Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Dijon
Thématique : Résiliation contractuelle : responsabilité partagée et obligations non respectées.
→ RésuméLa société G.R.I.E. a signé un contrat de distribution exclusif avec un fournisseur américain pour des produits de tabac à chicha de marque Fantasia. Elle a ensuite confié la distribution à la SAS Mercier, avec un engagement d’achat minimum de 24 000 kg par an. Après une première commande de 6 000 kg, des retards de livraison ont été constatés, entraînant des tensions entre les parties. En août 2017, G.R.I.E. a émis plusieurs factures, dont certaines ont été réglées par Mercier, mais des difficultés de livraison ont persisté.
En avril 2019, G.R.I.E. a informé Mercier de son mécontentement concernant le non-respect des engagements contractuels, notamment l’obligation d’achat minimum. Mercier a contesté ces accusations, arguant que les quantités minimales étaient irréalistes et que les retards de livraison étaient imputables à G.R.I.E. En l’absence de solution amiable, G.R.I.E. a assigné Mercier devant le tribunal de commerce, demandant la résiliation du contrat et des dommages-intérêts. Le tribunal a jugé que la résiliation était aux torts de G.R.I.E. et a débouté cette dernière de ses demandes, condamnant G.R.I.E. à payer des frais à Mercier. G.R.I.E. a interjeté appel, soutenant que Mercier avait manqué à ses obligations de paiement et d’achat minimum, tandis que Mercier a demandé la confirmation du jugement initial, affirmant que les retards de livraison étaient dus à G.R.I.E. Les articles du Code civil relatifs aux obligations contractuelles et à la résolution des contrats ont été invoqués par les deux parties. G.R.I.E. a demandé des dommages-intérêts pour le non-respect des engagements de Mercier, tandis que Mercier a réclamé des compensations pour les préjudices subis en raison des retards de livraison. La cour a confirmé le jugement initial, considérant que les manquements de G.R.I.E. avaient empêché Mercier de remplir ses obligations contractuelles. |
S.A.R.L. GRIE
C/
S.A.S. MERCIER
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
2ème chambre civile
ARRÊT DU 03 AVRIL 2025
N° RG 22/01150 – N° Portalis DBVF-V-B7G-GA43
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 25 juillet 2022,
rendue par le tribunal de commerce de Chalon sur Saône – RG : 21/001236
APPELANTE :
S.A.R.L. GRIE prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège :
[Adresse 3]
[Localité 1] – SUISSE
représentée par Me Florent SOULARD membre de la SCP SOULARD – RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 127
assisté de Me Olivier FERNEX de MONGEX, avocat au barreau de CHAMBERY
INTIMÉE :
S.A.S. MERCIER, agissant poursuites et diligences de son président en exercice, domicilié ès qualités audit siège :
[Adresse 4]
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Cécile RENEVEY – LAISSUS membre de la SELARL ANDRE RENEVEY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 2
assistée Jean-Michel RAYNAUD membre de la SELARL RAYNAUD Avocats, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 23 janvier 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de Chambre,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
Bénédicte KUENTZ, Conseiller,
Après rapport fait à l’audience par l’un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 03 Avril 2025,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
La société G.R.I.E. est titulaire d’un contrat de distribution exclusif pour la France des produits de tabac à chicha de marque Fantasia en vertu d’une convention signée avec un fournisseur américain.
Elle a concédé à la SAS Mercier, spécialisée dans le commerce de gros, aux termes d’un contrat conclu le 22 mars 2017, la distribution des produits Fantasia sur l’ensemble du territoire français, le contrat étant conclu pour une durée de trois ans, renouvelable tous les ans, et comprenant notamment une exigence minimale de quantité (article 1: 24 000 kg).
La société Mercier a procédé à une première commande de 6 000 kg de tabac à chicha Fantasia pour un montant global de 121 200 euros HT.
Le 22 mai 2017, la société G.R.I.E a adressé une confirmation de commande et a émis une première facture n°F0001-06-2017 du même montant le 5 juin 2017.
Des retards de livraisons sont intervenus.
Le 12 août 2017, la société G.R.I.E a émis deux nouvelles factures à l’ordre des Etablissements Mercier portant sur les mêmes marchandises.
-facture n°F001-06-2017-AIR d’un montant de 20 361,60 euros HT
-facture n°F001-06-2017-B d’un montant de 100 838,40 euros HT.
Le 15 septembre 2017, la société Mercier a réglé la somme de 106 878,20 euros puis une somme de 11 998,80 euros le 24 octobre 2018 concernant un reliquat de marchandises livrées courant octobre 2017.
Par courriel du 20 octobre 2017, la société Mercier a procédé à une nouvelle commande portant sur des emballages vides.
Une facture n°002-10-2017 d’un montant de 14 198,04 euros a été établie le 30 octobre 2017 au titre des emballages paquets (50g) et cartouches (10 x 50g), répartis entre les quatre sociétés membres du groupe Neodis auquel appartient la société Mercier. Cette somme a été réglée le 18 décembre 2017.
Le 13 mars 2018, la société G.R.I.E a établi un document intitulé «mise à jour du contrat de distribution de tabac à chicha de la marque Fantasia» portant sur le nouveau prix au kg, non signé par le distributeur.
La deuxième partie de la facture n°F002-10-2017 relative au produit lui même a donné lieu à une facture émise le 30 avril 2018 d’un montant de 108 381,78 euros portant sur une quantité de 6 192 euros de tabac à chicha, après déduction des frais d’emballage susvisés, déjà réglé. Cette facture a été réglée le 28 mai 2018.
La société Mercier n’a procédé à aucune nouvelle commande.
Le 26 avril 2019, la société G.R.I.E. a indiqué à son co-contractant que le non respect de ses engagements contractuels tenant à la quantité d’achats minimum, lui causait un manque à gagner de 200 000 euros. Elle lui reprochait encore des prises de contact avec d’autres fournisseurs allemands. Elle ouvrait la voie à une négociation.
En l’absence de réponse, par nouveau courrier du 9 mai 2019, la société G.R.I.E indiquait qu’au regard des infractions au contrat, elle entendait saisir la juridiction compétente pour réclamer réparation de son préjudice.
La société Mercier, objectant du caractère irréaliste des quantités minimales fixées, des difficultés dans la livraison des produits et une absence d’accord d’exclusivité d’approvisionnement de sa part, n’a pas entendu donner suite aux injonctions de la société G.R.I.E.
Aucune solution amiable n’a pu être trouvée entre les parties.
C’est dans ces conditions que, par acte du 02 mars 2021, la société G.R.I.E a fait assigner la société Mercier devant le tribunal de commerce de Chalon-sur-Saône aux fins de voir constater les manquements de la société Mercier, prononcer la résiliation du contrat de distribution aux torts de la défenderesse et condamner cette dernière au paiement de dommages-intérêts.
Par jugement du 25 juillet 2022, le tribunal de commerce de Chalon-sur-Saône a :
– dit que la résiliation du contrat est intervenue aux torts de la société G.R.I.E. SARL,
– débouté la société G.R.I.E. SARL de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société Mercier SAS de ses autres demandes,
– condamné la société G.R.I.E. SARL à payer à la société Mercier SAS la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société G.R.I.E. SARL en tous les dépens de l’instance, dont frais de greffe indiqués auxquels sont ajoutés le coût de l’assignation et les frais de mise à exécution de la décision, les dépens visés à l’article 701 du code de procédure civile étant liquidés à la somme de 60,22 euros TTC.
Par déclaration du 16 septembre 2022, la société G.R.I.E. a relevé appel de ce jugement.
Aux termes du dispositif de ses conclusions d’appelante notifiées le 29 août 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens développés au soutien des prétentions, la société G.R.I.E. demande à la cour, au visa des articles 1101 à 1104, 1171 alinéas 1 et 2, 1224, 1217, 1231 et 1353 du code civil, ainsi que de l’article L441-6 du code de commerce, de :
– la déclarer recevable et bien fondée en son appel dirigé contre la société Mercier, celui-ci ayant été formulé dans les délais légaux ;
– confirmer la décision déférée en ce qu’elle a rejeté la demande de la société Mercier tendant à voir juger :
*le remboursement de stock périmé en l’absence de clause prévoyant la reprise de la marchandise,
*le droit à préjudice économique.
– réformer le jugement de première instance déféré en ce qu’il :
*a dit que la résiliation du contrat est intervenue à ses torts,
*l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes,
*l’a condamnée à payer à la société Mercier SAS la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
*l’a condamnée en tous les dépens de l’instance, dont frais de greffe indiqués auxquels sont ajoutés le coût de l’assignation et les frais de mise à exécution de la décision, les dépens visés à l’article 701 du code de procédure civile étant liquidés à la somme de 60,22 euros TTC.
et statuant à nouveau :
– juger que la société Mercier a engagé sa responsabilité contractuelle envers elle pour manquement à l’obligation de paiement 100% à la commande validée ;
– constater la faute de la société Mercier dans les retards allégués ;
– retenir l’absence d’inexécution grave de son obligation de livraison ;
– juger pleine et entière la responsabilité de la société Mercier dans le non-respect de son obligation d’achat d’un minimum annuel de 24 000 kg de tabac à chicha de marque Fantasia, obligation de résultat ;
– juger que la société Mercier a engagé sa responsabilité contractuelle envers elle concernant le non-respect de son obligation de développement du marché ;
– rejeter l’ensemble des demandes ou prétentions de la société Mercier émises à son encontre, lesquelles sont infondées.
en conséquence,
– condamner la société Mercier à réparer l’entier préjudice direct qu’elle a subi et à lui régler les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :
*en raison du non-respect de l’obligation d’achat d’un minimum annuel :
-242 400 euros HT au titre du préjudice commercial pour la première année,
-475 200 euros HT au titre du préjudice commercial pour la deuxième année,
-475 200 euros HT au titre du préjudice commercial pour la troisième année,
*en raison du non-respect de l’obligation de développement :
-500 000 euros,
– condamner la société Mercier à lui régler en raison de sa mauvaise foi et du manquement à l’obligation de loyauté la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.
en tout état de cause,
– débouter la société Mercier de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions formulées à son encontre ;
Par ces motifs
La cour,
Déclare irrecevable la demande de condamnation à hauteur de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison de la mauvaise foi et manquement à l’obligation de loyauté formée pour la première fois dans les conclusions n°2 de société G.R.I.E notifiées le 29 août 2023,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société G.R.I.E aux dépens d’appel,
Condamne la société G.R.I.E à payer à la SAS Mercier la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président
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