La vente d’un bien, en l’occurrence une tractopelle, est soumise aux dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil, qui régissent la garantie des vices cachés. Selon l’article 1641, le vendeur est tenu de garantir l’acheteur contre les vices cachés de la chose vendue, c’est-à-dire des défauts qui rendent la chose impropre à l’usage auquel elle est destinée ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. L’article 1642 précise que le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et que l’acheteur doit prouver l’existence d’un vice caché au moment de la vente.
Dans le cas présent, le tribunal a constaté que la tractopelle présentait des défauts non visibles pour un acheteur non professionnel, ce qui a conduit à la résolution de la vente. L’expert judiciaire a établi que les défauts affectant le système de transmission et le circuit hydraulique étaient antérieurs à la vente et n’étaient pas décelables par un acheteur non averti. Ainsi, la condition d’un vice caché, au sens des articles 1641 et 1642, était remplie, justifiant la décision de prononcer la résolution de la vente et d’ordonner les restitutions réciproques. En ce qui concerne les frais de justice, l’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés non compris dans les dépens. Le tribunal a donc également appliqué cette disposition en condamnant M. [L] [Y] à verser une somme à M. [I] [N] [D] pour couvrir ses frais d’appel. La décision de justice s’inscrit donc dans le cadre des règles relatives à la garantie des vices cachés et à la prise en charge des frais de justice, conformément aux articles précités du Code civil et du Code de procédure civile. |
L’Essentiel : La vente d’une tractopelle est soumise aux articles 1641 et suivants du Code civil concernant la garantie des vices cachés. Le tribunal a constaté que la tractopelle présentait des défauts non visibles pour un acheteur non professionnel, entraînant la résolution de la vente. L’expert a établi que les défauts du système de transmission et du circuit hydraulique étaient antérieurs à la vente et non décelables. La condition d’un vice caché était remplie, justifiant la décision de prononcer la résolution de la vente.
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Résumé de l’affaire : M. [L] [Y] a vendu une tractopelle à M. [I] [N] [D] pour 8 500 euros le 6 août 2018. À la suite d’une demande de M. [I] [N] [D], le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire le 7 juillet 2020, dont le rapport a été déposé le 10 avril 2021. M. [I] [N] [D] a ensuite assigné M. [L] [Y] devant le tribunal judiciaire de Lorient le 12 mai 2021. Le tribunal a rendu un jugement le 1er décembre 2021, prononçant la résolution de la vente, condamnant M. [L] [Y] à restituer le prix de vente et à payer 1 000 euros à M. [I] [N] [D] pour les frais, tout en ordonnant à M. [I] [N] [D] de restituer la tractopelle. M. [L] [Y] a interjeté appel le 22 avril 2022. Dans ses conclusions du 26 mars 2024, il a demandé l’infirmation du jugement et des condamnations à son encontre. M. [I] [N] [D] a, de son côté, demandé la confirmation du jugement et des condamnations à l’encontre de M. [L] [Y]. La cour a rendu son ordonnance de clôture le 28 mars 2024, confirmant le jugement du 1er décembre 2021 et condamnant M. [L] [Y] à payer 3 000 euros à M. [I] [N] [D] pour les frais d’appel, ainsi qu’aux dépens de la procédure d’appel.
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Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences de la présence de vices cachés dans la vente d’un bien d’occasion ?La présence de vices cachés dans la vente d’un bien d’occasion entraîne la possibilité pour l’acheteur d’agir en résolution de la vente, conformément aux articles 1641 et suivants du code civil. L’article 1641 du code civil stipule que « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. » Ainsi, si un bien présente des défauts non visibles au moment de la vente et qui affectent son usage, l’acheteur peut demander la résolution de la vente et la restitution du prix payé. Comment la vétusté du matériel influence-t-elle la responsabilité du vendeur ?La vétusté du matériel peut influencer la responsabilité du vendeur, mais elle ne l’exonère pas de sa garantie en cas de vices cachés. L’article 1643 du code civil précise que « le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même. » Cependant, si les défauts sont non visibles pour un acheteur non professionnel, comme dans le cas présent, le vendeur reste responsable. Dans cette affaire, bien que la tractopelle soit ancienne et présente une certaine vétusté, les défauts cachés affectant son usage n’étaient pas décelables par l’acheteur, ce qui engage la responsabilité du vendeur. Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement des frais exposés pour la procédure, ce qui a été appliqué dans ce litige. Cet article stipule que « la cour peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. » Dans ce cas, le tribunal a condamné le vendeur à payer une somme à l’acheteur pour couvrir ses frais d’appel, ce qui est conforme à la pratique judiciaire en matière de litiges commerciaux. |
ARRÊT N°354
N° RG 22/02601
N° Portalis DBVL-V-B7G-SVXH
(Réf 1ère instance : 21/01220)
M. [L] [Y]
C/
M. [I] [N] [D]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me BARTHE
– Me LE COULS-BOUVET
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Ludivine BABIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 28 Mai 2024 et tenue en double rapporteur, sans opposition des parties par Monsieur David JOBARD, Président de Chambre, et Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Octobre 2024, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
APPELANT :
Monsieur [L] [Y]
né le 30 Janvier 1955 à [Localité 3]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Fabien BARTHE de la SELARL CABINET LEMONNIER – BARTHE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉ :
Monsieur [I] [N] [D]
né le 22 Septembre 1957 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Thibault DOUBLET, plaidant, avocat au barreau de QUIMPER
Suivant facture du 6 août 2018, M. [L] [Y] a vendu à M. [I] [N] [D] une tractopelle de marque Case modèle 580 F au prix de 8 500 euros.
Suivant ordonnance du 7 juillet 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lorient a ordonné, à la demande de M. [I] [N] [D], une expertise judiciaire. L’expert a déposé son rapport le 10 avril 2021.
Suivant acte d’huissier du 12 mai 2021, M. [I] [N] [D] a assigné M. [L] [Y] devant le tribunal judiciaire de Lorient.
Suivant jugement du 1er décembre 2021, le tribunal a :
– Prononcé la résolution de la vente.
– Condamné M. [L] [Y] à restituer à M. [I] [N] [D] le prix de vente.
– Dit que ce dernier devrait restituer la tractopelle.
– Condamné M. [L] [Y] à payer à M. [I] [N] [D] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamné M. [L] [Y] aux dépens en ce compris les frais d’expertise.
Suivant déclaration du 22 avril 2022, M. [L] [Y] a interjeté appel.
En ses dernières conclusions du 26 mars 2024, il demande à la cour de :
Vu les articles 1641 et suivants du code civil,
– Infirmer le jugement déféré.
Statuant à nouveau,
– Débouter M. [I] [N] [D] de ses demandes.
– Le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
– Le condamner aux dépens en ce compris les frais d’expertise.
En ses dernières conclusions du 27 mars 2024, M. [I] [N] [D] demande à la cour de :
– Confirmer le jugement déféré.
– Débouter M. [L] [Y] de ses demandes.
– Le condamner à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
– Le condamner aux dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions des parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 mars 2024.
Au soutien de son appel, M. [L] [Y] fait valoir que la tractopelle était un bien d’occasion, que l’acheteur disposait de connaissances à l’égard de ce type de matériel, qu’il a procédé à des interventions sur celui-ci et qu’il n’est aucunement établi l’existence d’un vice caché antérieur à la vente. Il reproche aux premiers juges de n’avoir pas pris en considération l’état d’usure normale et de vétusté du matériel.
M. [I] [N] [D] explique que peu après la vente, il a constaté une fuite importante d’huile affectant le système hydraulique de la tractopelle et que le vendeur a accepté de prendre en charge le coût de la réparation. Il ajoute qu’il a constaté dans un second temps une panne affectant l’inverseur mais que le vendeur a refusé de prendre en charge le coût de la réparation. Il rappelle que, selon l’expert judiciaire, si la vétusté de la tractopelle était apparente, l’état du châssis et les défauts affectant le système de transmission et le circuit hydraulique de levage, défauts antérieurs à la vente, ne l’étaient pas pour un acheteur non professionnel. Il souligne le fait que la tractopelle a été vendue au prix de 8 500 euros, ce qui laissait supposer qu’elle était en état de fonctionner.
L’expert judiciaire a indiqué que la date de mise en service de la tractopelle était inconnue mais que ce type de matériel avait été commercialisé entre 1973 et 1982. Dans le cadre des opérations d’expertise, M. [L] [Y] a précisé que préalablement à la vente, il avait réalisé des travaux de remplacement de la pompe hydraulique par une pièce d’occasion, de vidange du moteur avec le remplacement des filtres à huile et à air, de vidange de l’inverseur et de vidange du circuit hydraulique.
L’expert judiciaire a constaté que la tractopelle était dans un état général de vétusté.
Il a surtout constaté que le système de transmission de la tractopelle présentait des défauts conséquents qui ne permettaient pas de l’utiliser en l’état. Il a imputé ces défauts, en particulier la casse de la cloche de l’inverseur, à une intervention non conforme antérieure à la vente. Il a indiqué qu’ils n’étaient pas visibles par un acheteur non professionnel, qu’ils s’étaient aggravés avec le temps et qu’ils avaient conduit à l’immobilisation du matériel.
Il a également relevé que plusieurs vérins de levage présentaient des défauts d’étanchéité de nature à rendre l’utilisation du matériel dangereuse. Il a précisé que ces défauts étaient difficilement décelables par un utilisateur non averti lors d’un simple examen visuel, sans réaliser des essais dynamiques préalables. Il a expliqué que le remplacement des joints d’étanchéité, tel que réalisé par M. [L] [Y] après la vente, n’était pas conforme aux règles de l’art et ne permettrait pas d’obtenir une réparation pérenne et fiable.
Il n’est pas démontré que M. [I] [N] [D] aurait pu déceler au jour de la vente les défauts décrits par l’expert judiciaire comme non visibles par un acheteur non professionnel. M. [I] [N] [D] n’est pas un professionnel des engins de terrassement même s’il possède des notions de mécanique. Il n’est pas démontré que ses interventions mécaniques sont en lien avec les défauts constatés.
Selon l’expert judiciaire, le coût des réparations du système de transmission, décrit comme empêchant l’usage du matériel, et du circuit hydraulique, décrit comme dangereux, peut être évalué à la somme de 11 776,80 euros, étant précisé que certaines pièces détachées ne sont plus disponibles auprès du constructeur.
Il est constant que le matériel était ancien de sorte que M. [I] [N] [D] ne pouvait se plaindre de la présence d’un certain nombre d’anomalies. Le vendeur restait cependant tenu de garantir un usage normal au regard de l’ancienneté du matériel puisque celui-ci avait été présenté comme en état de fonctionner. Or tel n’était manifestement pas le cas.
C’est donc à juste titre que les premiers juges, faisant application des articles 1641 et suivants du code civil, ont prononcé la résolution de la vente, la tractopelle étant au moment de la vente affectée de défauts cachés la rendant impropre à l’usage auquel elle était destinée, et ordonné les restitutions réciproques.
Le jugement déféré sera confirmé.
Il n’est pas inéquitable de condamner M. [L] [Y] à payer à M. [I] [N] [D] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel.
M. [L] [Y] sera condamné aux dépens de la procédure d’appel.
La cour,
Confirme le jugement rendu le 1er décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Lorient.
Y ajoutant,
Condamne M. [L] [Y] à payer à M. [I] [N] [D] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel.
Condamne M. [L] [Y] aux dépens de la procédure d’appel.
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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