Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Thématique : Responsabilité contractuelle et manquement au devoir de conseil dans la gestion immobilière
→ RésuméContexte JuridiqueL’affaire se fonde sur les dispositions du Code de procédure civile et du Code civil, notamment concernant la responsabilité contractuelle et les obligations des mandataires. Les articles cités établissent que les contrats doivent être exécutés de bonne foi et que le mandataire est responsable des dommages résultant de son inexécution. Responsabilité de la Société FONCIALa société FONCIA a été mandatée pour gérer le bien immobilier de Madame [W] [U]. Un contrat de mandat a été signé, mais il a été constaté qu’aucune preuve d’adhésion à une assurance garantie de paiement des loyers n’a été fournie. Malgré cela, FONCIA a affirmé avoir souscrit une telle assurance. L’absence de vérification des documents nécessaires a été considérée comme une faute de gestion, entraînant un préjudice pour Madame [W] [U] lorsque la locataire est devenue défaillante. Évaluation du PréjudiceLe préjudice subi par Madame [W] [U] a été évalué en deux parties : les loyers et charges impayés, et les dégradations locatives. Les loyers impayés s’élevaient à 5 142,11€, tandis que les dégradations locatives ont été évaluées à 2 000€, après prise en compte de la vétusté. La somme totale due à Madame [W] [U] a été fixée à 7 142,11€. Demande Reconventionnelle de FONCIALa société FONCIA a également formulé une demande reconventionnelle pour le remboursement de frais engagés pour le compte de Madame [W] [U]. Après examen, il a été décidé que Madame [W] [U] devait rembourser un total de 1 465,32€ pour divers frais, y compris des frais de serrurier et des frais d’huissier. Décisions AccessoiresLe tribunal a condamné la société FONCIA aux dépens et a ordonné le paiement de 800€ à Madame [W] [U] au titre des frais irrépétibles. L’exécution provisoire de la décision a également été prononcée, rendant la décision immédiatement exécutoire. ConclusionLe tribunal a statué en faveur de Madame [W] [U], condamnant la société FONCIA à verser des indemnités pour le préjudice financier subi, tout en reconnaissant également certaines créances de FONCIA à l’encontre de Madame [W] [U]. |
N° RG 22/03899 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WUAB
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE
SUR LE FOND
59C
N° RG 22/03899 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WUAB
Minute n° 2024/00609
AFFAIRE :
[W] [U]
C/
Société FONCIA [Localité 5]
Grosses délivrées
le
à
Avocats : la SELARL CABINET CAPORALE – MAILLOT – BLATT ASSOCIES
la SELARL RUAN
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 19 NOVEMBRE 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré
Mme Angélique QUESNEL, Juge ,
Statuant à Juge Unique
Greffier, lors des débats et du prononcé
Isabelle SANCHEZ, Greffier
DÉBATS
A l’audience publique du 17 Septembre 2024
JUGEMENT
Contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile
DEMANDERESSE
Madame [W] [U]
née le 12 Juillet 1945 à [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Albane RUAN de la SELARL RUAN, avocats au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSE
Société FONCIA [Localité 5]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Maître Olivier MAILLOT de la SELARL CABINET CAPORALE – MAILLOT – BLATT ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
N° RG 22/03899 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WUAB
Madame [W] [U], propriétaire d’un appartement de type F2, situé [Adresse 7] à [Localité 6] a conclu le 4 janvier 2010 avec l’agence immobilière CENTURY 21 (AGENCE OUEST IMMOBILIER) un contrat de mise en location de bien. Ce contrat prévoyait un mandat de location et un mandat de gestion immobilière.
Dans le cadre de ces deux mandats, l’agence CENTURY 21 a donné l’appartement de Madame [U] en location à Madame [C] [L] à compter du 15 mai 2015.
Le 1er octobre 2019, la société FONCIA [Localité 5] a acquis l’intégralité des actions de la société AGENCE OUEST IMMOBILIER.
Informée du rachat par la société concluante de la société AGENCE OUEST IMMOBILIER exerçant sous l’enseigne commerciale CENTURY 21, la compagnie SERENIS ASSURANCES (AXELLIANCE) a résilié unilatéralement le contrat couvrant la garantie de loyers impayés par courrier en date du 20.12.20219 à effet du 31 décembre 2019.
Le 2 janvier 2020, la société FONCIA [Localité 5] a par courrier recommandé avec accusé réception, informé Madame [U] qu’à compter du 1er janvier 2020, les garanties cesseraient.
Madame [C] [L] n’a plus payé de manière régulière son loyer au cours de l’année 2019.
Madame [W] [U] a payé une cotisation afférente à une “assurance loyers impayés”.
Le 30 décembre 2019, la société FONCIA [Localité 5] a effectué auprès de la compagnie d’assurance AXELLIANCE une déclaration de sinistre au bénéfice de Madame [W] [U], pour le non paiement des loyers de sa locataire, Madame [C] [L].
La compagnie d’assurance AXELLIANCE a dénié sa garantie et a procédé à un classement sans suite du dossier. Ce refus est lié à l’absence de production du bulletin d’adhésion de Madame [W] [U] à l’assurance SERENIS au titre de la GLI.
Le 11 juin 2021, la société FONCIA [Localité 5] a proposé une solution amiable avec une indemnisation fixée à 4 169,57€.
Aucune solution amiable n’ayant été trouvée, Madame [W] [U] a assigné la société FONCIA BORDEAUX devant le tribunal judiciaire de BORDEAUX aux fins d’obtenir réparation de ses préjudices.
Suivant les dernières conclusions, notifiées par RPVA le 14 décembre 2023, Madame [W] [U] a sollicité sur le fondement des articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil du tribunal de :
Juger que la société FONCIA n’a pas exécuté ses obligations contractuelles à l’égard de Mme [U],Condamner la société FONCIA à payer à Mme [U] la somme de 10 760.14€,Juger que cette somme portera intérêts à compter de la mise en demeure du 20 décembre 2021,Ordonner la capitalisation des intérêts,Débouter la société FONCIA de l’intégralité de ses demandes,Juger n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à venir,Condamner la société FONCIA aux entiers dépens et à verser la somme de 3 500€ sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile
Au soutien de ses prétentions,:
Madame [W] [U] fait valoir que la responsabilité de la société FONCIA [Localité 5] est incontestable en raison de ses fautes dans l’exécution du mandat de gestion. Elle fait observer qu’il ressort clairement des documents produits qu’une assurance “loyers impayés” avait été souscrite à son bénéfice dans le cadre des mandats de location et de gestion conclus avec son prédécesseur. Un courrier du 22 novembre 2016, détaillant la garantie d’assurance a été produit pour étayer cette affirmation. De plus, Madame [W] [U] souligne qu’elle recevait régulièrement des récapitulatifs et des publicités confirmant qu’elle était couverte en cas de difficulté avec sa locataire, telles que le défaut de paiement ou la dégradation du bien loué. Madame [W] [U] rappelle que les cotisations, d’abord de 14,69€ puis 14,88€ ont été payées par elle, comme en attestent les relevés de gestion jusqu’en décembre 2019. Par ailleurs, Madame [W] [U] souligne qu’elle ignore les raisons pour lesquelles la compagnie d’assurance a refusé de prendre en charge le sinistre, car la société FONCIA ne l’a informée d’aucun des échanges qu’elle a eus avec la compagnie d’assurance, la laissant ainsi dans l’ignorance totale quant aux motifs de ce refus.
Madame [W] [U] fait valoir en réplique aux arguments de la société FONCIA, que cette dernière a repris l’intégralité des engagements souscrits par la société AGENCE OUEST IMMOBILIER, notamment le contrat d’assurance souscrit pour le compte de sa mandante. Les engagements initiaux de la société AGENCE OUEST IMMOBILIER ont donc été repris par la société FONCIA, qui est tenue aux mêmes conditions et termes, et doit répondre de ses engagements, que ce soit sur la période avant ou après la cession des actions. Sous la gestion de la société FONCIA, la cotisation pour l’assurance garantissant les loyers impayés et les dégradations locatives a été payée, démontrant l’adhésion de la société FONCIA aux termes du contrat d’assurance. Elle précise qu’elle n’a jamais reçu de contrat d’assurance, la société AGENCE OUEST IMMOBILIER se contentant de lui confirmer occasionnellement l’étendue des garanties. Ainsi, l’assureur était contractuellement lié uniquement à son mandataire. Elle rappelle que l’assureur a résilié les contrats d’assurance dès la cession des actions de la société OUEST IMMOBILIER. Madame [W] [U] fait valoir également que la société FONCIA [Localité 5] n’a pas effectué les diligences nécessaires pour que l’assurance prenne en compte les premiers loyers impayés en 2019. En effet, elle souligne que le mandataire n’a pas pris les mesures requises lors des impayés de la locataire, qui a eu un premier incident de paiement en juillet 2019. Il incombait au mandataire de déclarer le sinistre à l’assurance, FONCIA était le gestionnaire de l’appartement à ce moment là. Or, les documents montrent que la société FONCIA n’a déclaré le sinistre que le 30 décembre 2019, soit plusieurs mois après le premier incident. Cette déclaration tardive n’a pas été suivie des réponses nécessaires aux demandes de l’assurance, qui a classé le dossier le 26 octobre 2020. Ainsi, les fautes de FONCIA sont avérées et sa responsabilité est engagée justifiant qu’elle soit condamnée à réparer les préjudices subis. Madame [W] [U] fait valoir que concernant les préjudices à indemniser, le contrat d’assurance tel qu’il résulte du courrier du 22 novembre 2016, stipulait une couverture de 61 000€ pour les loyers impayés et frais de contentieux, 8 000€ pour les dégradations immobilières et un minimum de 2 mois de loyer pour la période nécessaire aux réparations. Elle indique que les préjudices qu’elle a subi incluent les loyers non perçus pour 5 035,63€ et dégradations locatives pour 5 724,61€, ce qui donne droit à une indemnisation de 10 760,14€. En réplique aux arguments de la société FONCIA, elle souligne que le décompte produit par cette dernière est erroné car il ne tient pas compte des loyers impayés de 2019 et, qu’il convient donc de se référer au montant indiqué dans le relevé de février 2021. Elle soutient également que les demandes de remboursement de la société FONCIA ne sont pas justifiées car une partie des dépenses n’étaient pas nécessaires. Madame [W] [U] fait valoir enfin, que les travaux nécessaires pour relouer l’appartement ont été largement sous estimés par la société FONCIA. Contrainte de réaliser des travaux importants, elle a produit une facture de 5 260,30€ correspondant aux dépenses de matériels. Elle rappelle que grâce à l’aide de son fils, elle a pu effectuer les travaux.
Suivant les dernières conclusions, notifiées par RPVA le 4 avril 2023, la société FONCIA BORDEAUX sollicite sur le fondement de l’article 1199 du code civil du tribunal de :
Débouter Madame [U] de toutes ses demandes, fins et conclusions,Condamner Madame [U] à verser à la société FONCIA [Localité 5] la somme de 1.835,07 € au titre des sommes dues par Madame [U], Condamner Madame [U] à verser à la société FONCIA [Localité 5] la somme de 2.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,Condamner Madame [U] aux entiers dépens de l’instance et au paiement des frais éventuels d’exécution forcée de la décision à intervenir. Au soutien de ses prétentions,:
La société FONCIA réplique en premier lieu, qu’en vertu de l’article IV dudit mandat, en cas de cession de clientèle du mandataire, le mandant reconnaît au mandataire une faculté de substitution au profit de son cessionnaire. Ainsi, la société FONCIA [Localité 5] a succédé à la société AGENCE OUEST IMMOBILIER sans besoin de solliciter un nouveau mandat. Elle observe que le dossier de Madame [W] [U] comprenait un mandat de gestion locative, mais ne mentionnait pas la souscription d’une assurance de carence locative ultérieure. Toutefois, constatant que Madame [W] [U] payait les frais de cotisation, elle a maintenu le paiement des frais d’assurance. Elle précise qu’elle a informé Madame [W] [U] que l’assurance avait résilié le contrat et qu’à partir de janvier 2020, il n’y avait plus de couverture. Elle ajoute qu’il n’ a jamais été convenu qu’une nouvelle assurance serait souscrite, comme indiqué dans son courrier du 2 janvier 2020. Elle rappelle que la locataire avait cessé ses paiements et que par la suite Madame [W] [U] n’a pas souhaité réaliser les travaux nécessaires pour permettre une nouvelle location, résiliant le mandat de gestion confié à la société FONCIA. La société FONCIA réplique qu’elle a tout mis en oeuvre pour obtenir une indemnisation au bénéfice de Madame [W] [U] de la part de l’assurance. Cependant, elle n’ a pas pu retrouver le bulletin d’adhésion et les documents associés, car l’agence OUEST IMMO n’a pas fourni ces données lors de la cession. La société FONCIA réplique que la locataire a rencontré des difficultés de paiement à partir de janvier 2020 et a quitté le logement le 19 décembre de la même année. Un premier arrêté de compte locataire a été établi indiquant un montant net à payer de 10 866,62€. Toutefois, après correction d’une erreur, un deuxième arrêté de compte a été établi à la date du 2 mars 2021 fixant ce montant à 5 565,14€ (423,03€ de réparations locatives et annulation du montant erroné de 5 724,51€ au titre des réparations locatives mentionnées par erreur dans le premier décompte). Elle précise que le montant de 423,03€ correspond aux frais de remise en état imputables au locataire, selon le devis établi par la société MULTING. Cette évaluation s’appuie sur une comparaison entre l’état des lieux d’entrée et de sortie, prenant en compte l’usure normale due à 5 ans et demi d’occupation du logement.
Par ailleurs, elle précise que la proposition d’indemnisation, ne constitue en aucun cas une reconnaissance de responsabilité, mais est une offre faite à titre commercial sur fonds propres.
Enfin, qu’elle a toujours informé sa cliente et qu’il est incorrect de prétendre le contraire. Madame [W] [U] ne peut prétendre ne pas avoir été informée du suivi du dossier puisque des documents nécessaires à la prise en charge par SERENIS ASSURANCES lui ont été demandés, auxquels elle n’a jamais répondu. Dès lors, il est évident que la société FONCIA a rempli ses obligations contractuelles. De plus, Madame [W] [U] n’a à aucun moment démontré que la société FONCIA, qui est un tiers au contrat d’assurance liant Madame [W] [U] et la société AXELLIANCE, n’aurait pas correctement exécuté ses obligations. Par conséquent, c’est contre la compagnie d’assurance que Madame [W] [U] aurait dû agir et non contre la société FONCIA [Localité 5].
Enfin, que la demande de condamnation à lui verser la somme de 1 835,07 euros pour les frais engagés et remboursement d’un loyer impayé est parfaitement justifié.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
La mise en état a été clôturée par ordonnance en date du 3 juillet 2024 et l’affaire fixée à plaider à l’audience du 17 septembre 2024, puis mise en délibéré au 19 novembre 2024, par mise à disposition du greffe.
MOTIVATION
A titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 4 du Code de procédure civile dispose que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
1 – Sur la responsabilité contractuelle de la société FONCIA :
Aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Aux termes l’article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public.
Aux termes de l’article 1199 du code civil le contrat ne crée d’obligations qu’entre les parties. Les tiers ne peuvent ni demander l’exécution du contrat ni se voir contraints de l’exécuter, sous réserve des dispositions de la présente section et de celles du chapitre III du titre IV.
Aux termes de l’article 1991 du code civil, le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.
Aux termes de l’article 1992 du code civil, le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion. Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire.
Dans le cadre d’un mandat de gestion, le mandataire est tenu d’un devoir de conseil envers son mandant ; est ainsi fautif le fait de n’avoir pas accompli les vérifications nécessaires à la validité et à l’efficacité des actes souscrits des actes souscrits par le mandant qui rentrent dans l’objet du mandat.
Selon l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement des dommages et intérêts, soit à raison de inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
En l’espèce, il ressort des pièces débattues, que la société OUEST IMMOBILIER, puis la société FONCIA [Localité 5] ont été mandatées pour gérer le bien immobilier de Madame [W] [U]. Il est constaté que cette dernière a signé le 4 janvier 2010 un contrat de mandat de gestion immobilière avec la société AGENCE OUEST IMMOBILIERE. L’analyse de ce contrat ne permet pas d’établir que l’agence OUEST IMMOBILIERE a adhéré à une assurance garantie de paiement de loyers et charges et détériorations immobilières. En effet, il n’est fait mention nulle part d’une adhésion auprès d’Axelliance.
Cependant, il est relevé du courrier, daté du 2 janvier 2020, à l’attention de Madame [W] [U] par la société FONCIA que cette dernière a souscrit une assurance comme l’atteste la première phrase “vous avez souscrit auprès du cabinet OUEST IMMOBILIER un mandat de gestion assorti d’une garantie de paiement des loyers”.
Si, aucune des parties n’a été en capacité de retrouver le bulletin d’adhésion auprès de la compagnie d’assurance ; toutefois, cette garantie des loyers impayés était dans le champ contractuel avec une rémunération supplémentaire prévue. En ne s’assurant pas que les documents ont tous été retournés à la compagnie assurance, l’agence immobilière a commis une faute de gestion créant une situation de risque pour son mandant, alors qu’il est relevé des comptes de gestion que la prestation a toujours été facturée et payée par Madame [W] [U]. En effet, il est constaté que Madame [W] [U] a payé pendant plusieurs années, les frais de garantie loyers impayés d’un montant de 14,88€.
Le risque s’est réalisé puisque la locataire s’est avérée défaillante, générant une dette locative de 5 142,11€, au 28 février 2021 selon le compte-rendu de gérance de la société FONCIA IMMOBILIER en date du 2 mars 2021 (impayés sur la période du 15/05/2015 au 19 décembre 2020).
Le lien de causalité entre la faute, soit l’absence de souscription de la garantie des loyers impayés et le préjudice, soit la perte de revenus locatifs, est démontré justifiant une indemnisation.
Si la société FONCIER [Localité 5] invoque la responsabilité de la compagnie d’assurance Axelliance dans le préjudice subi par Madame [W] [U], cette demande est inopérante à partir du moment où elle n’a pas rempli ses obligations dès le départ en ne prévoyant pas les documents nécessaires pour finaliser l’assurance.
Ainsi, il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’agence immobilière a commis une faute dans la gestion de son mandat, en ne s’assurant pas de l’adhésion à une assurance en cas d’impayés de loyers et charges.
Madame [W] [U] est donc en droit d’agir contre l’agence FONCIA [Localité 5] en réparation d’un préjudice qui serait né d’une faute de gestion de l’agence à cause de la souscription de ce contrat d’assurance dans le cadre du mandat qu’elle lui a donné.
Par conséquent, il convient de dire que la société FONCIA est déclaré responsable du préjudice subi par Madame [W] [U].
2 – Sur l’évaluation du préjudice :
Conformément aux dispositions de l’article 1991 du code civil, le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages et intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.
2.1- Sur l’indemnisation au titre des loyers et charges impayés :
En l’espèce, il ressort du décompte de gestion établi par la société FONCIA en date du 2 mars 2021, page 2, que Madame [C] [L] a accumulé des loyers et charges impayés sur la période du 15 mai 2015 au 19 décembre 2020 pour un montant de 5 142,11€.
Il est également relevé des différents échanges entre les parties et notamment du courrier en date du 11 juin 2021, que la société FONCIA a proposé de prendre en charge pour partie ces loyers et charges. Si la société FONCIA a présenté cette prise en charge comme un geste commercial, il est établi des éléments ci-dessus que cette dernière est responsable du préjudice financier de Madame [W] [U].
C’est pourquoi, il y a lieu de condamner la société FONCIA à payer la somme de 5 142,11€ au titre des loyers et charges impayés.
2.2 – Sur la demande d’indemnisation concernant les dégradations locatives :
En vertu de l’article 1732 du Code civil, le locataire est tenu de prendre à sa charge les dégradations intervenues pendant la location ainsi que les réparations locatives, permettant notamment de remédier aux défauts d’entretien.
Il en résulte que le locataire est tenu des réparations locatives qui lui sont imputables, qui excèdent celles qui résultent de l’usure et de la vétusté et qui ne résultent pas d’un usage normal des lieux. Le locataire est ainsi dispensé de remettre à neuf les peintures, moquettes et autres papiers peints muraux en état d’usage après des années d’occupation.
Il y a lieu de rechercher si les dégradations alléguées sont imputables à la vétusté, à la carence du locataire ou les deux à la fois. La vétusté implique une lente dégradation des lieux résultant d’un écoulement du temps assez long. L’usure normale des peintures, papiers peints et sols doit être assimilée à la vétusté après plusieurs années d’occupation.
Cependant, il ne peut être invoqué la vétusté du bien loué que si son état ou son aggravation ne résultent pas de sa négligence ou d’un défaut d’entretien qui lui serait imputable dont la preuve incombe au bailleur, à défaut de quoi ce dernier est tenu de prendre à sa charge les désordres résultant de la vétusté.
En l’espèce, compte-tenu de la durée d’occupation des lieux par Madame [C] [K] du 15 mai 2015 au 19 décembre 2020, soit un peu plus de 5 ans, la vétusté des installations et équipements peut légitimement être prise en considération dans l’appréciation des dégradations locatives. Bien que la demande d’indemnisation concernant ces dégradations soit chiffrée à 5 260,30 euros, sur la base de plusieurs factures produites, elle n’est pas entièrement justifiée. En effet, aucune corrélation précise n’a été établie entre les dégradations alléguées et le procès-verbal de constat du 25 novembre 2020. Par ailleurs l’état de lieux d’entrée révèle que le logement était déjà, pour partie, dans un état moyen.
Dès lors après analyse des éléments du dossier, il est indiqué que la demande d’indemnisation ne peut être retenue qu’à hauteur de 2 000€ pour les dégradations locatives.
En conséquence, il y a lieu de condamner la société FONCIA [Localité 5] à payer la somme de 2 000€.
Récapitulatif des sommes dues au titre du préjudice financier subi :
– loyers et charges impayés : 5142,11€,
– indemnisation au titre des dégradations locatives : 2 000€.
Par conséquent, il s’ensuit que la société FONCIA [Localité 5] sera condamnée à verser la somme globale de 7 142,11€ (5142,11+2000) à Madame [W] [U]. Cette somme portera intérêts à compter de la mise en demeure du 20 décembre 2021.
En vertu de l’article 1343-2 du code civil, il convient de prononcer la capitalisation des intérêts.
3 – Sur la demande reconventionnelle de la société FONCIA [Localité 5] :
Dans le cas présent, il ressort des conclusions de la société FONCIA que celle-ci demande le remboursement de frais engagés pour le compte de Madame [W] [U]. Il est constaté après examen du dossier, sur les 1 835,07€ réclamés, la société FONCIA [Localité 5] a réussi à apporter la preuve des dépenses suivantes :
Sur le remboursement du loyer d’août 2019 pour un montant de 436,25€ : Il ressort du relevé de compte de gestion établi par la société FONCIA du 22 mars 2021 que Madame [W] [U] est redevable de la somme de 436,25€. Ce montant correspond au loyer d’août 2019 que la locataire n’avait pas payé à l’agence immobilière. Cependant, les relevés bancaires de Madame [W] [U] montrent que la somme de 474,39 a été créditée le 9 août 2019.
En conséquence, Madame [W] [U] sera condamnée à payer à la société FONCIA la somme de 436,25€.
Sur les frais de serrurier pour un montant de 216,48€: Il ressort de la facture n°F/203231, émise par la SARL ALLO DEPANN HEURE que le montant de 216,48€ est dû pour des travaux de serrurerie réalisés dans l’appartement de Madame [W] [U].
Bien que Madame [W] [U] conteste la nécessité de ces travaux, elle n’a fourni aucun élément de preuve pour étayer cette position.
En conséquence, Madame [W] [U] sera tenue de payer la somme de 216,48€.
Sur les dépenses de diagnostics pour un montant global de 74€ : Il ressort des deux factures n°F3186378 et F3186622, un montant total de 74€ correspondant aux frais de diagnostics engagés pour le compte de Madame [W] [U] par la société CONSTATIMMO.
Bien que Madame [W] [U] conteste ces factures, il est établi que les travaux de diagnostic ont été réalisés en vue d’une future location de son bien immobilier. Il convient de rappeler que Madame [W] [U] n’a mis fin au mandat de gestion que le 14 avril 2021, ce qui signifie que, jusqu’à cette date, les dépenses engagées par l’agence étaient légitimes et nécessaires dans le cadre de la gestion locative.
Par conséquent, Madame [W] [U] sera condamnée à verser la somme de 74€.
Sur les frais d’huissier de justice pour un montant de 738,59€: Il ressort des factures n°75047 et n°75287 un montant total de 738,59€ correspondant aux frais d’huissier, incluant notamment la sommation interpellative, la saisie conservatoire et procès-verbal de constat. Après examen du dossier, il est clairement établi que ces démarches étaient indispensables pour permettre à Madame [W] [U] de récupérer son logement de manière sécurisée et certaine.
En conséquence, il y a de condamner Madame [W] [U] à payer la somme de 738,59€.
Sur les honoraires de gestion FONCIA pour un montant de 369,75€: Après analyse du dossier, il apparaît qu’aucune des pièces fournies ne permet de justifier le montant de 369,75€ réclamé au titre des honoraires de gestion.
En l’absence de preuve suffisante pour établir cette créance, la demande de paiement de ces frais sera rejetée.
Par conséquent, au vu des éléments précités, il y a lieu de condamner Madame [W] [U] à payer à la société FONCIA la somme totale de 1 465,32€.
4 – Sur les demandes accessoires :
4.1 – Les dépens :
L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, il y a lieu de condamner la société FONCIA [Localité 5] aux dépens.
4.2 – Les frais irrépétibles non compris dans les dépens :
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991.
Au cas présent, il convient de condamner la société FONCIA [Localité 5] à indemniser Madame [W] [U] à hauteur de 800€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
4.3 – L’exécution provisoire :
Il convient de rappeler que la présente instance est soumise aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile aux termes duquel les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire.
En l’espèce, il convient de prononcer l’exécution provisoire.
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