Tribunal judiciaire de Versailles, 14 février 2025, RG n° 21/00554
Tribunal judiciaire de Versailles, 14 février 2025, RG n° 21/00554

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Versailles

Thématique : Évaluation de l’incapacité permanente et prise en compte des antécédents médicaux dans le cadre d’un accident du travail.

Résumé

Présentation des faits

Un opérateur habillage GMP, employé par une société de travail temporaire, a été mis à disposition d’une autre société à partir du 16 septembre 2016. Le 4 décembre 2017, cet opérateur a subi un accident du travail en se blessant au dos en soulevant une charge lourde. Un certificat médical a confirmé des lombalgies aiguës suite à cet incident.

Prise en charge de l’accident

La Caisse primaire d’assurance maladie a reconnu l’accident comme étant d’origine professionnelle, fixant la date de consolidation au 24 septembre 2020 et notifiant un taux d’incapacité permanente de 3 % pour des séquelles de raideur lombaire. L’opérateur a contesté cette décision, entraînant une réévaluation par la Commission médicale de recours amiable qui a porté le taux à 5 %.

Procédure judiciaire

L’opérateur, par l’intermédiaire de son conseil, a saisi le tribunal judiciaire de Versailles pour contester la décision de la Commission. Le tribunal a ordonné une expertise médicale pour évaluer les séquelles et déterminer le taux d’incapacité. Le rapport d’expertise a été déposé le 24 septembre 2024.

Demandes de l’opérateur

Lors de l’audience, l’opérateur a demandé une nouvelle expertise et une majoration de son taux d’incapacité à 8 % en raison d’une perte de revenus. Il a contesté les conclusions de l’expert, arguant que le test de Schober n’avait pas été réalisé et que son état antérieur ne devait pas affecter le taux d’incapacité.

Arguments de la Caisse

La Caisse a soutenu que le rapport d’expertise devait être écarté car il prenait en compte un état antérieur dans le calcul du taux d’incapacité. Elle a confirmé que le taux de 5 % était justifié, tenant compte de l’état antérieur documenté et a souligné l’absence de preuve d’un préjudice économique lié à l’accident.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté la demande de nouvelle expertise, considérant que le rapport d’expertise était suffisant pour statuer. Il a confirmé le taux d’incapacité de 5 % fixé par la Commission médicale de recours amiable et a débouté l’opérateur de ses autres demandes, le condamnant aux dépens.

Pôle social – N° RG 21/00554 – N° Portalis DB22-W-B7F-QAIJ

Copies certifiées conformes délivrées,
le :
à :
– [H] [S]
– CPAM DES YVELINES
– Me David COURTILLAT

N° de minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
POLE SOCIAL

CONTENTIEUX MEDICAL DE LA SECURITE SOCIALE

JUGEMENT RENDU LE VENDREDI 14 FEVRIER 2025

N° RG 21/00554 – N° Portalis DB22-W-B7F-QAIJ

Code NAC : 88L

DEMANDEUR :

Monsieur [H] [S]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Maître David COURTILLAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDEUR :

CPAM DES YVELINES
Département juridique
[Adresse 4]
[Localité 2]

représentée par Madame [Y] [E], munie d’un pouvoir régulier

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Madame Catherine LORNE, Vice-présidente
Monsieur Stéphane GUILLEMOT, Représentant des salariés
Monsieur Emmanuel MOREAU, Représentant des employeurs et des travailleurs indépendants

Madame Valentine SOUCHON, Greffière

DEBATS : A l’audience publique tenue le 17 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 14 Février 2025.
Pôle social – N° RG 21/00554 – N° Portalis DB22-W-B7F-QAIJ

Exposé des faits, procédure, prétentions et moyens des parties :

M. [H] [S], né le 1er juin 1967, embauché par la société de travail temporaire [5], a été mis à disposition de la société [6], à compter du 16 septembre 2016, en qualité d’opérateur habillage GMP.

Le 04 décembre 2017, M. [S] a été victime d’un accident du travail dans les circonstances suivantes : “l’intéressé déclare : Je me suis fait mal au dos en soulevant un bac de rossi au niveau du linéaire”.

Le certificat médical initial établi le 04 décembre 2017 faisait état de “lombalgies basses aiguës après port de charge lourde”.

La Caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines (ci-après CPAM ou la caisse) a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle. La date de consolidation a été fixée au 24 septembre 2020 et un taux d’incapacité permanente (IPP) de 3 % a été notifié à M. [S], par décision de la caisse en date du 19 octobre 2020, pour des séquelles d’une “(…) raideur du rachis lombaire, gêne douloureuse pour tous les mouvements nécessitant une thérapeutique régulière dans un contexte d’état antérieur dont il a été tenu compte pour le calcul du taux d’IP”.

Afin de contester cette décision, M. [S] a saisi la Commission médicale de recours amiable (CMRA) de la caisse, qui, lors de sa séance du 26 février 2021, a porté à 5% le taux d’IPP attribué à M. [S], sans incidence professionnelle.

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 20 mai 2021, M. [S], par l’intermédiaire de son conseil, a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles afin de contester cette décision.

Par jugement avant dire droit du 02 juin 2023, le tribunal a notamment :
– ordonné une consultation avec un examen clinique et commis pour y procéder le docteur [Z] [I] avec pour mission de :
– prendre connaissance du dossier médical de M. [S],
– convoquer les parties en son cabinet et le cas échéant leurs avocats ou défenseurs,
– examiner M. [S],
– décrire les séquelles directement imputables à l’accident du 04 décembre 2017 et proposer, à la date de la consolidation du 24 septembre 2020, le taux d’incapacité permanente partielle de M. [S] imputable à cet accident, selon le barème indicatif d’invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles, annexé au livre IV du code de la sécurité sociale.
– dire si M. [S] souffrait d’un état antérieur,
– le cas échéant, dire si cet accident du travail du 04 décembre 2017 a été sans influence sur cette pathologie, si les conséquences de l’accident du travail sont plus graves du fait de cette pathologie et l’accident du travail a aggravé/déclenché cette pathologie.

Le rapport de consultation du docteur [I] a finalement été déposé le 24 septembre 2024.

À l’audience du 17 décembre 2024, M. [S] sollicite du tribunal de :
À titre principal,
– ordonner une nouvelle expertise au titre d’une contre-expertise ;
À titre subsidiaire,
– ajouter un taux de 5 % au titre du coefficient socio-professionnel au taux de 8 % fixé par l’expert au titre du taux médical.

Au soutien de ses prétentions, M. [S] conteste les conclusions du docteur [I] au motif qu’il n’a pas réalisé le test de Schober, pourtant prévu par le code de la sécurité sociale qui mentionne que toute réduction de 5 cm atteste l’existence de douleurs lombaires réelles. Sur l’état antérieur, il fait valoir que l’atteinte antérieure a été guérie de sorte qu’elle n’a pas à minorer le quantum du taux attribué et fait état de l’aggravation de son état de santé, précisant qu’il n’arrive plus à se pencher et donc à exercer son activité professionnelle.

Sur le coefficient socio-professionnel, il déclare avoir subi une perte de revenus de 150 euros depuis son accident.

En défense, la caisse développe oralement les termes de ses conclusions visées à l’audience, sollicitant du tribunal de :
– écarter le rapport d’expertise du docteur [I] en ce qu’il prend en considération l’état antérieur dans le calcul du taux d’IPP en ajoutant un taux de 5 % ;
– confirmer la décision de la CMRA fixant un taux d’incapacité permanente partielle de 5% consécutif à l’accident du travail survenu le 4 décembre 2017 ;
– rejeter la demande de fixation d’un taux professionnel.

Au soutien de ses prétentions, la caisse estime qu’un taux de 5% est justifié au regard de l’existence d’un état antérieur connu et documenté interférant avec les séquelles propres à l’accident du travail rappelant que la seule part d’incapacité imputable à l’affection d’origine doit être indemnisée. La caisse précise que l’expert a fixé à 3% le taux d’IPP, majoré d’un taux de 5% pour l’existence de l’état antérieur alors même que la CMRA avait fixé à 5 % le taux et avait précisé que l’état antérieur relevé était muet avant l’accident de sorte qu’il ne devait pas être pris en considération pour le calcul du taux. Elle souligne que l’état antérieur a été mis en évidence de sorte que les lésions prises en compte au niveau de l’articulation ne sont pas imputables à l’affection d’origine.

Sur le coefficient socio-professionnel, elle indique qu’aucun élément n’est produit par l’assuré permettant de justifier d’une incidence professionnelle faisant observer qu’il est normal que la fiche de paie de 2017 au titre de sa qualité de travailleur intérimaire soit supérieure à sa fiche de paie de 2024 en tant que salarié. Elle ajoute que M. [S] n’a pas sollicité d’indemnité temporaire d’inaptitude et souligne qu’il est actuellement sans emploi du fait de l’arrivée à son terme de son contrat de travail et non en raison de son état de santé.

Pour un plus ample exposé des moyens, il sera renvoyé aux conclusions des parties conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

À l’issue de l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 14 février 2025.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort, mis à disposition au greffe le 14 février 2025,

DÉBOUTE M. [H] [S] de sa demande principale de nouvelle expertise ;

ÉCARTE le rapport de consultation du docteur [Z] [I] déposé le 24 septembre 2024 ;

CONFIRME la décision de la commission médicale de recours amiable, prise à l’occasion de sa séance du 26 février 2021, fixant le taux d’incapacité de M. [H] [S] à 5 % à la suite de son accident du travail du 04 décembre 2017 ;

DÉBOUTE M. [H] [S] de ses autres demandes ;

CONDAMNE M. [H] [S] aux dépens.

Dit que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le mois de la réception de la notification de la présente décision

La Greffière La Présidente

Madame Valentine SOUCHON Madame Catherine LORNE

 


Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?

Merci pour votre retour ! Partagez votre point de vue, une info ou une ressource utile.

Chat Icon