Formation e-sport non reconnue par l’Etat : nullité du contrat

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Formation e-sport non reconnue par l’Etat : nullité du contrat
La notion de Bachelor peut être trompeuse. S’agissant d’une formation d’une durée de 3 ans, sanctionnée chaque année par un diplôme (Bachelor 1, Bachelor 2, Bachelor 3) destinée principalement à des étudiants en formation initiale, il appartient à l’établissement d’informer précisément l’étudiant qui s’inscrit de la nature de la formation qu’il va suivre et de sa valeur par rapport aux diplômes universitaires dispensés dans des établissements publics ou privés sous contrat, étant souligné que la plaquette informative indique bien que « eSport University est un établissement d’enseignement supérieur technique privé hors contrat. L’admission n’est pas conditionnée par l’inscription à Parcoursup. Vous pouvez vous inscrire directement dans votre école ».

Compte tenu de ce qu’un « Bachelor » peut, selon les cas, donner lieu à un titre RNCP, donc constituer un diplôme reconnu ou non par l’Etat, il lui appartenait de préciser expressément dans le contrat d’enseignement si la formation délivrée donnerait lieu à un diplôme reconnu ou non par l’Etat ou si, le diplôme n’était pour l’instant pas reconnu mais avait vocation à le devenir, et le cas échéant sous quel délai espéré ou prévisible.

En la cause, en omettant d’apporter une précision essentielle sur les caractéristiques de la prestation, la société défenderesse, alors même qu’elle savait que pour les années scolaires litigieuses, la formation eSport dispensée n’était pas sanctionnée par un titre certifié par l’Etat, a commis une réticence dolosive.

Cette réticence dolosive lors de la conclusion du contrat est corroborée par d’autres éléments du dossier, révélés postérieurement à la conclusion du contrat, démontrant qu’un certain flou était volontairement entretenu sur la reconnaissance des titres délivrés par l’Etat.

Selon l’article 1130 du code civil : « L’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. /Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné. »

L’article 1131 du même code prévoit que les vices du consentement sont une cause de nullité du contrat.

Aux termes de l’article 1137 du code civil : « Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges. /Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

Le dol ne peut être caractérisé que s’il est intentionnel et s’il est à l’origine d’une erreur qui a été déterminante du consentement de la victime. La preuve du dol est libre, l’intention dolosive peut être prouvée par un faisceau d’indices. Le tribunal, pour former sa conviction, sur l’existence d’un dol au moment de la formation du contrat, peut tenir compte de révélations postérieures à la conclusion du contrat.

Par ailleurs, aux termes de l’article L. 111-1 du code de la consommation : « Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat à titre onéreux, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, ainsi que celles du service numérique ou du contenu numérique, compte tenu de leur nature et du support de communication utilisé, et notamment les fonctionnalités, la compatibilité et l’interopérabilité du bien comportant des éléments numériques, du contenu numérique ou du service numérique, ainsi que l’existence de toute restriction d’installation de logiciel (….) ».

Selon l’article 1112-1 du code civil : « Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant./ Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. /Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties./Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie. /Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir. /Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »

Il en résulte que tout professionnel vendeur de biens ou prestataires de service doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Il appartient à celui qui se prétend libéré d’une obligation de justifier du fait qui l’a éteinte.

Ainsi que cela a été jugé par la Première chambre civile de la Cour de cassation le 20 décembre 2023 (n°22-18.928, publié au Bulletin), « il résulte de la combinaison de l’article L. 111-1 du code de la consommation, qui n’assortit pas expressément de la nullité du contrat le manquement aux obligations d’information précontractuelles qu’il énonce, et de l’article 1112-1 du code civil, qu’un tel manquement du professionnel à l’égard du consommateur entraîne néanmoins l’annulation du contrat, dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants du code civil, si le défaut d’information porte sur des éléments essentiels du contrat ».

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