Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Nîmes
Thématique : Injonction de paiement européenne : Validité et exécution contestées
→ RésuméPar ordonnance d’injonction de payer européenne du 22 mai 2020, le Tribunal de district de Cracovie a ordonné à la SCI DAC de verser 17.330 euros à Monsieur [F] [Z], avec intérêts. L’ordonnance est devenue exécutoire le 15 avril 2021, et Monsieur [Z] a fait signifier cette injonction à la SCI DAC le 27 octobre 2021. Une saisie attribution a été établie le 3 février 2022, suivie d’un virement de 23.250,11 euros par la CIC Lyonnaise de Banque à la SCP [H] [I] [U]. Le juge de l’exécution a ensuite autorisé la SCI DAC à saisir cette somme. Le 2 mai 2022, la contestation de la SCI DAC a été déclarée irrecevable, et elle a été condamnée à verser 1.500 euros à Monsieur [Z].
La SCI DAC a ensuite assigné Monsieur [Z] et la SCP [H] [I] [U] pour obtenir la restitution de la somme de 23.250,11 euros, arguant que l’injonction de payer était non avenue. Le tribunal s’est déclaré incompétent et a transféré l’affaire au Tribunal Judiciaire de Nîmes. Dans ses conclusions, la SCI DAC a demandé la nullité de la saisie attribution et la restitution des sommes perçues par Monsieur [Z]. Ce dernier a contesté les demandes de la SCI DAC, affirmant que l’ordonnance avait été régulièrement signifiée et que la saisie était valide. La SCP [H] [I] [U] a également soutenu qu’elle n’avait commis aucune faute dans la procédure. L’instruction a été clôturée le 20 août 2024, et l’affaire a été plaidée le 20 septembre 2024. Le tribunal a finalement rejeté les demandes de la SCI DAC et celles de Monsieur [Z] et de la SCP [H] [I] [U], condamnant la SCI DAC à verser des sommes à titre d’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. L’exécution provisoire a été rappelée. |
Copie ❑ exécutoire
❑ certifiée conforme
délivrée le
à
la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI
Me Justine FAGES
la SELARL HARNIST AVOCAT
TRIBUNAL JUDICIAIRE Par mise à disposition au greffe
DE NIMES
Le 18 Octobre 2024
Troisième Chambre Civile
N° RG 23/01695 – N° Portalis DBX2-W-B7H-J55E
Minute n° JG24/177
JUGEMENT
Le tribunal judiciaire de Nîmes, Troisième Chambre Civile, a dans l’affaire opposant :
S.C.I. DAC immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le n° 398 254 714, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité ausit siège, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par la SELARL HARNIST AVOCAT, avocats au barreau de NIMES, avocats postulant, Me Guillaume BUY, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
à :
Me [N] [H], demeurant [Adresse 1]
représenté par la SCP CABINET BRUGUES LASRY, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats plaidant, la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, avocats au barreau de NIMES, avocats postulant
S.C.P. [H] [I] [U], dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SCP CABINET BRUGUES LASRY, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats plaidant, la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, avocats au barreau de NIMES, avocats postulant
M. [F] [Z], demeurant [Adresse 2] (POLOGNE)
représenté par la SCP ANNE-LAURE GUERIN-SOLENE MORIN, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats plaidant, Me Justine FAGES, avocat au barreau de NIMES, avocat postulant
Rendu publiquement le jugement non qualifiée suivant, statuant en premier ressort après que la cause a été débattue en audience publique le 20 Septembre 2024 devant Chloé AGU, Juge, statuant comme juge unique, assistée de Sofia AIGUES, Auditrice de Justice, et de Corinne PEREZ, Greffier, et qu’il en a été délibéré.
N° RG 23/01695 – N° Portalis DBX2-W-B7H-J55E
EXPOSE DU LITIGE
Par ordonnance d’injonction de payer européenne en date du 22 mai 2020, le Tribunal de district de CRACOVIE a enjoint la SCI DAC à payer à Monsieur [F] [Z] la somme de 17.330 euros avec intérêts au taux de 7 % à compter du 4 décembre 2018.
L’ordonnance ayant été rendue exécutoire en l’absence de contestation le 15 avril 2021, Monsieur [F] [Z] a fait signifier, le 27 octobre 2021 et par l’intermédiaire de Maître [N] [H], Huissier de justice au sein de la SCP [N] [H], [E] [I] et Seema [U], à la SCI DAC l’injonction de payer européenne en date du 22 mai 2020.
Par acte en date du 08 février 2022, la SCP [H] [I] [U] a dénoncé le procès-verbal de saisie attribution établi le 03 février 2022 à la SCI DAC.
Par acte en date du 15 mars 2022, la SCP [H] [I] [U] a fait signifier à la CIC LYONNAISE DE BANQUE le certificat de non-contestation.
Le 15 mars 2022, la CIC LYONNAISE DE BANQUE a procédé au virement de la somme de 23.250,11 euros à la SCP [H] [I] [U], qui a donné mainlevée de la saisie attribution le 31 mars 2022.
Par ordonnance du 04 avril 2022, le juge de l’exécution du Tribunal Judiciaire de Montpellier a autorisé la SCI DAC à saisir conservatoirement entre les mains de la SCP [H] [I] [U] la somme de 23.250,11 euros.
Par jugement en date du 02 mai 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Montpellier a déclaré irrecevable la contestation de la SCI DAC à défaut de dénonciation de la contestation à l’huissier instrumentaire et l’a condamnée à payer à Monsieur [Z] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par acte en date du 09 mai 2022, la SCI DAC a donné assignation devant le tribunal judiciaire de Montpellier, à Monsieur [F] [Z], Maître [N] [H] ainsi qu’à la SCI [N] [H], [E] [I] et Seema [U] aux fins de condamner Monsieur [Z] à lui restituer la somme de 23.250,11 euros et condamner la SCP [H] [I] et [U] à lui restituer toute somme qu’elle détiendrait par suite de la saisie-attribution pratiquée à son préjudice.
Par ordonnance en date du 24 mars 2023, le Tribunal Judiciaire de Montpellier s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal Judiciaire de Nîmes.
*
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 08 février 2024, la SCI DAC demande au tribunal, sur le fondement des articles 13 du Règlement n01896/2006 du Parlement Européen et du Conseil du 12 décembre 2006 et des articles L111-3 et L211-1 du Code des procédures civiles d’exécution, 1424-5 et 1411 du Code de procédure civile et de l’article 1382 du Code civil, de :
– CONSTATER le défaut de signification de l’injonction de payer européenne du 22 mai 2020 dans un délai de six mois
– CONSTATER que l’injonction de payer européenne du 22 mai 2020 est non avenue et donc non exécutoire
– CONSTATER que les sommes perçues pour le compte de Monsieur [F] [Z] au détriment de la SCI DAC l’ont été indûment
– CONSTATER la nullité de la saisie attribution pratiquée par-DEBOUTER Monsieur [F] [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées contre la SCI DAC
– DEBOUTER la SCP [H], [I] et [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées contre la SCI DAC
– CONDAMNER Monsieur [F] [Z] à restituer à la SCI DAC la somme de 23 250,11 euros
– FAIRE DEFENSE à la SCP [H], [I] et [U] de se libérer entre les mains de Monsieur [F] [Z] de toute somme détenue-CONDAMNER la SCP [H], [I] et [U] à restituer à la SCI DAC toute somme qu’elle détiendrait par suite de la saisie-attribution pratiquée au préjudice de la SCI DAC.
– CONDAMNER solidairement Monsieur [F] [Z] et Maître [N] [H] à payer à la SCI DAC la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– DIRE n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
La SCI DAC sollicite la condamnation de Monsieur [Z] en restitution de l’indu de la somme de 23.250,11 euros en expliquant qu’il a perçu cette somme qui ne lui était pas due car elles lui ont été attribuées en exécution d’une injonction de payer non avenue et par conséquent non exécutoire de telle sorte que l’acte de saisie attribution était nul.
Elle sollicite également la condamnation de l’huissier instrumentaire, la SCP [H] [I] ET [U] qui s’est abstenue de vérifier l’absence de caractère exécutoire de l’acte fondant la saisie attribution pratiquée. Il estime qu’en procédant à l’exécution forcée par la voie d’une saisie attribution, d’une injonction de payer européenne non avenue et donc non exécutoire, la SCP [H] [I] [U] a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Elle soutient que son préjudice est caractérisé par le paiement de sommes indues à Monsieur [Z].
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 27 octobre 2023, Monsieur [F] [Z] demande au tribunal, sur le fondement des articles 1302 et 1240 du Code civil, L121-1 du CPCE et L213-6 al 1er du COJ, de :
– DEBOUTER la SCI D.A.C de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Reconventionnellement,
– CONDAMNER la SCI D.A.C à lui payer la somme de 1 039,80 € par an à compter de la saisie attribution (03.02.2022) au titre du préjudice subi, somme à parfaire au jour du jugement.
– CONDAMNER la SCI D.A.C à lui payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.
N° RG 23/01695 – N° Portalis DBX2-W-B7H-J55E
Monsieur [Z] sollicite le rejet des demandes formulées à son encontre en soutenant d’une part l’absence d’indu dans le litige en rappelant que le jugement du JEX en date du 02 mai 2023, qui a déclaré irrecevable la SCI DAC sans sa contestation, n’a pas été frappé d’appel et par conséquent est devenu définitif, de telle sorte qu’elle ne peut pas contester la validité du titre exécutoire devant une autre juridiction. D’autre part, il argue de la régularité de la notification de l’ordonnance d’injonction de payer qui a été notifiée le 19 juin 2020 par l’autorité polonaise comme le confirme la mention portée sur ladite ordonnance et le procès verbal de signification du 27 octobre 2021 en indiquant que l’huissier de justice a correctement suivi la procédure.
Reconventionnellement, il sollicite la condamnation de la SCI DAC à l’indemniser des préjudices subis à compter de la saisie attribution en indiquant être privé de l’usage effectif de la somme de 23.250,11 euros qui est en attente dans l’étude de Me [H] [I] [U], ainsi que des intérêts de 6% par an qui ne sont plus versés depuis la saisie.
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 12 juin 2023, Maître [N] [H] et la SCP [H] [I] [U] demande au tribunal, sur le fondement des articles 13 et 19 du Règlement CE 1896/2006, 1425-5 et 1425-14 du CPCE et 1411 du CPC, de :
– JUGER que la signification de l’ordonnance d’injonction de payer est intervenue le 19 juin 2020 soit dans le délai de six mois
– JUGER qu’aucun délai n’est imposé pour la signification de l’ordonnance exécutoire
– JUGER que la signification du 27 octobre 2021 est régulière
– CONSTATER que la mainlevée de la saisie attribution est intervenue le 31 mars 2022
– JUGER que Maître [H] et la SCP [H] [I] [U] n’ont commis aucune faute
– JUGER que la SCI DAC ne justifie d’aucun préjudice en relation directe de causalité LA DEBOUTER de ses demandes
– JUGER que Maître [H] et la SCP [H] [I] [U] exécuteront toute décision passée en force de chose jugée concernant les sommes visées par la saisie conservatoire.
– ORDONNER la mainlevée de la saisie conservatoire sous astreinte de 100 € par jour de retard commençant à compter du jugement à intervenir.
– CONDAMNER la SCI DAC à leur payer la somme de 3 000 € par application des dispositions de l’article 700 du CPC
– LA CONDAMNER aux entiers dépens.
Maître [H] et la SCP [H] [I] [U] soutiennent qu’ils n’ont commis aucune faute de nature à engager leur responsabilité dans la mesure où toutes les procédures de signification et d’exécution ont été respectées et validées par les dispositions légales et judiciaires. Ils exposent que l’ordonnance du 22 mai 2020 a été signifiée le 19 juin 2020 respectant le délai de six mois conformément à l’article 1411 du Code de procédure civile, qu’aucune opposition n’a été faite par la SCI DAC rendant l’ordonnance exécutoire le 15 avril 2021, que l’acte de signification du 27 octobre 2021 concernait l’ordonnance exécutoire et sa signification n’avait pas de délai précis imposé de telle sorte que l’huissier pouvait légitimement engager une mesure d’exécution.
N° RG 23/01695 – N° Portalis DBX2-W-B7H-J55E
Ils ajoutent que la contestation par la SCI DAC de la saisie attribution du 03 février 2022 signifiée le 08 février 2022 a été déclarée irrecevable pour cause de délai dépassé validant ainsi la saisie attribution du 03 février 2022 produisant ainsi tous ses effets.
Ils sollicitent le rejet de la demande en nullité de la main levée de la saisie attribution qui est infondée.
Ils soutiennent également qu’ils n’ont causé aucun préjudice à la SCI DAC car la saisie attribution du 03 février 2022 est maintenue produisant ainsi tous ses effets dans la mesure où la saisie attribution du 13 avril 2023 n’est pas fondée.
L’instruction a été clôturée le 20 août 2024 par ordonnance du 24 mai 2024.
L’affaire, plaidée à l’audience du 20 septembre 2024 a été mise en délibéré au 18 octobre 2024.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe, et en premier ressort
Rejette les demandes de la SCI DAC
Rejette les demandes reconventionnelles de Monsieur [F] [Z]
Rejette les demandes reconventionnelles de Maître [N] [H] et de la SCP [H]-[I]-[U]
Condamne la SCI DAC à payer à Monsieur [F] [Z] une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne la SCI DAC à payer à Maître [N] [H] une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne la SCI DAC à payer à la SCP [H]-[I]-AFFORTIune somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne la SCI DAC aux dépens
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit.
Le Greffier, Le Président,
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