Cour d’appel de Metz, 26 mars 2025, RG n° 22/02564
Cour d’appel de Metz, 26 mars 2025, RG n° 22/02564

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Metz

Thématique : Sanctions disciplinaires et contestation des horaires de travail : enjeux et conséquences.

Résumé

Un salarié, en qualité d’agent de service, a été employé par la société Derichebourg Propreté après un transfert de contrat. En mars 2020, il a été placé en arrêt maladie, période durant laquelle l’employeur lui a notifié plusieurs avertissements pour des manquements supposés, notamment le non-respect des horaires de travail et l’exécution de tâches. Le salarié a contesté ces avertissements, arguant qu’il n’avait pas reçu de planning clair et qu’il avait informé son employeur de ses problèmes de santé.

En février 2021, le salarié a subi un accident de travail, mais a été convoqué à un entretien préalable au licenciement pour des comportements jugés inappropriés, notamment une altercation avec un collègue. Le licenciement a été prononcé pour faute grave en mars 2021. Le salarié a alors saisi le conseil de prud’hommes, estimant que les sanctions étaient injustifiées et que son licenciement était abusif.

Le conseil de prud’hommes a annulé les avertissements et jugé le licenciement nul, condamnant la société Derichebourg Propreté à verser des indemnités au salarié. En appel, la société a contesté cette décision, soutenant que les avertissements étaient justifiés et que le licenciement était fondé sur des manquements avérés.

Le salarié a, de son côté, demandé la confirmation du jugement initial, arguant que les sanctions étaient infondées et qu’il avait subi un préjudice moral. La cour a finalement retenu que les avertissements étaient injustifiés et a accordé des dommages et intérêts au salarié, tout en confirmant certaines retenues sur salaire pour absences injustifiées. Le litige a mis en lumière les obligations de l’employeur en matière de clarté des consignes et de respect des droits des salariés en cas de suspension de contrat pour maladie ou accident.

Arrêt n°25/00114

26 mars 2025

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N° RG 22/02564 –

N° Portalis DBVS-V-B7G-F3BG

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Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FORBACH

25 Octobre 2022

21/00248

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

vingt six mars deux mille vingt cinq

APPELANTE :

S.A.S. DERICHEBOURG PROPRETE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Christine SALANAVE, avocat au barreau de METZ avocat postulant

Représentée par Me Nadine JUNG, avocat au barreau de METZ avocat plaidant

INTIMÉ :

M. [B] [S]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Cécile CABAILLOT, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Octobre 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

M. François-Xavier KOEHL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE, Greffier

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [B] [S] a été embauché définitivement à compter du 18 mai 2010 en qualité d’agent de service, par la société Hyperclean reprise par la société Caronet.

A compter du 1er juin 2019, son contrat de travail a été transféré à la SAS Derichebourg Propreté suite à la reprise du chantier Cora à [Localité 1].

M. [S] a été placé en arrêt maladie du 10 mars 2020 au 19 novembre 2020.

Au cours de cette période, la société Derichebourg Propreté a, par courrier du 8 avril 2020, notifié à M. [S] un avertissement pour non-respect de ses horaires de travail et non-exécution d’une tâche qui lui avait été confiée. Par lettre du 27 avril 2020 le salarié a contesté les faits et a sollicité l’annulation de cette sanction, qui a été maintenue par l’employeur dans un écrit du 15 mai 2020.

Par courrier du 14 décembre 2020, M. [S] a reçu notification d’un deuxième avertissement pour non-respect de ses horaires de travail, qu’il a également contesté par un écrit du 22 décembre 2020.

Par un écrit du 14 janvier 2021, la société Derichebourg Propreté a proposé à M. [S] deux avenants de modification de ses horaires de travail, proposition à laquelle le salarié n’a pas donné suite.

Par lettre du 28 janvier 2021, M. [S] a reçu notification d’un avertissement pour avoir scanné un document personnel avec les outils informatiques du magasin Cora de [Localité 1]. Il a contesté ce troisième avertissement par courrier du 4 février 2021, et l’employeur lui a fait connaître par une réponse écrite du 11 février 2021 que la sanction était maintenue.

Par courrier du 12 février 2021, la société Derichebourg Propreté a adressé à M. [S] un rappel à l’ordre pour absence injustifiée et non-respect du délai de prévenance imposé pour poser des congés.

M. [S] a été victime d’un accident de travail survenu le 11 février 2021 (douleurs au dos et au poignet en glissant sur une plaque de verglas), qui a été déclaré par l’employeur le 12 février 2021 à l’organisme social qui a retenu la prise en charge au titre de la législation professionnelle.

M. [S] a été placé en arrêt de travail pour accident du travail à compter du 19 février 2021 jusqu’au 19 avril 2021.

Par courrier du 15 février 2021, M. [S] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 24 février 2021 avec notification d’une mise à pied à titre conservatoire.

M. [S] a été licencié pour faute grave par courrier du 11 mars 2021.

Estimant les sanctions prononcées à son encontre injustifiées, son licenciement abusif, et ne pas avoir été rempli de ses droits en termes de rémunération, M. [S] a, par requête enregistrée le 5 novembre 2021 au greffe, saisi le conseil de prud’hommes de Forbach.

Par jugement contradictoire du 25 octobre 2022 le conseil de prud’hommes de Forbach a statué comme suit :

« Annule l’avertissement du 8 avril 2000 ;

Annule l’avertissement du 14 décembre 2020 ;

Annule l’avertissement du 28 janvier 2021 ;

Juge le licenciement de Monsieur [B] [S] nul ;

Condamne la SAS Derichebourg à payer à M. [B] [S] les sommes de :

– 3 220,26 € brut au titre l’indemnité compensatrice de préavis

– 322,02 € brut au titre des congés payés afférents au préavis

– 1 397,46 € brut à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire

– 139,74 € brut au titre des congés payés afférents

– 1 457,95 € brut à titre de rappel de salaire relatif à la prime de nuit

– 145,79 € brut au titre des congés payés afférents

– 4 569,21 € net au titre indemnité de licenciement

Avec intérêts de droit et exécution provisoire par application des dispositions de l’article R 1454-28 du code du Travail, la moyenne des 3 derniers mois de salaire étant fixée à 1 610, 13 € brut.

Condamne la SAS Derichebourg à payer à M. [B] [S] la somme de 14 500 € net au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul

Avec intérêts de droit à compter du jour du prononcé du jugement.

Condamne la SAS Derichebourg Propreté au remboursement du jour du licenciement au jour du jugement prononcé du jugement, des indemnités chômage dans la limite de six mois en application de l’article L 1235-4 du code du travail ;

Condamne la SAS Derichebourg Propreté à la rectification de l’attestation Pôle emploi sous astreinte de 10 € par jour de retard passé un délai de quinze jours suivant la notification du jugement ;

Le conseil de prud’hommes se réserve le droit de liquider l’astreinte ;

Condamne la SAS Derichebourg Propreté à payer à M. [B] [S] la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit que chacun supportera ses entiers frais et dépens de l’instance. »

Par déclaration transmise par voie électronique le 10 novembre 2022, la société Derichebourg Propreté a interjeté appel du jugement.

Dans ses conclusions d’appelant n° 3 datées du 3 octobre 2024 et déposées par voie électronique le même jour, la société Derichebourg Propreté demande à la cour de statuer comme suit :

« Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Forbach en ce qu’il a déclaré la demande de M. [S] recevable et en partie fondée et condamné la société Derichebourg Propreté au règlement des sommes suivantes :

– 3 220,26 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 322,02 euros brut au titre des congés payés afférents,

– 1 397,46 € euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,

– 139,74 euros brut au titre des congés payés afférents,

– 1 457,95 euros brut à titre de rappel de salaire relatif à la prime de nuit,

– 145,79 euros brut au titre des congés payés afférents,

– 4 569,21 euros net au titre de l’indemnité de licenciement,

– 14 500 euros net au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

– remboursement des indemnités chômage du jour du licenciement au jour du jugement dans la limite de 6 mois,

– 10 euros d’astreinte par jour de retard dans la rectification de l’attestation Pôle emploi,

– 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Sur l’appel incident,

Confirmer le jugement pour le surplus en ce qu’il a débouté M. [B] [S] de ses demandes au titre de

– 1 014,78 € brut au titre de rappels de salaire,

– 101,47 € brut au titre des congés payés y afférents,

– 3 000 € net à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait des prononcés de ses sanctions pour des motifs totalement injustifiés,

Statuant à nouveau,

Constater que les manquements reprochés au salarié sont avérés ;

Considérer que les trois avertissements sont justifiés ;

Considérer que le licenciement prononcé à l’encontre de M. [B] [S] repose bien sur une faute grave ;

Débouter M. [B] [S] de l’intégralité de ses demandes.

En tout état de cause,

Condamner M. [B] [S] au paiement d’une somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel ;

Condamner M. [B] [S] aux entiers frais et dépens. »

Au soutien du bien-fondé des sanctions antérieures au licenciement, la société Derichebourg fait valoir que celles-ci étaient régulières, justifiées et proportionnées au regard des faits reprochés.

Concernant le reproche tenant à l’inexécution de la prestation de travail, elle explique que de manière récurrente M. [S] ne respectait pas les consignes qui lui étaient données. Elle ajoute qu’elle n’a jamais été informée par le salarié d’un quelconque problème de santé l’empêchant d’exécuter ses tâches, et qu’aucune démarche à ce titre n’a été entreprise auprès de la médecine du travail. Elle souligne qu’elle a précisé au salarié par courrier les tâches à accomplir, et ce préalablement au premier avertissement.

Sur le non-respect des horaires de travail, la société Derichebourg Propreté soutient que suite à sa reprise du chantier Cora de [Localité 1], le planning de travail de M. [S] n’a pas été modifié, et que tant son contrat de travail que le planning du 28 décembre 2012 annexé à l’avenant convenu avec le précédent employeur (société Caronet) comportaient les horaires applicables.

Elle précise que le salarié a lui-même reconnu qu’il ne respectait pas ces horaires, et considère qu’il n’était pas nécessaire de les préciser dans l’avertissement puisqu’ils étaient contractuellement prévus.

Elle ajoute que l’absence de plainte de la société cliente à propos des horaires réalisés par M. [S] est sans influence sur l’existence de ces manquements.

Elle considère qu’en tout état de cause, les horaires, comme les nouvelles tâches correspondent à la qualification du salarié et constituent de simples modalités d’exécution du contrat qui relèvent du pouvoir de direction de l’employeur, et que M. [S] ne peut donc valablement se prévaloir de l’absence de signature de l’avenant du 1er juin 2019 rédigé lors du transfert de son contrat de travail.

Sur le manquement sanctionné par le troisième avertissement, l’employeur explique que cette sanction fait suite à une une plainte de la société cliente concernant le comportement du salarié qui a scanné un document personnel en utilisant l’outil informatique mis à la disposition du personnel du magasin Cora, ce qui est contraire au règlement intérieur.

Il indique que le document scanné a été enregistré dans les données informatiques de la cliente, et qu’il contenait des informations pouvant nuire à l’image de la société. Il estime que l’intervention du délégué syndical du magasin Cora pour numériser le document est sans importance, car le manquement est caractérisé par le seul fait que le salarié a apporté sur son lieu de travail un document personnel qu’il a transmis au délégué syndical de la société cliente, et qu’il importe peu de savoir qui a appuyé sur le bouton de l’imprimante.

S’agissant du montant sollicité par M. [S] à titre de dommages et intérêts, l’employeur se prévaut de ce que le salarié n’apporte aucun élément qui atteste de l’existence d’un préjudice et de son étendue.

Concernant les demandes relatives aux rappels de salaire, la société appelante estime qu’aucune majoration pour heures de nuit n’est due. Elle mentionne que le salarié n’apporte pas d’élément suffisamment fiable, cohérent et précis pour justifier de la réalisation d’heures de nuit. Elle ajoute que lorsqu’il s’agit d’un transfert conventionnel des contrats, les usages concédés par l’ancien employeur ne sont pas repris lors de la reprise du marché, et qu’en tout état de cause M. [S] ne démontre ni la constance ni la généralité du paiement d’heures de nuit. Elle souligne que le salarié ne travaillait pas entre 21 heures et 5 heures.

Sur la retenue sur salaire liée aux absences injustifiées, l’appelante indique que le salarié n’a pas respecté la procédure pour poser ses congés, notamment le délai de prévenance de deux mois. Elle précise avoir reçu le 14 janvier 2021 une demande de congés payés datée du 13 janvier 2021 pour des absences envisagées le 13 janvier 2021 et du 18 janvier au 3 février 2021. Elle souligne qu’elle a ainsi été informée de la demande d’absence alors même que M. [S] était déjà absent. Elle ajoute que le délai de prévenance est prévu par une note interne, par le règlement intérieur, et mentionné sur la feuille de demande de congé qui a été complétée par le salarié.

Elle rappelle qu’en tout état de cause, le droit à congés n’autorise pas le salarié à les prendre sans l’accord de son employeur ou de sa hiérarchie.

Elle souligne que l’indemnité de congés payés versée sur le bulletin de paie du mois de mars 2021 dans le cadre du solde de tout compte reprend l’indemnité sollicitée pour la période du 18 janvier au 03 février 2021, ce qui rend la demande du salarié inutile.

S’agissant du licenciement, l’employeur fait valoir que le salarié dont le contrat est suspendu pour arrêt de travail d’origine professionnelle peut être licencié en cas de faute grave commise avant l’arrêt de travail.

Il indique que l’interprétation faite par le salarié de l’article L1226-9 du code du travail (faute grave caractérisée par la déloyauté) est erronée, car ce raisonnement revient à rendre impossible la sanction des fautes commises par le salarié avant un arrêt de travail pour accident, alors même que l’arrêt de travail n’a pas d’effet interruptif ou suspensif de la prescription des faits fautifs fixée à deux mois.

Concernant la gravité de la faute, la société Derichebourg Propreté fait valoir qu’elle est caractérisée au regard du passé disciplinaire du salarié, dont le maintien au sein de l’entreprise était impossible.

Elle explique que le magasin Cora de [Localité 1] l’a informée de ce que M. [S] était à l’origine d’une violente altercation avec l’un de ses collègues de travail, et qu’il avait déjà eu un précédent incident avec la même personne.

Elle ajoute que des plaintes lui avaient déjà été adressées par la société Cora, et que le comportement de M. [S] nuit aux relations entre salariés, mais également à l’image de la société auprès de sa cliente.

Elle précise qu’elle a sanctionné par un avertissement l’autre protagoniste M. [E] [C]

Subsidiairement, la société Derichebourg Propreté estime que le montant des dommages et intérêts sollicité par le salarié est disproportionné par rapport au préjudice subi.

Par ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 4 septembre 2024, M. [S] demande à la cour de statuer comme suit :

« Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Forbach en date du 25 octobre 2022 en ce qu’il a :

– annulé l’avertissement du 8 avril 2020,

– annulé l’avertissement du 14 décembre 2020,

– annulé l’avertissement du 28 janvier 2021,

– jugé le licenciement de Monsieur [B] [S] nul,

– condamné la SAS Derichebourg à payer à M. [B] [S] les sommes de :

3220,26 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

322,02 euros brut au titre des congés payés afférents au préavis,

1397,46 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,

139,74 euros brut au titre des congés payés afférents,

1457,95 euros brut à titre de rappel de salaire relatif à la prime de nuit,

145,79 euros brut au titre des congés payés afférents,

4 569,21 euros net au titre de l’indemnité de licenciement,

Avec intérêts de droit et exécution provisoire par application des dispositions de l’article R 1454-28 du code du travail, la moyenne des 3 derniers mois de salaire étant fixée à 1 610,13 euros brut,

– condamné la SAS Derichebourg à payer à M. [B] [S] la somme de :

14 500 euros net au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

Avec intérêts de droit à compter du jour du prononcé du jugement,

– condamné la SAS Derichebourg Propreté au remboursement du jour du licenciement au jour du prononcé du jugement, des indemnités chômage dans la limite de six mois en application de l’article L 1235-4 du code du travail,

– condamné la SAS Derichebourg Propreté à la rectification de l’attestation Pôle emploi sous astreinte de 10 euros par jour de retard passé un délai de quinze jours suivant la notification du jugement,

– réservé au Conseil de prud’hommes le droit de liquider l’astreinte,

– condamné la SAS Derichebourg Propreté à payer à M. [B] [S] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la SAS Derichebourg Propreté du surplus de ses demandes.

Statuant à nouveau

Recevoir l’appel incident de M. [B] [S],

Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Forbach en date du 25 octobre 2022 en ce qu’il a débouté M. [B] [S] de sa demande de rappel de salaire au titre d’absence injustifiée ainsi que de sa demande indemnitaire au titre du préjudice subi du fait de l’annulation de ses sanctions disciplinaires ;

En conséquence,

Condamner la Sas Derichebourg Propreté à payer à M. [B] [S] les sommes de :

– 1014,78 euros brut à titre de rappel de salaire,

– 101,478 euros brut au titre des congés payés afférents,

– 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du prononcé de ses (ces) sanctions pour des motifs totalement injustifiés,

Condamner la Sas Derichebourg Propreté à rectifier l’attestation Pôle emploi, les bulletins des mois de janvier et février 2021 ainsi que l’attestation de salaire émise par l’employeur suite à l’arrêt de travail ayant débuté en février 2021 en ce que sont portées sur ces documents les absences injustifiées des mois de janvier et février 2021 et ce sous astreinte définitive de 50 euros par document et par jour de retard, passé un délai d’un mois suivant la notification de l’arrêt à intervenir ;

Condamner la Sas Derichebourg Propreté à payer à M. [B] [S] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du CPC pour la présente procédure ;

Condamner la Sas Derichebourg Propreté aux entiers frais et dépens.»

Au soutien de l’annulation des sanctions disciplinaires, M. [S] indique que les faits ne sont pas matériellement établis. Il précise qu’il n’a jamais reçu de planning de tâches précis en dépit de ses demandes.

Concernant la nouvelle tâche qui lui a été attribuée – monter les chaises sur les tables -, il explique qu’il a informé son employeur de ses problèmes de santé qui faisaient obstacle à son exécution. Il ajoute, qu’en tout état de cause, aucune pièce produite par l’employeur ne vient prouver un manquement de sa part sur ce point.

Sur le non-respect de l’horaire de travail, M. [S] soutient que le grief est imprécis, et qu’il n’est pas davantage établi que cela perturberait l’organisation du site.

Il souligne qu’il a contesté cet avertissement, et que des discussions l’ont opposé à l’employeur qui a refusé de communiquer avec précision les horaires auxquelles il était soumis.

Il expose qu’il a continué à effectuer les horaires convenus avec l’ancien employeur, avant la reprise de son contrat de travail qui ne fixait pas d’horaires quotidiens précis. En outre, il fait valoir que le planning des horaires de travail dont se prévaut la société Derichebourg Propreté n’est pas probant eu égard à son ancienneté et à la multitude des échanges postérieurs intervenus à ce sujet. Il fait grief à l’employeur de ne pas lui avoir communiqué ce document au cours de leurs nombreux échanges durant l’année 2020.

Il ajoute qu’il n’a pas signé l’avenant de reprise de son contrat de travail par la société Derichebourg Propreté, de sorte que les horaires qui y sont mentionnés ne lui sont pas opposables.

De plus, il estime que les relevés de pointage ne sont pas des éléments probants et que rien n’autorisait son supérieur à le dépointer. Il indique avoir toujours respecté ses horaires de travail et être resté à la disposition de l’employeur. Il ajoute qu’aucune preuve de son départ prématuré de son poste de travail n’est apportée par celui-ci.

Concernant l’avertissement notifié en raison de l’utilisation du scanner de la société cliente, M. [S] conteste les faits qui lui sont reprochés. Il indique qu’il ne sait pas faire fonctionner cet outil informatique, et il explique qu’il avait apporté un document à un représentant syndical travaillant pour la société cliente qui a procédé à la numérisation du document.

Il considère que le seul fait d’apporter un document personnel dans les locaux où il travaille ne constitue pas un comportement fautif, et qu’en tout état de cause l’employeur n’établit pas la preuve de l’existence d’une interdiction de scanner un document sur son lieu de travail, en dehors du temps de travail, soit pendant une pause.

M. [S] souligne qu’il n’avait fait l’objet d’aucune sanction depuis son embauche et jusqu’en avril 2020, et que son travail n’a jamais été remis en cause jusqu’à la reprise du marché par la société appelante.

Il soutient qu’il a subi une dégradation de ses conditions de travail, et qu’un passé disciplinaire a été constitué pour pouvoir le licencier.

Il réclame 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi du fait du prononcé de sanctions injustifiées au regard du but recherché par l’employeur de constituer un dossier disciplinaire à son encontre.

Sur le rappel de salaire au titre de l’absence injustifiée, M. [S] indique qu’il a formulé une demande de congés qui ne lui a pas été refusée, de sorte que, son absence ne peut pas lui être reprochée. Il soutient qu’il ignorait l’existence d’un délai de prévenance qui ne lui a jamais été communiqué.

Il explique qu’il ne maitrise pas parfaitement la langue française.

Il indique que les absences injustifiées inscrites sur les bulletins de salaire et l’attestation Pôle emploi ont des incidences sur ses droits à indemnités journalières versées par la sécurité sociale.

S’agissant de sa demande de rappel de salaire au titre de la majoration des heures de nuit, M. [S] estime que l’employeur ne produit aucun élément permettant de remettre en cause ses déclarations selon lesquelles il a effectué des heures de nuit. Il se prévaut des bulletins de paie établis par le précédent employeur, qui comporte une rémunération à ce titre.

Sur la rupture du contrat de travail, M. [S] se prévaut de ce que son contrat de travail était suspendu dans le cadre d’un arrêt d’origine professionnelle et qu’il ne pouvait être rompu par l’employeur qu’en cas de faute grave liée à un manquement à son obligation de loyauté, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, de sorte que son licenciement est nécessairement nul. Il précise que l’employeur ne pouvait ignorer l’origine professionnelle de son arrêt de travail.

Il ajoute qu’en tout état de cause, aucun manquement n’est établi car il ne peut pas être à l’origine de l’altercation évoquée dans la lettre de licenciement.

Il conteste la valeur probante des attestations produites par l’employeur.

Il mentionne que les trois avertissements constituant le passé disciplinaire évoqué dans la lettre de licenciement sont injustifiés, et que les faits relatifs à une altercation antérieure ont été portés à la connaissance de l’employeur le 10 décembre 2020 soit avant les avertissements du 14 décembre 2020 et du 28 janvier 2021 de sorte que ces faits ne peuvent plus lui être reprochés, l’employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire.

Il souligne également que la seconde personne concernée par l’altercation n’a été sanctionnée que par un avertissement.

L’ordonnance de clôture de la procédure de mise en état a été rendue le 8 octobre 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

 


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