Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Draguignan
Thématique : Responsabilité des intervenants dans un projet de construction : enjeux d’expertise et garanties d’assurance
→ RésuméAcquisition et ConstructionLa SARL L’OASIS a acquis une villa et un terrain sur la commune de [Localité 9] et a entrepris la construction d’une résidence comprenant deux bâtiments de trois appartements chacun, en plus de la villa existante. La maîtrise d’œuvre a été confiée à Monsieur [N] [D], assuré par la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF). Plusieurs sociétés ont été impliquées dans la phase de conception, notamment GEOTERRIA, BET HM et ENERXIA, chacune ayant son propre assureur. Vente des AppartementsQuatre appartements ont été vendus entre juillet et août 2017, avec des livraisons s’étalant de décembre 2017 à août 2018. Les acheteurs incluent Monsieur et Madame [U], Monsieur et Madame [I], Madame [A], ainsi que Monsieur et Madame [T]. Réclamations des AcheteursLes acheteurs ont signalé diverses malfaçons, inachèvements et non-conformités, notamment des infiltrations au niveau des toitures-terrasses. En octobre 2018, ils ont assigné en référé la SARL L’OASIS, Monsieur [N] [D] et le syndic de la copropriété pour obtenir la désignation d’un expert et, pour certains, la consignation d’une somme représentant 5 % du solde du prix. Expertise JudiciaireLe juge des référés a désigné un expert, Monsieur [Y] [B], pour examiner les désordres. Plusieurs ordonnances ont suivi, élargissant la mission de l’expert et impliquant d’autres parties, y compris des assureurs. Des désordres supplémentaires ont été constatés, entraînant des extensions de mission pour l’expert. Interventions des AssureursLa compagnie MAF a assigné en référé plusieurs sociétés, dont GEOTERRIA et BET HM, ainsi que leurs assureurs, pour que les opérations d’expertise soient déclarées communes et opposables. La compagnie ALBINGIA a contesté la demande de MAF, arguant de l’absence de garantie mobilisable. Décisions du TribunalLe tribunal a constaté que la SARL ENERXIA n’avait pas été citée et a ordonné sa mise hors de cause. La compagnie ALBINGIA a également été mise hors de cause en raison de l’absence de couverture pour la responsabilité civile professionnelle. Les ordonnances de référé ont été déclarées communes et opposables aux autres parties impliquées. Conclusion et DépensesLes dépens de l’instance ont été laissés à la charge de la MAF, sans application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Le surplus des demandes a été rejeté, et le tribunal a statué sur la base des éléments présentés. |
T R I B U N A L JUDICIAIRE
D E D R A G U I G N A N
____________
O R D O N N A N C E D E R É F É R É
CONSTRUCTION
RÉFÉRÉ n° : N° RG 24/07083 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KKM5
MINUTE n° : 2025/ 60
DATE : 22 Janvier 2025
PRÉSIDENT : Monsieur Frédéric ROASCIO
GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT
DEMANDERESSE
S.A. MAF en sa qualité d’assureur de M. [D], dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Danielle ROBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN (avocat postulant) et Me Virginie POURTIER, avocat au barreau de PARIS (avocat plaidant)
DEFENDERESSES
S.A.S.U. BET HM, dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Sébastien GUENOT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Mutuelle AUXILIAIRE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Sébastien GUENOT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
S.A. AXA FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par Me Sébastien GUENOT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
S.A.S. GEOTERRIA, dont le siège social est sis [Adresse 6]
non comparante
Société AR-CO ès qualité d’assureur de la SAS GEOTERRIA, dont le siège social est sis [Adresse 8] BELGIQUE
non comparante
Société ALBINGIA ès qualité d’assureur de la SAS GEOTERRIA, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Alain DE ANGELIS, avocat au barreau de MARSEILLE
DÉBATS : Après avoir entendu à l’audience du 11 Décembre 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, l’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.
copie exécutoire à
Me Alain DE ANGELIS
Me Sébastien GUENOT
Me Virginie POURTIER
Me Danielle ROBERT
2 copies service des expertises
1 copie dossier
délivrées le :
Envoi par Comci à Me Alain DE ANGELIS
Me Sébastien GUENOT
Me Virginie POURTIER
Me Danielle ROBERT
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
La SARL L’OASIS a acquis une villa et un terrain situés [Adresse 2] sur la commune de [Localité 9] et elle a entrepris la construction d’une résidence composée de deux bâtiments de trois appartements chacun s’ajoutant à la villa existante.
La SARL L’OASIS a confié la maîtrise d’œuvre de l’opération à Monsieur [N] [D], assuré auprès de la société d’assurance mutuelle MUTELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), et il a été recouru en phase conception aux sociétés suivantes :
la SASU GEOTERRIA, assurée auprès de la société étrangère AR-CO, puis de la SA ALBINGIA, et intervenue en tant que géotechnicien ;la SASU BET HM, assurée auprès de la SA AXA FRANCE IARD, en qualité que bureau d’étude structure ;la SAS ENERXIA, assurée auprès de la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE, et intervenue au titre du bureau d’étude thermique.
Il a été confié :
le lot gros œuvre et carrelage à la SA UMIT, assurée auprès de la SA SMA SA ;le lot étanchéité à l’EURL [Z] [V], assurée auprès de la SA AXA FRANCE IARD ;le lot ferronnerie à la SAS LEO ;le lot concernant les ascenseurs à la SAS SEALIFT COTE D’AZUR, assurée auprès de la SA AXA FRANCE ;le lot menuiseries extérieures à la SARL TSE BATIMENT, assurée auprès de la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE ;le lot plomberie / VMC / climatisation à la SARL CARROZA GENIE CLIMATIQUE, assurée auprès de la société étrangère AXELLIANCE CREATIVE SOLUTIONS.
La SA SOCOTEC est intervenue en qualité de contrôleur technique.
Une garantie d’achèvement a en outre été souscrite auprès de la CAISSE D’EPARGNE COTE D’AZUR.
Quatre appartements ont été vendus en état d’achèvement entre juillet et août 2017, puis livrés entre décembre 2017 et août 2018 à Monsieur [G] [U] et Madame [R] [C] épouse [U] (lots 2 et 7), à Monsieur [S] [I] et Madame [X] [F] épouse [I] (lots 1, 4 et 16), à Madame [A] [J] (lots 1 et 11), ainsi qu’à Monsieur [W] [T] et Madame [L] [H] épouse [T] (lots 5, 6, 9 et 14).
Se plaignant de diverses malfaçons, inachèvements, non-conformités au permis de construire et infiltrations au niveau des toitures-terrasses, et par exploits d’huissier de justice du 24 octobre 2018, Monsieur [G] [U], Madame [R] [C] épouse [U], Monsieur [S] [I], Madame [X] [F] épouse [I], Madame [A] [J], Monsieur [W] [T], Madame [L] [H] épouse [T] ont fait assigner en référé la SARL L’OASIS, Monsieur [N] [D] et le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 10], pris en la personne de son syndic en exercice la SARL CAP IMMO SUD aux fins principales de désignation d’un expert et, pour les époux [U], d’être autorisés à procéder à la consignation d’une somme représentant les 5 % du solde du prix.
Par ordonnance de référé rendue le 18 novembre 2018 (RG 18/07215, minute 2018/415), le juge des référés de la présente juridiction a fait droit à la seule demande de désignation d’expert, commettant Monsieur [Y] [B] en qualité d’expert chargé notamment d’examiner les désordres en litige.
Par ordonnance de référé du 23 août 2019, les opérations d’expertise ont été déclarées communes et opposables à la SA SOCOTEC, attraite en la cause le 31 mai 2019 par les consorts [K]-[P], et il a été ordonné la mise hors de cause de la SA SMABTP, attraite en la cause le 23 juillet 2019 par la SARL L’OASIS, alors que l’intervention volontaire de SA SMA a été reçue en sa qualité assureur en responsabilité professionnelle de la SA UMIT.
Par ordonnance de référé du 18 décembre 2019, il a été rectifié l’omission de statuer affectant l’ordonnance du 23 août 2019 en prévoyant que les opérations d’expertises soient déclarées communes et opposables à l’ensemble des parties assignées par la SARL L’OASIS, à savoir l’EURL [Z] [V], son assureur la SA AXA FRANXE IARD, la SA UMIT et son assureur la SA SMA.
Par ordonnance de référé du 18 novembre 2020, la mission de l’expert judiciaire a été étendue à la demande des consorts [K]-[P], suite à l’apparition d’autres désordres constatés notamment par procès-verbal de constat d’huissier du 5 novembre 2019 et par courriers des 27 juillet 2018, 7 février 2019, 1er décembre 2019, 21 janvier 2020 et 18 avril 2020 (absence d’accès aux climatiseurs extérieurs, infiltrations et coulures en façade et dans le couloir, réserves non réparées, conformité à la sécurité incendie, nuisances acoustiques).
Par ordonnances de référé des 14 octobre 2020 et 6 janvier 2021, les opérations d’expertises ont été déclarées communes et opposables à la CAISSE EPARGNE COTE D’AZUR, la SAS LEO, la compagnie d’assurances MAF, la SAS SEALIFT COTE D’AZUR, la SARL TSE BATIMENT et la SARL CARROZZA GENIE CLIMATIQUE.
Par ordonnance du 18 mai 2021, le magistrat chargé des opérations du contrôle des expertises a également étendu la mission confiée à l’expert judiciaire aux non-conformités et malfaçons affectant les parties communes, selon liste réactualisée le 23 avril 2021.
Par ordonnance du 17 novembre 2021, la mission confiée à l’expert judiciaire, selon ordonnance du 28 novembre 2018 complétée par ordonnance du 18 novembre 2020, a été étendue à l’appartement et au garage constituant les lots 10 et 13 de la copropriété, étant précisé que ces lots vendus en état futur d’achèvement à Monsieur [W] [T] seul et qu’ils ont été livrés le 28 juin 2021 après rejet de la demande de ce dernier tendant à la résolution judiciaire de la vente par arrêt définitif rendu le 6 avril 2021 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Par ordonnance de référé du 15 février 2023, le juge des référés a fait droit à la demande d’extension de mission sollicitée par les consorts [K]-[P] aux désordres concernant l’implantation de l’immeuble, l’altimétrie, l’emprise au sol et divers éléments de conception concernant les accès et stationnements.
Par exploits de commissaire de justice des 12, 15, 16, 18, 19 juillet 2024, la compagnie MAF a fait assigner en référé la SASU GEOTERRIA et ses deux assureurs successifs AR-CO et ALBINGIA, la SASU BET HM et son assureur AXA FRANCE IARD, ainsi que la compagnie L’AUXILIAIRE en qualité d’assureur des sociétés ENERXIA et TSE BATIMENT aux fins principales de voir les opérations d’expertise judiciaire lui être déclarées communes et opposables.
Suivant ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 décembre 2024, reprenant ses dernières écritures et auxquelles elle se réfère à l’audience du 11 décembre 2024, la société d’assurance mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), en sa qualité d’assureur de Monsieur [N] [D], sollicite, au visa des articles 145 et 245 du code de procédure civile, de :
La DECLARER recevable et bien fondée en sa demande,
RENDRE COMMUNE ET OPPOSABLE l’ordonnance rendue par le tribunal judiciaire de Draguignan le 28 novembre 2018 portant le numéro RG 18/07215, à :
• la société GEOTERRIA,
• la société AR-CO, ès-qualités d’assureur de GEOTERRIA,
• la société ALBINGIA, ès-qualités d’assureur de GEOTERRIA,
• le BET HM,
• AXA FRANCE IARD, ès-qualités d’assureur du BET HM,
• la société ENERXIA,
• la société L’AUXILIAIRE, ès-qualités d’assureur de la société ENERXIA,
• la société L’AUXILIAIRE ès qualités d’assureur de la société TSE BATIMENT ;
Débouter ALBINGIA de sa demande de mise hors de cause ;
Débouter ALBINGIA de sa demande au titre de l’article 70 (en réalité 700 dans le corps des écritures) du code de procédure civile ;
Réserver les dépens de l’instance.
Suivant ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 décembre 2024, auxquelles elle se réfère à l’audience du 11 décembre 2024, la SA ALBINGIA, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA, sollicite, au visa des articles L.124-5 du code des assurances, 145 et 835 du code de procédure civile, de :
A titre principal, DEBOUTER la MAF de ses demandes à son encontre eu égard à l’absence de motif légitime de sa participation aux opérations expertales en l’état de l’absence de toute garantie mobilisable ;
CONDAMNER la MAF à lui verser à la société ALBINGIA la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
A titre subsidiaire et reconventionnel, CONDAMNER la société GEOTERRIA à produire aux débats ses attestations d’assurance ainsi que toutes les stipulations contractuelles de responsabilité civile professionnelle postérieures au 31 décembre 2022 et en cours à la date de la réclamation, soit le 16 juillet 2024, au besoin sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;
A titre subsidiaire, lui DONNER ACTE de ses plus expresses protestations et réserves, notamment de responsabilité, de prescription, de garantie, de fait et de droit à la demande de la MAF de lui déclarer les opérations d’expertise confiées à Monsieur [B] par ordonnance de référé du 28 novembre 2018 communes et opposables ;
En tout état de cause, METTRE à la charge de la MAF les dépens de l’instance.
A l’audience du 11 décembre 2024, la SASU BET HM, la SA AXA FRANCE IARD, ès-qualités d’assureur de la SASU BET HM, et la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE, ès-qualités d’assureur des SARL ENERXIA et TSE BATIMENT, ont formulé des protestations et réserves sur les demandes présentées.
La SASU GEOTERRIA, citée à personne, et la société de droit étranger AR-CO, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA, citée à l’étranger conformément aux dispositions de l’article 684 du code de procédure civile, n’ont pas constitué avocat ni présenté leurs observations.
Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, il est renvoyé aux écritures des parties conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Nous, juge des référés, statuant après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire mise à disposition au greffe, exécutoire de droit et en premier ressort :
CONSTATONS que la SARL ENERXIA n’a pas été citée à la présente instance et qu’ainsi aucune demande ne peut être formée contre elle.
ECARTONS des débats la note en délibéré datée du 19 décembre 2024 et transmise par voie électronique le 23 décembre 2024 par le conseil de la société d’assurance mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF) en sa qualité d’assureur de Monsieur [N] [D].
ORDONNONS la mise hors de cause de la SA ALBINGIA, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA.
DECLARONS communes et opposables à :
la SASU GEOTERRIA,la société de droit étranger AR-CO, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA,la SASU BET HM,la SA AXA FRANCE IARD, ès-qualités d’assureur de la SASU BET HM,la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE, ès-qualités d’assureur des SARL ENERXIA et TSE BATIMENT,l’ordonnance rendue le 18 novembre 2018 par le juge des référés du tribunal de grande instance, devenue tribunal judiciaire, de Draguignan (RG 18/07215, minute 2018/415) ayant désigné Monsieur [Y] [B] en qualité d’expert, outre les différentes ordonnances subséquentes rendues en référé et par le juge chargé du contrôle des expertises ayant notamment désigné en dernier lieu Monsieur [E] [O] en qualité d’expert.
DISONS que l’expert commis devra poursuivre ses opérations contradictoirement à l’égard des sociétés désignées ci-dessus.
DISONS que les mises en cause devront être régulièrement convoquées par l’expert et que son rapport leur sera opposable.
DISONS que, dans l’hypothèse où la présente ordonnance est portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ces dispositions seront caduques.
DONNONS acte de ses protestations et réserves émises par les sociétés BET HM, L’AUXILIAIRE et AXA FRANCE IARD.
LAISSONS les dépens de la présente instance à la charge de la société d’assurance mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF) en sa qualité d’assureur de Monsieur [N] [D].
DISONS n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
REJETONS le surplus des demandes.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois, an susdits.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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