Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Thématique : Expertise judiciaire ordonnée pour évaluer des désordres techniques dans une copropriété.
→ RésuméUn couple résidant dans un immeuble en copropriété a assigné une société de construction, ainsi qu’une société d’agencement et son assureur, devant le Tribunal Judiciaire de Bordeaux. Le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, a demandé la désignation d’un expert pour évaluer des désordres liés à un portail récemment modifié par la société de construction, sans autorisation préalable de l’assemblée des copropriétaires. Les demandeurs soutiennent que ce portail présente des dysfonctionnements entraînant bruit et vibrations, malgré des réparations effectuées.
Lors de l’audience, les demandeurs ont maintenu leurs demandes, arguant que l’expertise en cours ne les concernait pas directement et que des éléments cruciaux avaient été omis par l’expert déjà désigné. Ils ont également souligné que les désordres affectaient spécifiquement leur usage du portail, justifiant ainsi leur demande d’expertise distincte. En réponse, la société de construction a demandé le rejet des demandes, affirmant que les demandeurs n’avaient pas d’intérêt légitime à solliciter une expertise, étant donné qu’une autre était déjà en cours. Le tribunal a statué en faveur des demandeurs, considérant que leur demande d’expertise était fondée sur un motif légitime, étant donné la nature technique des désordres. Il a ordonné la réalisation d’une expertise pour déterminer l’origine des problèmes et les responsabilités des différents intervenants dans la construction. Les frais de l’expertise ont été laissés à la charge des demandeurs, sauf à les inclure dans un éventuel préjudice global. La société de construction a été déboutée de sa demande de mise hors de cause, et les défendeurs ont été contraints de produire leurs attestations d’assurance. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE [Localité 15]
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
74Z
Minute
N° RG 24/02101 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZMM5
5 copies
EXPERTISE
GROSSE délivrée
le 14/04/2025
à la SELARL HEXA
l’AARPI RIVIERE – DE KERLAND
COPIE délivrée
le 14/04/2025
à
2 copies au service expertise
Rendue le QUATORZE AVRIL DEUX MIL VINGT CINQ
Après débats à l’audience publique du 10 Mars 2025,
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Par Jacqueline DESCOUT, Vice-Présidente au tribunal judiciaire de BORDEAUX, assistée de Céline GABORIAU, Greffier.
DEMANDEURS
Le Syndicat COPROPIETE DU [Adresse 7] pris en la personne de son Syndic en exercice, Monsieur [U] [O], demeurant:
[Adresse 4]
[Localité 9],
habilité à agir en justice selon procès-verbal d’assemblée générale en date du 12 octobre 2023
Monsieur [U] [O]
né le 24 décembre 1952 à [Localité 20]
[Adresse 4]
[Localité 9]
Madame [M] [Z], épouse [O]
née le 19 décembre 1951 à [Localité 17]
[Adresse 4]
[Localité 9]
Tous représentés par Maître Hervé DESPUJOL de la SELARL HEXA, avocats au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSES
La Société LEYTEIRE
société civile de construction vente dont le siège social est :
[Adresse 12]
[Localité 13]
Prise en la personne de son(ses) représentant(s) légal(aux) domicilié(s) en cette qualité au dit siège
Représentée par Maître Vianney LE COQ DE KERLAND de l’AARPI RIVIERE – DE KERLAND, avocats au barreau de BORDEAUX
La société AGENCEMENT TECHNIQUES ETUDES COMMERCIALES (ATEC)
société à responsabilité limitée dont le siège social est :
[Adresse 2]
[Localité 10]
prise en la personne de son gérant
Défaillante
La société MAAF ASSURANCES SA
société anonyme dont le siège social est :
[Adresse 16]
[Localité 14]
Prise en la personne de son(ses) représentant(s) légal(aux) domicilié(s) en cette qualité au dit siège
Défaillante
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur et Madame [O] demeurent [Adresse 5] ([Adresse 8]).
L’appartement dans lequel ils résident est un immeuble en copropriété dont le syndicat des copropriétaires est celui du [Adresse 6], représenté par Monsieur [O] en sa qualité de syndic.
La société LEYTEIRE est un copropriétaire des immeubles si [Adresse 6] à [Localité 15]. Cette dernière a réalisé un programme immobilier à l’arrière des bâtiments de la copropriété précitée, lequel est desservi par une servitude de passage traversant la copropriété depuis la [Adresse 19]. L’entrée sur la [Adresse 19] est fermée par un portail électrique.
Par actes des 26 et 31 juillet et 06 septembre 2024, le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] ont fait assigner la société LEYTEIRE, la SARL AGENCEMENT TECHNIQUES ETUDE COMMERCIALES (ATEC) et la MAAF ASSURANCES SA en qualité d’assureur de la société ATEC devant le Juge des Référés du Tribunal Judiciaire de Bordeaux afin de voir désigner un expert au visa de l’article 145 du Code de procédure civile et condamner la société LEYTEIRE à verser à Madame [M] [O], à Monsieur [U] [O] et au syndicat des COPROPRIETE DU [Adresse 7] la somme de 2.500,00€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l’instance.
L’affaire a été appelée à l’audience du 10 mars 2025, au cours de laquelle les demandeurs ont maintenu leurs demandes.
Ils exposent au soutien de leurs prétentions que la société LEYTEIRE a pris l’initiative, sans l’autorisation de l’assemblée des copropriétaires, de changer le portail de la copropriété donnant sur la [Adresse 19], lequel connaît depuis une série de dysfonctionnements qui entraîne un bruit et des vibrations à chacune de ses utilisations. Ils précisent que ces désordres persistent malgré les travaux de réparation. En réponse aux écritures adverses, ils indiquent qu’il importe peu qu’un expert judiciaire soit déjà saisi des désordres affectant le portail dès lors que les demandeurs n’y sont pas partie, qu’ils n’avaient, au moment des échanges avec la société LEYTEIRE, pas connaissance de l’ampleur exacte de l’expertise ordonnée lui permettant de s’y joindre et qu’en outre, l’expert judiciaire a éludé des éléments importants lors de son étude des désordres affectant le portail. Ils ajoutent enfin que l’expertise en cours concerne l’ensemble du bâtiment construit par la SCCV LEYTEIRE et qu’il serait inéquitable de faire subir aux demandeurs les complexités et la durée d’une telle expertise alors qu’ils ne sont concernés que par un désordres moins important.
La SCCV LEYTEIRE a sollicité le rejet des demandes formées par le SDC et les époux [O] ainsi que leur condamnation à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance.
Elle expose au soutien de ses prétentions que les demandeurs ne rapportent pas l’existence d’un intérêt légitime à voir ordonner une expertise judiciaire alors qu’un expert est déjà saisi du désordre relatif au portail.
Bien que régulièrement assignées, la SARL AGENCEMENT TECHNIQUES ETUDE COMMERCIALES et la SA MAAF ASSURANCES SA en qualité d’assureur de la SARL ATEC n’ont pas constitué avocat.
Il y a dès lors lieu de statuer par décision réputée contradictoire.
Évoquée à l’audience du 10 mars 2025, l’affaire a été mise en délibéré au 14 avril 2025.
PAR CES MOTIFS
Le Juge des Référés du Tribunal Judiciaire de Bordeaux, statuant publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe, réputée contradictoire, en premier ressort,
Vu l’article 145 du Code de procédure civile,
ORDONNE une mesure d’expertise, tous droits et moyens des parties réservés, et commet pour y procéder :
Monsieur [V] [N]
[Adresse 3]
[Localité 11]
Tél : [XXXXXXXX01]
[Courriel 18]
DIT que l’expert répondra à la mission suivante :
– se rendre sur les lieux en présence des parties et de leurs conseils ou après les avoir dûment convoquées ; se faire communiquer, dans le délai qu’il estimera utile de fixer, tous documents et pièces qu’il jugera nécessaires à l’exercice de sa mission, et notamment l’assignation, ainsi que tous documents contractuels, techniques et administratifs se rapportant aux travaux de construction litigieux; visiter les lieux et les décrire ;
– déterminer la mission et le rôle effectif de chacun des intervenants à la construction ;
– préciser le cas échéant, la date de début effectif des travaux, si un procès-verbal de réception a été établi, et dans la négative fournir à la juridiction les éléments propres à caractériser une réception tacite ou à déterminer à quelle date l’ouvrage était réceptionnable ;
– vérifier si les désordres allégués dans la liste visée dans l’assignation, les conclusions ultérieures, les constats ou expertises amiables auxquelles elles se réfèrent, existent et dans ce cas, les décrire en indiquant leur nature et la date de leur apparition ; préciser l’importance de ces désordres, en indiquant ce qui relève respectivement des malfaçons ou des travaux inachevés, indiquer les parties de l’ouvrage qu’ils affectent, en spécifiant tous éléments techniques permettant d’apprécier s’il s’agit d’éléments constitutifs ou d’éléments d’équipement faisant corps ou non, de manière indissociable avec des ouvrages de viabilité, de fondations, d’ossature, de clos ou de couvert ;
– dire si les désordres étaient apparents ou non, lors de la réception ou de la prise de possession, pour un profane,dans le cas où ces désordres auraient été cachés, rechercher leur date d’apparition ;
– dire si ces désordres apparents ont fait l’objet de réserves, si des reprises ont été effectuées, leur nature, leur date et leur utilité ou leur inefficacité pour remédier aux réserves et indiquer si les réserves ont été levées ;
– pour chaque désordre, dire s’il affecte un élément du gros oeuvre ou un élément d’équipement indissociablement lié au gros oeuvre ; préciser si le désordre est de nature à rendre l’immeuble, actuellement ou à terme certain, impropre à son usage ou à compromettre sa solidité, et préciser en quoi ;
– rechercher la cause des désordres en précisant, pour chacun des désordres, malfaçons ou non conformité, s’il y a eu vice du matériau, malfaçons dans l’exécution, vice de conception, défaut ou insuffisance dans la direction ou le contrôle ou la surveillance du chantier, défaut d’entretien ou de tout autre cause, ou préciser en quoi les travaux réalisés ne sont pas conformes aux prescriptions contractuelles ou aux termes du marché ;
– donner tous éléments techniques et de fait permettant au juge de déterminer les responsabilités éventuelles encourues par les différents intervenants et, le cas échéant, déterminer, en précisant les motifs techniques présidant à son appréciation, qui a eu un rôle prépondérant, secondaire ou mineur ;
– en cas de travaux supplémentaires et réceptionnés non prévus au devis et n’ayant pas fait l’objet d’un avenant, rechercher les circonstances dans lesquelles les travaux ont été décidés et réalisés ;
– donner son avis sur les travaux propres à remédier aux désordres constatés, en évaluer le coût hors-taxes et TTC, et la durée, désordre par désordre, à partir des devis que les parties seront invitées à produire, chiffrer le coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres, en préciser la durée, et préciser leur incidence sur la jouissance de l’immeuble;
– donner son avis, en cas d’urgence pour la sécurité des personnes ou la préservation des biens, sur les mesures nécessaires pour remédier au péril ; cet avis sera donné dans une note préalable au rapport d’expertise et communiqué immédiatement et par tous moyens aux parties ;
– donner au juge tous éléments techniques et de fait de nature à lui permettre de déterminer la nature et l’importance des préjudices subis par le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] et proposer une base d’évaluation;
– constater l’éventuelle conciliation des parties sans manquer dans ce cas d’en aviser le Magistrat chargé du Contrôle des Expertises;
– établir une note de synthèse et la communiquer aux parties et les inviter à formuler leurs dires et observations récapitulatifs dans un délai de deux mois pour ce faire, et répondre aux dires et observations formulés dans ce délai;
DIT que l’Expert judicaire devra procéder à l’établissement à l’issue de la première réunion d’expertise, d’une note faisant état de l’identité des tiers à la procédure, susceptibles d’être concernés par les doléances émises par le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] et dont la mise en cause apparait ainsi opportune ;
DIT que l’expert judiciaire devra notamment recueillir l’identité des assureurs de responsabilité l’ensemble des intervenants à l’acte de construire concernés par ces doléances, d’une part au moment de l’ouverture de chantier, et d’autre part au moment où une réclamation a été formée à leur encontre au titre de ces doléances ; que l’expert judiciaire devra également recueillir l’identité des assureurs de responsabilité des intervenants à l’acte de construire mis en cause au cours des opérations d’expertise, ce dès l’établissement de la première note d’expertise suivant cette mise en cause ;
AUTORISE le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] à effectuer, à leurs frais avancés, les mesures conservatoires utiles et nécessaires préconisées par l’ expert judiciaire
DIT qu’au stade du pré-rapport, l’intégralité des chefs de mission doit avoir été traitée par l’expert judiciaire, dont la problématique des imputabilités
RAPPELLE QUE, en application de l’article 276 du Code de procédure civile, les observations et dires précédents dont les termes ne seraient pas sommairement repris dans les dires récapitulatifs, seront réputés abandonnés par les parties,
INVITE l’expert à signaler aux parties dans le délai de deux mois à compter de la première réunion d’expertise, les intervenants à la construction dont la présence aux opérations lui semblerait utile, lesquels devront fournir au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] les coordonnées de leurs assureurs lors de la DROC et lors de l’assignation,
DIT que l’expert ne pourra recueillir l’avis d’un autre technicien que dans une spécialité distincte de la sienne, et qu’il pourra recueillir des informations orales ou écrites de toutes personnes, sauf à ce que soient précisés leur nom, prénom, adresse, et profession ainsi que, s’il y a lieu, leur lien de parenté ou d’alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d’intérêt avec elles,
FIXE à la somme de 4.000 € la provision que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] devront consigner par virement sur le compte de la Régie du Tribunal Judiciaire de Bordeaux avec la mention du numéro PORTALIS située en haut à gauche sur la première page de l’ordonnance de référé dans le délai de 2 mois, faute de quoi l’expertise pourra être déclarée caduque,et ce à moins que ces parties ne soient dispensées du versement d’une consignation par application de la loi sur l’aide juridictionnelle, auquel cas les frais seront avancés par le Trésor,
DIT que l’expert doit établir un devis prévisionnel, l’ajuster en tant que de besoin en fonction de l’évolution de l’expertise, et veiller à ce que la somme consignée corresponde toujours aux coûts prévisibles de l’expertise, au besoin en demandant des consignations complémentaires,
DIT que l’expert devra déposer son rapport en un seul exemplaire au greffe du Tribunal Judiciaire, dans le délai de 12 mois suivant la date de la consignation,
DEBOUTE la société LEYTEIRE de sa demande de mise hors de cause ;
DIT que les défendeurs devront produire auprès du le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur dans le mois de la présente ordonnance leurs attestations d’assurance en vigueur lors de la DROC et lors de l’assignation,
REJETTE toutes autres demandes
DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
DIT que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7], Monsieur [U] [O], Madame [M] [Z], épouse [O] conserveront provisoirement les frais de la présente procédure, sauf à les inclure dans leur éventuel préjudice global.
La présente décision a été signée par Jacqueline DESCOUT, Vice-Présidente, et par Céline GABORIAU, Greffier.
Le Greffier, Le Président,
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