Le sous-traitant principal d’un marché de téléphonie (SFR) qui voit ses commandes baisser peut répercuter cette baisse sur les commandes passées à son sous-traitant de 2ème rang. Ce dernier ne peut se prévaloir d’une résiliation unilatérale fautive.
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L’Essentiel : La société Spie ICS a établi un contrat-cadre de sous-traitance avec Mafip en 2010, renouvelé en 2014. Ce contrat concernait la maintenance de marchés, notamment pour SFR. En janvier 2015, SFR a résilié son marché avec Spie, entraînant une notification à Mafip pour anticiper la transition d’activité. En réponse, Mafip a assigné Spie et SFR en justice, affirmant une résiliation unilatérale du contrat-cadre sans motif valable. L’examen des moyens juridiques a révélé que certains griefs n’étaient pas susceptibles de cassation, conformément à l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile.
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Résumé de l’affaire :
Contrat-cadre de sous-traitanceLa société Spie communications, devenue Spie ICS, a conclu un contrat-cadre de référencement de sous-traitance avec la société Mafip le 1er octobre 2010, renouvelé le 24 juillet 2014 pour trois ans. Ce contrat visait à confier à Mafip la sous-traitance de marchés de maintenance, dont un marché attribué par la société SFR. Résiliation du marché par SFREn janvier 2015, la société SFR a notifié à Spie la résiliation de son marché, avec un préavis se terminant le 1er août 2015. Spie a informé Mafip de cette résiliation par courriel et lettre, l’invitant à anticiper la transition d’activité en raison de la baisse des demandes d’intervention de SFR. Spie a également indiqué qu’elle ne pouvait pas proposer d’autres activités à Mafip. Action en justice de MafipMafip, ainsi que son gérant M. [Y], a assigné la société Spie et la société SFR en réparation de leurs préjudices, arguant que Spie avait résilié unilatéralement le contrat-cadre sans motif et avant la date prévue. Cette action repose sur la responsabilité contractuelle. Examen des moyens juridiquesConcernant le second moyen de la défense, il a été décidé qu’il n’était pas nécessaire de statuer par une décision spécialement motivée, car ce grief n’était manifestement pas de nature à entraîner la cassation selon l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature juridique du contrat-cadre de référencement de sous-traitance ?Le contrat-cadre de référencement de sous-traitance, tel que décrit dans l’arrêt, est un accord par lequel une entreprise (la société Spie) désigne une autre entreprise (la société Mafip) comme sous-traitante pour l’exécution de certains marchés. Ce type de contrat est régi par les dispositions du Code civil, notamment l’article 1101 qui définit le contrat comme un accord de volontés par lequel une ou plusieurs personnes s’engagent envers une ou plusieurs autres à donner ou à faire quelque chose. Selon cet article : « Le contrat est un accord de volontés par lequel une ou plusieurs personnes s’engagent envers une ou plusieurs autres à donner ou à faire quelque chose. » Dans le cadre de ce contrat-cadre, la société Spie s’engage à confier des marchés de maintenance à la société Mafip, ce qui implique une relation contractuelle régie par les principes de la responsabilité contractuelle. Quelles sont les conséquences de la résiliation unilatérale du contrat-cadre par la société Spie ?La résiliation unilatérale d’un contrat-cadre, comme celle effectuée par la société Spie, soulève des questions de responsabilité contractuelle. Selon l’article 1217 du Code civil, la partie qui subit une inexécution peut choisir entre plusieurs options, dont la demande de réparation du préjudice. Cet article stipule : « En cas d’inexécution de son obligation, le créancier peut : Dans ce cas, la société Mafip pourrait revendiquer des dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de la résiliation unilatérale, si elle prouve que cette résiliation n’était pas justifiée. Quels sont les droits de la société Mafip en cas de résiliation anticipée du contrat ?La société Mafip, en tant que partie au contrat-cadre, dispose de droits spécifiques en cas de résiliation anticipée. Selon l’article 1134 du Code civil, les contrats doivent être exécutés de bonne foi. Cet article précise : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. » Ainsi, la société Spie ne peut résilier le contrat-cadre sans un motif légitime, et la société Mafip peut contester cette résiliation en invoquant la violation de l’obligation de bonne foi. Quelles sont les implications de la notification de résiliation par la société SFR ?La notification de résiliation par la société SFR a des implications directes sur le contrat d’application entre la société Spie et la société Mafip. Selon l’article 1219 du Code civil, la résiliation d’un contrat doit être notifiée à l’autre partie. Cet article indique : « Chacune des parties peut mettre fin au contrat par une déclaration unilatérale, sous réserve des dispositions qui en limitent l’exercice. » Dans ce contexte, la société SFR a respecté son obligation de notifier la résiliation, ce qui a conduit la société Spie à informer la société Mafip. Cela soulève la question de savoir si la société Spie avait le droit de résilier le contrat-cadre en raison de la résiliation du marché principal. Comment la responsabilité contractuelle est-elle engagée dans cette affaire ?La responsabilité contractuelle peut être engagée lorsque l’une des parties ne respecte pas ses obligations contractuelles. Selon l’article 1231-1 du Code civil, la responsabilité contractuelle est engagée en cas d’inexécution d’une obligation. Cet article stipule : « La responsabilité contractuelle est engagée en cas d’inexécution d’une obligation, sauf si le débiteur prouve que l’inexécution est due à une cause étrangère qui ne peut lui être imputée. » Dans cette affaire, la société Mafip pourrait arguer que la société Spie a manqué à ses obligations en résiliant le contrat-cadre sans justification, ce qui pourrait entraîner une demande de réparation pour les préjudices subis. |
HM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 29 janvier 2025
Cassation partielle
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 46 F-D
Pourvoi n° U 22-13.974
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 JANVIER 2025
La société Spie ICS, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° U 22-13.974 contre l’arrêt rendu le 28 janvier 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. [E] [Y], domicilié [Adresse 1],
2°/ à la société Mafip, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],
3°/ à la société Société Française du radiotéléphone (SFR), société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de la SCP Françoise Fabiani – François Pinatel, avocat de la société Spie ICS, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Société Française du radiotéléphone, de la SCP Spinosi, avocat de M. [Y] et de la société Mafip, après débats en l’audience publique du 3 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 28 janvier 2022) et les productions, par un contrat-cadre de référencement de sous-traitance (le contrat-cadre) conclu le 1er octobre 2010 et renouvelé le 24 juillet 2014 pour une durée de trois ans, la société Spie communications, devenue Spie ICS (la société Spie), a référencé comme sous-traitante la société Mafip en vue de lui confier, par des contrats dits « d’application », la sous-traitance de marchés de maintenance (les marchés principaux) dont la société Spie serait contractuellement chargée par des opérateurs de téléphonie. Elle lui a confié, à ce titre, par un contrat d’application, la sous-traitance du marché que lui avait attribué la société Société française du radiotéléphone (la société SFR).
2. Fin janvier 2015, la société SFR a notifié à la société Spie la résiliation de ce marché à l’issue d’un préavis prenant fin le 1er août 2015. Par courriel du 26 février 2015 puis par lettre du 3 mars suivant, la société Spie en a informé la société Mafip et l’a invitée, en raison « de la diminution significative des demandes d’intervention » de la société SFR, à « prendre des dispositions afin d’anticiper et de gérer au mieux cette phase de transition d’activité ». Par courriel du 10 mars 2015, elle lui a écrit qu’elle n’était pas en mesure de lui proposer d’autres activités.
3. Reprochant à la société Spie d’avoir unilatéralement résilié le contrat-cadre sans motif et avant le terme contractuellement fixé, la société Mafip et M. [Y], son gérant, l’ont assignée, ainsi que la société SFR, en réparation de leurs préjudices sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
Sur le second moyen, pris en sa première branche
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