Compromis d’arbitrage : 20 octobre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-15.403

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Compromis d’arbitrage : 20 octobre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-15.403

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Rejet non spécialement motivé

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10563 F

Pourvoi n° F 20-15.403

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 OCTOBRE 2021

1°/ La société Groupe [C] [F] (GBT), société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ la société Financière et immobilière [C] [F] (FIBT), société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 5],

3°/ la société Brouard-Daudé, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], en la personne de M. [B] [Q], agissant en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

ont formé le pourvoi n° F 20-15.403 contre l’arrêt rendu le 28 février 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige les opposant :

1°/ à la société CDR créances, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [R] [M], prise en qualité de mandataire judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

3°/ à la société SEL Abitbol, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [G] [O], prise en qualité d’administrateur judiciaire et de commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde des sociétés GBT et FIBT,

4°/ à la société Brouard-Daudé, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], en la personne de M. [B] [Q], prise en qualité de mandataire judiciaire à la sauvegarde puis au redressement judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

5°/ à la société SEL Abitbol, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [G] [O], administrateur judiciaire à la sauvegarde puis au redressement des sociétés GBT et FIBT,

défenderesses à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Groupe [C] [F], de la société Financière et immobilière [C] [F] et de la société Brouard-Daudé, ès qualités, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société CDR créances, et l’avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l’audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vallansan, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

Reprise d’instance

1. Il est donné acte de sa reprise d’instance à la société Brouard-Daudé, en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Groupe [C] [F] et Financière et immobilière [C] [F].

2. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

3. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Groupe [C] [F], la société Financière et immobilière [C] [F] et la société Brouard-Daudé aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Groupe [C] [F], la société Financière et immobilière [C] [F] et la société Brouard-Daudé, ès qualités.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir admis la société CDR Créances au passif des sociétés GBT et FIBT à titre chirographaire pour les montants de 93.127.301,57 euros au titre de la quote-part de la somme de 404.623.082,54 euros qu’elle a personnellement payée, 7.546.151,25 euros au titre des intérêts du 2 décembre 2015 attachés à la créance de 93.127.301,57 euros ;

AUX MOTIFS QU’il ressort d’un courrier du 28 juillet 2008, que dans le cadre de l’exécution de la sentence arbitrale du 7 juillet 2008, une compensation conventionnelle entre créances réciproques est intervenue : les liquidateurs de GBT ainsi que M.et Mme [F] ont accepté la compensation entre, d’une part, la condamnation en principal de 240 millions d’euros majorée du préjudice moral de 45 millions d’euros, d’autre part, les créances du CDR à hauteur de 163.351.810,19 euros, dont sera déduit le prix d’attribution des actions BTF SA (76.224.508,62 euros). En conclusion, les liquidateurs demandaient le paiement de la somme de 197.872.698,43 euros.

La déclaration du CDR Créances ne comporte pas de poste relatif au montant de 87.127.301,57 euros. La contestation des appelantes ne porte donc que sur la créance de restitution. Or, son montant a été irrévocablement fixé par l’arrêt du 3 décembre 2015 et mis à la charge solidaire des sociétés GBT et FIBT entre autres. Par conséquent, ainsi qu’il vient d’être jugé la remise en cause de ce montant à raison d’erreurs prétendument commises dans la détermination des sommes à prendre ou non en compte dans le cadre de cette restitution, est inopérant.

Il s’ensuit que les moyens pris de l’irrégularité de la déclaration et du mal fondé de la créance de ce chef seront rejetés, étant surabondamment relevé qu’une somme, fût-elle payée par compensation entre créances réciproques, en exécution d’une décision de justice ou d’une sentence arbitrale qui a ensuite été rétractée, doit être restituée par la partie qui l’a reçue à celle qui l’a payée.

GBT et FIBT soutiennent ensuite que le montant de la restitution inclut à tort un montant 6 millions d’euros, soit la moitié de la somme de 12 millions d’euros, qui correspond à une créance que le CDR détenait sur le Crédit Lyonnais (suite à l’accord donné par le Crédit Lyonnais pour supporter cette somme en cas de condamnation du CDR), et que le CDR a cédée aux liquidateurs du groupe [F] en vertu du protocole d’exécution des sentences du 16 mars 2009, selon lequel « Les Liquidateurs ont accepté et réitèrent expressément au sein des présentes leur engagement de décharger définitivement le CDR de régler 12 millions d’euros du montant des condamnations, tout en se réservant la possibilité d’agir à l’encontre du Crédit Lyonnais pour tenter de recouvrer cette somme, opérant ainsi une cession de créance à titre gratuit pour laquelle le CDR cède aux Liquidateurs sa créance à l’encontre du Crédit Lyonnais, créance discutée par celui-ci au titre de la contribution forfaitaire. »

Les sociétés débitrices arguent que cette cession de créance a été anéantie à raison de la rétractation des sentences arbitrales.

Cependant, ainsi qu’il vient d’être jugé, le montant de la créance de restitution ayant été irrévocablement fixé par l’arrêt du 3 décembre, la contestation de GBT et FIBT est inopérante.

1/ ALORS QUE la somme de 87.127.301,57 euros était mentionnée dans la déclaration de créance de la société CDR Créances, au point 9, comme ayant été payée par elle le 29 juillet 2018 et devant lui être restituée ; que les sociétés débitrices contestaient formellement ce poste de créance ; qu’en retenant, pour rejeter cette contestation des sociétés débitrices, que « la déclaration du CDR Créances ne comporte pas de poste relatif au montant de 87.127.301,57 euros », la cour d’appel a dénaturé ladite déclaration de créances, violant ainsi le principe de l’interdiction faite au juge de dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

2/ ALORS QUE les sociétés GBT et FIBT faisaient valoir que la société CDR Créances ne fournissait aucune pièce justifiant les montants qu’elle prétendait avoir versés aux sociétés exposantes dont elle demandait la restitution, si bien qu’en ne s’expliquant pas sur ce moyen, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE la cour d’appel retient « qu’une somme, fût-elle payée par compensation entre créances réciproques, en exécution d’une décision de justice ou d’une sentence arbitrale qui a ensuite été rétractée, doit être restituée par la partie qui l’a reçue à celle qui l’a payée », mais refuse de déterminer les montants effectivement payés, et à qui, par la société CDR Créances demanderesse à la restitution s’est déterminée par des motifs contradictoires, violant ainsi l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir admis la société CDR Créances au passif des sociétés GBT et FIBT à titre chirographaire pour les montants de 1.321.130,84 euros en remboursement des frais et honoraires réglés pour la procédure d’arbitrage et de 112.718,50 euros au titre des intérêts sur cette somme au 2 décembre 2015 ;

AUX MOTIFS QUE Le CDR Créances a déclaré une créance de 1.706.792,94 euros au titre des coûts de l’arbitrage qu’elle a payés et de 140.676,21 euros au titre des intérêts au 30 novembre 2015 attachés à cette créance.

Selon l’annexe 1 jointe à la déclaration de créance, le montant de 1.706.792,94 euros comporte les honoraires versés aux trois arbitres ainsi que des honoraires versés aux avocats et conseils du CDR Créances.

GBT et FIBT soutiennent que les coûts de la procédure d’arbitrage ne comportent en aucun cas les notes d’honoraires des avocats et conseils du CDR Créances, et qu’en tout état de cause ces frais ne sont pas justifiés, dès lors que certaines factures sont postérieures à la procédure d’arbitrage et d’autres sans libellé ou justificatif, ce qui ne permet pas d’identifier les travaux réalisés.

Le CDR Créances considère au contraire que les frais de ses conseils sont bien inclus dans la condamnation prononcée par l’arrêt du 3 décembre 2015.

Le dispositif de l’arrêt du 3 décembre 2015 est ainsi libellé « Condamne solidairement FIBT, GBT [….] à rembourser à la société CDR Créances et à la société CDR Consortium de Réalisation les coûts de la procédure d’arbitrage, en ce compris les frais et honoraires des arbitres, avec intérêts au taux légal sur ces sommes depuis le jour du paiement, et ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l’article 1154 du code civil. »

Il résulte des motifs de l’arrêt que cette condamnation intervient à titre de dommages et intérêts en raison du caractère frauduleux de l’arbitrage.

En précisant « en ce compris les frais et honoraires des arbitres », la cour d’appel n’a pas entendu limiter le remboursement aux seuls frais et honoraires des arbitres, mais viser l’ensemble des frais exposés à l’occasion de la procédure d’arbitrage, dont font manifestement partie les honoraires des conseils exposés par les CDR.

Ainsi, que l’a relevé la Cour de cassation dans son arrêt du 18 mai 2017, pour rejeter les moyens relatifs à cette condamnation, la cour d’appel statuant sur la réparation du préjudice causé par la fraude à la décision du tribunal arbitral, n’était pas soumise aux stipulations du compromis d’arbitrage signé le 16 novembre 2007 répartissant entre les parties la charge du coût des procédures.

Il sera donc admis que la condamnation au remboursement des frais et honoraires d’arbitrage à titre de dommages et intérêts inclut les honoraires des avocats et conseils des CDR.

ALORS QUE l’arrêt du 3 décembre 2015 avait condamné les sociétés GBT et FIBT à rembourser aux sociétés CDR Créances et CDR Consortium de Réalisation les frais de la procédure d’arbitrage ; qu’en étendant cette condamnation aux frais exposés à l’occasion de la procédure d’arbitrage, incluant les honoraires des conseils et consultants choisis par les sociétés CDR, la cour d’appel a dénaturé l’arrêt précité, violant ainsi l’article 1355 du code civil ;

ALORS QUE, selon l’article 461 du code de procédure civile, il appartient à tout juge d’interpréter sa décision et qu’il résulte de l’article L.624-2 du code de commerce que le juge commissaire n’a pas compétence pour trancher une contestation sérieuse opposée à une demande d’admission d’une créance, de sorte qu’en se prononçant sur une difficulté d’interprétation de l’arrêt du 3 décembre 2015, la cour d’appel a violé les textes précités.

 


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