La nullité d’un contrat peut être prononcée en vertu de l’article 1111 du Code civil, qui stipule que la violence exercée contre une partie lors de la conclusion d’un contrat constitue une cause de nullité, même si cette violence est exercée par un tiers. Pour établir la violence, l’article 1112 du même code précise qu’il faut démontrer qu’elle est de nature à impressionner une personne raisonnable et à lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. En l’espèce, Mme [V] [M] n’a pas apporté de preuves suffisantes pour établir qu’elle avait été victime de violences morales lors de la signature des contrats, ce qui a conduit à rejeter sa demande de nullité.
Concernant la force majeure, l’article 1218 alinéa 1er du Code civil définit la force majeure comme un événement échappant au contrôle du débiteur, imprévisible lors de la conclusion du contrat, et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées. L’article 1351 précise que l’impossibilité d’exécuter la prestation libère le débiteur à due concurrence lorsqu’elle résulte d’un cas de force majeure. Dans ce cas, Mme [V] [M] a soutenu que la pandémie de Covid-19 constituait un cas de force majeure, mais n’a pas fourni de preuves médicales suffisantes pour justifier son incapacité à honorer ses obligations contractuelles. L’article 1171 du Code civil traite des clauses abusives dans les contrats d’adhésion, stipulant qu’une clause non négociable qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite. Mme [V] [M] a contesté les clauses de résiliation anticipée, mais n’a pas démontré que celles-ci créaient un déséquilibre significatif, étant donné que les indemnités de résiliation étaient proportionnelles au préjudice subi par le bailleur. Enfin, la qualification de l’indemnité de résiliation est régie par l’article 1226 du Code civil, qui définit la clause pénale comme celle par laquelle une personne s’engage à payer une somme en cas d’inexécution d’une obligation. L’article 1235-5 précise que le juge peut modérer ou augmenter la pénalité convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Dans cette affaire, les indemnités de résiliation ont été jugées proportionnées au préjudice subi par la société bailleur, ce qui a conduit à leur confirmation. |
L’Essentiel : La nullité d’un contrat peut être prononcée en raison de la violence exercée lors de sa conclusion, même par un tiers. Pour établir cette violence, il faut démontrer qu’elle impressionne une personne raisonnable. Mme [V] [M] n’a pas apporté de preuves suffisantes de violences morales, entraînant le rejet de sa demande. Concernant la force majeure, elle a soutenu que la pandémie de Covid-19 en était une, mais n’a pas fourni de preuves médicales justifiant son incapacité à honorer ses obligations.
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Résumé de l’affaire : Mme [V] [M], pharmacienne libérale, a signé plusieurs contrats de location de matériel de téléphonie et informatique avec la société BNP Paribas Lease Group, après avoir initialement contracté avec les sociétés Paritel et Healthlease. En mai 2019, elle a résilié ces contrats de manière anticipée et a demandé la reprise du matériel. En février 2021, BNP Paribas a réclamé le paiement d’une indemnité de résiliation de 19 483,20 euros. Après plusieurs mises en demeure et une saisie en mai 2022, le tribunal de commerce d’Épinal a condamné Mme [V] [M] à payer cette somme, ainsi qu’une indemnité de 1 000 euros. Elle a interjeté appel, demandant l’annulation des contrats et contestant les indemnités. La cour d’appel a confirmé le jugement de première instance, déboutant Mme [V] [M] de sa demande de nullité des contrats et lui imposant de payer 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, tout en déboutant BNP Paribas de sa demande concernant le coût de la sommation de payer.
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Q/R juridiques soulevées :
La nullité des contrats en date des 6 juin 2018 et 4 juillet 2018Aux termes de l’article 1111 du code civil, la violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une cause de nullité, encore qu’elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite. Selon l’article 1112 du même code, il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. Il est à noter que l’appelante ne produit aucun élément de preuve de nature à établir qu’elle aurait été victime de violences morales de la part de la société Paritel. Elle ne démontre pas davantage qu’elle aurait subi des pressions de la part de l’agent commercial ayant recueilli son consentement. Par conséquent, il convient de débouter l’appelante de sa demande de nullité des contrats en date des 6 juin 2018 et 4 juillet 2018. La force majeureEn application de l’article 1218 alinéa 1er du code civil, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur. L’article 1351 du même code dispose que l’impossibilité d’exécuter la prestation libère le débiteur à due concurrence lorsqu’elle procède d’un cas de force majeure et qu’elle est définitive. L’appelante soutient qu’elle a été contrainte de cesser son activité en 2020 en raison de la pandémie de Covid-19. Cependant, elle ne produit aucun élément médical établissant que son état de santé ou son âge seraient incompatibles avec l’exercice de sa profession. Il y a donc lieu de débouter l’appelante de sa demande tendant à la reconnaissance de la force majeure. Le caractère abusif de la clause de résiliation anticipéeAux termes de l’article 1171 du code civil, dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L’appelante prétend que les indemnités de résiliation et les pénalités prévues aux contrats sont de nature à créer un déséquilibre significatif entre les parties. Cependant, elle ne démontre pas que les clauses prévues aux articles 12.5 et 12.6 des contrats litigieux créeraient un tel déséquilibre. Il convient donc de débouter l’appelante de sa demande tendant à ce que les clauses soient déclarées abusives. La qualification de l’indemnité de résiliationConformément à l’article 1226 du code civil, la clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution. L’article 1235-5 du même code stipule que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre. En l’espèce, les indemnités de résiliation prévues aux dispositions des articles 12.5 et 12.6 des contrats litigieux sont proportionnées au préjudice financier effectivement subi par la bailleresse. Il n’y a donc pas lieu de les modérer. La créance de la société BNP ParibasConformément au décompte produit, la société BNP Paribas justifie que l’indemnité de résiliation due pour chaque contrat s’élève respectivement à la somme de 9 741,60 euros. Il convient donc de confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a condamné l’appelante à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 19 483 euros majorée des intérêts aux taux légal courant à compter du 16 février 2021. Les demandes accessoiresL’appelante, succombant dans ses prétentions, est condamnée aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel. Elle est également déboutée de ses demandes formées au titre des frais irrépétibles exposés devant le tribunal et la cour. Il convient de confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a condamné l’appelante à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D’APPEL DE NANCY
CINQUIEME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT N° /24 DU 09 OCTOBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 23/01363 – N° Portalis DBVR-V-B7H-FGHN
Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Commerce d’EPINAL, R.G. n° 2022001321, en date du 23 mai 2023,
APPEL PRINCIPAL / INTIME SUR APPEL INCIDENT :
Madame [V] [M]
née le 1er Février 1951 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]
Représentée par Me Denis RATTAIRE de la SAS SAS ISARD AVOCAT CONSEILS, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉE SUR APPEL PRINCIPAL / APPEL INCIDENT :
S.A. BNP PARIBAS LEASE GROUP, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social [Adresse 1] inscrite au registre du commerce et de l’industrie de Nanterrre sous le numéro 632 017 513
Représentée par Me Violaine GUIDOT de la SELARL BGBJ, avocat au barreau d’EPINAL
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 02 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Olivier BEAUDIER, conseiller chargé du rapport, Président d’audience
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller,
Monsieur Jean-Louis FIRON Conseiller
Monsieur Benoit JOBERT, Magistrat honoraire
Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL.
A l’issue des débats, le conseiller faisant fonction de Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2024 puis à cette date le délibéré a été prorogé au 07 octobre 2024, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 09 Octobre 2024, par Monsieur Ali ADJAL, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile
signé par M.Olivier BEAUDIER, Conseiller à la cinquième chambre commerciale , et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
FAITS ET PROCEDURE
Mme [V] [M] a exercé une activité de pharmacienne libérale, étant titulaire d’une officine situé à [Localité 4].
Le 6 juin 2018, Mme [V] [M] a signé un contrats d’abonnement téléphonique, ainsi qu’ un contrat de maintenance auprès de la société Paritel, incluant la commande et la mise à disposition de matériels de téléphonie à Paritel. Elle a également donné mandat à la société Viatelease afin de rechercher un bailleur pour la location de ce matériel.
Suivant contrat en date du 4 juillet 2018, la société Viatelease a donné en location du matériel de téléphonie à Mme [V] [M], moyennant le paiement de vingt et-un loyers trimestriels, du 1er juillet 2018 au 10 juillet 2023 d’un montant hors-taxes de 615 euros.
La société Viatelease a cédé ledit contrat à la société BNP Paribas Lease group (ci-après dénommée la société BNP Paribas).
Suivant contrat du 26 mars 2019, la société Healthlease a donné en location divers matériels informatiques à Mme [V] [M], moyennant le paiement de trente loyers mensuels, du 14 juillet 2019 au 14 décembre 2021 d’un montant hors-taxes de 410 euros.
Le 13 mai 2019, la société Healthlease a cédé ledit contrat à la société BNP Paribas.
Par courrier du 3 juillet 2020, Madame [M] a résilié les contrats, de manière anticipée auprès de la société BNP Paribas et a sollicité la reprise du matériel.
Le 17 août 2020, Mme [V] [M] a publié l’annonce de la radiation de son entreprise individuelle au Bodacc.
Suivant courrier en date du 16 février 2021, la société Eurorecx, mandatée par la société BNP Paribas a informé Mme [V] [M] de la résiliation des contrats et a sollicité le paiement de la somme de 19 483, 20 euros correspondant à l’indemnité de résiliation anticipée.
Par courrier du 15 mars 2021, une mise en demeure a été adressée à Madame [M] aux fins de paiement de l’indemnité de résiliation dans un délai de huit jours.
Le 14 septembre 2021, une sommation de payer a été délivrée à Madame [M] par la SCP Gassmann, commissaire de justice.
Par acte du 2 mai 2022, la société BNP Paribas a saisi le tribunal de commerce d’Epinal aux fins notamment de voir condamner Mme [V] [M] au paiement de l’indemnité de résiliation litigieuse.
Suivant jugement rendu contradictoirement le 23 mai 2023, le tribunal de commerce d’Epinal a :
– condamné Mme [V] [M] à payer la société BNP Paribas Lease Group la somme de 19 483 euros, outre intérêts au taux légal à compter de 16 février 2021,
– rejeté l’intégralité des demandes de Mme [V] [M],
– condamné Mme [V] [M] à payer à société BNP Paribas Lease Group la somme de 1 000 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et débouté cette dernière de ses plus amples demandes,
– dit qu’il n’y a pas lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à venir,
– condamné Mme [V] [M] aux entiers dépens de l’instance.
Par déclaration au greffe en date du 26 juin 2023, Mme [V] [M] a interjeté appel du jugement rendu le 23 mai 2023 par le tribunal de commerce d’Epinal.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 septembre 2023, Mme [V] [M] demande à la cour de :
-dire et juger Mme [V] [M], tant recevable que bien fondée en son appel,
y faisant droit,
‘ infirmer le jugement rendu le 23 mai 2023 par le tribunal de commerce d’Epinal en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
à titre principal,
-prononcer la nullité des contrats du 06 juin 2018 et du 04 juillet 2018,
à titre subsidiaire,
-dire que la résiliation par Mme [V] [M] des contrats du 26 mars 2019, 6 juin 2018, et 04 juillet 2018 relevait d’un cas de force majeure,
à titre infiniment subsidiaire,
– dire que les clauses de résiliation anticipée des contrats du 26 mars 2019, 6 juin 2018, et 4 juillet 2018 sont réputées non écrites,
à titre encore plus subsidiaire,
– dire que la clause prévoyant les modalités de calcul des indemnités et pénalités de résiliation doit s’analyser en une clause pénale,
– en conséquence, réduire à de plus justes proportions les demandes de la société BNP Paribas Lease Group,
en tout état de cause,
– débouter la société BNP Paribas Lease Group de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
-condamner la société BNP Paribas Lease Group à verser à Mme [V] [M] la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société BNP Paribas Lease Group aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 décembre 2023, la société BNP Paribas demande à la cour de confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a :
‘ Condamné Mme [V] [M] à payer la SA BNP Paribas Lease Group la somme de 19 483,00 euros, outre intérêts au taux légal à compter de 16 février 2021,
‘ Rejeté l’intégralité des demandes de Mme [V] [M],
‘ Condamné Mme [V] [M] à payer à SA BNP Paribas Lease Group, la somme de 1 000 euros à titre d’indemnités sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et débouté cette dernière de ses plus amples demandes,
‘ Condamné Mme [V] [M] aux entiers dépens de l’instance.
– déclarer Mme [V] [M] mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,
– l’en débouter.
-réformer le jugement en ce qu’il n’a pas condamné Mme [V] [M] au paiement du coût de la sommation de payer du 14 septembre 2021,
– condamner Mme [V] [M] aux entiers dépens de la procédure de première instance en ce compris le coût de la sommation de payer du 14 septembre 2021,
– condamner Mme [V] [M] à verser à la SA BNP Paribas Lease Group la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,
– condamner Mme [V] [M] aux entiers dépens de la procédure d’appel, dont distraction au profit de Me Violaine Guidot, Avocate.
Pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions visées ci-dessus, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 15 mai 2024
– Sur la nullité des contrats en date des 6 juin 2018 et 4 juillet 2018 :
Aux termes de l’article 1111 du code civil, la violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une cause de nullité, encore qu’elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite. Selon l’article 1112 du même code, il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. On a égard, en cette matière, à l’âge, au sexe et à la condition des personnes.
Mme [V] [M] soulève devant la cour la nullité des contrats conclus les 6 juin 2018 et 4 juillet 2018, au motif qu’elle aurait été victime de violences de l’agent commercial de la société Paritel, le 6 juin 2018, le jour de la signature des contrats d’abonnement téléphonique et de maintenance. Elle indique qu’elle a signé à la hâte les contrats qui lui ont été présentés par ce dernier, sans pouvoir prendre le temps de les lire car elle devait servir d’autres clients. Elle fait valoir qu’elle était âgée de 67 ans, au jour de la conclusion des contrats litigieux et d’une santé fragile suite au fait qu’elle avait été précédemment victime de deux infarctus du myocarde.
Mme [V] [M] ne verse cependant aux débats aucun élément de preuve de nature à établir qu’aurait victime de violences morale de la part de la société Paritel. Elle ne démontre pas davantage qu’elle aurait subi des pressions de la part de l’agent commercial ayant recueilli son consentement et ne produit à cet égard aucun témoignage sur les agissements qui sont dénoncés à l’encontre de ce dernier.
Par ailleurs, en application de l’article 1116 du code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
L’appelante ne démontre pas davantage l’existence de manoeuvres frauduleuses qui seraient en l’espèce imputables à l’agent commercial de la société Paritel au jour de la signature des contrats litigieux. Elle affirme qu’elle a tenté de résister à ce dernier, ‘en le suppliant de revenir un autre jour’, et qu’il a alors commencé à débrancher et démonter le matériel installé au sein de son officine, mais elle n’apporte aucun témoignage de nature à démontrer ces faits. Il n’est pas prouvé également que la société Paritel aurait trompé Mme [V] [M] sur la date d’arrivée à échéance des contrats d’abonnement qu’elle avait précédemment souscrits pour la convaincre d’en signer de nouveau. Il n’est produit aux débats aucun élément accréditant cette allégation.
Au vu de ce qui précède, il convient de débouter Mme [V] [M] de sa demande de nullité des contrats en date des 6 juin 2018 et 4 juillet 2018.
– Sur la force majeure :
En application de l’article 1218 alinéa 1er du code civil, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
L’article 1351 du même code dispose par ailleurs que l’impossibilité d’exécuter la prestation libère le débiteur à due concurrence lorsqu’elle procède d’un cas de force majeure et qu’elle est définitive, à moins qu’il n’ait convenu de s’en charger ou qu’il ait été préalablement mis en demeure.
Mme [V] [M] soutient en l’espèce qu’elle a été contrainte de cesser son activité en 2020 en raison de la pandémie de Covid-19 et de la fragilité de son état de santé liée à son âge. Elle relève qu’au jour de la signature des contrats litigieux l’épidémie de Covid-19 présentait un caractère imprévisible l’exonérant du respect de ses obligations. Elle ne produit cependant aucun élément médical qui serait de nature à établir que son état de santé ou son âge seraient incompatibles avec l’exercice de sa profession de pharmacienne.
La société BNP Paribas observe au surplus que l’entreprise individuelle de Mme [V] [M] a été radiée le 30 juin 2020, soit bien après le début la crise sanitaire, étant rappelé que le premier confinement qui a été ordonné par l’Etat est intervenu du 17 mars au 11 mai 2020. L’état de santé de l’appelante était par ailleurs prévisible au jour de la signature des contrats du 6 juin 2018 et 4 juillet 2018 et ne peut constituer un cas de force majeure.
Il y a lieu pour ces motifs de débouter Mme [V] [M] de sa demande tendant à la reconnaissance de la force majeure.
– Sur le caractère abusif de la clause de résiliation anticipée :
Aux termes de l’article 1171 du code civil, dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.
Mme [V] [M] prétend que les indemnités de résiliation et les pénalités prévues aux contrats sont de nature à créer un déséquilibre significatif entre les parties, eu égard à leur montant respectif.
L’articles 12.5 des contrats litigieux prévoit qu’en cas de résiliation anticipée ‘intervenant après la date de mise en service et avant le terme de la période initiale d’engagement, rendra immédiatement exigibles les montant dus par le Client au titre du ou des abonnements(s) souscrit(s), y compris les services optionnels, pour la période restant à courir jusqu’au terme de la période d’engagement initiale’.
L’article 12.6 stipule par ailleurs qu »il est précisé qu’en cas de résiliation avant la date de mise en service des Services Opérateurs, pour quelque motif que ce soit, à l’exception pour faute de Paritel Opérateur, le Client ne sera redevable que des frais de résiliation forfaitaires d’un montant de 500 euros HT par accès pris en charge par le contrat’.
Mme [V] [M] ne démontre pas en l’espèce que les clauses prévues aux articles 12.5 et 12.6 des contrats en date des 6 juin 2018 et 4 juillet 2018, dont elle demande qu’elles soient déclarées réputées non-écrites, créeraient un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de la bailleresse et du locataire.
Il est constant en effet qu’aux termes des contrats souscrits les 6 juin 2018 et 4 juillet 2018, la société BNP Paribas a financé intégralement le matériel informatique et de téléphonie pour le compte exclusif de Mme [V] [M], laquelle en est devenue immédiatement locataire de celui-ci sur une durée respective de 63 mois et de 30 mois. L’indemnité de résiliation ainsi fixée pour chaque contrat est strictement égale au montant des loyers qui étaient prévus au contrat, de sorte qu’elle ne crée aucun déséquilibre significatif au détriment du locataire, auteur de la résiliation. Cette indemnité constitue par ailleurs la contrepartie nécessaire à la faculté de résiliation unilatérale instaurée au bénéfice du locataire, lequel doit indemniser la bailleresse de son préjudice financier résultant de la perte des loyers escomptés sur le matériel qu’elle a financé à la demande expresse de ce dernier.
L’indemnité forfaitaire de résiliation mise à charge du locataire en vertu de l’article 12.6 ne crée également aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties aux contrats litigieux. Celle-ci trouve en effet sa contrepartie dans les frais futurs exposés par la bailleresse du fait de la résiliation, dont les parties ont convenu à l’avance du montant.
Il convient au vu de ces observations de débouter Mme [V] [M] de sa demande tendant à ce que les clauses prévues aux articles 12.5 et 12.6 des contrats soient qualifiées d’abusives au sens des dispositions de l’article 1171 du code civil.
– Sur la qualification de l’indemnité de résiliation :
Conformément à l’article 1226 du code civil, la clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution.
Aux termes de l’article 1235-5 du même code, Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent. Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite. Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.
La clause prévoyant une indemnité d’un montant équivalent aux loyers dus en cas d’exécution du contrat jusqu’à son terme correspond à l’évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice subi par le bailleur du fait de la résiliation unilatérale du locataire. Elle présente un caractère comminatoire ayant pour objet de contraindre le locataire à exécuter le contrat jus’à son expiration et constitue en ce sens une clause pénale susceptible de modération ou d’excès, en application des dispositions susvisées.
En l’espèce, les indemnités de résiliation prévues aux dispositions des articles 12.5 et 12.6 des contrats litigieux qui sont égales au montant des loyers exigibles jusqu’au terme du contrat majorés d’une indemnité forfaitaire de 500 euros (hors taxes) par contrat sont proportionnées au préjudice financier effectivement subi par la bailleresse du fait de la résiliation unilatérale du locataire. Il n’y a pas lieu dans ces conditions de les modérer.
– Sur la créance de la société BNP Paribas :
Conformément au décompte produit, la société BNP Paribas justifie que l’indemnité de résiliation due pour chaque contrat, portant les référence A1B35507 et A1E38775, s’élève respectivement à la somme de 9 741,60 euros.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a condamné Mme [V] [M] à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 19 483 euros majorée des intérêts aux taux légal courant à compter du 16 février 2021.
– Sur les demandes accessoires :
Mme [V] [M], succombant dans ses prétentions, est condamnée aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel, Me Violaine Guidot, avocate, étant autorisée à recouvrer directement ceux exposés devant la cour conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. Elle est par ailleurs déboutée de ses demandes formées au titre des frais irrépétibles exposés devant le tribunal et la cour.
Conformément aux dispositions de l’article 695 du code de procédure pénale, la société BNP Paribas est déboutée de sa demande tendant à l’intégration aux dépens du coût de la sommation de payer délivrée le 14 septembre 2021, celle-ci délivrée à l’initiative de l’intimée n’apparaissant pas nécessaire à l’instance, compte tenu de la délivrance antérieure d’une précédente mise en demeure en date du 15 mars 2021.
Il convient de confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a condamné Mme [V] [M] à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
[V] [M] est condamné à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,
Déboute Mme [V] [M] de sa demande de nullité des contrats en date des 6 juin 2018 et 4 juillet 2018
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions
Y ajoutant :
Déboute la société BNP Paribas Lease Group de sa demande relative au coût de la sommation de payer délivrée le 14 septembre 2021
Déboute [V] [M] de sa demande formée au titre de l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne [V] [M] à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne [V] [M] aux entiers frais et dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par M.Olivier BEAUDIER, Conseiller à la cinquième chambre commerciale , à la Cour d’Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRÉSIDENT,
Minute en pages.
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