Cour d’appel de Douai, 3 avril 2025, RG n° 23/00567
Cour d’appel de Douai, 3 avril 2025, RG n° 23/00567

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Douai

Thématique : Conflit commercial autour d’une zone d’activité et de la rémunération des services.

Résumé

La société Trimax développement, agissant en tant que maître d’ouvrage, a projeté la création d’une zone commerciale sur des terrains situés dans deux communes. Elle a obtenu un titre lui permettant de déposer les autorisations administratives nécessaires et de négocier la commercialisation de la zone. Parallèlement, les sociétés Borggrefe et Socaprim ont développé un projet commercial dans la même région. Les trois sociétés ont signé un premier protocole en 2006, suivi d’un second en juillet de la même année, mais aucun des projets n’a été réalisé.

En février 2021, la société Borggrefe a adressé une facture de 600 000 euros TTC à la société Trimax pour des honoraires liés au protocole de juillet 2006. Après une mise en demeure restée sans réponse, la société Borggrefe a assigné la société Trimax en paiement en juillet 2021. Le tribunal de commerce de Lille Métropole a rendu un jugement en janvier 2023, condamnant la société Trimax à payer la somme due, ainsi que des intérêts et des dommages et intérêts, tout en déboutant la société Trimax de ses demandes.

En février 2023, la société Trimax a interjeté appel, demandant l’annulation du jugement et contestant la recevabilité des demandes de la société Borggrefe, invoquant la prescription extinctive. La société Borggrefe a, de son côté, demandé à la cour de confirmer le jugement initial et de débouter la société Trimax de ses demandes.

La cour a finalement annulé le jugement du tribunal de commerce, constatant que l’action en paiement de la société Borggrefe était prescrite pour une partie de la créance. Elle a également rejeté la demande reconventionnelle de la société Trimax et a condamné la société Borggrefe aux dépens, tout en accordant une indemnité de procédure à la société Trimax.

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 03/04/2025

****

N° de MINUTE :

N° RG 23/00567 – N° Portalis DBVT-V-B7H-UXUA

Jugement (N° 21012486) rendu le 05 janvier 2023 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

APPELANTE

SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT prise en la personne de son Président, Monsieur [P] [Z], domicilié audit siège en cette qualité

ayant son siège [Adresse 1]

Représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Mes Emmanuel Drai et Vanessa Ruffa, avocats plaidants substitués par Me Jessica Lusardi, avocats au barreau de Paris

INTIMÉE

SARL BORGGREFE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège [Adresse 2]

Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Frédéric Cavedon, avocat au barreau de Bordeaux, avocat plaidant

DÉBATS à l’audience publique du 14 janvier 2025 tenue par Nadia Cordier magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Stéphanie Barbot, présidente de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Pauline Mimiague, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 03 avril 2025 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Stéphanie Barbot, présidente et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 17 décembre 2024

****

FAITS ET PROCEDURE

La société Trimax développement, anciennement la Société de Participations et de Placements (la société Trimax) a souhaité créer, en qualité de maître d’ouvrage, une zone commerciale et d’activité sur les communes de [Localité 5] et [Localité 3], sur une emprise d’environ 20 hectares.

Ladite société bénéficiait d`un titre l’autorisant à déposer l’ensemble des autorisations administratives nécessaires à la création de la zone et à négocier la commercialisation de sa zone d’une capacité externe d’environ 60 000 m² de Shon.

Les sociétés Borggrefe et Socaprim développaient, quant à elles, une opération commerciale sur la commune de [Localité 3] d’environ 55 000 m² de Shon.

Les parties se sont rapprochées, un premier protocole dédié au programme Triel Park sud ayant été régularisé le 12 avril 2006 avec notamment les trois sociétés précitées comme signataires (Protocole Triel).

Le 24 juillet 2006, un second protocole d’accord a été régularisé entre d’une part, la société Trimax, d’autre part, les sociétés Borggrefe et Socaprim en vue de réaliser l’opération [Localité 5] (Protocole [Localité 5]).

Aucune des deux opérations n’a abouti.

Le 24 février 2021, la société Borggrefe adressé à la société Trimax une facture de 500 000 euros HT, soit 600 000 euros TTC, au titre de ses honoraires dans le cadre du protocole [Localité 5].

Une mise en demeure a été adressée le 23 mars 2021 à laquelle la société Trimax n’a pas donné suite.

Par acte du 7 juillet 2021, la société Borggrefe a assigné la société Trimax en paiement.

Par jugement du 5 janvier 2023, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

– dit que les autorisations administratives prévues au protocole du 24 juillet 2006 ont été obtenues et sont devenues définitives ;

– condamné la société Trimax à payer à la société Borggrefe :

– la somme de 600 000 euros TTC en principal ;

– avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure, soit le 2 avril 2021 ;

– la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– la somme de 1 500 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté la société Trimax de toutes ses demandes ;

– condamné la société Trimax aux entiers dépens ;

Par déclaration du 3 février 2023, la société Trimax a interjeté appel de la décision précitée.

PRETENTIONS

Par conclusions signifiées par voie électronique le 4 décembre 2024, la société Trimax demande à la cour, au visa de l’article 6§1 de la CEDH, des articles 9, 12, 16, 31, 32, 122, 455, 458, 446-1 du code de procédure civile, des articles 2224 du code civil et L .110-4 du code de commerce, des articles 1131 et 1315 ancien du code civil, de :

– la recevoir en toutes ses demandes et les déclarer bien fondées ;

– annuler le jugement rendu le 5 janvier 2023 et statuer sur l’intégralité du litige en vertu de l’effet dévolutif ;

– à défaut, infirmer le jugement

Et, statuant à nouveau :

A titre principal,

– dire irrecevables les demandes de la société Borggrefe ;

– dire irrecevable, en raison de l’acquisition de la prescription extinctive, la demande de paiement de la somme de 600 000 euros de la société Borggrefe ;

A titre subsidiaire,

– dire irrecevable, en raison de l’acquisition de la prescription extinctive, la demande de paiement de la somme de 250 000 euros de la société Borggrefe ;

– ordonner sa mise hors de cause ;

– juger infondée, injustifiée et non causée ou, le cas échéant, caduque la demande en paiement de la somme de 600 000 euros de la société Borggrefe ;

– débouter la société Borggrefe de toutes ses demandes ;

A titre reconventionnel,

– condamner la société Borggrefe à lui verser la somme de 5 922 945 euros HT ;

– Subsidiairement, vu les articles 232 et suivants du code de procédure civile ;

– ordonner une expertise judiciaire aux fins d’évaluation de son préjudice « auquel la société Borggrefe doit contribuer » ;

– désigner à cette fin tel expert dans les domaines comptable et financier qu’il plaira au « tribunal » avec la mission qu’il lui plaira et fixer sa provision.

En tout état de cause,

– condamner la société Borggrefe à lui verser, la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 décembre 2024, la société Borggrefe demande à la cour, au visa des articles 9 et suivants, 564 et suivants, 910-4, devenu 915-2, du code de procédure civile ; des articles 1134 et suivants (devenus 1103 et suivants) du code de civil, de :

– la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes,

– Y faire droit ;

En conséquence,

* A titre principal,

– débouter la société Trimax de l’ensemble de ses demandes, visant à l’annulation du jugement

– déclarer la société Trimax irrecevable en sa demande d’infirmation du jugement rendu le 5 janvier 2023 par le tribunal de commerce de Lille Métropole, ainsi qu’en sa demande reconventionnelle, en ce compris celle visant à voir ordonner une mesure d’expertise et désigner tel expert qu’il plaira à la cour ;

* Subsidiairement, débouter la société Trimax de l’ensemble de ses demandes visant à l’infirmation du jugement, ainsi qu’en sa demande reconventionnelle, en ce compris celle visant à voir ordonner une mesure d’expertise et désigner tel expert qu’il plaira à la cour ;

– déclarer la société Trimax irrecevable en sa demande visant à dire irrecevable en raison de l’acquisition de la prescription extinctive, la demande de paiement de la somme de 250 000 ‘ de la société Borggrefe ; et, à titre subsidiaire, débouter la société Trimax de l’ensemble de ses demandes,

– « confirmer le jugement rendu le 5 janvier 2023 en ce qu’il : »

– à titre subsidiaire, dans le cas où , par extraordinaire, la cour entendrait faire droit à la demande d’annulation du jugement déféré,

– déclarer la société Trimax irrecevable en sa demande d’infirmation du jugement rendu le 5 janvier 2023, ainsi qu’en sa demande reconventionnelle ; et, à titre subsidiaire, débouter la société Trimax de l’ensemble de ses demandes visant à l’infirmation du jugement, ainsi qu’en sa demande reconventionnelle, et en conséquence,

Statuant à nouveau,

– condamner la société Trimax à lui payer la somme TTC de 600 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2021, date de réception de la mise en demeure de paiement ;

– condamner la société Trimax à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

* En tout état de cause,

– débouter la société Trimax de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions, que celles-ci soient formées à titre principal, subsidiaire ou encore reconventionnel ;

– condamner la société Trimax à lui payer la somme de 15 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société Trimax aux entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

ANNULE le jugement du tribunal de commerce de Lille-Métropole du 5 janvier 2023 en toutes ses dispositions ;

Vu l’effet dévolutif,

REJETTE la fin de non-recevoir opposée par la société Borggrefe et tirée de la nouveauté des demandes ;

DIT non fondée la fin de non-recevoir basée sur l’article 910-4 du code de procédure civile ;

REJETTE la fin de non-recevoir tirée du défaut de droit d’agir de la société Borggrefe opposée par la société Trimax ;

DIT que l’action en paiement de la société Borggrefe au titre des honoraires est prescrite à concurrence de la somme de 250 000 euros ;

DIT que la société Trimax n’est pas redevable de la part des honoraires non atteinte par la prescription et, en conséquence, REJETTE la demande formée à ce titre par la société Borggrefe ;

REJETTE la demande reconventionnelle présentée par la société Trimax à hauteur de 5 922 945 euros HT ;

En conséquence, DIT sans objet la demande d’expertise formée par la société Trimax ;

REJETTE la demande de dommages et intérêts formée par la société Borggrefe pour résistance abusive ;

CONDAMNE la société Borggrefe aux dépens de première instance et d’appel ;

CONDAMNE la société Borggrefe à payer à la société Trimax la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la société Borggrefe de sa demande d’indemnité procédurale.

Le greffier

Marlène Tocco

La présidente

Stéphanie Barbot

 


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