Règle de droit applicableL’article 873 du Code de procédure civile régit les mesures conservatoires et de remise en état que le président du Tribunal de commerce peut prescrire en référé. Cet article stipule que le président peut, même en présence d’une contestation sérieuse, ordonner des mesures pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite. En cas d’obligation non sérieusement contestable, il peut également accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire. Conditions de la demande de provisionPour qu’une demande de provision soit recevable, il est nécessaire que l’obligation de paiement soit non sérieusement contestable. Dans le cas présent, la société NB ASSURANCES a soulevé des contestations relatives à l’exécution du contrat par la société KIASSURE, notamment des manquements dans la gestion des contrats d’assurance, ce qui a conduit à des résiliations. Ces éléments ont été jugés suffisants pour établir une contestation sérieuse, empêchant ainsi l’octroi d’une provision. Conséquences de la contestation sérieuseLa présence d’une contestation sérieuse sur l’existence de l’obligation de paiement empêche le juge des référés de statuer en faveur de la demande de provision. En effet, le juge ne peut pas trancher des litiges portant sur l’exécution des obligations contractuelles dans le cadre d’une procédure de référé, ce qui a conduit à l’infirmation de l’ordonnance du Tribunal de commerce. Article 700 du Code de procédure civileL’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés non compris dans les dépens. Dans cette affaire, la SARL KIASSURE a été condamnée à verser une somme de 2.000€ à la SASU NB ASSURANCES en application de cet article, en raison de la décision de débouter la première de ses demandes. Condamnation aux dépensConformément aux articles 695 et 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est également condamnée aux dépens, ce qui inclut les frais de justice engagés par la partie gagnante. Dans cette affaire, la SARL KIASSURE a été condamnée aux entiers dépens de première instance et d’appel, en raison de l’issue défavorable de ses prétentions. |
L’Essentiel : L’article 873 du Code de procédure civile permet au président du Tribunal de commerce d’ordonner des mesures conservatoires même en cas de contestation sérieuse. La société NB ASSURANCES a soulevé des contestations sur l’exécution du contrat par KIASSURE, empêchant l’octroi d’une provision. La présence d’une contestation sérieuse empêche le juge des référés de statuer en faveur de la demande de provision, entraînant l’infirmation de l’ordonnance. La SARL KIASSURE a été condamnée à verser 2.000€ à la SASU NB ASSURANCES.
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Résumé de l’affaire : La présente affaire oppose une société de courtage en assurances, la SASU NB ASSURANCES, à une société de distribution d’assurances, la SARL KIASSURE, dans le cadre d’un protocole de partenariat établi en 2022. Ce partenariat stipule que la société KIASSURE place des contrats d’assurance pour le compte de la société NB ASSURANCES, qui perçoit des rétrocessions sur les commissions des contrats souscrits. En cas de résiliation ou d’annulation de contrats, la société KIASSURE est tenue de rembourser à la société NB ASSURANCES une partie des sommes perçues.
Depuis le dernier trimestre 2022, la société NB ASSURANCES a constaté une insatisfaction croissante des clients vis-à-vis des prestations de la société KIASSURE, ce qui aurait impacté ses propres résultats. En revanche, la société KIASSURE reproche à la société NB ASSURANCES de ne pas rembourser le solde négatif dû, correspondant aux reprises sur commissions. Face à ce désaccord, la société KIASSURE a assigné la société NB ASSURANCES devant le Tribunal de commerce de Marseille, demandant le paiement d’une somme provisionnelle de 25.444,08 € pour reprises sur commissions. Par ordonnance de référé du 21 septembre 2023, le tribunal a condamné la société NB ASSURANCES à verser cette somme, ainsi qu’une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. La société NB ASSURANCES a interjeté appel de cette décision, arguant que la société KIASSURE n’avait pas respecté ses obligations contractuelles et que la créance n’était pas certaine. En réponse, la société KIASSURE a demandé la confirmation de l’ordonnance et l’actualisation de la somme due. Finalement, la Cour d’appel a infirmé l’ordonnance du tribunal de commerce, déboutant la société KIASSURE de ses demandes et condamnant cette dernière à verser 2.000 € à la société NB ASSURANCES au titre des frais de justice. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la décision de la Cour concernant la demande de provision ?La décision de la Cour repose sur l’article 873 du Code de procédure civile, qui traite des ordonnances de référé. Cet article stipule que : « Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire. » Dans cette affaire, la société NB ASSURANCES a contesté la demande de provision de la société KIASSURE, arguant que l’obligation de paiement n’était pas sérieusement contestable. La Cour a considéré que les éléments fournis par la société NB ASSURANCES, notamment les manquements allégués de la société KIASSURE, constituaient une contestation sérieuse, rendant ainsi la demande de provision infondée. Quel est l’impact des manquements allégués sur la décision de la Cour ?Les manquements allégués par la société NB ASSURANCES ont eu un impact significatif sur la décision de la Cour. En effet, la société NB ASSURANCES a produit des éléments démontrant des insatisfactions répétées de la part des assurés, ce qui a été considéré comme une contestation sérieuse des obligations contractuelles de la société KIASSURE. La Cour a noté que, bien que les bordereaux de commission fournis par la société KIASSURE n’aient pas été expressément contestés, les difficultés signalées par la société NB ASSURANCES étaient justifiées dans leur principe. Ces difficultés avaient été signalées dès le mois de mars 2023, avant l’engagement de l’instance, ce qui a conduit la Cour à conclure que l’obligation de paiement de la société NB ASSURANCES n’était pas sérieusement contestable au sens de l’article 873 du Code de procédure civile. Quel est le résultat de la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ?La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formulée par la société KIASSURE a été rejetée par la Cour. La décision du Tribunal de commerce a été confirmée en ce qu’elle a débouté la société KIASSURE de cette prétention. La Cour a considéré que, compte tenu de la solution adoptée sur la demande principale, il n’y avait pas lieu d’accorder des dommages et intérêts pour résistance abusive, car la contestation soulevée par la société NB ASSURANCES était jugée sérieuse. Quel est le montant des condamnations prononcées par la Cour ?La Cour a condamné la société KIASSURE à verser à la société NB ASSURANCES une somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Cette disposition prévoit que : « La partie qui succombe peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » En outre, la société KIASSURE a été condamnée aux entiers dépens de première instance et d’appel, ce qui inclut tous les frais liés à la procédure judiciaire. La décision de la Cour a donc des implications financières significatives pour la société KIASSURE, qui doit assumer les coûts de la procédure en plus de la somme allouée à la société NB ASSURANCES. |
Chambre 1-4
ARRÊT AU FOND
DU 20 MARS 2025
N° 2025 /
Rôle N° RG 23/14272
N° Portalis DBVB-V-B7H-BMFPU
SASU N.B. ASSURANCES
C/
S.A.R.L. KIASSURE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Agnès ERMENEUX
Me Maria GRAAFLAND
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 21 Septembre 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 2023R00233.
APPELANTE
SASU N.B. ASSURANCES
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX – CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Jean-baptiste ITIER, avocat au barreau d’AVIGNON
INTIMÉE
S.A.R.L. KIASSURE, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Maria GRAAFLAND de la SELARL PACTA JURIS, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Adrian CANDAU, conseiller-rapporteur, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Inès BONAFOS, Présidente
Mme Véronique MÖLLER, Conseillère
M. Adrian CANDAU, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Christiane GAYE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2025.
ARRÊT
La SASU NB ASSURANCES exerce une activité de courtier en assurances et propose notamment la distribution de produits à des grossistes fournisseurs qui procèdent par la suite au placement de ces produits. La société KIASSURE fait partie de ses clients au titre d’un protocole de partenariat conclu en 2022.
Dans le cadre de cette relation contractuelle, la société KIASSURE place donc des contrats d’assurance auprès de clients et la société NB ASSURANCES se rémunère alors sous la forme d’une rétrocession par un prélèvement sur les commissions liées aux contrats souscrits par les assurés.
Lorsqu’un contrat faisait l’objet par la suite d’une résiliation ou d’une annulation, la société KIASSURE devait alors procéder à une reprise à proportion des sommes qui avaient été versées à NB ASSURANCES à titre de rétrocession.
La société NB ASSURANCES expose que depuis le dernier trimestre de l’année 2022, elle a constaté une insatisfaction croissante de clients souscripteurs au titre des prestations assurées par la société KIASSURE ; elle considère ainsi que cette dernière n’a pas accompli correctement ses prestations auprès de sa clientèle, cette mauvaise gestion se répercutant, selon NB ASSURANCES, dans ses propres résultats.
La société KIASSURE a au contraire reproché à la société NB ASSURANCES de ne pas procéder au remboursement du solde négatif dû dans le cadre de leur relation contractuelle, solde négatif correspondant au montant des reprises liées aux annulation et résiliation de contrats.
En l’état de ce désaccord, par acte d’huissier en date du 12 juin 2023, la SARL KIASSURE a donné assignation à la société NB ASSURANCES devant le Tribunal de commerce de MARSEILLE en vue d’obtenir, à titre provisionnel, la condamnation de cette dernière à lui payer, notamment, une somme de 25.444,08€ à titre de reprises sur commissions.
Par ordonnance de référé en date du 21 septembre 2023, le Tribunal de commerce de MARSEILLE a jugé :
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent et par provision, vu l’urgence,
Vu les dispositions de l’article 873 alinéa 2 du Code de Procédure Civile,
Condamnons la société N.B. ASSURANCES S.A.S.U. à payer, en deniers ou quittance, à la société KIASSURE S.A.R.L. la somme provisionnelle de 25 444,02 € (vingt-cinq mille quatre cent quarante-quatre euros et deux centimes) au titre des reprises de commissions ainsi que celle de 1 000 € (mille euros) au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de Procédure Civile,
Condamnons la société N.B. ASSURANCES S.A.S.U. aux dépens toutes taxes comprises de la présente ordonnance tels qu’énoncés par l’article 695 du Code de Procédure Civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquidés à la somme de 40,66 € (quarante euros et soixante-six centimes TTC)
Rejetons tout surplus des demandes comme non justifié.
Cette décision a été prononcée au vu du protocole de partenariat signé entre les parties en 2022 portant sur la commercialisation par la société N.B. ASSURANCES S.A.S.U des produits d’assurance santé et/ou prévoyance gérés par la société KIASSURE en contrepartie de la rétrocession par la société KIASSURE d’une commission à la société N.B. ASSURANCES S.A.S.U.
Le juge des référés a considéré que la société KIASSURE était effectivement tenue au remboursement d’un solde négatif au bénéfice de la société NB ASSURANCES justifiant cette condamnation à titre provisionnel sur le fondement de l’article 873 al.2 du Code de procédure civile.
Par déclaration en date du 17 novembre 2023, la SASU NB ASSURANCES a formé appel de cette décision à l’encontre de la SARL KIASSURE en ce qu’elle :
– condamne la société N.B. ASSURANCES SASU à payer, en deniers ou quittance, à la société KIASSURE SARL la somme provisionnelle de 25 444,02 euros au titre des reprises de commissions ainsi que celle de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du C.P.C,
– condamne la société N.B. ASSURANCES SASU aux dépens toutes taxes comprises de la présente Ordonnance tels qu’énoncés par l’article 695 du C.P.C., étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquidés à la somme de 40,66 euros T.T.C.
Par ordonnance d’incident en date du 11 juillet 2024, la Présidente de la chambre 1-4 de cette Cour :
Constate le désistement de la S.A.R.L. KIASSURE de l’incident de radiation sur le fondement de l’article 524 du code de procédure.
Dit que les dépens de l’incident seront joints à ceux du principal et seront distraits au profit des avocats en ayant fait l’avance.
*
Les parties ont exposé leur demande ainsi qu’il suit, étant rappelé qu’au visa de l’article 455 du code de procédure civile, l’arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :
Par conclusions notifiées le 22 décembre 2023, la SASU NB ASSURANCES demande à la Cour de :
Vu les articles 872 et 873 du Code de procédure civile
Vu les pièces versées aux débats,
Il est demandé à la Cour d’Appel d’Aix en Provence :
Juger que la société KIASSURE n’a pas respecté ses obligations contractuelles
Juger que la société KIASSURE ne détient pas une créance certaine, liquide et exigible
Juger l’existence d’une contestation sérieuse ;
En conséquence, infirmer l’ordonnance du Tribunal de Commerce de Marseille
Débouter la société KIASSURE de l’ensemble de ses demandes
Condamne la société KIASSURE au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.
A l’appui de ses demandes, la SASU NB ASSURANCES indique en premier lieu qu’elle n’a pas pu faire valoir ses arguments devant le Tribunal de commerce en ce qu’elle n’a pas été rendue destinataire des avis de renvoi du greffe, ni des pièces adverses. Elle fait valoir que la demande de la société KIASSURE se heurte à une contestation sérieuse, le caractère liquide de la prétendue créance reconnue par le juge des référés n’étant pas établi ; que la société KIASSURE n’a pas assumé ses obligations à l’égard de nombreux assurés de sorte qu’un taux de résiliation important a été constaté en raison des carences de la société KIASSURE. La SASU NB ASSURANCES fait donc état d’une déloyauté de cette société et du non-respect de ses obligations contractuelles pour justifier du fait qu’elle n’a pas fait droit à ses demandes de remboursement.
La SARL KIASSURE, par conclusions notifiées le 20 décembre 2024 demande à la Cour de :
Vu l’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées au débat,
Il est demandé à la Cour de :
CONFIRMER l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Marseille en date du 21 septembre 2023 en ce qu’elle a condamné, à titre provisionnel, la société N.B. ASSURANCES au paiement de 25.444,02 euros à titre de reprises sur commissions ;
DIRE que le montant de cette condamnation devra être actualisé au regard de la dette nouvellement contractée par la société N.B. ASSURANCES, d’un montant de 17.388,30 euros ;
En conséquence :
CONDAMNER la société N.B. ASSURANCES au paiement de 43.832,38 euros à titre de reprises sur commissions ;
CONFIRMER l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Marseille en date du 21 septembre 2023 en ce qu’elle a condamné, à titre provisionnel, la société N.B. ASSURANCES au paiement de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;
INFIRMER l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Marseille en date du 21 septembre 2023 en ce qu’elle a débouté la société Kiassure de sa demande de provision sur dommages et intérêts.
Statuant de nouveau à ce titre :
CONDAMNER à titre provisionnel la société N.B. ASSURANCES au paiement des sommes suivantes :
– 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
– 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
– DEBOUTER la société N.B. ASSURANCES de l’intégralité de ses demandes ;
– CONDAMNER la société N.B. ASSURANCES aux entiers dépens.
Elle soutient que l’obligation de la société NB ASSURANCES à son égard n’est pas sérieusement contestable et se prévaut d’une créance liquide en indiquant que cette créance, qui n’avait pas été contestée avant l’engagement de l’instance, est justifiée par les pièces versées à la procédure. Elle fait valoir que son professionnalisme ne peut pas être mis en cause et que les éléments produits par la société KIASSURE pour démontrer ses carences ne sont pas probants.
De la même façon, elle considère qu’aucune mauvaise foi ne peut lui être reprochée. Elle conclut donc que sa créance s’élève à la somme de 43.832,38€, montant de sa demande.
L’affaire a fait l’objet d’une fixation a bref délai par avis donné aux parties le 30 juillet 2024 et a été appelée en dernier lieu à l’audience du 15 janvier 2025.
Sur la demande principale :
Selon l’article 873 du Code de procédure civile, relatif aux ordonnances de référé du Président du Tribunal de commerce :
« Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ».
La société NB ASSURANCES reproche au premier juge d’être entré en voie de condamnation à son encontre sans qu’aucun état comptable ne justifie du quantum des sommes sollicitées. Elle reproche à la société KIASSURE des manquements par un non-respect de ses obligations vis-à-vis de ses assurés ayant entraîné de nombreuses demandes de résiliation, ainsi qu’à son égard en ne l’informant pas de ces résiliations. Elle considère que cette question de la difficulté d’exécution contractuelle constitue une contestation sérieuse à la demande de provision.
Selon la société KIASSURE, l’obligation de NB ASSURANCES n’est pas sérieusement contestable et sa dette est justifiée par les bordereaux de commission produits ; elle soutient également qu’aucun manquement ne peut lui être reproché et considère que les attestations versées par NB ASSURANCES n’ont pas de caractère probant en ce qu’elles ne font pas état de manquements qui lui seraient imputables.
Le protocole de partenariat entre les sociétés KIASSURE et NB ASSURANCES a été conclu le 27 janvier 2022 et a fait l’objet d’un avenant le 26 août 2022, avenant dont l’objet était de modifier les produits pouvant être commercialisés ; ce protocole détermine les obligations respectives des parties et les modalités de distribution des contrats d’assurances. Son article 16 organise notamment les conditions de versement de commissions par rétrocession par la société KIASSURE à NB ASSURANCES. S’agissant de la possibilité d’un solde négatif, il est ainsi convenu que :
« Dans l’hypothèse où le compte du Courtier Distributeur deviendrait négatif, pour quelques motifs que ce soit, il est convenu qu’aucune commission (fixée par l’annexe 1 du présent Protocole de Commissionnement) ne doit être versé par KIASSURE. La suspension du paiement des commissions demeure tant que le solde du compte du Courtier Distributeur n’est pas redevenu positif.
Dès lors, le Courtier Distributeur s’engage expressément à régulariser le montant des sommes dues dans un délai de 15 jours calendaires à compter de la validation du bordereau constatant le solde négatif. Sous réserve de l’accord préalable de KIASSURE, le remboursement de la dette peut être effectué par tout moyen ».
Les dispositions de l’article 12 de ce même contrat portent sur le taux de chute (taux de résiliation et d’annulation des contrats d’assurance qu’elle qu’en soit la cause et la personne qui en est à l’origine) et sur les conditions de remboursement du différentiel de commission en résultant par NB ASSURANCES à KIASSURE.
Par courriers émis au cours du mois de décembre 2022, la société KIASSURE a sollicité auprès de NB ASSURANCES le paiement d’une somme de 971,19€ correspondant au solde négatif au 15 décembre, en versant à l’appui de ses demandes un bordereau de commission faisant état de ce montant. Par la suite, la société KIASSURE a actualisé à la hausse, cela à plusieurs reprises, les demandes faites à la société NB ASSURANCES en se prévalant des résultats négatifs apparaissant sur les bordereaux de commissionnement. Aux termes d’un courriel en date du 15 janvier 2024, elle faisait ainsi état d’une somme due de 42.380,81€.
La société KIASSURE verse aux débats des éléments relatifs à l’absence de validation ou de demandes d’annulation de différents contrats souscrits par des clients ; sont également produits des échanges avec des clients relatifs à des demandes de remboursement de prestations et frais de santé ainsi que les bordereaux de commission récapitulant les souscriptions, commissions et résiliations au cours des périodes litigieuses.
La société NB ASSURANCES se prévaut de son côté de manquements de la société KIASSURE pour justifier du fait que les sommes réclamées par celle-ci ne sont pas dues. Elle produit une série de lettres attribuées à des assurés faisant état de leur mécontentement vis-à-vis de la société KIASSURE en raison de retards dans les remboursements ou dans la délivrance des cartes mutuelles ainsi que d’un manque de sérieux de cette société. Outre ces lettres, sont versés aux débats des échanges entre ces deux sociétés à propos de ces mécontentements des assurés. Ainsi, notamment, par courriel en date du 30 mars 2023, la société NB ASSURANCES indiquait à la société KIASSURE :
« Nous tenons à vous informer que plusieurs de nos clients reviennent vers nous et font des demandes de renonciation car ils se retrouvent avec une double mutuelle, or il est prévu dans notre convention de partenariat que KIASSURE se charge des RIA, il semblerait que cela n’est pas été le cas pour un certain nombre de dossiers (‘).
D’autre part de nombreux adhérents nous signalent ne pas avoir reçu leur carte TP 2023 et payent leurs cotisations sans pouvoir bénéficier de leur couverture santé ce qui représente une gêne et un mécontentement non négligeable.
Pour finir nous avons fait une proposition d’échéancier concernant le solde négatif de notre code apporteur dont vous nous avez fait part, mais à ce jour nous n’avons aucun retour depuis plus d’un mois. Veuillez bien croire que nous souhaitons continuer à travailler dans le cadre d’un partenariat solide et à long terme avec Kiassure c’est pourquoi nous souhaitons apporter les corrections nécessaires de part et d’autre pour une production optimale ».
Des éléments produits, il ressort que les parties s’opposent donc sur les conditions d’exécution de la convention de partenariat conclue entre elles et sur les sommes dues en exécution de celle-ci. En l’état des conclusions des parties, le débat ne porte donc pas sur la nature des obligations issues de cette convention, mais sur la bonne exécution de celles-ci.
Si la société KIASSURE fonde sa demande de provision sur les bordereaux de commission émis dans le cadre de cette relation contractuelle, les éléments produits par la société NB ASSURANCES font état de contestations relatives aux conditions d’exécution du contrat sous la forme d’insatisfactions répétées émises par des assurés et dont l’imputabilité est discutée entre les parties. Le fait que les assurés ayant émis ces contestations soient toujours clients ou aient annulé leurs contrats postérieurement au mois d’avril 2023, comme le soutient la société KIASSURE, ne rend pas le contenu de ces attestations inopérants. De même, l’étude de la sincérité de ces documents et donc l’appréciation du bien fondé des manquements allégués par NB ASSURANCES relève de l’appréciation au fond du dossier.
Les contestations émises sur le déroulement de cette relation contractuelle et sur le respect, par chacune des parties, des obligations y afférentes ne peuvent pas être tranchées par le juge des référés. En outre, au vu des pièces et des éléments contradictoires versés aux débats il ne saurait être considéré que l’obligation de paiement de la société NB ASSURANCES à l’encontre de la société KIASSURE n’est pas sérieusement contestable au sens de l’article 873 du Code de procédure civile.
Certes, les bordereaux de commission produits aux débats par la société KIASSURE ne sont pas expressément contestés par la société NB ASSURANCES comme étant inexacts ou comportant des erreurs. Cependant, si la portée exacte des difficultés relatives aux prestations accomplies par la KIASSURE n’est pas établie, ces difficultés sont justifiées dans leur principe et ont été signalées par NB ASSURANCES à sa contractante dès le mois de mars 2023, soit avant l’engagement de l’instance devant le Tribunal de commerce.
En conséquence, l’appréciation du bienfondé des demandes provisionnelles formulées par la société KIASSURE étant subordonnée à la prise en compte des manquements qui lui sont imputés par l’appelante dans l’exécution de leur protocole de partenariat et donc à un examen au fond de l’affaire, il convient de considérer que cette demande de provision se heurte à une contestation sérieuse et d’en débouter la société KIASSURE.
L’ordonnance du Tribunal de commerce en date du 21 septembre 2023 sera en conséquence infirmée sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :
Compte tenu de la solution adoptée, cette demande de la société KIASSURE sera également rejetée.
La décision du Tribunal de commerce sera confirmée en ce qu’elle a débouté la société KIASSURE de ce chef de prétention.
Sur les demandes annexes :
Compte tenu de la solution du litige, il convient de condamner la société KIASSURE à verser à la société NB ASSURANCES une somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société KIASSURE sera également condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
La Cour,
Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Infirme l’ordonnance du Tribunal de commerce de MARSEILLE en date du 21 septembre 2023, sauf en ce qu’elle a débouté la SARL KIASSURE de sa demande de dommages et intérêts et en ce qu’elle a liquidé les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe à la somme de 40,66€ ;
Statuant à nouveau,
Déboute la SARL KIASSURE de l’ensemble de ses prétentions dirigées à l’encontre de la SASU NB ASSURANCES ;
Y ajoutant,
Condamne la SARL KIASSURE à payer à la SASU NB ASSURANCES une somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la SARL KIASSURE aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Madame Patricia CARTHIEUX, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, La présidente,
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