Tribunal judiciaire de Poitiers, 26 février 2025, RG n° 24/00355
Tribunal judiciaire de Poitiers, 26 février 2025, RG n° 24/00355

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Poitiers

Thématique : Indemnisation des préjudices immatériels et conditions de recevabilité des demandes provisionnelles.

Résumé

Exposé du litige

M. l’Acheteur et Mme la Co-propriétaire sont propriétaires d’un appartement acquis de la SARL Promoteur Immobilier. La S.A. Assureur est l’assureur dommages ouvrage. Un procès-verbal de livraison des locaux a été signé avec réserves. En mars 2023, M. l’Acheteur et Mme la Co-propriétaire ont mis en demeure la S.A. Assureur de les indemniser pour des infiltrations. En novembre 2023, ils ont cité à comparaître la S.A. Assureur et la SARL Promoteur Immobilier devant le juge des référés. En janvier 2024, la S.A. Assureur a été condamnée à verser une somme provisionnelle pour dommages immatériels.

Demandes des parties

M. l’Acheteur et Mme la Co-propriétaire ont assigné la S.A. Assureur, demandant le rejet des demandes reconventionnelles et une indemnisation de 31.000 euros, ainsi que des frais irrépétibles. Ils soutiennent que les demandes reconventionnelles de la S.A. Assureur sont irrecevables et que la garantie décennale n’est pas prescrite. La S.A. Assureur, de son côté, demande l’irrecevabilité de l’action des demandeurs et sollicite des remboursements pour des sommes versées.

Motifs de la décision

Le juge a examiné la recevabilité des demandes de condamnations provisionnelles. Il a rappelé que l’ordonnance de référé n’a pas l’autorité de la chose jugée au principal, mais possède une autorité au provisoire. Les demandes de M. l’Acheteur et Mme la Co-propriétaire ont été jugées irrecevables car elles ne reposent pas sur des circonstances nouvelles. La demande de renvoi devant le juge du fond a également été rejetée, l’ancienneté du litige ne constituant pas une urgence.

Demande reconventionnelle de provision

La S.A. Assureur a demandé une provision pour des sommes perçues pour des réparations non justifiées. Les demandeurs ont produit des factures justifiant des réparations, mais le juge a décidé qu’il n’y avait pas lieu à référé sur cette demande.

Dépens et frais

Les parties ont été condamnées aux dépens par moitié. Les demandes de frais non compris dans les dépens ont été rejetées.

Conclusion

Le juge a déclaré irrecevable la demande de condamnation provisionnelle des demandeurs, rejeté leur demande de renvoi, et n’a pas donné suite à la demande de la S.A. Assureur. Les parties ont été condamnées aux dépens, chacun par moitié.

MINUTE N° :
DOSSIER : N° RG 24/00355 – N° Portalis DB3J-W-B7I-GPTJ

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE POITIERS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ORDONNANCE DU JUGE DES RÉFÉRÉS
EN DATE DU 26 FÉVRIER 2025

DEMANDEURS :

LE :

Copie simple à :
-Me CAURAND
-Me BARROUX

Copie exécutoire à :
– Me CAURAND
– Me BARROUX

Monsieur [J] [I]
demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Florence CAURAND, avocat au barreau de SAINTES

Madame [Z] [I]
demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Florence CAURAND, avocat au barreau de SAINTES

DEFENDERESSE :

S.A. ALBINGIA
dont le siège social est sis [Adresse 1]

Représentée par Me Paul BARROUX, avocat au barreau de POITIERS, avocat postulant et par Me Pierre TORREGANO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION :

JUGE DES RÉFÉRÉS : Cyril BOUSSERON, Président

GREFFIER : Marie PALEZIS

Débats tenus à l’audience publique de référés du : 05 février 2025.

EXPOSE DU LITIGE :
M. [J] [I] et Mme [Z] [I] sont propriétaires d’un appartement situé [Adresse 3] acquis de la SARL COJIM, promoteur immobilier. La S.A. ALBINGIA est l’assureur dommages ouvrage.
Un procès-verbal de livraison des locaux et de remise des clés avec réserves a été signé le 30 juillet 2009.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mars 2023, M. [J] [I] et Mme [Z] [I] ont mis en demeure la S.A. ALBINGIA de les indemniser de leurs préjudices en raison d’infiltrations.
Par exploit du 6 novembre 2023, M. [J] [I] et Mme [Z] [I] ont fait citer à comparaitre la S.A. ALBINGIA et la SARL COJIM devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Poitiers sur le fondement de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile.
Selon ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Poitiers du 31 janvier 2024, la S.A. ALBINGIA a été condamnée à payer la somme de 5.500 euros à titre provisionnel à Monsieur [J] [I] et Madame [Z] [I] au titre de la garantie sur les dommages immatériels, outre la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par acte de commissaire de justice signifié à personne le 7 novembre 2024, M. [J] [I] et Mme [Z] [I] ont assigné la S.A. ALBINGIA devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Poitiers.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par RPVA le 28 janvier 2025, ils sollicitent, à titre principal, de :
Rejeter l’ensemble des demandes reconventionnelles de la S.A. ALBINGIA ; Condamner la S.A. ALBINGIA à leur verser la somme de 31.000 euros à titre de provision, avec intérêts légaux à compter du 29 février 2024 ;Condamner la S.A. ALBINGIA à leur verser la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles par application de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamner la S.A. ALBINGIA aux dépens. A titre subsidiaire, elle demande de renvoyer l’affaire à une audience dont la date sera fixée, pour qu’il soit statué au fond, en application de l’article 873-1 du code de procédure civile.
Ils soutiennent que les demandes reconventionnelles de la S.A. ALBINGIA visant au remboursement du montant des condamnations lors de l’audience de référé pour laquelle elle ne s’est pas constituée sont irrecevables. Ils expliquent que l’article 490 du code de procédure civile impose un délai de 15 jours pour faire appel et que la S.A. ALBINGIA ne l’a pas fait.
Ils invoquent les dispositions des articles L. 242-1 du code des assurances, 1231 et suivants et 1792-1 du code civil et font valoir que la S.A. ALBINGIA est tenue de garantir les dommages immatériels subis dès lors que sa responsabilité contractuelle et celle du constructeur sont engagées.
Ils précisent que la garantie décennale de l’article 1792 du code civil n’est pas prescrite en présence de dommages évolutifs de fissures dénoncés dans la période de garantie légale, que l’action biennale de l’article L. 114-1 du code des assurances contre la S.A. ALBINGIA n’est pas prescrite et qu’aucune cause exonératoire n’exonère la S.A. ALBINGIA.
Ils opposent que les demandes présentées sont nouvelles s’agissant de préjudices n’ayant pas fait l’objet de demande de provision, qu’ils ne peuvent pas soumettre de nouvelles prétentions en appel aux termes de l’article 564 du code de procédure civile et qu’ils disposent de la qualité et de l’intérêt à agir.
Ils exposent, subsidiairement, que l’urgence à statuer sur l’appartement est patente et justifie qu’il soit fait application des dispositions de l’article 873-1 du code de procédure civile.
Selon ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 3 février 2025, la S.A. ALBINGIA sollicite, à titre principal, de déclarer irrecevable l’action de M. [J] [I] et Mme [Z] [I] et de rejeter l’ensemble de leurs demandes de condamnations formées à son encontre.
A titre subsidiaire, elle demande de rejeter l’ensemble des demandes de condamnations formées à son encontre dès lors qu’il existe des contestations réelles et sérieuses, de rejeter l’irrecevabilité soulevée par les demandeurs au titre de la demande de remboursement des sommes versées au titre de l’ordonnance du 31 janvier 2024 et condamner in solidum et solidairement à titre reconventionnel les demandeurs à lui rembourser la somme de 6.700 euros.
A titre très subsidiaire, elle demande de rejeter l’ensemble des demandes de condamnations formées à son encontre et de faire application des conditions et limites de la police et notamment de la franchise contractuelle d’un montant de 8.000 euros.
En tout état de cause, elle sollicite le rejet de la demande de renvoi en application de l’article 873-1 du code de procédure civile, la condamnation des demandeurs à lui verser la somme de 4.144,91 euros, le rejet de la demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile, et la condamnation des demandeurs à lui verser la somme de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles, outre le paiement des entiers dépens.
Elle invoque les dispositions de l’article 488 du code de procédure civile et soutient qu’une ordonnance de référé peut être modifiée ou rapportée uniquement en cas de circonstances nouvelles c’est-à-dire lorsqu’un changement de circonstances suffisamment important pour entrainer une révision de la première décision est intervenu.
Elle explique que les demandeurs ont déjà formé une demande de provision au titre des pertes financières alléguées du fait de l’absence de location de l’appartement entre 2019 et 2023 et qu’il n’existe aucune circonstance nouvelle de nature à ce que le juge des référés modifie ou rétracte l’ordonnance de référé du 31 janvier 2024. Elle ajoute que les chefs de demandes sont identiques.
Elle fait valoir, subsidiairement, que la demande de provision formulée par M. [J] [I] et Mme [Z] [I] se heurte à de nombreuses contestations sérieuses tirées de la prescription de l’action des demandes conformément à l’article L. 114-1 du code des assurances, de la forclusion décennale, de l’exception de subrogation de l’article L. 121-12 du code des assurances et de l’absence de lien d’imputabilité entre le préjudice allégué et une défaillance de sa part.
Elle ajoute, en tout état de cause, que les demandeurs ne justifient pas de l’urgence au sens de l’article 873-1 du code de procédure civile.
Elle se prévaut des dispositions des articles A. 243-1, A, 3° et L. 121-17 du code des assurances et expose que les demandeurs doivent justifier de l’affectation des fonds relatifs à leur indemnisation à la réalisation des travaux. Elle précise qu’ils ne produisent qu’une facture pour un montant de 3.179,29 euros et qu’il reste un reliquat injustifié de 4.144,91 euros.

PAR CES MOTIFS :
Nous, Juge des référés, statuant par ordonnance de référé mise à la disposition des parties, contradictoire, après débats en audience publique, en premier ressort,
Déclarons irrecevable la demande de condamnation provisionnelle formée par M. [J] [I] et Mme [Z] [I].
Rejetons la demande fondée sur l’article 837 du code de procédure civile de M. [J] [I] et Mme [Z] [I].
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation provisionnelle formée par la S.A. ALBINGIA.
Rejetons les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire par provision de plein droit ;
Rappelons qu’il sera procédé à la signification de la présente ordonnance par la partie la plus diligente.
Condamnons M. [J] [I] et Mme [Z] [I] d’une part et la SA ALBINGIA d’autre part aux dépens, chacun par moitié.
La présente ordonnance de référé a été mise à disposition des parties le 26 février 2025 par Monsieur Cyril BOUSSERON, Président du Tribunal Judiciaire, assisté de Madame Marie PALEZIS, Greffière, et signée par eux.
La Greffière Le Président

 


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