Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire du Havre
Thématique : Prêt à la consommation : déchéance des intérêts pour non-conformité contractuelle.
→ RésuméLa SA SOCRAM BANQUE a accordé un prêt à un emprunteur et une co-emprunteuse d’un montant de 27 000 € en février 2020, avec un taux d’intérêt de 5,10 % et un remboursement échelonné sur 84 mois. En mars 2023, la banque a constaté un non-paiement des échéances et a envoyé une mise en demeure à l’emprunteur, suivie d’une déclaration de déchéance du terme en août 2023. En août 2024, la banque a assigné les deux co-emprunteurs devant le juge des contentieux de la protection, demandant le remboursement de 21 108,75 € ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive.
Lors de l’audience, l’emprunteur a évoqué des difficultés financières, notamment des pensions alimentaires à payer, et a demandé des délais de paiement. La banque a soutenu que sa demande était recevable, malgré des arguments de forclusion et de nullité du contrat, mais a été contrainte de prouver la régularité de l’opération selon le code de la consommation. Le tribunal a constaté que la banque n’avait pas respecté certaines obligations, notamment l’absence d’un bordereau de rétractation conforme, entraînant la déchéance de son droit aux intérêts conventionnels. En conséquence, la créance de la banque a été limitée au capital restant dû, soit 14 986,65 €, après déduction des paiements effectués. La co-emprunteuse a été déboutée de la demande de paiement en raison d’une procédure de rétablissement personnel. Le tribunal a accordé des délais de paiement à l’emprunteur, tout en rejetant la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive. Enfin, l’emprunteur a été condamné aux dépens et à verser 300 € à la banque pour les frais non compris dans les dépens. La décision a été rendue le 7 avril 2025. |
MINISTÈRE DE LA JUSTICE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DU HAVRE
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
JUGEMENT DU 07 AVRIL 2025
Minute :
N° RG 24/00893 – N° Portalis DB2V-W-B7I-GUK4
NAC : 53B Prêt – Demande en remboursement du prêt
DEMANDERESSE :
S.A. SOCRAM, dont le siège social est sis 2, rue du 24 février – BP 8426 – 79092 NIORT CEDEX 9
Représentée par Me Claire VARGUES substituée par Me Stanislas MOREL, Avocats au barreau du HAVRE
DÉFENDEURS :
Monsieur [M] [E]
né le 29 Août 1985 à LE HAVRE (76600), demeurant 81 rue d’Esmaleville – 76210 GRUCHET LE VALASSE
Comparant en personne
Madame [O] [N]
née le 24 Juillet 1981 à LE HAVRE (76600), demeurant 11 rue Bir Hakeim – 76600 LE HAVRE
Comparante en personne
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :
PRÉSIDENT : Agnès PUCHEUS, Juge au Tribunal Judiciaire du HAVRE chargée des contentieux de la protection
GREFFIER : Isabelle MAHIER
DÉBATS : en audience publique le 03 Février 2025
JUGEMENT : contradictoire
en premier ressort
par mise à disposition au Greffe, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
SIGNÉ PAR : Agnès PUCHEUS, Juge au Tribunal Judiciaire du HAVRE chargée des contentieux de la protection et Isabelle MAHIER, Greffier au siège de ce Tribunal, 133 Boulevard de Strasbourg – 76600 LE HAVRE
EXPOSE DU LITIGE
La SA SOCRAM BANQUE (la Société) a consenti à Monsieur [M] [E] et Madame [O] [N] une offre de prêt suivant acte sous seing privé en date du 24 février 2020 d’un montant de 27 000 € avec un taux effectif global de 5,10 %, remboursable en 84 mensualités d’un montant de 386,75 € chacune.
Se prévalant du non-paiement des échéances au terme convenu, la Société a adressé à Monsieur [E] une mise en demeure d’avoir à régulariser le retard, visant la déchéance du terme, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 mars 2023. La déchéance du terme a été prononcée et notifiée à Monsieur [E] par une nouvelle lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31 août 2023.
Par acte en date du 27 août 2024, la Société a fait assigner Monsieur [E] et Madame [N] devant le juge des contentieux de la protection. Elle lui demande de :
– Condamner solidairement Monsieur [M] [E] et Madame [O] [N] co-emprunteurs à lui payer la somme totale de 21 108,75€, augmentée des intérêts de droit au taux contractuel à compter de la mise en demeure du 29 mars 2023,
– Les condamner sous la même solidarité au paiement d’une somme de 600 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive outre celle de 800 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir,
– Les condamner solidairement aux entiers dépens.
A l’audience du 3 février 2025, la Société était représentée par Maître VARGUES, substituée par Maître MOREL qui s’est rapporté à l’acte introductif d’instance.
Sur les moyens relevés d’office tendant notamment à :
– l’irrecevabilité de la demande en paiement pour cause de forclusion,
– la nullité du contrat pour déblocage anticipé des fonds et omission de la date de l’offre par l’emprunteur,
– la déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour non remise d’un exemplaire du contrat doté d’un bordereau de rétractation, non remise de la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, défaut de consultation préalable du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, non remise d’une notice d’assurance à l’emprunteur, défaut de recueil d’un nombre d’informations suffisantes permettant la vérification de solvabilité de l’emprunteur, défaut de justificatif de l’accomplissement du devoir d’explication, absence de conformité du contrat aux articles L. 312-28, L. 312-65 et R. 312-10 du code de la consommation, non-conformité du document d’information à l’article R. 314-20 du code de la consommation en matière de regroupement de crédit,
– la réduction de l’indemnité conventionnelle,
– la suppression de l’intérêt au taux légal,
la banque a précisé qu’il n’existe aucune cause de forclusion, et qu’elle s’en rapporte sur l’existence de causes d’irrecevabilité, de nullité ou de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.
Monsieur [E] et Madame [N] ont comparu en personne. Madame [N] a indiqué avoir bénéficié d’une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire en 2023. Monsieur [E] a indiqué avoir des pensions alimentaires à payer et avoir des ressources à hauteur de 2 000 € environ. Il a demandé la suspension du paiement de la dette ou des délais de paiement.
La décision a été mise en délibéré au 7 avril 2025.
PAR CES MOTIFS
Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
DÉCLARE la SA SOCRAM BANQUE recevable en ses demandes ;
PRONONCE la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels sur le prêt personnel, souscrit le 24 février 2020 par Monsieur [M] [E] et Madame [O] [N] ;
DÉBOUTE la SA SOCRAM BANQUE de sa demande en paiement à l’encontre de Madame [O] [N] ;
CONDAMNE Monsieur [M] [E] à payer à la SA SOCRAM BANQUE la somme de 14 986,65 euros (quatorze mille neuf cent quatre-vingt-six euros et soixante-cinq centimes) au titre du solde du capital restant dû de ce prêt, sans intérêts ;
AUTORISE Monsieur [M] [E] à s’acquitter des sommes dues en 23 versements mensuels de 500 euros au minimum, payables le dixième jour de chaque mois suivant celui de la signification du présent jugement, le 24ème versement étant majoré du solde de la dette, sauf meilleur accord entre les parties ou engagement d’une procédure de surendettement ;
DIT qu’en cas de défaut de paiement d’une échéance à sa date exacte, et après une mise en demeure restée sans effet pendant quinze jours, l’échelonnement qui précède sera caduc et la totalité des sommes dues deviendra immédiatement exigible ;
RAPPELLE que la présente décision suspend les procédures d’exécution et interdit la mise en œuvre de nouvelles procédures pendant le délai de grâce ;
DÉBOUTE la SA SOCRAM BANQUE de sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive ;
DÉBOUTE la SA SOCRAM BANQUE de toute demande plus ample ou contraire ;
CONDAMNE Monsieur [M] [E] aux entiers dépens ;
CONDAMNE Monsieur [M] [E] à payer à la SA SOCRAM BANQUE la somme de 300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit en application de l’article 514 du code de procédure civile.
Ainsi jugé le 07 AVRIL 2025.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT
Isabelle MAHIER Agnès PUCHEUS
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