Règle de droit applicableLa cession d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire est régie par les dispositions de l’article L. 642-19 du Code de commerce, qui stipule que le liquidateur judiciaire doit obtenir l’autorisation du juge-commissaire pour procéder à la cession des éléments d’actif de la société en liquidation. Cette autorisation est conditionnée par le respect des droits des créanciers et la conformité aux stipulations contractuelles, notamment celles relatives à la destination du bail commercial. Textes législatifs pertinentsL’article L. 642-19 du Code de commerce précise que le liquidateur peut céder les éléments d’actif, mais uniquement après avoir obtenu l’accord du juge-commissaire, qui doit s’assurer que cette cession ne porte pas atteinte aux droits des créanciers et respecte les conditions contractuelles en vigueur. De plus, l’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer une somme au titre des frais d’avocat, ce qui est pertinent dans le cadre des demandes accessoires formulées par les parties. Conséquences de la décisionLa rétractation de l’ordonnance du 9 décembre 2024 par le juge-commissaire, en raison du refus du bailleur de déspécialiser le bail, illustre l’importance de la conformité aux stipulations contractuelles dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce. Cette décision souligne également que l’appel peut devenir sans objet si les circonstances ayant conduit à l’appel sont modifiées par une nouvelle décision judiciaire. |
L’Essentiel : La cession d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire nécessite l’autorisation du juge-commissaire, qui doit veiller au respect des droits des créanciers et des stipulations contractuelles. L’article L. 642-19 du Code de commerce encadre cette procédure, stipulant que le liquidateur ne peut céder les éléments d’actif sans cet accord. La rétractation de l’ordonnance du 9 décembre 2024 par le juge-commissaire, due au refus du bailleur de déspécialiser le bail, illustre cette exigence de conformité.
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Résumé de l’affaire : Le 16 septembre 2024, le tribunal de commerce de Pontoise a prononcé la liquidation judiciaire de la SASU Poissonnerie Georges, sous la direction d’un dirigeant d’entreprise. La SELARL Asteren, représentée par un liquidateur judiciaire, a été désignée pour gérer cette liquidation. Le 9 décembre 2024, le juge-commissaire a autorisé la cession du fonds de commerce de la société à un acheteur pour un montant de 15 000 euros, avec des conditions précises concernant la remise des clés et la prise en charge des charges locatives par l’acheteur.
Cependant, le 20 décembre 2024, l’acheteur a interjeté appel de cette ordonnance, contestant la cession des actifs de la société, arguant qu’elle violait les dispositions du code de commerce. Il a demandé l’annulation de l’ordonnance et la restitution du prix de vente. Parallèlement, le dirigeant de la société a également demandé à la cour d’annuler la cession, soulignant que celle-ci ne respectait pas la destination alimentaire prévue par le bail commercial. La déclaration d’appel a été signifiée à la société Asteren, qui n’a pas constitué avocat. Le 6 mars 2025, à la suite de l’appel, le liquidateur a demandé la rétractation de l’ordonnance du 9 décembre 2024, ce qui a été accordé par le juge-commissaire en raison du refus du bailleur de déspécialiser le bail. Cette rétractation a rendu l’appel sans objet. En conséquence, la cour a constaté que l’appel était devenu sans objet et a condamné l’acheteur aux dépens d’appel, tout en rejetant la demande d’indemnisation fondée sur l’article 700 du code de procédure civile. Cette affaire met en lumière l’importance de la conformité aux stipulations contractuelles lors de la cession d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la cession autorisée par le juge-commissaire ?La cession autorisée par le juge-commissaire repose sur les dispositions de l’article L. 642-19 du code de commerce, qui stipule que le liquidateur peut céder les actifs de la société en liquidation judiciaire. Cet article précise que la cession doit être effectuée dans l’intérêt des créanciers et que le liquidateur doit respecter les conditions de vente fixées par le tribunal. Il est également mentionné que le cessionnaire doit prendre en charge les risques et charges liés à l’exploitation du fonds de commerce à compter de la date de l’ordonnance. Quel est l’impact de la rétractation de l’ordonnance du 9 décembre 2024 ?La rétractation de l’ordonnance du 9 décembre 2024, intervenue par ordonnance du 6 mars 2025, a pour effet de rendre l’appel de M. [X] [L] sans objet. En effet, selon l’article 480 du code de procédure civile, l’appel est considéré comme sans objet lorsque l’acte attaqué a été annulé ou rétracté. Ainsi, la cession des éléments résiduels d’actifs de la société Poissonnerie Georges n’est plus valide, ce qui entraîne la nécessité de restituer le prix de vente, conformément aux règles de droit applicables. Quel est le rôle du bailleur dans la cession du fonds de commerce ?Le bailleur joue un rôle crucial dans la cession du fonds de commerce, notamment en ce qui concerne la déspécialisation du bail commercial. L’article L. 145-16 du code de commerce stipule que toute cession de bail doit être autorisée par le bailleur, et que ce dernier peut refuser la déspécialisation si l’activité projetée par le cessionnaire est incompatible avec la destination du bail. Dans ce cas, le refus du bailleur de déspécialiser le bail a conduit à la rétractation de l’ordonnance de cession, soulignant l’importance de l’accord du bailleur dans ce type de transaction. Quel est le fondement des demandes accessoires de M. [M] ?Les demandes accessoires de M. [M] sont fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, qui permet à une partie de demander le remboursement de ses frais de justice. Cet article précise que le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés, sauf si la demande est jugée abusive ou infondée. Dans ce cas, la cour a rejeté la demande de M. [M], considérant que l’équité commandait de ne pas faire droit à cette demande, ce qui souligne l’appréciation discrétionnaire du juge en matière de frais de justice. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 4DF
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 1er AVRIL 2025
N° RG 24/07913 – N° Portalis DBV3-V-B7I-W5ZH
AFFAIRE :
[Z] [X] [L]
C/
S.E.L.A.R.L. ASTEREN
[R], [E], [U], [W], [J] [M]
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 9 Décembre 2024 par le Juge commissaire de [Localité 8]
N° RG : 2024J00772
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Mathieu LARGILLIERE
Me Joseph SOUDRI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER AVRIL DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANT :
Monsieur [Z] [X] [L]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Mathieu LARGILLIERE de la SELARL LARGILLIERE AVOCAT, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 86
****************
INTIMEE :
S.E.L.A.R.L. ASTEREN Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la société « POISSONNERIE GEORGES » selon décision en date du 16 septembre 2024
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Défaillant – déclaration d’appel signifiée à personne morale
****************
PARTIE INTERVENANTE
Monsieur [R], [E], [U], [W], [J] [M]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentant : Me Joseph SOUDRI de la SELARL CABINET SOUDRI,, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 19
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Mars 2025, Monsieur Ronan GUERLOT, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
Le 16 septembre 2024, le tribunal de commerce de Pontoise a placé la SASU Poissonnerie Georges, ayant pour dirigeant M. [M], en liquidation judiciaire et a désigné la SELARL Asteren, prise en la personne de Mme [H], en qualité de liquidateur judiciaire.
Le 9 décembre 2024, le juge-commissaire a :
– autorisé le liquidateur à céder de gré à gré le fonds de commerce de la société Poissonnerie Georges exploité à [Adresse 2], à M. [X] [L], moyennant le prix de 15 000 euros hors taxe, hors frais, hors droits et hors charges, payable au comptant le jour de la signature de l’acte, et aux autres conditions de son offre, réparti comme suit :
– éléments incorporels : 12 000 euros ;
– éléments corporels : 3 000 euros ;- fixé l’entrée en jouissance à la date de la présente ordonnance ;
– dit qu’à compter de cette date, le cessionnaire assurera l’ensemble des risques et charges, de sorte qu’il prendra à sa charge les loyers, l’assurance et les autres charges locatives ;
– dit que conformément aux modalités de vente fixée, la remise des clés au cessionnaire désigné sera subordonnée aux conditions suivantes :
consignation de la totalité du prix offert ;
présentation d’un certificat d’assurance des locaux ;
attestation d’absence de travaux jusqu’à la signature des actes de cession ;
consignation du dépôt de garantie du bail ;
– ordonné par ailleurs la vente aux enchères publiques du véhicule hors périmètre de la présente cession et inventorié par le Commissaire de justice, la SELARL Dumeyniou [C] Valmier dépendant du patrimoine de la liquidation judiciaire de la société Poissonnerie Georges.
Le 20 décembre 2024, M. [X] [L] a interjeté appel de l’ordonnance du 9 décembre 2024 en tous ses chefs de disposition, à l’exception de ce qu’elle a ordonné la vente aux enchères publiques du véhicule hors périmètre de la présente cession et inventorié par le commissaire de justice, la société Dumeyniou [C] Valmier dépendant du patrimoine de la liquidation judiciaire de la société Poissonnerie Georges.
Par dernières conclusions du 31 janvier 2025, il demande à la cour de :
– déclarer son appel recevable ;
Et en conséquence,
A titre principal,
– annuler l’ordonnance du 9 décembre 2024 en ce qu’elle autorise la cession des éléments résiduels d’actifs de la société Poissonnerie Georges en liquidation judiciaire à son profit, ladite cession étant intervenue en violation des dispositions de l’article L. 642-19 du code de commerce ;
Et en conséquence,
– ordonner à la société Asteren de procéder à la restitution du prix de vente, soit la somme de 15 000 euros à son profit, et ce dans les 8 jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir ;
Subsidiairement,
– infirmer l’ordonnance du 9 décembre 2024 en ce qu’elle autorise la cession des éléments résiduels d’actifs de la société Poissonnerie Georges en liquidation judiciaire à son profit en ce qu’elle autorise la cession du bail commercial alors que l’activité du cessionnaire est contraire aux stipulations contractuelles du bail ;
Et en conséquence,
– rejeter la demande d’autorisation de cession du bail commercial à son profit ;
– ordonner à la société Asteren de procéder à la restitution du prix de vente, soit la somme de 15 000 euros à son profit, et ce dans les 8 jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir ;
En tout état de cause,
– condamner la société Asteren aux entiers dépens et au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions d’intervenant volontaire du 4 mars 2025, M. [M] demande à la cour de :
– constater que la cession du fonds de commerce telle qu’autorisée par l’ordonnance du 9 décembre 2024 au profit de M. [X] [L] n’est pas conforme à la destination de commerce alimentaire prévue par le bail ;
– annuler en conséquence cette autorisation de cession consentie à la société Asteren, prise en la personne de Mme [H], mandataire liquidateur, et au profit de M. [X] [L] ;
– condamner la société Asteren d’une part, et M. [X] [L] d’autre part, à payer chacun la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– les condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Cabinet Soudri.
La déclaration d’appel a été signifiée à la société Asteren le 21 janvier 2025 par remise à personne morale. Les conclusions lui ont été signifiées le 4 février 2025 selon les mêmes modalités. Celle-ci n’a pas constitué avocat.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 10 mars 2025.
Par note en délibéré du 18 mars 2025, demandée à l’audience du 17 mars 2025, le conseil de M. [X] [L] a transmis à la cour l’ordonnance du juge-commissaire du 6 mars 2025 rétractant l’ordonnance du 9 décembre 2024, objet du présent appel.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
– Sur la demande principale
Il ressort des pièces transmises par note en délibéré que, par requête du 5 mars 2025, le liquidateur a, à la suite du présent appel, sollicité la rétraction de l’ordonnance dont appel et que par ordonnance du 6 mars 2025, le juge-commissaire a rétracté cette ordonnance en raison du refus du bailleur de déspécialiser le bail.
Il en résulte que l’appel est devenu sans objet.
– Sur les demandes accessoires
L’équité commande de rejeter la demande de M. [M] fondée sur l’article 700 du code de procédure.
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire,
Constate que l’appel est sans objet ;
Condamne M. [X] [L] aux dépens d’appel ;
Rejette la demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT,
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