Tribunal judiciaire de Lyon, 1 avril 2025, RG n° 25/01184
Tribunal judiciaire de Lyon, 1 avril 2025, RG n° 25/01184

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Lyon

Thématique : Non-respect des conditions d’isolement en milieu psychiatrique.

Résumé

Un patient a été placé en isolement le 29 mars 2025 à 16h41, mais son hospitalisation complète sans consentement n’a été prononcée que le 30 mars 2025 à 10h10. Cette situation soulève des questions sur la légalité de la mesure d’isolement, car l’article L3222-5-1 du code de la santé publique stipule que l’isolement ne peut être appliqué qu’à des patients déjà hospitalisés sans consentement. En l’occurrence, le patient a été isolé sans cadre juridique approprié, ce qui constitue une violation de ses droits.

Les dispositions légales précisent que l’isolement et la contention doivent être des mesures de dernier recours, mises en œuvre uniquement pour prévenir un dommage immédiat ou imminent, sur décision d’un psychiatre, et doivent être surveillées de manière stricte. De plus, toute prolongation de ces mesures au-delà des durées initiales requiert l’information d’un membre de la famille et la saisine d’un juge. Dans ce cas, ces procédures n’ont pas été respectées, ce qui entache la régularité de la mesure.

Le juge, dans son rôle de contrôle, ne remet pas en question l’évaluation médicale mais se concentre sur la conformité des procédures aux exigences légales. Étant donné que l’isolement a été appliqué sans que le patient soit légalement admis en hospitalisation complète, la procédure est considérée comme irrégulière. Par conséquent, le juge ordonne la mainlevée de la mesure d’isolement, reconnaissant ainsi la violation des droits du patient.

En conclusion, la décision du juge souligne l’importance du respect des procédures légales en matière de privation de liberté dans le cadre des soins psychiatriques, garantissant ainsi la protection des droits des patients.

COUR D’APPEL DE LYON
Tribunal judiciaire de Lyon
Cabinet de Sophie TARIN

N°RG 25/001184 – JLD hospitalisation
M. [L] [I] né le 20/01/1996

ORDONNANCE RELATIVE A UNE MESURE D’ISOLEMENT
MAINLEVEE – (1ère demande)

rendue le 1er avril 2025 à 14h32

Par, Sophie TARIN, Juge au tribunal judiciaire de Lyon, statuant sans audience selon la procédure écrite de principe prévue aux articles L3211-12-2 et L3222-5-1 du Code de la santé publique ;

Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants, L3222-5-1, R3211-34 et suivants du Code de la santé publique ;

Vu la décision du Directeur du CH Le Vinatier portant admission en hospitalisation complète du patient en date du 30 mars 2025 à 10h10 ;

Vu les pièces du dossier et notamment la décision de renouvellement de la mesure d’isolement du 1er avril 2025 à compter de 1h53 prise par le Dr [B] [V], considérant que l’état du patient, M. [L] [I], nécessite le renouvellement exceptionnel de la mesure débutée le 29 mars 2025 à 16h41;

Vu les informations délivrées aux tiers en application du premier alinéa du II de de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ;

Vu la saisine du Juge par le Directeur du CH Le Vinatier le 1er avril 2025, enregistrée le même jour à 8h22, aux fins de maintien de la mesure sans demande de comparution du patient,

Vu l’avis du Ministère public ;

MOTIFS DE LA DECISION :

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose, dans son premier alinéa, que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement ; qu’il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient ; qu’enfin, leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical, comportant notamment deux évaluations par 24 heures (isolement)/12heures(contention).

Il dispose aussi, dans son paragraphe II, qu’à titre exceptionnel, le médecin peut renouveler sous les mêmes conditions, au delà des durées totales de 48 heures pour la mesure d’isolement et de 24 heures pour la mesure de contention, la mesure d’isolement ou de contention avec l’obligation d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de celui-ci, du renouvellement qui est envisagé ; que cette même information doit être délivrée par le directeur d’établissement au juge, ce dernier devant être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration de la soixante-douzième heure d’isolement et de la quarante-huitième heure de contention si l’état de santé du patient rend le renouvellement de la mesure nécessaire au delà de ces durées, et statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure d’isolement ou la soixante-douzième heure de contention.

Il est aussi précisé à cet article qu’une mesure d’isolement ou de contention est regardée comme une nouvelle mesure lorsqu’elle est prise au moins quarante-huit heures après une précédente mesure d’isolement ou de contention et qu’en-deçà de ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement et de contention qui la précèdent et qu’en outre, l’information susvisée et la saisine du juge doivent être effectuées selon les mêmes modalités lorsque le médecin prend plusieurs mesures d’une durée cumulée de quarante-huit heures pour l’isolement et de vingt-quatre heures pour la contention sur une période de quinze jours.

L’article R3211-31-1 dispose que l’information relative au renouvellement de la mesure d’isolement ou de contentionest délivrée par tout moyen à au moins un membre de la famille du patient, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt. Cette personne a le droit de saisir le juge aux fins de mainlevée d’une mesure d’isolement ou de contention.

Dans le cadre de son contrôle, le juge ne peut se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins. Il n’opère pas une appréciation de l’opportunité médicale de la mesure mais un contrôle de ses motifs au regard des critères posés au paragraphe I de l’article L3222-5-1 susvisé.

Attendu qu’il convient en l’espèce de relever que le patient a fait l’objet d’une mesure d’isolement depuis le 29 mars 2025 à 16h41 mais que son hospitalisation complète sans son consentement n’a été prononcée que le 30 mars 2025 à 10h10, de sorte que les prescriptions impératives posées par l’article L3222-5-1 du code de la santé publique qui dispose dans son premier alinéa que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours qui ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement n’ont pas été respectées; Que la procédure apparait viciée par une irrégularité qui porte atteinte aux droits du patient, dès lors qu’il a été placé à l’isolement sans être admis en hospitalisation complète sans consentement, donc sans cadre juridique définissant la privation de liberté;

Il résulte de ces développements que la procédure est irrégulière.

En conséquence, il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la mesure d’isolement de M. [L] [I].

 


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