSSAF PACA a interjeté appel de ce jugement.
Suivant ses conclusions reçues au greffe via le RPVA le 29 novembre 2024, l’URSSAF PACA demande à la cour de :
In limine litis et à titre principal :
– surseoir à statuer dans l’attente des arrêts qui seront rendus par la Cour de cassation (pourvoi n° D 22-24.218 et C 22-24.217) sur les deux pourvois formés à l’encontre des deux arrêts rendus par la Cour d’appel de Colmar le 13 octobre 2022 (RG n°21/00810 et RG 21/00811) ;
Au fond et à titre subsidiaire :
– juger que l’Organisme ne s’oppose pas à la déduction de la valeur des biens qui n’auront pas fait l’objet d’une vente ultérieure sous réserve de la présentation par la société [5] d’un justificatif chiffré des biens ayant effectivement fait l’objet d’un réacheminement en France ou d’une destruction ;
– juger que la société SAS [5] venant aux droits et obligations de la société [4] peut déduire sur le formulaire C3S – ou sur papier libre – les biens ayant effectivement fait l’objet d’un réacheminement en France ou d’une destruction ;
Par conséquent :
– juger recevable et fondé son appel ;
– infirmer le jugement rendu le 20 mars 2024 par le tribunal judiciaire d’Epinal et statuer à nouveau ;
Statuant à nouveau :
– juger la société SAS [5] mal fondée en ses demandes de remboursement de la C3S au titre des biens qui ont fait l’objet d’une vente à l’étranger ;
– juger la société SAS [5] fondée en ses demandes de remboursement de la C3S au titre des seuls biens qui n’auraient pas fait l’objet d’une vente à l’étranger (destruction, réacheminement en France) sous réserve qu’elle fournisse les justificatifs nécessaires ;
– condamner la société [5] à lui rembourser les sommes versées en exécution du jugement rendu en première instance et qui produiront intérêts au taux légal à compter du versement, le 31 mai 2024, par l’Organisme, intérêts qui seront capitalisés dans les conditions de l’article 1154 devenu l’article 1342-2 du code civil ;
– condamner la société [5] à lui verser 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Suivant ses conclusions reçues au greffe via le RPVA le 27 novembre 2024, la société [5] demande à la cour de :
– débouter l’URSSAF PACA de sa demande de sursis à statuer ;
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire d’Epinal du 20 mars 2024 ;
– constater que la réglementation française ne comporte pas de mécanisme permettant la déduction de la valeur des biens de l’assiette des contributions lorsque les biens ne sont pas destinés à être vendus dans l’autre Etat membre ou ont été réacheminés dans l’Etat membre d’origine sans avoir été vendus ;
– juger que les articles 28 et 30 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à la réglementation française prévoyant que l’assiette de contributions perçues sur le chiffre d’affaires annuel des sociétés soit calculée en tenant compte de la valeur représentative des biens transférés par un assujetti ou pour son compte, pour les besoins de son entreprise, de cet État membre vers un autre État membre de l’Union européenne ;
– juger que les sommes correspondantes versées par [5] SAS l’ont été indûment ;
– annuler la décision de rejet du 4 novembre 2021 de l’URSSAF ;
– annuler la décision de rejet du 23 février 2022 reçue le 20 avril 2022 de la commission de recours amiable ;
– condamner l’URSSAF PACA à rembourser les contributions contestées pour un montant total de 489.811 € au principal ainsi que les majorations correspondantes, le tout avec intérêts moratoires ;
– juger que le paiement des intérêts moratoires sera calculé à compter de la date de réception de la demande de remboursement faite à l’URSSAF PACA adressée le 10 mai 2021,
– condamner l’URSSAF PACA aux entiers frais et dépens ;
– condamner l’URSSAF PACA au versement d’une somme de 4 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– débouter l’URSSAF PACA de l’ensemble de ses demandes.
Pour l’exposé des moyens des parties, il sera renvoyé aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l’audience.
Plaidé à l’audience du 3 décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 12 février 2025 prorogé au 26 mars 2025.
PAR CES MOTIFS
La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
Surseoit à statuer sur les demandes dans l’attente des arrêts qui seront rendus par la cour de cassation (pourvoi n° D 22-24.218 et C. 22-24.217) sur les deux pourvois formés à l’encontre des arrêts rendus par la Cour d’appel de Colmar le 13 octobre 2022 (RG n° 21/00810 et n° 21/00811) ;
Renvoie l’affaire à l’audience du 16 septembre 2025 à 13 heures 30, la notification du présent arrêt valant convocation à l’audience ;
Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Et signé par Madame Corinne BOUC, Présidente de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE
Minute en six pages
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