Règle de droit applicableL’article 1641 du Code civil stipule que « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ». L’article 1642 précise que « le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même ». Dans le cas présent, le tribunal a considéré que le vice de corrosion affectant le châssis du camping-car était préexistant à la vente et non apparent dans son ampleur, rendant le véhicule impropre à sa destination. L’expert a confirmé que les désordres étaient existants au moment de la vente et que M. [F], bien qu’étant contrôleur technique, n’avait pas pu apprécier l’état réel du véhicule en raison de la présentation d’un procès-verbal de contrôle technique ne mentionnant que des défaillances mineures. Responsabilité du contrôleur techniqueLa responsabilité délictuelle de la société Contrôle technique du Val de Loir est engagée en raison d’une faute dans l’exécution de sa mission, en ne relevant pas l’état de corrosion excessive affectant le châssis, ce qui constitue une négligence grave en matière de sécurité. L’arrêté ministériel du 18 janvier 1991, qui régit le contrôle technique, impose des vérifications spécifiques, notamment sur l’état général du châssis, et la société CTVL a manqué à cette obligation. Indemnisation des préjudicesL’article 1645 du Code civil stipule que « si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur ». M. [F] a subi un préjudice en raison de la privation de jouissance du camping-car, ainsi que des frais d’assurance et de contrôle technique, qui sont tous considérés comme indemnisables. Les condamnations prononcées à l’encontre des vendeurs et de la société CTVL sont donc fondées sur la reconnaissance de leur responsabilité respective dans la survenance des préjudices subis par M. [F]. |
L’Essentiel : Le tribunal a considéré que le vice de corrosion affectant le châssis du camping-car était préexistant à la vente et non apparent dans son ampleur, rendant le véhicule impropre à sa destination. L’expert a confirmé que les désordres étaient existants au moment de la vente et que M. [F], bien qu’étant contrôleur technique, n’avait pas pu apprécier l’état réel du véhicule en raison de la présentation d’un procès-verbal de contrôle technique ne mentionnant que des défaillances mineures.
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Résumé de l’affaire : Le 26 novembre 2019, un acquéreur a acheté un camping-car de marque Fiat, modèle Ducato, à un vendeur et à sa conjointe pour un montant de 12 000 euros. Avant la vente, le véhicule avait subi un contrôle technique, qui avait relevé trois défaillances mineures. Après utilisation, l’acquéreur a constaté des dysfonctionnements et une corrosion importante sur le châssis. Il a alors contacté le vendeur pour demander l’annulation de la vente, mais sa demande a été refusée.
Un nouveau contrôle technique a été effectué, révélant des défaillances majeures, dont des problèmes de fixation des câbles de frein et une corrosion excessive. L’acquéreur a également découvert un ancien procès-verbal de contrôle technique, datant de 2018, qui mentionnait déjà des défaillances majeures. En conséquence, il a assigné le vendeur et la société ayant réalisé le contrôle technique pour obtenir l’annulation de la vente et des dommages-intérêts. Le tribunal judiciaire de Blois a rendu un jugement le 8 décembre 2022, déboutant l’acquéreur de ses demandes et le condamnant à payer des frais aux vendeurs et à la société de contrôle technique. L’acquéreur a interjeté appel, demandant la résolution de la vente et la restitution du prix, ainsi que des dommages-intérêts pour la perte de jouissance du véhicule. Les vendeurs ont également fait appel, soutenant qu’ils n’avaient pas connaissance des vices cachés et demandant la condamnation de la société de contrôle technique. Cette dernière a, pour sa part, demandé la confirmation du jugement initial, arguant qu’elle avait respecté ses obligations. La cour d’appel a finalement infirmé le jugement, prononçant la résolution de la vente et ordonnant la restitution du prix, tout en reconnaissant la responsabilité de la société de contrôle technique pour son examen incomplet. Les vendeurs ont été condamnés à indemniser l’acquéreur pour ses préjudices, tandis que la société de contrôle technique a été tenue de garantir une partie des condamnations. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la demande de résolution de la vente par l’acheteur ?L’acheteur invoque les articles 1641 et suivants du code civil, qui stipulent que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue. L’article 1641 précise que « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ». L’article 1642, quant à lui, indique que « le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même ». Dans cette affaire, l’expert a constaté que le véhicule présentait des désordres majeurs, notamment une corrosion excessive affectant la rigidité du châssis, ce qui rendait le véhicule impropre à sa destination. Ainsi, l’acheteur soutient que ces défauts étaient préexistants à la vente et non apparents, justifiant ainsi sa demande de résolution. Quel est le rôle du contrôle technique dans cette affaire ?Le contrôle technique a pour mission de vérifier l’état général des véhicules, conformément à l’arrêté ministériel du 18 janvier 1991. L’article 6.1.1 de cet arrêté stipule que « la corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage » doit être signalée comme un défaut majeur. L’expert a conclu que la société de contrôle technique a commis une faute en ne relevant pas l’état de corrosion du châssis, ce qui engage sa responsabilité délictuelle envers l’acheteur. L’acheteur, en tant que contrôleur technique lui-même, a fait confiance au procès-verbal de contrôle, qui ne mentionnait que des défaillances mineures. Cette confiance a été mal placée, car le contrôle n’a pas été effectué de manière adéquate, omettant de vérifier des éléments cruciaux du véhicule. Quel est le principe de la responsabilité délictuelle du contrôleur technique ?La responsabilité délictuelle du contrôleur technique est engagée lorsqu’il commet une faute dans l’exécution de sa mission, causant un préjudice à un tiers. L’article 1240 du code civil stipule que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Dans ce cas, la société de contrôle technique a omis de signaler des défauts majeurs, ce qui a conduit l’acheteur à acquérir un véhicule dangereux. L’expert a confirmé que cette omission constituait une faute grave en matière de sécurité, engageant ainsi la responsabilité de la société envers l’acheteur. Quel est le montant des dommages et intérêts réclamés par l’acheteur ?L’acheteur réclame plusieurs sommes au titre de ses préjudices, notamment 14 400 euros pour la perte de jouissance du véhicule, 1 240,17 euros pour l’assurance automobile, et 60 euros pour le contrôle technique réalisé après l’achat. L’article 1645 du code civil précise que « si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur ». Les juges ont reconnu que l’acheteur a subi un préjudice en étant privé de son véhicule, et ont ordonné le paiement des sommes réclamées, assorties d’intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure. Quel est le sort des demandes de l’acheteur concernant la responsabilité des vendeurs ?Les vendeurs sont également tenus responsables des vices cachés, conformément à l’article 1641 du code civil. Ils ont vendu un véhicule qu’ils savaient impropre à sa destination, en dissimulant des informations cruciales sur l’état du châssis. L’expert a conclu que les vendeurs avaient connaissance des défauts majeurs, comme en témoigne le contrôle technique antérieur. En conséquence, ils sont condamnés à indemniser l’acheteur pour les préjudices subis, en solidarité avec la société de contrôle technique. Quel est le principe de la garantie en cas de vice caché ?Le principe de la garantie en cas de vice caché est énoncé dans les articles 1641 et 1645 du code civil. L’article 1641 stipule que le vendeur est tenu de garantir l’acheteur contre les défauts cachés qui rendent la chose vendue impropre à son usage. L’article 1645 précise que si le vendeur connaissait les vices, il doit indemniser l’acheteur. Dans cette affaire, les vendeurs ont caché des informations sur l’état du véhicule, engageant ainsi leur responsabilité et celle de la société de contrôle technique. L’acheteur a donc droit à une indemnisation pour les préjudices subis en raison de ces vices cachés. |
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 01/04/2025
Me Angela VIZINHO-JONEAU
Me Emilie HALBARDIER
ARRÊT du : 1er AVRIL 2025
N° : – 25
N° RG 23/00074 – N° Portalis DBVN-V-B7G-GWQ2
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BLOIS en date du 08 Décembre 2022
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265291478102810
Monsieur [E], [O], [M] [F]
né le 17 Octobre 1973 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représenté par Me Angela VIZINHO-JONEAU, avocat au barreau de BLOIS
D’UNE PART
INTIMÉS :
– Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265289134568648
Monsieur [P] [L]
né le 19 Mai 1985 à [Localité 11]
[Adresse 8]
[Localité 5]
représenté par Me Emilie HALBARDIER, avocat au barreau de BLOIS
Madame [H] [V] épouse [L]
née le 11 Mars 1988 à [Localité 9]
[Adresse 8]
[Localité 5]
représentée par Me Emilie HALBARDIER, avocat au barreau de BLOIS
– Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265289187906911
E.U.R.L. CTVL exerçant sous l’enseigne SECURITEST prise en son établissement secondaire [Adresse 7] [Localité 4], ayant son siège social [Adresse 1] [Localité 3], prise en la personne de ses représentants légaux,
représentée par Me Jacques SIEKLUCKI de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS
D’AUTRE PART
DÉCLARATION D’APPEL en date du : 23 Décembre 2022.
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 4 novembre 2024
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l’audience publique du 14 Janvier 2025 à 14h00, l’affaire a été plaidée devant Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, en l’absence d’opposition des parties ou de leurs représentants.
Lors du délibéré, au cours duquel Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles a rendu compte des débats à la collégialité, la Cour était composée de:
Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,
Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,
Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
GREFFIER :
Mme Karine DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé.
ARRÊT :
Prononcé publiquement le 1er avril 2025 (délibéré prorogé, initialement fixé au 4 mars 2025) par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 26 novembre 2019, M. [E] [F] a acquis de M. [P] [L] et de Mme [H] [V] épouse [L] un véhicule de type camping-car de marque Fiat, modèle Ducato, immatriculé [Immatriculation 10], pour un prix de 12 000,00 euros.
Ce véhicule avait, préalablement à la vente, fait l’objet d’un contrôle technique dont le procès-verbal, en date du 8 novembre 2019, a été établi par la société Contrôle Technique du Val du Loir (ci-après désignée CTVL), qui a noté 3 défaillances mineures.
Ayant utilisé le véhicule pour partir en vacances à Noël, au retour, il s’est aperçu de plusieurs dysfonctionnements et rendu compte que le châssis était couvert de corrosion, surtout au niveau du longeron avant droit, des fixations du berceau et des passages de roues.
S’étant, selon courrier du 24 février 2020, adressé à M. et Mme [L] pour demander l’annulation de la vente, après leur réponse négative du 28 février 2020, il a fait réaliser un nouveau contrôle technique le 2 mars 2020 par le centre de contrôle technique Couty, qui a révélé des défaillances majeures, fixation défectueuse des câbles de frein de la timonerie, endommagement et corrosion des câbles et des flexibles de la direction assistée, fêlure et déformation d’un longeron et d’une traverse de châssis, mauvaise fixation et manque d’étanchéité du système d’échappement, émission à l’échappement défectueux.
Par la suite, il s’est fait communiquer le procès-verbal du contrôle technique réalisé par le prédécesseur de M. et Mme [L] le 6 novembre 2018, faisant état de défaillances majeures relatives à la corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage du châssis.
Alléguant l’existence de défaillances majeures affectant ce véhicule, M. [F] a fait assigner, par acte d’huissier du 10 février 2021, M. et Mme [L] ainsi que la société CTVL devant le président du tribunal judiciaire de Blois aux fins d’expertise.
Par ordonnance de référé du 30 mars 2021, le président du tribunal judiciaire de Blois a ordonné une mesure d’expertise et désigné pour y procéder M. [K] [N].
L’expert a déposé son rapport le 5 juillet 2021.
Par acte d’huissier en date du 22 septembre 2021, M. [F] a fait assigner M. et Mme [L] et l’EURL CTVL en nullité de la vente, subsidiairement, résolution de la vente, restitution du prix de vente, reconnaissance de la responsabilité de la société CTVL, condamnation de celle-ci au paiement de 12 000 euros de dommages et intérêts et condamnation de tous les assignés au paiement de dommages et intérêts au titre de la perte de jouissance du véhicule, des frais et d’une indemnité de procédure.
Par jugement en date du 8 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Blois a :
– débouté M. [E] [F] de sa demande de résolution du contrat de vente, conclu avec M. [P] [L] et Mme [H] [L], portant sur le véhicule Fiat Ducato, immatriculé [Immatriculation 10] ;
– débouté M. [E] [F] de sa demande en nullité du contrat de vente, conclu avec M. [P] [L] et Mme [H] [L], portant sur le véhicule Fiat Ducato, immatriculé [Immatriculation 10] ;
– débouté M. [E] [F] de ses demandes de dommages et intérêts formées à l’encontre de M. [P] [L] et de Mme [H] [L] ;
– débouté M. [E] [F] de ses demandes de dommages et intérêts formées à l’encontre de la société CTVL ;
– débouté M. [E] [F] du surplus de ses demandes ;
– débouté M. [P] [L] et Mme [H] [L] de leurs demandes formées à l’encontre de la société CTVL ;
– condamné M. [E] [F] a payer à M. [P] [L] et à Mme [H] [L], ensemble, la somme de 2.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [E] [F] à payer à la société CTVL la somme de 2.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [E] [F] aux dépens, incluant les frais de l’expertise judiciaire ordonnée par ordonnance de référé du 30 mars 2021 ;
– dit que les dépens concernant M. [P] [L] et Mme [H] [L] seront recouvrés directement par Maître Emilie Halbardier, avocate, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ; – rappelé que le présent jugement est assorti de droit de l’exécution provisoire.
Par déclaration en date du 23 décembre 2022, M. [F] a relevé appel de l’intégralité des chefs de ce jugement.
Les parties ont constitué avocat et conclu.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 4 novembre 2024.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 26 juin 2024, M. [F] demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Blois le 8 décembre 2022 dans toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
– prononcer la résolution de la vente conclue entre M. et Mme [L] et M. [F] portant sur le camping-car Fiat Ducato immatriculé [Immatriculation 10] aux torts de M. et Mme [L],
Et a titre subsidiaire,
– prononcer la nullité de la vente conclue entre M. et Mme [L] et M. [F] portant sur le camping-car Fiat Ducato immatriculé [Immatriculation 10],
En conséquence et en tout état de cause,
– condamner M. et Mme [L] à restituer à M. [F] la somme de 12.000 euros correspondant au prix de vente du camping-car,
– ordonner la restitution du camping-car Fiat Ducato immatriculé [Immatriculation 10] par M. [F] à M. et Mme [L], une fois le prix remboursé,
– dire et juger que la société CTVL a engagé sa responsabilité délictuelle à l’égard de M. [F],
– condamner la société CTVL à régler à M. [F] la somme de 12.000 euros en réparation du préjudice manifestement subi,
– condamner également in solidum M. et Mme [L] et la société CTVL à verser à M. [F] les sommes suivantes :
– 14.400 euros sauf à parfaire, au titre du préjudice subi en raison de la perte de jouissance du véhicule,
– 1.240,17 euros au titre de l’assurance automobile souscrite,
– 60 euros au titre du second contrôle technique en date du 2 mars 2020,
– dire que le montant de toutes les condamnations qui seront prononcées à l’encontre de M. et Mme [L] et de la société CTVL portera intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2020, date de la mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception,
– ordonner la capitalisation des intérêts,
– condamner in solidum M. et Mme [L] et la société CTVL à verser à M. [F] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum M. et Mme [L] et la société CTVL aux entiers dépens comprenant la rémunération de l’expert judiciaire,
– accorder à Maître Angéla Vizinho-Joneau le droit de recouvrement prévu à l’article 699 du code de procédure civile,
– débouter M. et Mme [L] et la société CTVL de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 30 octobre 2024, M. et Mme [L] demandent à la cour de :
– déclarer M. [E] [F] mal fondé en son appel, ainsi qu’en toutes ses demandes, fins et conclusions en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de M. [P] [L] [P] et Mme [H] [V] épouse [L], et l’en débouter,
– déclarer M. [P] [L] [P] et Mme [H] [L] recevables et fondés en leur appel incident,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [E] [F] de sa demande de résolution du contrat de vente conclu avec M. [P] [L] et Mme [H] [L], portant sur le véhicule Fiat Ducato, immatriculé [Immatriculation 10] ; débouté M. [E] [F] de sa demande en nullité du contrat de vente conclu avec M. [P] [L] et Mme [H] [L], portant sur le véhicule Fiat Ducato, immatriculé [Immatriculation 10] ; débouté M. [E] [F] de ses demandes de dommages et intérêts formées à l’encontre M. [P] [L] et Mme [H] [L],
A titre subsidiaire,
Si l’annulation de la vente était prononcée,
– déclarer M. [P] [L] et Mme [H] [L] vendeurs de bonne foi en ce qu’ils n’avaient pas connaissance du vice,
En conséquence,
– débouter M. [E] [F] de ses demandes de condamnation de M. [P] [L] et Mme [H] [L] à indemniser ses préjudices complémentaires,
– infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [P] [L] et Mme [H] [L] de leurs demandes formées à l’encontre de la société CTVL ; condamné seul M. [E] [F] aux dépens, incluant les frais de l’expertise judiciaire ordonnée par ordonnance de référé du 30 mars 2021 ; condamné seul M. [E] [F] à verser à M. [P] [L] et Mme [H] [L] la somme de 2.000euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau,
– condamner la société CTVL à garantir M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L] de toute condamnation prononcée à leur encontre,
– condamner la société CTVL à verser à M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L] la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral,
– condamner la société CTVL, solidairement ou l’un à défaut de l’autre, aux entiers dépens de première instance les frais d’expertise judiciaire ainsi qu’à verser aux époux [L] la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
En tout état de cause,
– rejeter toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes.
– condamner M. [E] et la société CTVL, solidairement ou l’un à défaut de l’autre, aux entiers dépens d’appel,
– dire que les dépens d’appel seront recouvrés directement par Maître Emilie Halbardier
conformément à l’article 699 du code de procédure civile,
– condamner M. [E] la société CTVL, solidairement ou l’un à défaut de l’autre, à verser à M. [P] [L] et Mme [H] [L] la somme de 3.000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 30 mars 2023, l’EURL CTVL demande à la cour de :
– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Blois du 08 décembre 2022 dans l’ensemble de ses dispositions,
En conséquence,
– débouter M. [F] de l’ensemble de ses demandes,
A titre subsidiaire,
– déclarer que M. [F] ne justifie pas de la réalité du préjudice dont il sollicite l’indemnisation en la forfaitisant au prix de vente du véhicule,
– débouter M. [F] de ses demandes,
A titre encore plus subsidiaire,
– déclarer que M. [F] a commis une manifeste faute de négligence de nature à limiter la responsabilité éventuelle de la société CTVL à hauteur de 50 %,
En tout état de cause,
– débouter l’ensemble des parties adverses de leurs demandes formulées à l’encontre de la société CTVL,
– condamner M. [F] ou toute autre partie succombant à payer à la société CTVL la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner la partie succombant aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.
Sur la résolution de la vente
Moyens des parties
M. [F] pour solliciter la résolution de la vente sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil fait plaider que l’expert [N] a relevé que les principaux désordres concernent l’état du soubassement et plus particulièrement l’avancement de la corrosion affectant l’intégralité du châssis et des trains roulants rendant le véhicule dangereux ; il a considéré que ces désordres étaient existants au jour de son achat mais également au jour de l’achat par les époux [L], cette évolution ne pouvant survenir en moins d’un an d’utilisation par ces derniers puisqu’ils l’ont revendu à peine sept mois plus tard, alors qu’ils avaient connaissance des défaillances majeures mentionnées sur le contrôle technique du 6 novembre 2018 (pièce n° 12), remis par leurs prédécesseurs, et n’ont pas hésité à revendre le véhicule au prix de 12 000 euros alors qu’ils l’avaient acheté au prix 8 000 euros, les seules factures produites pour justifier cette augmentation pendant les opérations d’expertise portant sur des réparations mineures d’un montant total de 283,15 ‘ (pièces adverses n°2 à 4) ; ils ont expliqué au cours des opérations d’expertise avoir confié les travaux de distribution et une vidange du véhicule à un ami qui a nécessairement constaté l’état de corrosion avancé du châssis et sa dangerosité, étant précisé que M. [L], réceptionnaire Peugeot doit être qualifié de professionnel de l’automobile. Il précise être parvenu à se procurer ce contrôle technique du 6 novembre 2018, le 9 mars 2020, en s’adressant au centre de contrôle technique concerné (pièces n°11 et 12).
Il indique que lors de l’acquisition du camping-car, il a examiné le véhicule à la lumière du contrôle technique qui lui a été remis et qui ne faisait état que de défaillances mineures réparables, l’état du soubassement n’était visible qu’à l’arrière du véhicule et non à l’avant, la corrosion présente sur la carrosserie à l’arrière du véhicule était parfaitement réparable, ce qui n’était pas le cas de la corrosion présente à l’avant affectant le longeron et donc le berceau moteur situé sous le véhicule, ce que relève l’expert judiciaire dans son rapport ; au surplus, la présence de traces de corrosion à l’arrière du véhicule n’implique pas de corrosion à l’avant et ce d’autant moins qu’en l’espèce, la traverse avant était neuve ; il en va de même des bas de caisse qui peuvent se remplacer facilement.
Il soutient que, mécanicien de son état, M. [L] a parfaitement su le mettre en confiance en attirant son attention sur les défauts intérieurs mineurs du camping-car et sur les termes du contrôle technique alors qu’en l’achetant au prix de 12 000 euros, s’il avait conscience qu’il y avait quelques réparations à entreprendre, il ne pouvait imaginer que le camping-car était dangereux et impropre à la circulation, sa qualité de contrôleur technique de profession ne pouvant lui permettre d’imaginer que le camping-car n’était ni économiquement, ni techniquement réparable, sa profession l’ayant d’ailleurs amené à faire confiance et se fier totalement au contrôle technique présenté par M. [L]. Il considère que c’est à tort que l’expert indique que l’antériorité des désordres aurait dû l’amener à apprécier l’état réel du camping-car avec davantage de vigilance, dès lors qu’il ajoute lui-même que la partie avant du moteur, le train roulant et les longerons situés à l’avant du véhicule n’étaient pas accessibles visuellement sans l’aide d’un pont élévateur et il reproche au tribunal d’avoir retenu qu’il n’est pas un profane de l’automobile puisqu’il exerce la fonction de contrôleur technique, alors que, salarié d’un centre de contrôle technique, il n’est ni un garagiste, ni un mécanicien mais se contente, dans l’exercice de ses fonctions, d’examiner la conformité aux règles de sécurité des véhicules qui lui sont confiés et passe en revue 133 points de contrôle à l’aide de diverses machines et outils : pont élévateur, bancs de suspension et de freinage, miroirs de contrôle d’éclairage, pistolets de gonflage, compresseur, analyseur de gaz et de fumée, clefs de serrage de roues et, bien sûr, un poste informatique de contrôle et que, sans ce matériel, il n’a aucune compétence en matière de mécanique ou de carrosserie, le contrôle du soubassement d’un véhicule nécessitant un pont élévateur et une fosse et ne pouvant en aucun cas s’opérer au sol (pièces n°27 et 28) ; ayant acheté le véhicule à des personnes habitant le Loir et Cher, il ne peut lui être reproché de n’avoir pas tenu compte de la provenance du camping-car qui aurait été immatriculé dans le Pas de Calais ‘soit une région fortement iodée’.
Il ajoute que dès lors qu’aucune trace de corrosion ne figurait comme défaillance majeure dans ce contrôle technique établi le 8 novembre 2019, il ne pouvait imaginer que le soubassement avant du véhicule était affecté de corrosion rédhibitoire ; ce camping-car avait 18 ans et présentait 124 549 km au compteur, mais pensait avoir fait l’acquisition d’un véhicule en bon état de marche, étant précisé que l’âge moyen d’un camping-car dépasse largement 20 ans pour plus de 200 000 km parcourus.
M. et Mme [L] répondent que M. [F] s’est déplacé à trois reprises à leur domicile, sur leur insistance, et qu’à ces occasions, il a pu examiner l’ensemble du véhicule, y compris en se couchant dessous, et a pu constater la corrosion que celui-ci présentait ; par souci de les incriminer et de les faire passer pour des escrocs, il soutient qu’ils auraient pris un soin particulier à lui dissimuler les informations dont ils disposaient sur le véhicule, alors qu’ils ne lui ont jamais caché qu’il leur fallait retrouver le dossier de factures des travaux exécutés sur le véhicule avant leur achat, dont ils ne disposaient donc pas au jour de la vente mais qu’ils devaient lui fournir dès qu’ils le retrouveraient.
Ils soutiennent que si M. [F] soutient que le contrôleur technique n’est ni un garagiste, ni un mécanicien, qu’il n’aurait aucune compétence en mécanique ou carrosserie sans machines ou outils de contrôle et que le contrôle du soubassement d’un véhicule nécessite un pont élévateur et une fosse, ce qu’il entend prouver à renfort d’attestations de la part de ses collègues, et fait reproche aux premiers juges d’avoir retenu que le contrôle technique du 8 novembre 2019 mentionnait l’existence de corrosion sur le châssis alors que selon lui, le contrôle technique ne visait que la partie arrière
et plus précisément les bas de caisse ARD et ARG, corrosions réparables et n’empêchant pas le véhicule de fonctionner, ce faisant, il se livre à une lecture bien particulière dudit procès-verbal de contrôle technique sur lequel il est bien mentionné que c’est « l’ETAT GÉNÉRAL DU CHÂSSIS » qui est contrôlé et qu’il n’est aucunement précisé que ce contrôle se serait limité au bas de caisse ou que la corrosion serait limitée au bas de caisse et par ailleurs, il fait peu de cas de l’avis de l’expert judiciaire qui confirme dans son rapport que l’état visuel du camping-car et plus précisément du soubassement, était perceptible SANS OUTILLAGE NI PONT ÉLÉVATEUR ; lors de la réunion d’expertise du 12 mai 2021, ces constatations, sans outillage ni pont élévateur ont permis de révéler les défauts du véhicule, l’expert concluant que l’état général visuel du véhicule est très moyen et présage d’un camping-car en fin de vie.
Il ajoute que l’expert s’appuie sur le statut de professionnel de M. [F], contrôleur technique en activité, qui, compte tenu de l’aspect visuel du camping-car, ne pouvait aucunement considérer que celui-ci pouvait correspondre à l’état mis en évidence via le procès-verbal du 08 novembre 2019 établi par la société CTVL, son statut de contrôleur technique professionnel lui garantissant des aptitudes dépassant celles d’un profane en vue de prendre connaissance de l’état visuel du camping-car ; au surplus le camping-car en question affichait au moment de son achat par M. [F] 124 549 km, était en circulation depuis plus de 18 ans et sa plaque d’immatriculation indiquait qu’il avait été immatriculé dans le département du Pas de Calais, soit une région fortement iodée ; la corrosion avancée du soubassement du véhicule relève donc d’une usure normale pour un véhicule de cet âge et de cette provenance, de sorte que le vice doit être considéré comme apparent.
Il considère, au regard de ces indications et de ses constatations visuelles, Monsieur [F] n’a pas mis en oeuvre les diligences élémentaires que son statut de contrôleur technique professionnel lui imposait ; le vice n’étant pas caché au sens des articles 1641 et suivants du code civil, c’est donc par une exacte appréciation des faits de la cause que les premiers juges ont considéré que la demande de résolution de la vente devait être rejetée.
Réponse de la cour
L’article 1641 du code civil énonce que, ‘le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus’.
Aux termes de l’article 1642 de ce code, ‘le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même’.
L’expert a, page 23, décrit l’état du véhicule et constaté les dysfonctionnements l’affectant, à savoir, ‘l’état général visuel du véhicule est très moyen et présage d’un camping-car en fin de vie. Les désordres principaux concernent l’état du soubassement et plus particulièrement l’avancement de la corrosion affectant l’intégralité du châssis et des trains roulants. Je confirme la présence des désordres allégués et insiste sur le caractère dangereux du véhicule’.
Il a confirmé l’antériorité des désordres par rapport à la vente.
Il a estimé que M. [F], contrôleur technique de profession aurait pu apprécier l’état réel du camping-car avec davantage de vigilance, considérant qu’une partie du soubassement était visible par M. [F] lors d’un examen au sol, sans outillage spécifique et aurait dû l’amener à douter de l’état réel du véhicule et du degré important de corrosion ; en effet, la corrosion visible au niveau du porte à faux arrière ne peut aucunement se limiter à cette unique zone. M. [F] devait le savoir ou a minima l’envisager ; l’état en partie Avant, moteur, train roulant et longerons Avant, n’était pas accessible visuellement sans l’aide d’un pont élévateur.
Toutefois, il apparaît que lors de la vente, M. [F], trompé par le procès-verbal de contrôle technique réalisé le 8 novembre 2019 par l’EURL Contrôle technique du Val de Loire, qui ne mentionnait que des défaillances mineures. S’il a pu constater la corrosion au niveau des bas de caisse et de la baie de pare-brise et examiner l’arrière du véhicule et le toit, il a pu ne pas envisager l’ampleur du phénomène corrosif affectant le véhicule en considération du résultat du contrôle technique très récent qui lui avait été communiqué, qui n’en faisait pas mention.
Ce d’autant plus que le vendeur, M. [L], réceptionnaire après-vente Peugeot, qui exerce une importante activité de revente de véhicules anciens qu’il restaure lui-même, est également un professionnel de l’automobile et n’a pas davantage fait mention d’un problème de corrosion affectant le châssis. Il avait fait l’acquisition du camping-car le 16 avril 2019, selon le certificat d’immatriculation, au prix de 8 000 euros, avec un procès-verbal de contrôle technique réalisé le 6 novembre 2018 par le Centre de contrôle Autovision, mentionnant comme défaillance majeure : ETAT GÉNÉRAL DU CHÂSSIS : corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage et comme défaillances mineures, notamment, l’Etat général du châssis : Corrosion (AVG, AVD, C, AR), Corrosion du berceau (AV). Le contrôle technique pour contre-visite réalisé le 18 décembre 2018 mentionnait des défaillances mineures, Etat général du châssis : Corrosion (AVG, AVD, C, AR), Corrosion du berceau (AV) et ajoutait sous la rubrique Etat général du châssis : Modification ne permettant pas le contrôle d’une partie du châssis (D).
L’expert a observé que M. [L] n’a pas été en mesure de produire la moindre facture de réparation de la défaillance majeure relevée mais qu’une réparation ‘de fortune’ avait été réalisée et de la peinture appliquée.
M. [L] lui a donc caché l’état réel du camping-car en ne lui remettant ni le contrôle technique du 6 novembre 2018 ni celui de contre-visite, et a donc, loin d’attirer l’attention de M. [F] sur les défauts affectant le véhicule, omis de les porter à sa connaissance. Le fait, relevé par l’expert, que ‘M. [F] ne s’est pas donné les moyens, compte tenu de son statut de contrôleur technique professionnel, d’évaluer l’état visuel du véhicule avant l’achat’, peut trouver explication dans les circonstances ainsi relevées, tenant à la production d’un procès-verbal de contrôle technique ne mentionnant pas la corrosion importante du châssis et au fait que le vendeur, professionnel de l’automobile, n’en a pas davantage fait mention. En effet, en raison de sa profession, il a été enclin à se fier à l’unique contrôle technique communiqué, qui ne mentionnait aucun défaut majeur, le contrôle technique du 6 novembre 2018, qui en faisait mention ne lui ayant pas été communiqué par M. [L], professionnel de l’automobile, qui restaure des véhicules anciens, le lui ayant caché et ayant, au contraire, majoré son prix d’acquisition du camping-car d’un montant de 4 000 euros. Il est en outre certain que M. [F] ne pouvait se rendre compte, sans mettre le véhicule sur un pont, de l’ampleur de la corrosion affectant le châssis, même pour un contrôleur technique.
L’expert conclu que ‘le véhicule vendu par les époux [L] était économiquement et techniquement non réparable au jour de la vente à M. [F]. Les époux [L] ont vendu un véhicule impropre à sa destination’.
Le défaut préexistait donc à la vente, n’était pas apparent dans son ampleur et est d’une gravité telle qu’il rend le véhicule impropre à sa destination. En conséquence, il convient, infirmant le jugement, de prononcer la résolution de la vente et d’ordonner la restitution du prix de 12 000 euros.
Les parties devant être remises en l’état antérieur, cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 janvier 2020, ainsi que le demande M. [F], les intérêts dus pour une année entière étant capitalisés en application de l’article 1343-2 du code civil. M. [F] restituera le camping-car à M. et Mme [L], une fois le prix restitué, à charge pour eux de venir le chercher à l’endroit où il se trouvera stationné.
Sur la responsabilité du contrôleur technique à l’égard de M. [F]
Moyens des parties
M. [F] fait plaider que le contrôleur technique automobile à qui il appartenait de vérifier la carrosserie, la structure du véhicule et notamment les longerons et traverses, a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle envers l’acquéreur en omettant de mentionner dans son procès-verbal des anomalies devant être décelées sans démontage, au niveau des éléments devant être contrôlés ; il a commis une faute grave à l’occasion du contrôle technique du 8 novembre 2019 en ne concluant à aucune défaillance majeure alors que l’expert est d’avis que la société Contrôle technique du Val de Loir a effectué un examen incomplet en occultant la quasi-totalité du sous bassement et a commis une faute grave en matière de sécurité.
Il se prévaut de l’annexe I de l’arrêté du 18 juin 1991 relatif à la mise en place et à l’organisation du contrôle technique des véhicules dont le poids n’excède pas 3,5 tonnes applicable lors du contrôle technique du 8 novembre 2019 pour dire que le résultat de celui-ci aurait dû être défavorable. Il considère subi un préjudice pour être privé de son véhicule depuis le 26 novembre 2019, après avoir disposé de toutes ses économies pour en financer le prix.
La société Contrôle technique du Val de Loir, CTVL, rappelle que sa mission se borne à la vérification, sans démontage du véhicule, d’un certain nombre de points limitativement énumérés par l’arrêté ministériel du 18 janvier 1991, sa responsabilité ne pouvant être engagée en dehors de cette mission restreinte qu’en cas de négligence susceptible de mettre en cause la sécurité du véhicule.
Elle prétend que M. [F] ne précise pas en quoi le contrôle technique aurait été incomplet et les défauts qui n’auraient pas été relevés visuellement ; qu’elle a relevé la corrosion dans son procès-verbal, corrosion apparaissant déjà dans les précédents contrôles techniques remis par M. [D] aux époux [L], à savoir, celui du 6 novembre 2018 ; l’expert ne précise la date à laquelle les désordres étaient existants, désordre par désordre, pas plus que si elle aurait été en mesure de constater les désordres allégués au regard des points de contrôle prescrits et du caractère visuel de l’examen. Elle considère qu’elle doit être mise hors de cause. Elle ajoute que les époux [L] avaient connaissance de la corrosion bien avant son intervention.
Subsidiairement, elle relève que M. [F] n’explicite pas en quoi consisterait le préjudice dont il demande réparation alors que le préjudice de jouissance fait l’objet d’une demande distincte et en déduit qu’il doit être débouté de sa demande en paiement d’une somme de 12 000 euros. Elle considère en second lieu, que M. [F], contrôleur technique, avait toute latitude pour se rendre compte de l’état critique du camping-car et a commis une faute de négligence ayant contribué à son propre préjudice et qu’un partage de responsabilité doit être opéré en limitant sa responsabilité à 50%.
Réponse de la cour
L’expert est d’avis, page 19, que la société Contrôle technique du Val de Loir a effectué un examen incomplet en occultant la quasi-totalité du soubassement, erreur grave en matière de sécurité, et a conclu qu’elle a commis une faute susceptible de mettre en danger les occupants et les usagers de la route.
L’arrêté ministériel du 18 janvier 1991 relatif à la mise en place et à l’organisation du contrôle technique des véhicules dont le poids n’excède pas 3,5 tonnes prévoit en son, annexe I, sous la rubrique 6.1.1. ÉTAT GÉNÉRAL DU CHÂSSIS :
Code
Libellé point de contrôle
Niveau
6.1.1. c. 2.
Corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage
Majeure
6.1.1. c. 3.
Corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage : résistance insuffisante des pièces
Critique
Eu égard au fait que le camping-car avait été mis en service le 6 juillet 2001 et totalisait 124 526 km le jour du contrôle technique, la société CTVL aurait dû le monter sur un pont élévateur ou au-dessus d’une fosse pour vérifier l’état de corrosion des sous bassements.
La société CTVL, qui a commis une faute, en ne remplissant correctement pas sa mission, engage sa responsabilité à l’égard de M. [F], qui, exerçant la même profession, a fait confiance au travail de l’un de ses collègues et a considéré que le procès-verbal de contrôle technique était de nature à lui donner un avis technique exact sur l’état du camping-car.
Sur l’indemnisation des préjudices de M. [F]
Moyens des parties
M. [F] se prévaut de l’article 1645 du code civil pour demander la condamnation in solidum de M. et Mme [L] et de la société CTVL à lui payer, la somme de 14 400 euros au titre de la perte de jouissance du véhicule, celle de 1 240,17 euros au titre de l’assurance automobile et de 60 euros au titre du contrôle technique du 2 mars 2020, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 janvier 2020 et intérêts capitalisés.
Il fait valoir que, privé du camping-car depuis le 2 mars 2020, date du contrôle technique réalisé à sa demande, qui a révélé les défaillances majeures, le véhicule est immobilisé sur son lieu de travail puisqu’il est inutilisable ; l’expert en interdisant tout usage en raison de sa dangerosité; il justifie en subir une perte de jouissance qu’il évalue à 600 euros par semaine de vacances, soit 3 600 euros par an pour 6 semaines, ce qui correspond au prix moyen de la location d’un camping-car d’occasion. Il prétend justifier du paiement des cotisations d’assurances, la législation l’obligeant à l’assurer et du prix du contrôle technique.
M. et Mme [L] relèvent que M. [F] ne justifie ni du prix de location d’un camping-car ni de ce qu’il est effectivement parti en vacances avec un camping-car de location pendant 6 semaines chaque année. S’agissant du coût du contrôle technique, ce préjudice n’est pas directement en lien avec leur faute, pour ne pas découler directement du vice atteignant le véhicule.
La société CTVL soutient que la faute commise par M. [F], qui aurait dû de se rendre compte de l’état du véhicule a contribué à son préjudice, ce qui entraîne un partage de responsabilité.
Réponse de la cour
A l’énoncé de l’article 1645 du code civil, ‘Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur’.
Tel étant le cas, comme dit ci-dessus, M. et Mme [L] doivent être condamnés à indemniser M. [F] de ses préjudices.
La société CTVL a quant à elle commis une faute dans l’exécution de la mission qui lui a été confiée par M. et Mme [L] en ne relevant pas, ainsi que l’a retenu l’expert, l’état important de corrosion affectant le châssis du véhicule, faute dans l’exécution de son contrat qui a causé un préjudice à un tiers, en l’espèce l’acquéreur du véhicule qui s’est fié au résultat de ce contrôle technique. La responsabilité délictuelle de la société CTVL est donc engagée à l’égard de M. [F].
M. [F] a été privé de la jouissance de ce camping-car, qu’il espérait utiliser pendant ses congés. M. [F] ne prouve pas que l’exercice de sa profession lui permettait de bénéficier de 6 semaines de congé. S’il ne produit pas de factures de location d’un camping-car, il est constant qu’il a subi un préjudice en étant privé de la possibilité de profiter de son véhicule pendant les vacances et il n’est pas justifié que le coût de location d’une semaine de location d’un camping-car qu’il réclame serait exagéré. Les justificatifs de paiement des cotisations d’assurance étant, par ailleurs, versés au débat, comme la facture du contrôle technique du 2 mars 2020, qui constitue un préjudice indemnisable en ce que M. [F] l’a fait réaliser peu de temps après son acquisition, suite aux désordres qu’il a constatés.
En conséquence, M. et Mme [L] seront condamnés, in solidum avec la société CTVL, à lui payer :
– le préjudice de jouissance du camping-car, (600 ‘ x 5 sem = 3000 ‘ l’an x 4 ans = 12 000 euros,
– le coût des assurances du 26 novembre 2019 au 22 octobre 2020 = 1 240,17 euros,
– le coût du contrôle technique : 60 euros.
Ces condamnations, de nature indemnitaires, porteront intérêts à compter de la présente décision.
M. [F] sollicite également le paiement par la société CTVL d’une indemnité de 12 000 euros réclamée pour ne pouvoir jouir du véhicule, préjudice qui vient d’être indemnisé et qui ne peut donc être indemnisé une seconde fois. Cette demande sera donc rejetée.
Sur les demandes de M. et Mme [L] conte la société CTVL
Moyens des parties
M. et Mme [L] font plaider que le vice affectant le véhicule vendu à M. [F] faisait partie des points de vérification prévus par l’arrêté ministériel du 18 janvier 1991, l’expert ayant retenu une faute dans l’exécution par la société CTVL de sa mission, pour avoir effectué un examen incomplet occultant la quasi-totalité du soubassement, erreur grave en matière de sécurité.
Ils prétendent qu’ils n’étaient pas en capacité de remettre en cause le procès-verbal de contrôle technique et ont vendu le véhicule à M. [F] en pensant de bonne foi qu’il ne présentait pas de défaillances majeures et ne constituait aucun danger pour l’acquéreur et les autres usagers de la route. Ils s’estiment fondés à obtenir la condamnation de la société CTVL à les garantir de toutes condamnations et, par ailleurs, à leur payer une indemnité de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral puisqu’ils ont été trompés et très affectés des accusations de malhonnêteté de M. [F], outre des tracas de la procédure.
La société CTVL répond que M. et Mme [L] ne peuvent se prévaloir de leur propre turpitude en tentant de se réfugier derrière le procès-verbal de contrôle technique en lui reprochant de n’avoir pas signalé la corrosion comme défaillance critique majeure alors qu’ils avaient parfaitement connaissance d’une corrosion excessive telle que mise en évidence par le précédent contrôle technique du 6 novembre 2018 et ne peuvent donc prétendre qu’ils n’auraient pas vendu le véhicule s’ils avaient connu l’état réel de corrosion.
Réponse de la cour
La société CTVL a commis une faute en omettant de mentionner dans le procès-verbal de contrôle technique un défaut majeur affectant la sécurité du véhicule qui faisait partie des points qu’elle devait contrôler.
Toutefois, M. et Mme [L] ne peuvent contester avoir connu les vices atteignant le camping-car puisqu’ils étaient en possession du procès-verbal de contrôle technique du 6 novembre 2018, mentionnant la défaillance majeure de l’état général du châssis en raison d’une corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage, qu’ils ont cachée à M. [F].
Si la faute contractuelle commise par la société CTVL a pu leur laisser croire qu’il suffisait à renseigner l’acquéreur sur l’état réel du véhicule et faciliter ainsi la vente de celui-ci à un prix de 4000 euros supérieur à celui auquel ils l’avaient acquis, il résulte des éléments sus-examinés qu’ils ont agi de la sorte alors qu’ils avaient une parfaite connaissance de la corrosion excessive affectant la rigidité de l’assemblage, qui figurait dans le précédent contrôle technique en leur possession, défaut auquel ils n’ont pas justifié avoir remédié, et qu’ils n’ont pas hésité à vendre à M. [F] un véhicule impropre à sa destination. Ils ont ainsi eux-mêmes commis une faute qui a très largement contribué à la survenance de leur préjudice, dans une proportion qui sera fixée à 85%.
Il sera donc fait droit à leur appel en garantie contre la société CTVL à hauteur de 15% des condamnations mises à leur charge.
M. et Mme [L] ne sauraient prétendre que la faute de la société CTVL leur a causé un préjudice moral alors qu’étant en possession de deux contrôles techniques dont les conclusions étaient contradictoires sans qu’il ne soit justifié d’aucun travaux réparatoires effectués entre les deux dates, ils ont de leur propre chef décidé de n’en communiquer qu’un seul à l’acquéreur et lui dissimuler l’état réel du véhicule.
Ils ne peuvent qu’être déboutés de leur demande en paiement d’une somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral.
Sur les demandes annexes
M. et Mme [L] et la société CTVL qui succombent seront déboutés de leur demande d’indemnité de procédure et condamnés, in solidum, au paiement des entiers dépens d’appel, en ce compris les frais de l’expert [N], distraits au profit de Maître Angéla Vizinho-Joneau, avocat, au titre de l’article 699 du code de procédure civile.
Il y a lieu de condamner les mêmes à verser à M. [F] une indemnité de procédure de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant publiquement et contradictoirement, par décision mise à disposition au greffe, rendue en dernier ressort ;
INFIRME le jugement, en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau ;
PRONONCE la résolution de la vente du véhicule de type camping-car de marque Fiat, modèle Ducato, immatriculé [Immatriculation 10], conclue le 26 novembre 2019 entre M. [E] [F], acquéreur, et M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L], vendeurs ;
ORDONNE à M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L] de restituer à M. [E] [F] le prix de 12 000 euros augmenté des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 janvier 2020 et des intérêts capitalisés en application de l’article 1343-2 du code civil ;
ORDONNE à M. [E] [F] de remettre le véhicule à M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L], à charge pour eux de venir le charger à son lieu de stationnement, une fois le prix restitué ;
DIT que la société Contrôle technique Val du Loir a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle à l’égard de M. [E] [F] ;
CONDAMNE M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L], in solidum, avec la société Contrôle technique Val du Loir à payer à M. [E] [F] à titre de dommages et intérêts :
– la somme de 12 000 euros au titre de son préjudice de jouissance,
– la somme de 1 240,17 euros au titre des frais d’assurance,
– la somme de 60 euros au titre des frais de contrôle technique, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
DÉBOUTE M. [E] [F] de sa demande en paiement d’une indemnité complémentaire de 12 000 euros par la société Contrôle technique Val du Loir ;
CONDAMNE la société Contrôle Technique Val du Loire à garantir M. et Mme [L] à hauteur de 15% des condamnations mises à leur charge au titre des dommages et intérêts et des frais irrépétibles, en ce non compris la condamnation à restitution du prix de vente ;
DÉBOUTE M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L] de leur demande de réparation d’un préjudice moral par la société Contrôle technique Val du Loir ;
REJETTE toute autre demande ;
CONDAMNE M. [P] [L] et Mme [H] [V] épouse [L] et la société Contrôle technique Val du Loir, in solidum, au paiement des entiers dépens d’appel, en ce compris les frais de l’expert [N], distraits au profit de Maître Angéla Vizinho-Joneau, avocat ;
Les DÉBOUTE de leur demande d’indemnité de procédure ;
Les CONDAMNE, in solidum, à verser à M. [E] [F] une indemnité de procédure de 3 000 euros.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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