Tribunal judiciaire de Paris, 7 avril 2025, RG n° 23/08708
Tribunal judiciaire de Paris, 7 avril 2025, RG n° 23/08708

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Indemnisation suite à une infection nosocomiale : évaluation des préjudices et provisions accordées.

Résumé

Le 25 novembre 2020, un chauffeur de bus de la RATP a subi un accident du travail entraînant une entorse du poignet après s’être coincé le bras dans une porte de bus. Suite à cet incident, une intervention chirurgicale a été réalisée le 7 janvier 2021 par un médecin à la Clinique de [Localité 17]. Cependant, le patient a développé une infection nosocomiale post-opératoire.

Une expertise judiciaire a été menée par un professeur désigné par le tribunal, concluant à une infection d’origine nosocomiale liée à l’ablation des broches. L’expertise a évalué divers préjudices, incluant un déficit fonctionnel total et partiel, des souffrances endurées, un préjudice esthétique temporaire, ainsi que des besoins en tierce personne. Le déficit fonctionnel permanent a été évalué à 20%, en raison de la raideur douloureuse et des conséquences psychologiques.

Le 15 juin 2023, le chauffeur a assigné la clinique, le médecin, une société d’assurance et la CCAS de la RATP pour obtenir une indemnisation complète de ses préjudices. En réponse, la clinique a contesté certaines demandes, tout en reconnaissant sa responsabilité pour l’infection. La CCAS de la RATP a également demandé des provisions pour couvrir les salaires maintenus et les frais médicaux.

Le 24 mars 2025, le juge a examiné les demandes de provision. Le chauffeur a sollicité 110.000 €, tandis que la clinique a contesté cette somme, arguant d’une contestation sérieuse. Le juge a finalement accordé une indemnité provisionnelle complémentaire de 20.000 € au chauffeur, ainsi que des provisions de 62.000 € à la CCAS et de 10.000 € à la RATP. Les demandes fondées sur l’article 700 du Code de procédure civile ont été rejetées, et les dépens ont été attribués selon le sort de l’instance principale. L’affaire a été renvoyée pour conclusions ultérieures.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE [Localité 18]

19eme contentieux médical

N° RG 23/08708

N° MINUTE :

Assignation des :
15 et 20 Juin 2023

CONDAMNE
RENVOI

ON

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 07 Avril 2025
DEMANDEUR A L’INCIDENT

Monsieur [M] [T]
[Adresse 1]
[Localité 14]

Représenté par Maître Hadrien MULLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0871

DEFENDEURS A L’INCIDENT

La CLINIQUE DE [Localité 16]
[Adresse 2]
[Localité 13]

Représentée par la SELARL BOIZARD EUSTACHE GUILLEMOT ASSOCIES, représentée par Maître Vincent BOIZARD, avocat au barreau de PARIS, vestaire #P0456

Monsieur [H] [G]
Clinique la [Localité 17]
[Localité 13]

Représenté par Maître Georges LACOEUILHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0105

La S.E.L.A.R.L. [H] [G]
Clinique [19]
[Adresse 5]
[Localité 10]

Non représentée

RELYENS MUTUAL INSURANCE
[Adresse 3]
[Localité 8]

Expéditions
exécutoires
délivrées le :
Non représentée

Décision du 07 Avril 2025
19ème contentieux médical
RG 23/08708

La Caisse de Coordination aux Assurances Sociales (CCAS) de la RATP
[Adresse 4]
[Localité 11]

Représentée par Maître Caroline CARRÉ-PAUPART, Associée de la SELARL CARRÉ-PAUPART, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1388

PARTIES INTERVENANTES

La CLINIQUE [Localité 16] LAMBERT
[Adresse 7]
[Localité 12]

Représentée par la SELARL BOIZARD EUSTACHE GUILLEMOT ASSOCIES, représentée par Maître Vincent BOIZARD, avocat au barreau de PARIS, vestaire #P0456

La RATP
[Adresse 6]
[Localité 9]

Représentée par Maître Caroline CARRÉ-PAUPART, Associée de la SELARL CARRÉ-PAUPART, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1388

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Monsieur Olivier NOËL, Vice-Président

Assisté de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et
au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 24 Mars 2025, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 07 Avril 2025.

ORDONNANCE

– Réputée contradictoire
– En premier ressort
– Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, les parties
en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de
l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 25 novembre 2020, Monsieur [M] [B], chauffeur de bus à la RATP, a été victime d’un accident du travail. Il a présenté une entorse du poignet après s’être coincé le bras dans une porte du bus.

Dans les suites de cet accident, il a subi une intervention chirurgicale en date du 7 janvier 2021 réalisée par le Docteur [G] exerçant à la Clinique de la [Localité 17] à [Localité 15]. Les suites opératoires ont été marquées par la survenue d’une infection nosocomiale.

Une expertise judiciaire a été réalisée par le Professeur [C] désigné par le Président du Tribunal Judiciaire de PARIS, concluant à une infection du site opératoire d’origine nosocomiale en relation avec l’ablation des broches, et dont l’évaluation des préjudices est la suivante :
– Déficit fonctionnel total :
Du 15/03/2021 au 22/03/2021
Du 30/03/2021 au 01/04/2021
Le 02/07/2021
Le 20/01/2022
– Déficit fonctionnel partiel 25% :
Du 23/03/2021 au 29/03/2021
Du 02/04/2021 au 01/07/2021
Du 03/07/2021 au 19/01/2022
Du 21/01/2022 au 15/02/2022
– Souffrances endurées : 3/7
– Préjudice esthétique temporaire : 2,5/7
– Besoin en tierce personne temporaire : 4 heures par semaine pour la période du DF Temporaire à 25%
– Consolidation : 15/02/2022
– DFP : 20% ce taux correspond à la raideur douloureuse du poignet en partie en secteur utile et aux répercussions psychologiques déclarées.
On estime clairement qu’en l’absence de complication, le déficit fonctionnel permanent aurait été de 3% Le déficit fonctionnel permanent en relation avec la survenue de l’infection du site opératoire est de 10% correspondant à la majoration de la raideur douloureuse. Ainsi l’expertise ajoute à la raideur qu’il évalue à 10%, les conséquences psychologiques et les douleurs, qui entrent également dans la définition du déficit fonctionnel permanent, d’où le taux global de 20%.
– Préjudice esthétique permanent : 2/7
– Préjudice d’agrément
– Préjudice sexuel
– Dépenses de santé futures
-Frais de véhicule adapté : boite automatique et aide au volant de type boule volant et avec direction assistée
– Incidence professionnelle : compte tenu de la raideur douloureuse résiduelle du poignet droit, la reprise du poste de conducteur de bus semble impossible. Il y aura donc un reclassement nécessaire dans un poste sédentaire sans mouvement répétitif avec le membre supérieur ni port de charge. Ce reclassement professionnel avec adaptation du poste est susceptible d’être à l’origine d’un déclassement professionnel.

Par acte en date des 15 et 20 juin 2023, Monsieur [M] [B] a assigné la SAS CLINIQUE [Localité 16], Monsieur [H] [G] et la SELARL [H] [G], la société RELYENS MUTUAL INSURANCE, la CCAS de la RATP aux fins de se voir indemniser de son entier préjudice sur la base de ce rapport qui fait suite à l’infection nosocomiale contractée.

Par écritures déposées le 24 juin 2024, Monsieur [M] [T] demande au Juge de la mise en état de :

JUGER [M] [T] bien fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions ;
CONDAMNER la SAS Clinique [Localité 16] Lambert venant aux droits de la Clinique [Localité 16] à verser une provision supplémentaire de 110.000 € à Monsieur [M] [T], dans l’attente de la liquidation de ses préjudices ;
CONDAMNER la SAS Clinique [Localité 16] Lambert venant aux droits de la Clinique [Localité 16], à payer 3.000,00 € au titre de l’article 700 du CPC à [M] [T] ;
SURSEOIR A STATUER sur la liquidation définitive des préjudices de [M] [T] CONDAMNER la SAS Clinique [Localité 16] Lambert venant aux droits de la Clinique [Localité 16], aux entiers dépens ;
RENDRE la présente ordonnance commune et opposable à la Caisse de Coordination de la RATP.

Le Docteur [H] [G], le 21 août 2024, demande en réponse au Juge de la mise en état de :
– Recevoir le Docteur [G] en ses écritures, le disant bien fondé ;
– Donner acte au Docteur [G] en ce qu’il s’en remet à l’appréciation du juge de la mise en état sur l’allocation d’une provision à Monsieur [T] à la charge de la Clinique [Localité 16].

La Caisse de Coordination aux Assurances Sociales (CCAS) de la RATP et la RATP, le 29 août 2024, demandent en réponse au Juge de la mise en état de :

RECEVOIR la RATP en sa double qualité d’organisme spécial de sécurité sociale et d’employeur en leurs demandes et les y déclarer bien fondées,
DIRE que la RATP, en tant qu’organisme spécial de sécurité sociale et en tant qu’employeur, ne s’oppose pas à la demande provisionnelle sollicitée par Monsieur [B], sous réserve qu’elle ne s’impute pas sur les postes soumis au recours des tiers payeurs,
CONDAMNER à titre provisionnel la CLINIQUE [Localité 16] LAMBERT à verser à la CCAS de la RATP la somme de 62.000 euros à titre provisionnel, au titre des salaires maintenus durant l’Interruption Temporaire Totale du Travail, des frais médicaux déboursés et de sa rente accident du travail, CONDAMNER à titre provisionnel la CLINIQUE [Localité 16] LAMBERT à verser à la RATP, en sa qualité d’employeur, la somme de 10.000 euros, au titre des charges patronales supportées sans contrepartie de travail.
CONDAMNER la CLINIQUE [Localité 16] LAMBERT à verser à la RATP la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
CONDAMNER la CLINIQUE [Localité 16] LAMBERT aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Caroline CARRE-PAUPART, dans les conditions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

La CLINIQUE DE [Localité 16] et la CLINIQUE [Localité 16] LAMBERT (intervenante volontaire), demandent en réponse, le 7 janvier 2025, au Juge de la mise en état de :

Débouter Monsieur [T] de sa demande de provision ;
Débouter la CCAS de la RATP et la RATP de ses demandes de provisions au titre des frais de santé ; Limiter le montant de la provision allouée à la CCAS de la RATP et la RATP à la somme de 60.000 euros;
Débouter Monsieur [T], la CCAS de la RATP et la RATP de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du CPC;
Statuer ce que de droit sur les dépens.

La société RELYENS MUTUAL INSURANCE et la SELARL [H] [G] n’ont pas constitué avocat.

L’incident a été évoqué à l’audience du 24 mars 2025 et mis en délibéré au 7 avril 2025.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant publiquement par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe et rendue en premier
ressort,

CONDAMNE la SAS Clinique [Localité 16] Lambert et la Clinique [Localité 16], à payer à Monsieur [M] [T] la somme de 20.000 € à titre d’indemnité provisionnelle complémentaire ;

CONDAMNE la SAS Clinique [Localité 16] Lambert et la Clinique [Localité 16], à payer à la CCAS de la RATP la somme de 62.000 € à titre d’indemnité provisionnelle ;

CONDAMNE la SAS Clinique [Localité 16] Lambert et la Clinique [Localité 16], à payer à la RATP, en sa qualité d’employeur, la somme de 10.000 € à titre d’indemnité provisionnelle ;

DIT que l’affaire reviendra à l’audience de mise en état du mardi 10 juin 2025 à 13 h30 de cette chambre pour conclusions de la partie demanderesse ;

DÉBOUTE les parties des demandes formées sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

DIT que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire ;

DIT que les dépens de la présente instance suivront le sort des dépens de l’instance principale.

Faite et rendue à [Localité 18] le 07 Avril 2025.

La Greffière Le Juge de la mise en état

Erell GUILLOUËT Olivier NOËL

 


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