Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel d’Aix-en-Provence
Thématique : Travaux non autorisés en copropriété : refus légitime et absence d’abus de majorité
→ RésuméContexte de l’affaireL’immeuble dénommé ‘[4]’, situé à [Localité 3] dans le département des Alpes Maritimes, est composé de trois copropriétaires, dont un copropriétaire titulaire de deux lots, un appartement et un garage. Ce copropriétaire a entrepris des travaux pour remplacer le chauffage central au fuel par un système de climatisation réversible, en installant une pompe à chaleur sur le toit de l’immeuble. Décision de l’assemblée généraleLe 19 août 2020, l’assemblée générale des copropriétaires a voté une résolution refusant d’autoriser a posteriori l’installation de la pompe à chaleur. Ce refus a été motivé par le non-respect des procédures d’autorisation nécessaires pour des travaux affectant les parties communes. Contestation de la décisionLe copropriétaire a contesté cette décision devant le tribunal judiciaire de Nice, arguant d’un abus de majorité et demandant des dommages-intérêts de 5.000 euros. En réponse, le syndicat des copropriétaires a soutenu la validité de la décision et a demandé la remise en état des parties communes. Jugement du tribunalLe tribunal a rendu son jugement le 24 mars 2022, déboutant le copropriétaire de toutes ses demandes et déclarant irrecevable la demande reconventionnelle du syndicat, faute d’autorisation préalable. Le tribunal a également condamné le copropriétaire aux dépens. Appel du copropriétaireLe copropriétaire a interjeté appel, soutenant que le refus de l’assemblée n’était pas justifié et qu’un autre copropriétaire avait obtenu une autorisation pour des travaux similaires. Il a demandé l’infirmation du jugement et la condamnation du syndicat à lui verser des dommages-intérêts. Arguments du syndicat des copropriétairesEn réponse, le syndicat des copropriétaires a fait valoir que les circonstances étaient différentes, car l’autre copropriétaire avait obtenu une autorisation préalable et avait respecté les règles. Il a demandé la confirmation du jugement en ce qui concerne le déboutement du copropriétaire et l’infirmation de la décision sur la demande reconventionnelle. Analyse juridiqueLa cour a examiné les demandes principales et a confirmé que l’assemblée générale avait le droit de refuser l’autorisation des travaux si elle n’était pas suffisamment informée. Le tribunal a également noté que l’accord donné à un autre copropriétaire ne créait pas de précédent pour les autres. Décision de la cour d’appelLa cour a confirmé le jugement en ce qui concerne le déboutement du copropriétaire, mais a infirmé la décision sur la demande reconventionnelle, déclarant celle-ci recevable. Elle a ordonné au copropriétaire de retirer la pompe à chaleur sous peine d’astreinte et a condamné ce dernier aux dépens et à verser une indemnité au syndicat des copropriétaires. |
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 12 MARS 2025
N° 2025 / 058
N° RG 22/05543
N° Portalis DBVB-V-B7G-BJHIT
[T] [I]
C/
Syndicat des copropriétaires [4]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Me Charles TOLLINCHI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire de NICE en date du 24 Mars 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 20/03151.
APPELANT
Monsieur [T] [I]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ, membre de la SCP COHEN GUEDJ – MONTERO – DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Philippe TEBOUL, membre de la SELARL TEBOUL PHILIPPE, avocat au barreau de NICE
INTIMÉ
Syndicat des copropriétaires [4] sis à [Localité 3]
[Adresse 2]
représenté par son syndic en exercice le Cabinet TREPIER VENTURINI IMMOBILIER, dont le siège social est [Adresse 1], lui-même poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, y domicilié.
représenté par Me Charles TOLLINCHI, membre de la SCP CHARLES TOLLINCHI – KARINE BUJOLI-TOLLINCHI AVOCATS ASSO CIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Franck BANERE, membre de la SELARL CABINET FRANCK BANERE, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Maria FREDON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mars 2025.
ARRÊT
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mars 2025, signé par Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère pour le Président empêché et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
L’immeuble dénommé ‘[4]’, situé [Adresse 2] à [Localité 3] (département des Alpes Maritimes), compte trois copropriétaires, parmi lesquels Monsieur [T] [I], titulaire des lots n° 2 et 6 correspondant à un appartement situé au deuxième étage et un garage, auxquels sont attachés 405/1.000 èmes des parties communes.
Ce dernier a effectué dans son logement des travaux consistant à supprimer l’installation de chauffage central au fuel pour la remplacer par un système de climatisation réversible ; pour ce faire, il a posé une pompe à chaleur sur le toit de l’immeuble.
Aux termes d’une résolution n° 15 votée le 19 août 2020, l’assemblée générale, statuant à la majorité prévue à l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, puis à celle prévue à l’article 24, a refusé d’autoriser a posteriori cette installation.
Par acte du 11 septembre 2020, M. [T] [I] a contesté cette décision devant le tribunal judiciaire de Nice pour abus de majorité et réclamé paiement d’une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts.
En défense, le syndicat des copropriétaires a conclu à la validité de sa décision et formé une demande reconventionnelle tendant à la remise en état des parties communes, sous peine d’astreinte.
Par jugement rendu le 24 mars 2022, le tribunal a :
– débouté M. [T] [I] de toutes ses demandes,
– déclaré irrecevable la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires faute d’autorisation préalable donnée par l’assemblée générale,
– condamné le demandeur aux dépens,
– et laissé à chacune des parties la charge de ses propres frais irrépétibles.
Monsieur [T] [I] a interjeté appel par déclaration enregistrée le 13 avril 2022 au greffe de la cour. Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 7 octobre 2022, il fait valoir :
– que le refus opposé par l’assemblée n’est justifié par aucun motif valable, dès lors que l’installation est conforme à la destination de l’immeuble et ne porte pas atteinte aux droits des autres copropriétaires,
– et que par une délibération précédente votée le 1er juillet 2019, un autre copropriétaire, M. [F], avait été autorisé à entreprendre des travaux similaires, de sorte que la résolution litigieuse procède d’un abus de majorité et instaure une rupture d’égalité.
Il demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de ses prétentions, et statuant à nouveau :
– d’annuler la résolution n° 15 votée le 19 août 2020,
– de condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts,
– et de mettre les entiers dépens à la charge de l’intimé, outre une indemnité de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il conclut en revanche à la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle aux fins de remise en état formulée par le syndicat, au motif que le syndic n’a pas été autorisé à agir à cette fin par l’assemblée générale comme le prévoit l’article 55 du décret du 17 mars 1967.
Par conclusions récapitulatives en réplique notifiées le 11 octobre 2022, le syndicat des copropriétaires de la résidence [4], représenté par son syndic en exercice le cabinet TREPIER-VENTURINI IMMOBILIER, soutient pour sa part :
– que les circonstances antérieures invoquées par l’appelant sont différentes, puisque M. [F] avait sollicité une autorisation avant tous travaux et avait pris l’engagement de les faire réaliser par des entreprises dûment qualifiées et assurées,
– que l’assemblée ne disposait par contre d’aucune information lui permettant de s’assurer que les travaux exécutés par M. [I] l’avaient été dans les règles de l’art.
Il demande en conséquence à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté le requérant de ses demandes principales.
Il conclut en revanche à l’infirmation de la décision en ce qu’elle a déclaré irrecevable sa demande reconventionnelle et demande à la cour, statuant à nouveau de ce chef, de condamner sous astreinte de M. [T] [I] à déposer les installations réalisées sur la toiture de l’immeuble. Il soutient que la résolution n° 15 votée le 19 août 2020 autorise le syndic à agir à cette fin, et qu’en tout état de cause cette prétention est recevable dès lors qu’elle constitue la suite et la conséquence nécessaire du rejet de la demande principale.
Il réclame enfin accessoirement paiement d’une somme de 6.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel, outre ses dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 décembre 2024.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Monsieur [T] [I] de sa demande d’annulation de la résolution n° 15 votée le 19 août 2020 par l’assemblée générale des copropriétaires, et par suite de sa demande en dommages-intérêts,
Infirme le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable et débouté le syndicat de sa demande reconventionnelle aux fins de remise en état des parties communes,
Statuant à nouveau de ces chefs :
Déclare cette demande recevable,
Condamne Monsieur [T] [I] à déposer la pompe à chaleur installée sur la toiture de l’immeuble ainsi que tous ses accessoires, sous peine d’une astreinte provisoire de cinquante euros par jour de retard passé le délai de trois mois à compter de la signification qui lui sera faite du présent arrêt,
Condamne Monsieur [T] [I] aux entiers dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
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