Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Douai
Thématique : Urgence de réhabilitation et relogement temporaire des occupants.
→ RésuméL’affaire concerne une association diocésaine de [Localité 3] et des locataires, désignés comme M. et Mme [P], en lien avec un bail verbal régissant leur logement. L’association a sollicité l’expulsion temporaire des locataires en raison de la nécessité de réaliser des travaux de réhabilitation urgents sur l’immeuble, justifiés par un rapport technique de la mairie signalant des problèmes structurels graves. Les locataires ont été informés de la nécessité de quitter les lieux pour permettre la réalisation de ces travaux, qui incluent des sondages destructifs.
La demande de retrait de pièces formulée par les locataires a été rejetée, les documents produits par l’association ne contenant aucun élément confidentiel antérieur. Concernant l’expulsion temporaire, le tribunal a confirmé que l’urgence des réparations justifiait cette mesure, sans que les locataires ne demandent la résiliation du bail. Les locataires ont également refusé une proposition de relogement temporaire dans un appartement équivalent, ce qui a été jugé injustifié. Les locataires ont demandé un délai supplémentaire pour quitter les lieux, mais n’ont pas réussi à prouver des conséquences d’une exceptionnelle dureté, leur âge et des troubles de l’humeur n’étant pas suffisants pour justifier une prorogation. De plus, leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive a été rejetée, confirmant que l’association n’avait pas agi de manière abusive. Enfin, le tribunal a statué sur les demandes d’astreinte, confirmant la compétence du juge des contentieux de la protection pour sa liquidation et rejetant la demande d’astreinte définitive. Les locataires ont été condamnés aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer une somme à l’association pour les frais irrépétibles. |
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 4
ARRÊT DU 03/04/2025
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N° de MINUTE : 25/313
N° RG 23/03774 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VB2R
Jugement (N° 23/04274) rendu le 12 Juin 2023 par le Juge des contentieux de la protection de Lille
APPELANTS
Monsieur [L] [P]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Madame [H] [T] épouse [P]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentés par Me Margaux Machart, avocat au barreau de [Localité 3], avocat constitué
INTIMÉE
Association Diocesaine de [Localité 3] l’Association Diocésaine de [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Franck Gys, avocat au barreau de Dunkerque, avocat constitué
DÉBATS à l’audience publique du 21 janvier 2025 tenue par Sara Lamotte magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Cécile Mamelin, président de chambre
Sara Lamotte, conseiller
Isabelle Facon, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025 après prorogation du délibéré en date du 06 mars 2025 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Cécile Mamelin, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 5 juillet 2024
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Depuis le 1er octobre 1977, l’association diocésaine de [Localité 3] a donné à bail à M. [L] [P] et Mme [H] [T] épouse [P], anciens salariés du Diocèse de [Localité 3], un local à usage d’habitation situé au [Adresse 2] à [Localité 3] moyennant un loyer d’un montant actuel de 116,62 euros. Aucun contrat de bail n’a été conclu par écrit.
Ce logement fait partie d’un ensemble immobilier situé au [Adresse 2] et au [Adresse 4] à [Localité 3].
Par acte signifié le 2 mai 2023, l’association diocésaine de [Localité 3] a fait assigner en référé M. [L] [P] et Mme [H] [P] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille en vue d’ordonner leur expulsion sous 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir jusqu’à réalisation des sondages destructifs et travaux de réhabilitation de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 3], leur condamnation in solidum au paiement de la somme de 1 500 euros à titre d’astreinte à défaut pour eux d’avoir quitté les lieux dans le délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir par jour de retard, de dire satisfactoire la proposition de bail de l’association diocésaine de [Localité 3] portant sur l’appartement sis dans la copropriété du [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant un loyer mensuel de 116,62 euros avec mise à disposition gratuite des moyens permettant le déménagement du mobilier et leur condamnation in solidum à régler à l’association diocésaine de [Localité 3] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Suivant jugement en date du 12 juin 2023, auquel il y a lieu de se référer pour un exposé exhaustif du dispositif s’agissant du rappel de mentions légales, le juge des contentieux de la protection a :
– Déclaré l’action de l’association diocésaine de [Localité 3] recevable ;
– Constaté que l’association diocésaine de [Localité 3] ne sollicite pas la résiliation du bail verbal intervenu avec M. et Mme [P] et que son action n’est pas soumise aux dispositions des articles 11 et suivants de la loi du 1er septembre 1948 ;
– Ordonné en application de l’article 1724 du code civil l’expulsion de M. et Mme [P] et de tous occupants de leur chef passé le délai de deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux afin de permettre l’exécution diagnostics et travaux de réhabilitation de l’ensemble immobilier sis [Adresse 2] à [Localité 3] ;
– Condamné in solidum M. et Mme [P] au paiement d’une astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 2 mois suivant la signification du commandement de payer ;
– Dit que la liquidation de l’astreinte sera de la compétence de la juridiction ;
– Rejeté la demande en dommages et intérêts formée par M. et Mme [P] pour procédure abusive ;
– Constaté que l’association diocésaine de [Localité 3] propose un relogement à ses frais de M. et Mme [P] dans un appartement situé [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant un loyer de 116,62 euros durant l’accomplissement des travaux qui impose un immeuble vide de tout occupant ;
– Condamné in solidum M. et Mme [P] au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné in solidum M. et Mme [P] aux dépens.
– Rappelé que la présente décision est exécutoire par provision de droit.
Suivant jugement rectificatif en date du 3 juillet 2023, le juge des contentieux de la protection a :
– Rectifié le jugement du 12 juin 2023 en ce sens qu’il faut lire dans le dispositif : « le juge des contentieux de la protection statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort » ;
– Dit que les autres termes du jugement restent inchangés ;
– Dit qu’il sera fait mention de la décision rectificative sur la minute du jugement du 12 juin 2023 ;
– Laissé les dépens à la charge du trésor public.
M. et Mme [P] ont interjeté appel de ces deux jugements par déclaration du 10 août 2023, dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas critiquées, déclaration d’appel critiquant chacune des dispositions de la décision entreprise rectifiée, sauf en ce qu’elle condamne in solidum M. et Mme [P] au paiement d’une astreinte, constate que l’association diocésaine de [Localité 3] propose un relogement à ses frais de M. et Mme [P] dans un appartement situé [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant un loyer de 116,62 euros durant l’accomplissement des travaux qui impose un immeuble vide de tout occupant et rappelle que la présente décision est exécutoire par provision de droit.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 8 novembre 2023, M. et Mme [P] demandent à la cour de :
– Déclarer l’appel recevable ;
– Infirmer le jugement du 12 juin 2023 rectifié le 3 juillet 2023 en ce qu’il :
Ordonne l’expulsion de M. et Mme [P] sur le fondement de l’article 1724 du code civil ;
Refuse de considérer que la loi du 1er septembre 1948 a vocation à s’appliquer ;
Refuse de leur accorder des délais avant de quitter les lieux (3 mois) ;
Les condamne à régler la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Les déboute de leurs demandes de dommages-intérêts de 750 euros chacun (1 500 euros au total) ;
Les déboute de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau,
– Écarter les pièces F3 et E produites par l’intimée ;
– Débouter l’association diocésaine de [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes ;
– Constater que le contrat est régi par les dispositions de la loi de 1948 ;
– Constater que les conditions des articles 11 à 13 quater de la loi du 1er septembre 1948 n’ont pas été respectées et que le droit au maintien dans les lieux est opposable au bailleur l’association diocésaine de [Localité 3] ;
– Débouter l’association diocésaine de [Localité 3] de sa demande d’expulsion et de la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Subsidiairement,
– Constater qu’aucune résiliation du bail n’est sollicitée et que l’article 1724 ne permet pas d’ordonner l’expulsion temporaire d’un locataire ;
En conséquence,
– Débouter le demandeur de sa demande d’expulsion et de la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
En tout état de cause,
– Condamner le bailleur au versement de la somme de 1 500 euros à M. et Mme [P] soit 750 euros chacun en réparation de leur préjudice, outre 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance et 1 800 euros en cause d’appel ;
– Condamner l’association diocésaine de [Localité 3] aux entiers dépens.
Très subsidiairement,
– Accorder aux locataires 3 mois de délai supplémentaire pour quitter les lieux ;
– Laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 novembre 2023, l’association diocésaine de [Localité 3] demande à la cour de :
– Débouter les époux [P] de l’ensemble de leurs demandes, fin et conclusions ;
– Confirmer purement et simplement la décision rectifiée en ce qu’elle a :
Déclaré l’action de l’association diocésaine de [Localité 3] recevable ;
Ordonné l’expulsion des époux [P] et de tous occupants de leur chef passé le délai de deux mois après la signification du commandement de quitter les lieux afin de permettre l’exécution des diagnostics et des travaux de réhabilitation de l’ensemble immobilier sis [Adresse 2] à [Localité 3] ;
Constaté que le bailleur proposait un relogement au [Adresse 1] dans le [Adresse 5] moyennant un loyer de 116,62 euros par mois durant les travaux ;
Condamné in solidum les époux [P] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Le réformant en ce qu’il a :
– Dit que la liquidation de l’astreinte sera de la compétence de la juridiction ;
– Condamné in solidum les époux [P] au paiement d’une astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 2 mois suivant la signification du commandement de payer.
Y ajoutant,
– Se déclarer compétente pour liquider l’astreinte provisoire fixée par le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille ;
– Fixer le montant de l’astreinte provisoire à 500 euros par jour de retard à compter du 13 septembre 2013, date de la signification de la décision de première instance ;
– Liquider et en tant que de besoin condamner in solidum les époux [P] à régler la somme de 30 000 arrêtée provisoirement au 13 novembre 2023 ;
– Fixer l’astreinte définitive à hauteur de 500 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la décision à intervenir et pendant une durée de 60 jours.
En tout état de cause,
– Condamner in solidum les époux [P] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens d’appel dont les frais de commandement de quitter les lieux dont distraction au profit de Maître Franck Gys, avocat au Barreau de Dunkerque y demeurant conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Par ordonnance en date du 7 mars 2024, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation formée par l’association diocésaine de [Localité 3], condamné celle-ci à verser et M. et Mme [P] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’incident.
Il est renvoyé aux conclusions pour un exposé détaillé des demandes et des moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Déboute M. et Mme [P] de leur demande tendant au retrait de pièces ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions critiquées ;
Y ajoutant,
Déboute l’association diocésaine de [Localité 3] de ses demandes relatives au prononcé de l’astreinte ;
Condamne M. et Mme [P] aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Maître Franck Gys, avocat au Barreau de Dunkerque, et à payer à l’association diocésaine de [Localité 3] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
Le greffier
Harmony POYTEAU
Le président
Cécile MAMELIN
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