Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Lyon
Thématique : Respect des délais et conditions pour l’isolement en milieu psychiatrique.
→ RésuméDans cette affaire, un centre hospitalier a pris une mesure d’isolement à l’encontre d’un patient, suite à une décision médicale. Cependant, le juge des libertés et de la détention a ordonné la mainlevée de cette mesure le 4 avril 2025 à 15h45. Malgré cette décision, le même jour à 17h23, une nouvelle mesure d’isolement a été décidée par un médecin, sans mentionner l’ordonnance du juge ni justifier la nécessité de cette reprise.
Selon l’article L3222-5-1 du code de la santé publique, l’isolement ne peut être appliqué qu’en cas de risque immédiat pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre, et doit être surveillé de manière stricte. En cas de mainlevée d’une mesure d’isolement, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant un délai de quarante-huit heures, sauf si des éléments nouveaux justifient cette action. Dans cette situation, il n’a pas été démontré que des éléments nouveaux étaient survenus pour justifier la reprise de l’isolement. Le juge a constaté que la décision médicale prise par le médecin ne tenait pas compte de l’ordonnance du juge des libertés, ce qui a conduit à une irrégularité dans la procédure. En conséquence, le juge a ordonné la mainlevée de la mesure d’isolement du patient. Il a également rappelé que la mainlevée de l’isolement entraîne automatiquement la mainlevée de toute mesure de contention, et qu’aucune nouvelle mesure ne peut être mise en place avant l’expiration du délai légal, sauf en cas de nouveaux éléments justifiant une telle action. Ainsi, le juge a statué en faveur du respect des droits du patient et de la légalité des procédures en matière de soins psychiatriques. |
COUR D’APPEL DE LYON
Tribunal judiciaire de Lyon
Cabinet de [Y] [S]
N° RG 25/01268 – N° Portalis DB2H-W-B7J-2TKW – Isolement
Monsieur [D] [P]
ORDONNANCE RELATIVE A UN PREMIER RENOUVELLEMENT DE LA MESURE D’ISOLEMENT
Rendue le 07 avril 2025 à 18h01
Par, [Y] [S], juge au tribunal judiciaire de Lyon, statuant sans audience selon la procédure écrite de principe prévue aux articles L3211-12-2 et L3222-5-1 du Code de la santé publique ;
Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants, L3222-5-1, R3211-34 et suivants du Code de la santé publique ;
Vu l’ordonnance du juge ayant ordonné la mainlevée de la mesure d’isolement concernant Monsieur [D] [P] en date 04/04/2025 à 15h45 (ordonnance non jointe à la saisine) ;
Vu les pièces du dossier, considérant que l’état du patient, Monsieur [D] [P], nécessite le renouvellement exceptionnel de la mesure de placement à l’isolement débutée le 04/04/2025 à 17h23 ;
Vu l’impossibilité de délivrer les informations en application du premier alinéa du II de de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ;
Vu la saisine du juge par le Directeur du CENTRE HOSPITALIER DU VINATIER le 07/04/2025, enregistrée le même jour à 11h44, aux fins de maintien de la mesure sans demande de comparution du patient,
Vu l’avis du Ministère public ;
MOTIFS DE LA DECISION :
L’article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose, dans son premier alinéa, que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement ; qu’il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient ; qu’enfin, leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical, comportant notamment deux évaluations par 24 heures (isolement)/12heures(contention);
Dans le cadre de son contrôle, le juge ne peut se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins. Il n’opère pas une appréciation de l’opportunité médicale de la mesure mais un contrôle de ses motifs au regard des critères posés au paragraphe I de l’article L3222-5-1 susvisé.
En l’espèce, les pièces produites au soutien de sa requête par le CH du Vinatier permettent de constater que suite à la décision du juge des libertés et de la détention ayant ordonné la mainlevée de la mesure d’isolement le 04/04/2025 à 15h45, une nouvelle mesure a été prise le même jour à 17h23 sans mention de l’ordonnance du juge des libertés (laquelle n’est d’ailleurs par jointe à sa requête par le CH) et sans justification de la survenance d’éléments nouveaux dans la situation du patient justifiant la reprise d’une mesure d’isolement;
Il convient donc à nouveau de rappeler qu’il résulte des dispositions légales en vigueur qu’en cas de mainlevée de la mesure, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures à compter de la mainlevée de la mesure, sauf survenance d’éléments nouveaux dans la situation du patient rendant impossibles d’autres modalités de prise en charge, auquel cas l’intérêt du patient doit être recherché afin de garantir sa sécurité et celle d’autrui, le juge des libertés et de la détention étant alors avisé sans délai de cette nouvelle mesure.
En l’espèce, il apparait que la décision médicale de reprise de la mesure d’isolement prise par le Dr [U] [N] [W] le 04/04/2025 à 17h23 ne mentionne pas la prise en compte de l’ordonnance du juge des libertés intervenue le même jour à 15h45 ni les éléments nouveaux justifiant la reprise d’une mesure d’isolement;
Il résulte de ces développements que la procédure est irrégulière.
En conséquence, il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la mesure d’isolement de Monsieur [D] [P].
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