Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Chambéry
Thématique : Responsabilité des prestataires de services de paiement en matière de sécurité des transactions
→ RésuméL’affaire concerne un utilisateur de services de paiement qui a contesté l’autorisation de 316 opérations effectuées sur son compte bancaire entre le 13 mai et le 1er octobre 2019, pour un montant total de 11.853,37 euros. L’utilisateur a affirmé ne pas être à l’origine de ces transactions, ce qui a conduit à une procédure judiciaire. Selon le code monétaire et financier, il incombe à l’utilisateur de prendre des mesures raisonnables pour sécuriser ses dispositifs de paiement et d’informer son prestataire de services de paiement en cas d’utilisation non autorisée. Toutefois, c’est au prestataire de prouver que l’utilisateur a agi de manière frauduleuse ou a négligé ses obligations.
Le prestataire, en l’occurrence la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie, a soutenu que l’utilisateur avait nécessairement participé à la fraude, sans fournir de preuves concrètes. Il a avancé que l’utilisateur avait probablement reçu un message l’incitant à fournir ses données bancaires, mais cette supposition n’a pas été jugée suffisante pour établir une négligence grave. Concernant le retard dans l’information de la banque, le tribunal a noté que l’utilisateur avait la possibilité de consulter son compte en ligne, mais que ses connexions étaient brèves et ne lui avaient pas permis de détecter les opérations litigieuses. Le tribunal a également souligné que la surveillance du compte n’était pas une condition pour priver l’utilisateur de son droit au remboursement, et que seule la fraude ou la négligence grave pouvaient justifier un refus de remboursement. En conclusion, le tribunal a confirmé le jugement initial, condamnant le prestataire à rembourser l’utilisateur et à payer des dépens ainsi qu’une indemnité procédurale. |
MR/SL
N° Minute
1C25/208
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
Chambre civile – Première section
Arrêt du Mardi 01 Avril 2025
N° RG 22/01615 – N° Portalis DBVY-V-B7G-HCVJ
Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’ANNECY en date du 29 Août 2022
Appelante
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE, dont le siège social est situé [Adresse 2] – [Localité 4]
Représentée par la SARL AVOLAC, avocats au barreau d’ANNECY
Intimé
M. [R] [C], demeurant [Adresse 1] – [Localité 3]
Représenté par Me Lionel FALCONNET, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
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Date de l’ordonnance de clôture : 16 Décembre 2024
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 janvier 2025
Date de mise à disposition : 01 avril 2025
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Composition de la cour :
– Mme Nathalie HACQUARD, Présidente,
– Mme Myriam REAIDY, Conseillère,
– M. Guillaume SAUVAGE, Conseiller,
avec l’assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,
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Faits et procédure
M. [R] [C] est titulaire d’un compte bancaire au sein du crédit agricole des Savoie et d’une carte bancaire Gold associée.
Le 1er octobre 2019, M. [C] a fait opposition à cette carte bancaire et a contesté 316 opérations réalisées du 13 mai au 20 septembre 2019, pour un montant total de 11.853,37 euros.
Estimant avoir été victime de paiement frauduleux, principalement sur des péages d’autoroutes, M. [C] a sollicité, par courrier recommandé du 6 novembre 2019, que sa banque lui recrédite la somme de 11.646,26 euros.
La banque n’a pas fait droit à cette demande.
C’est dans ce contexte que, par acte d’huissier en date du 15 décembre 2020, M. [C] a fait assigner la Caisse Regionale de Credit Agricole Mutuel des Savoie (CRCAM) devant le tribunal judiciaire d’Annecy en paiement.
Par jugement du 29 août 2022, le tribunal judiciaire d’Annecy a :
– Condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à payer à M. [R] [C] la somme de 11.646,26 euros (onze mille six cent quarante-six euros et vingt-six centimes), outre intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2019,
– Dit que les intérêts échus et dus pour au moins une année entière seront eux-mêmes capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
– Condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à payer à M. [R] [C] la somme de 3.000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie de l’ensembIe de ses demandes,
– Condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie aux dépens de l’instance, qui seront distraits au profit de Maître Falconnet, avocat,
– Rappelé que l’exécution provisoire est de droit..
Au visa principalement des motifs suivants :
M. [C] ne peut se voir reprocher une négligence dans la conservation et l’utilisation de sa carte bancaire ou des informations de sécurité associées, et l’absence de surveillance des mouvements de son compte bancaire ne constitue pas un motif permettant de priver le client de son droit à remboursement ;
M. [C] a signalé le problème dès qu’il en a eu connaissance.
Par déclaration au greffe du 8 septembre 2022, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie a interjeté appel de la décision en toutes ses dispositions.
Prétentions et moyens des parties
Par dernières écritures du 12 novembre 2024, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie sollicite :
– Réformer purement et simplement le jugement rendu le 29 août 2022 par le Tribunal Judiciaire D’annecy en ce qu’il a :
– condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à payer à M. [C] la somme de 11.646,26 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2019,
– dit que les intérêts échus et dus pour au moins une année entière seront eux-mêmes capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code Civil,
– condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à payer à M. [C] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie de l’ensemble de ses demandes,
– condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie aux dépens de l’instance,
Statuant à nouveau,
– Dire et juger non fondées l’intégralité des demandes formalisées par M. [C] à l’encontre du Crédit Agricole des Savoie,
– Voir condamner M. [C] à payer au Crédit Agricole des Savoie la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre aux entiers dépens y compris ceux de première instance,
Au soutien de ses prétentions, le Crédit Agricole des Savoie fait notamment valoir que :
pour remplir les obligations prévues à l’article 133-7, le client doit surveiller ses comptes ;
il est impossible qu’une fraude survienne sans que le client soit intervenu à un moment donné, et les opérations ont été réalisées avec la carte bancaire et la saisie de son code ;
M. [C] disposait de la possibilité de consulter ses comptes en ligne et s’est connecté à plusieurs reprises avant de signaler les anomalies constatées sur son compte pour effectuer des virements bancaires ou pour des retraits dans des distributeurs et aurait dû se rendre compte des fraudes.
Par dernières écritures du 4 novembre 2022, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, M. [R] [C] demande à la cour de :
– Confirmer le jugement du tribunal judiciaire d’Annecy du 29 août 2022 en toutes ses dispositions à savoir en ce qu’il a :
– condamné la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie payer à M. [R] [C] la somme de 11.646,26 euros outre intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2019,
– dit que les intérêts échus et dus pour au moins une année entière seront eux-mêmes capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil,
– condamné la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à payer à M. [R] [C] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie de l’ensemble de ses demandes,
– condamné la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie aux dépens de l’instance qui seront distraits au profi t de Maîre Falconnet, avocat,
– Débouter la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie de l’intégralité de ses demandes,
Y ajoutant,
– Condamner la Caisse Regionale de Credit Agricole Mutuel des Savoie à payer à M. [R] [C] la somme de 3.000 ‘ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel, et aux dépens d’appel, avec application au profit de Me Falconnet, avocat, des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, M. [C] fait notamment valoir que :
seule la preuve d’une négligence grave du client le prive de son droit à remboursement, et que la consultation de son compte bancaire en ligne pour effectuer un virement sans déceler les fraudes déjà survenues ne caractérise pas cette faute ;
des opérations de débit de sa carte bancaire ont eu lieu à [Localité 6] et diverses régions de France, alors qu’il était présent à [Localité 7] pour son travail et en possession de son moyen de paiement, ce qui ne peut s’expliquer que par une défaillance du système de la banque.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience ainsi qu’à la décision entreprise.
Une ordonnance du 16 décembre 2024 a clôturé l’instruction de la procédure. L’affaire a été plaidée à l’audience du 28 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie aux dépens de l’instance d’appel, avec application de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de Me Falconnet,
Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à payer la somme de 3.000 euros à M. [R] [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
et signé par Nathalie HACQUARD, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 01 avril 2025
à
la SARL AVOLAC
Me Lionel FALCONNET
Copie exécutoire délivrée le 01 avril 2025
à
Me Lionel FALCONNET
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