Compromis d’arbitrage : 20 octobre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-15.402

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Compromis d’arbitrage : 20 octobre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-15.402

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Rejet non spécialement motivé

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10562 F

Pourvoi n° E 20-15.402

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 OCTOBRE 2021

1°/ La société Groupe Bernard Tapie (GBT), société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ la société Financière et immobilière Bernard Tapie (FIBT), société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 5],

3°/ la société Brouard-Daudé, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], en la personne de M. [W] [N], agissant en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

ont formé le pourvoi n° E 20-15.402 contre l’arrêt rendu le 28 février 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige les opposant :

1°/ à la société CDR-Consortium de réalisation, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ à la société SEL Abitbol, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [S] [O], prise en qualité d’administrateur judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

3°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [R] [H], prise en qualité de mandataire judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

4°/ à la société Brouard-Daudé, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], en la personne de M. [W] [N], prise en qualité de mandataire judiciaire à la sauvegarde puis au redressement judiciaire des sociétés GBT et FIBT,

5°/ à la société SEL Abitbol, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [S] [O], administrateur judiciaire à la sauvegarde puis au redressement des sociétés GBT et FIBT,

défenderesses à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Groupe Bernard Tapie, de la société Financière et immobilière Bernard Tapie et de la société Brouard-Daudé, ès qualités, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Consortium de réalisation, et l’avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l’audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vallansan, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

Reprise d’instance

1. Il est donné acte de sa reprise d’instance à la société Brouard-Daudé, en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Groupe Bernard Tapie et Financière et immobilière Bernard Tapie.

2. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

3. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Groupe Bernard Tapie, la société Financière et immobilière Bernard Tapie et la société Brouard-Daudé aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Groupe Bernard Tapie, la société Financière et immobilière Bernard Tapie et la société Brouard-Daudé.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir admis la société CDR Consortium de Réalisation au passif des sociétés GBT et FIBT à titre chirographaire pour les montants de 311.495.780,97 euros au titre de sa créance de restitution résultant des arrêts de 17 février 2015 et 3 décembre 2015 et de 22.075.007,85 euros au titre des intérêts sur cette somme au 30 novembre 2015 ;

AUX MOTIFS que CDR Consortium de Réalisation soutient que la limitation de ce poste de créance à une part virile de 50%, telle qu’opérée par le juge-commissaire est dépourvue de fondement légal, dès lors qu’il s’agit d’une créance de restitution, et contredit le titre exécutoire irrévocable du 3 décembre 2015 sur lequel elle est fondée.

GBT et FIBT arguent au contraire du caractère conjoint et non pas solidaire de la créance, justifiant selon eux sa division par parts viriles, la solidarité n’étant prévue par l’arrêt du 3 décembre 2015 qu’entre les débiteurs, que ni le dispositif de cet arrêt qui a seul autorité, ni au demeurant ses motifs ne précisent la répartition de cette condamnation entre les créanciers, que la solidarité active ne se présumant pas, il y a lieu en l’absence de clause de solidarité de diviser la créance ‘par tête’, chaque créancier n’ayant le droit de réclamer que sa part sur cette créance, soit en l’espèce par moitié.

Il est de principe qu’une somme qui a été payée en exécution d’une décision de justice ou d’une sentence arbitrale qui a ensuite été rétractée doit être restituée par la partie qui l’a reçue à celle qui l’a payée.

La rétractation de la sentence arbitrale intervenue le 17 février 2015 a eu pour effet de rendre les CDR Consortium de Réalisation et CDR Créances créanciers d’une obligation de restitution à l’égard des sociétés GBT et FIBT, débiteurs solidaires avec d’autres de l’intégralité de cette restitution, dont le montant a été fixé par l’arrêt consécutif du 3 décembre 2015.

En présence d’une créance de restitution, les sociétés débitrices sont mal fondées à soutenir qu’à défaut de ventilation résultant du titre ou d’un accord entre créanciers et débiteurs, CDR Consortium de Réalisation ne peut déclarer sa créance que pour moitié.

Il est constant que les sociétés CDR Consortium de Réalisation et CDR Créances s’entendent sur la quote-part de créance de restitution due à chacune d’elles, leurs déclarations respectives n’excédant pas le montant de la créance de restitution résultant de l’arrêt du 3 décembre 2015, de sorte qu’aucune atteinte n’est portée aux droits des sociétés débitrices.

1/ ALORS QUE la solidarité active ne se présume pas ; qu’en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser la solidarité active, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1197 ancien du code civil ;

2/ ALORS QUE le dispositif de l’arrêt du 3 décembre 2015 ne donnait pas expressément à chacun des deux créanciers le droit de demander le paiement de la totalité ou d’une part supérieure à la moitié de la créance de restitution dont il a fixé le montant, si bien qu’en statuant comme elle l’a fait la cour d’appel a violé les articles 480 du code de procédure civile, 1355 du code civil, ensemble l’article 1197 ancien du code civil ;

3/ ALORS QUE les sociétés GBT et FIBT faisaient valoir dans leurs écritures (conclusions n°4, n° 68 à 73) qu’une éventuelle convention sur la répartition de la créance conclue entre les créanciers hors la présence des débiteurs serait inopposable à ces derniers, si bien qu’en ne s’expliquant pas sur ce moyen, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

4/ ALORS QUE l’accord des créanciers entre eux pour un partage inégal de leur créance globale est inopposable au débiteur et ne fait pas obstacle à la division de ladite créance par portions égales, si bien qu’en retenant que l’entente alléguée des sociétés CDR Consortium de Réalisation et CDR Créances sur la quote-part de créance de restitution revenant à chacune d’elles avait force obligatoire à l’égard des débiteurs, la cour d’appel a violé les articles 1197 ancien et 1199 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir admis la société CDR Consortium de Réalisation au passif des sociétés GBT et FIBT à titre chirographaire pour les montants de 2.573.365,56 euros en remboursement des frais et honoraires réglés pour la procédure d’arbitrage et de 205.077,80 euros au titre des intérêts sur cette somme au 30 novembre 2015 ;

AUX MOTIFS QUE le CDR Consortium de Réalisation a déclaré une créance de 2.861.194,27 euros au titre des coûts de l’arbitrage qu’elle a payés et de 224.004,16 euros au titre des intérêts au 30 novembre 2015 attachés à cette créance.

Il résulte de l’annexe 1 jointe à la déclaration de créance, que le montant de 2.861.194,27 euros déclaré correspond uniquement à des honoraires d’avocats et de conseils. Les sommes réglées aux arbitres n’ont donc pas été déclarées par le CDR Consortium de Réalisation.

GBT et FIBT soutiennent que les coûts de la procédure d’arbitrage ne comportent en aucun cas les notes d’honoraires des avocats et conseils du CDR Consortium de Réalisation, et qu’en tout état de cause ces frais ne sont pas justifiés, dès lors que certaines factures sont postérieures à la procédure d’arbitrage et d’autres sans libellé ou justificatif, ce qui ne permet pas d’identifier les travaux réalisés.

Le CDR Consortium de Réalisation considère au contraire que les frais de ses conseils sont bien inclus dans la condamnation prononcée par l’arrêt du 3 décembre 2015.

Le dispositif de l’arrêt du 3 décembre 2015 est ainsi libellé « Condamne solidairement FIBT, GBT [….] à rembourser à la société CDR Créances et à la société CDR Consortium de Réalisation les coûts de la procédure d’arbitrage, en ce compris les frais et honoraires des arbitres, avec intérêts au taux légal sur ces sommes depuis le jour du paiement, et ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l’article 1154 du code civil ».

Il résulte des motifs de l’arrêt que cette condamnation intervient à titre de dommages et intérêts en raison du caractère frauduleux de l’arbitrage.

En précisant « en ce compris les frais et honoraires des arbitres », la cour d’appel n’a pas entendu limiter le remboursement aux seuls frais et honoraires des arbitres, mais viser l’ensemble des frais exposés à l’occasion de la procédure d’arbitrage, frais dont font partie les honoraires des conseils exposés par les CDR pour les besoins de cette procédure.

Ainsi, que l’a relevé la Cour de cassation dans son arrêt du 18 mai 2017 pour rejeter les moyens du pourvoi relatifs à cette condamnation, la cour d’appel statuant sur la réparation du préjudice causé par la fraude à la décision du tribunal arbitral, n’était pas soumise aux stipulations du compromis d’arbitrage signé le 16 novembre 2007 répartissant entre les parties la charge du coût des procédures.

Il sera donc admis que la condamnation au remboursement des frais et honoraires d’arbitrage à titre de dommages et intérêts inclut les honoraires des avocats et conseils.

ALORS QUE l’arrêt du 3 décembre 2015 avait condamné les sociétés GBT et FIBT à rembourser aux sociétés CDR Créances et CDR Consortium de Réalisation les frais de la procédure d’arbitrage ; qu’en étendant cette condamnation aux frais exposés à l’occasion de la procédure d’arbitrage, incluant les honoraires des conseils et consultants choisis par les sociétés CDR, la cour d’appel a dénaturé l’arrêt précité, violant ainsi l’article 1355 du code civil ;

ALORS QUE, selon l’article 461 du code de procédure civile, il appartient à tout juge d’interpréter sa décision et qu’il résulte de l’article L.624-2 du code de commerce que le juge commissaire n’a pas compétence pour trancher une contestation sérieuse opposée à une demande d’admission d’une créance, de sorte qu’en se prononçant sur une difficulté d’interprétation de l’arrêt du 3 décembre 2015, la cour d’appel a violé les textes précités.

 


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