Transfert de contrat de travailL’article L. 1224-1 du Code du travail stipule que, lors d’une modification de la situation juridique de l’employeur, tous les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. Ce transfert est applicable uniquement si l’entité économique transférée est autonome, constituée d’un ensemble organisé de personnes et d’éléments poursuivant un objectif économique propre. Le transfert d’un contrat de travail peut être fondé sur des dispositions légales ou sur une convention entre les parties. En l’espèce, la convention de transfert signée entre la SN HÔTEL [6] et la société GSE a été acceptée par le salarié, ce qui a entraîné la cessation de toute relation contractuelle entre lui et la SN HÔTEL [6]. Prêt de main-d’œuvre illiciteL’article L. 8241-1 du Code du travail interdit toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre. Pour qu’une opération soit considérée comme licite, il est nécessaire que l’entreprise prêteuse ne facture que les salaires versés aux salariés, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés. La licéité d’un contrat de sous-traitance exige que la tâche exécutée soit définie, rémunérée de manière forfaitaire, et que la main-d’œuvre mise à disposition apporte un savoir-faire spécifique, distinct de celui des salariés de l’entreprise utilisatrice. En l’espèce, la société GSF JUPITER devait apporter un savoir-faire spécifique en matière de nettoyage, ce qui a été établi par le contrat de prestations de services. MarchandageL’article L. 8231-1 du Code du travail définit le marchandage comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’œuvre qui cause un préjudice au salarié ou élude l’application de dispositions légales ou conventionnelles. Pour établir un délit de marchandage, il est nécessaire de prouver que l’externalisation a eu pour but d’éluder des dispositions légales ou de causer un préjudice au salarié. En l’espèce, le salarié n’a pas démontré que la SN HÔTEL [6] avait pour intention d’éluder des règles favorables en externalisant ses activités, ni qu’il avait subi un préjudice en raison de cette externalisation. Travail dissimuléL’article L. 8221-5 du Code du travail définit le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié comme le fait pour un employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement des formalités relatives à l’embauche, à la délivrance d’un bulletin de paie, ou aux déclarations de salaires et cotisations sociales. Pour qu’un travail soit considéré comme dissimulé, il faut établir l’existence d’un lien de subordination entre le salarié et l’employeur. En l’espèce, le salarié n’a pas prouvé que ce lien de subordination avait perduré après le transfert de son contrat de travail, ce qui exclut la qualification de travail dissimulé. |
L’Essentiel : L’article L. 1224-1 du Code du travail stipule que, lors d’une modification de la situation juridique de l’employeur, tous les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. Ce transfert est applicable uniquement si l’entité économique transférée est autonome. En l’espèce, la convention de transfert signée entre la SN HÔTEL et la société GSE a été acceptée par le salarié, entraînant la cessation de toute relation contractuelle entre lui et la SN HÔTEL.
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Résumé de l’affaire : Un salarié, engagé par la société Nouvelle HÔTEL [6] en 2004, a vu son contrat de travail transféré à la société Générale Service Europe (GSE) en 2011, suite à une restructuration. Ce transfert a été suivi de plusieurs changements d’employeur, le salarié étant affecté à différentes sociétés de nettoyage jusqu’à la fermeture de l’hôtel en 2018. Une rupture conventionnelle a été homologuée en janvier 2019, après quoi le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Nice, alléguant un délit de marchandage et un prêt de main-d’œuvre illicite, demandant des dommages-intérêts.
Le conseil de prud’hommes a débouté le salarié de toutes ses demandes en octobre 2021, décision qu’il a contestée en appel. Dans ses écritures, le salarié a demandé la reformation du jugement, réclamant des sommes importantes pour divers préjudices, y compris des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des dommages-intérêts pour travail dissimulé. La société Nouvelle HÔTEL [6], en réponse, a demandé la confirmation du jugement initial, arguant que le prêt de main-d’œuvre était licite et que le salarié n’avait pas de lien de subordination avec elle après le transfert de son contrat. Elle a également soutenu que le salarié ne pouvait pas prouver l’existence d’un contrat de travail avec elle. La cour a examiné la recevabilité de l’appel et a confirmé que le salarié avait un intérêt à agir. Elle a ensuite analysé les éléments constitutifs du prêt de main-d’œuvre illicite et du marchandage, concluant que la société Nouvelle HÔTEL [6] n’avait pas commis de délit et que le transfert de contrat était valide. En conséquence, le salarié a été débouté de toutes ses demandes, et le jugement initial a été confirmé. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique du transfert de contrat de travail dans cette affaire ?Le transfert de contrat de travail est régi par l’article L. 1224-1 du Code du travail, qui stipule que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation de fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. » Cet article s’applique uniquement en cas de transfert d’une entité économique autonome, constituée d’un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre. Dans le cas présent, le contrat de travail de l’employé a été transféré à la société GSE, ce qui a été accepté par l’employé, qui a signé la convention de transfert. Cette convention stipule qu’aucune relation contractuelle ne perdure entre la société SN HÔTEL [6] et l’employé après la signature. Quel est le cadre légal concernant le prêt de main-d’œuvre illicite ?L’article L. 8241-1 du Code du travail précise que « toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d’œuvre est interdit. » Cet article énonce également que ces dispositions ne s’appliquent pas à diverses opérations, notamment le travail temporaire et la mise à disposition de salariés auprès d’organisations syndicales. Pour qu’un contrat de sous-traitance soit licite, il doit porter sur l’exécution d’une tâche définie, rémunérée de manière forfaitaire, et la main-d’œuvre mise à disposition doit apporter un savoir-faire spécifique, distinct de celui des salariés de l’entreprise utilisatrice. Dans cette affaire, l’appelant soutient que le transfert de son contrat de travail à la société GSE constitue un prêt de main-d’œuvre illicite, car il n’y aurait pas eu de changement dans ses fonctions ou ses conditions de travail. Cependant, la société SN HÔTEL [6] argue que la convention de prestation de service est valide et que les sociétés prestataires ont apporté un savoir-faire spécifique. Quel est le critère déterminant pour établir un lien de subordination dans un contrat de travail ?Le lien de subordination est un élément essentiel du contrat de travail, défini par l’article L. 1221-1 du Code du travail, qui stipule que « le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération. » L’existence d’un lien de subordination se caractérise par le pouvoir de l’employeur de donner des ordres et des directives, de contrôler l’exécution du travail et de sanctionner les manquements. Dans cette affaire, l’employé prétend avoir continué à recevoir des directives de la société SN HÔTEL [6] après le transfert de son contrat, ce qui pourrait indiquer un lien de subordination. Cependant, la cour a constaté que les directives reçues s’inscrivaient dans le cadre du contrôle de la qualité de la prestation fournie par la société GSF, et non d’une relation de subordination directe entre l’employé et la société SN HÔTEL [6]. Quel est le cadre juridique du marchandage selon le Code du travail ?L’article L. 8231-1 du Code du travail définit le marchandage comme « toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’œuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail. » Dans cette affaire, l’employé soutient que le transfert de son contrat de travail à une société de nettoyage constitue un délit de marchandage, car il aurait perdu des avantages liés à son statut de salarié d’un hôtel de luxe. Toutefois, la société SN HÔTEL [6] conteste cette allégation, arguant que l’employé ne prouve pas que l’externalisation avait pour but d’éluder des dispositions légales ou conventionnelles. La cour a conclu que l’employé n’a pas établi que la société SN HÔTEL [6] avait agi dans le but d’éluder des règles favorables, et par conséquent, le délit de marchandage n’est pas constitué. Quel est le fondement des demandes d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ?L’article L. 1232-1 du Code du travail stipule que « tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. » Dans cette affaire, l’employé soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, car il n’a pas été engagé dans une procédure de licenciement à son encontre. Cependant, la cour a constaté que la relation contractuelle entre l’employé et la société SN HÔTEL [6] avait pris fin après le transfert de son contrat de travail en juillet 2011. Par conséquent, l’employé ne peut pas revendiquer des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, car il n’était plus lié par un contrat de travail avec la société SN HÔTEL [6] au moment de la fermeture de l’hôtel. Quel est le cadre juridique du travail dissimulé selon le Code du travail ?L’article L. 8221-5 du Code du travail définit le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié comme le fait pour un employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de formalités légales, telles que la déclaration préalable à l’embauche ou la délivrance d’un bulletin de paie. Dans cette affaire, l’employé prétend que la société SN HÔTEL [6] a dissimulé son emploi en ne rédigeant pas de contrat de travail, alors qu’il se trouvait sous sa subordination. Cependant, la cour a conclu qu’aucun lien de subordination n’a perduré après le transfert de son contrat de travail, et par conséquent, la société SN HÔTEL [6] ne peut être considérée comme l’employeur de l’employé. Ainsi, la demande de reconnaissance d’un travail dissimulé n’est pas fondée, car il n’existe pas de contrat de travail entre l’employé et la société SN HÔTEL [6] après le transfert de son contrat. |
Chambre 4-5
ARRÊT AU FOND
DU 20 MARS 2025
N°2025/
PA/KV
Rôle N° RG 21/14349 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIGQ3
[C] [F]
C/
S.A.S. SOCIETE NOUVELLE DE L’HOTEL [6]
Copie exécutoire délivrée
le : 20/03/25
à :
– Me Didier LODS, avocat au barreau de GRASSE
– Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 06 Septembre 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00235.
APPELANT
Monsieur [C] [F], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Didier LODS, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
S.A.S. SOCIETE NOUVELLE DE L’HOTEL [6], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE substitué par Me Pascale FRAISIER, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
Les avocats ayant été invités à l’appel des causes à demander à ce que l’affaire soit renvoyée à une audience collégiale s’ils n’acceptaient pas de plaider devant les magistrats rapporteurs et ayant renoncé à cette collégialité, l’affaire a été débattue le 23 Janvier 2025 en audience publique, devant Monsieur Philippe ASNARD, Président de chambre, et Madame Marie-Anne BLOCH, Conseiller.
Monsieur Philippe ASNARD, Président de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe ASNARD, Président de chambre
Madame Marie-Anne BLOCH, Conseiller
Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 mars 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 mars 2025.
Signé par Monsieur Philippe ASNARD, Président de chambre et Mme Karen VANNUCCI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [C] [F] a été engagé par la société nouvelle HÔTEL [6] (ci-après la SN HÔTEL [6]) à un poste, discuté par les parties, de manutentionnaire ou de chasseur bagagiste, à compter du 7 mai 2004, par contrat à durée déterminée. A compter du 1er octobre 2004, la relation contractuelle s’est poursuivie par contrat à durée indéterminée en qualité d’équipier polyvalent. La convention collective des hôtels cafés restaurant ( HCR) régissait la relation contractuelle.
Le 15 juin 2011, suite à la conclusion d’un contrat de sous-traitance entre la société GSE et la société nouvelle [6], entraînant la restructuration de l’activité de l’hôtel [6] et l’externalisation de l’activité d’équipier ou d’employé polyvalent et de chasseur bagagiste polyvalent, le contrat de travail de M. [F] a été transféré par la SN HÔTEL [6] à la société Générale Service Europe (GSE) qui exerce dans le domaine de la propreté. Dans ce cadre, il a été proposé au salarié d’occuper des fonctions de chasseur bagagiste polyvalent au sein de la société GSE.
Par la suite, le contrat de travail du salarié a été transféré à plusieurs reprises à des sociétés prestataires, au fur et à mesure de l’attribution du marché de nettoyage et d’entretien de l’hôtel : en 2013 à la société SER hôtel et, au mois de juillet 2017, à la société GSF Jupiter.
A compter du 5 novembre 2018, à la suite de la fermeture de l’hôtel [6] pour travaux, le salarié a été affecté par la société GSF Jupiter à l’hôtel [3] à [Localité 5].
Une rupture conventionnelle de son contrat de travail avec la société GSF Jupiter a été homologuée le 10 janvier 2019.
Le 19 mars 2019, M.[F] a saisi le conseil de prud’hommes de Nice aux fins de voir reconnaître que la SN hôtel [6] est l’auteur d’un délit de marchandage et d’un prêt de main d »uvre illicite, en sollicitant divers dommages intérêts pour obtenir réparation à ce titre.
Par jugement du 11 octobre 2021, le conseil de prud’hommes de Nice a débouté M.[F] de l’intégralité de ses demandes, débouté la SN hôtel [6] de ses demandes reconventionnelles et a condamné M.[F] aux dépens.
Par déclaration notifiée par RPVA en date du 15 novembre 2021, M.[F] a interjeté appel de ce jugement.
La clôture est intervenue le 25 avril 2024.
Dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 25 mars 2024, M.[F] demande de’:
REFORMER le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nice en date du 11 octobre 2021.
CONDAMNER la Société Nouvelle de l’Hôtel [6] à payer à Monsieur [C]
[C] [F] les sommes suivantes :
77.000 € au titre des conséquences du prêt de main d »uvre illicite et de la rupture du contrat;
– subsidiairement : 31 585 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En tout état de cause :
CONDAMNER la Société Nouvelle de l’Hôtel [6] à payer à Monsieur [C] [F] :
– 5 053,70 € au titre de l’indemnité de préavis ;
– 505,37 € au titre de l’indemnité de congés payés sur préavis,
– 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat,
– 12 889,08 € au titre de l’indemnité pour travail dissimulé.
CONDAMNER la Société Nouvelle de l’Hôtel [6] à communiquer ses comptes de résultat depuis l’année 2011, sous astreinte de 200 € par jour à compter de la décision à intervenir ;
À défaut, LA CONDAMNER à payer à Monsieur [C] [F] une somme de
10 000 € à titre de dommages-intérêts.
CONDAMNER la Société Nouvelle de l’Hôtel [6] à payer à Monsieur [C] [F] une somme de 5.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
ainsi qu’aux entiers dépens.
La société nouvelle HÔTEL [6], intimée, demande dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 17 mars 2022, de’:
CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Nice en date du 6 septembre 2021 en toutes ses dispositions.
JUGER que le prêt de main d »uvre issu de la convention de prestation de services entre la société SN de l’Hôtel [6] et la société GSF JUPITER est parfaitement licite ;
JUGER non constitués les prétendus délits de prêt de main d »uvre illicite et de marchandage;
JUGER légitime le licenciement pour motif économique notifié à Monsieur [F] ;
JUGER qu’aucun contrat de travail n’existe entre Monsieur [F] et la société SN de l’Hôtel [6], à défaut de la démonstration d’un lien de subordination et qu’en l’état de sa relation salariale établie avec la société GSF JUPITER, il n’a pas qualité à agir ;
En conséquence,
DECLARER irrecevables les demandes de Monsieur[F] visant à la requalification de son contrat de travail, pour défaut de qualité à agir,
DECLARER irrecevable la nouvelle demande formulée en première instance par Monsieur [F] pour dommages et intérêts à titre de travail dissimulé,
DECLARER irrecevables les nouvelles demandes formulées en cause d’appel par Monsieur [F] au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l’indemnité de préavis et des congés sur préavis;
DEBOUTER Monsieur[F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
CONDAMNER Monsieur[F] à la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère conformément à l’article 455 du code de procédure civile à la décision entreprise et aux dernières écritures de l’appelant et de l’intimée.
sur la recevabilité de l’appel
Aucun des éléments soumis à l’appréciation de la cour ne permet de critiquer la recevabilité de l’appel par ailleurs non contestée. Il sera donc déclaré recevable.
Sur l’étendue de la saisine de la cour
L’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile énonce que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.Il en résulte que la cour n’a pas à répondre aux moyens qui ne sont pas soulevés dans la partie discussion des écritures des parties.
Il est rappelé que les demandes de juger ne sont pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile en ce qu’elles créent aucun droit au profit de celui qui s’en prévaut. En conséquence, il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes de ‘juger’ de la SN [6] qui sont en réalité des moyens.
Sur les fins de non recevoir soulevées par SN [6]
sur l’irrecevabilité de la demande de Monsieur [F] ‘visant à la requalification de son contrat de travail’, pour défaut de qualité à agir
La société SN [6] soutient, pour la première fois en cause d’appel, qu’en l’absence de contrat de travail entre Monsieur [F] et la SN de l’Hôtel [6], les demandes de Monsieur [F] à son encontre sont irrecevables pour défaut de qualité à agir.
L’article 122 dispose que « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »
La recevabilité de la fin de non recevoir soulevée par l’intimée en cause d’appel n’est ni contestée ni contestable en vertu de l’article 123 du même code.
L’article 31 du même code précise que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, et l’article 32 énonce qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.
L’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l’action.
Or, les moyens d’irrecevabilité soulevés par la SN [6] sont en réalité des moyens et défenses au fond, qui tendent à contester l’absence des éléments constitutifs du contrat de travail allégué et notamment l’existence d’un lien de subordination entre M.[F] et l’intimée.
Dans la mesure où Monsieur [F] invoque l’existence d’un contrat de travail le liant à la SN [6] et où il se prévaut d’un certain nombre d’éléments établissant, selon lui, l’existence d’un tel contrat, qui conditionne le succès de ses prétentions et va à l’appui de celles-ci, son intérêt à agir, qui découle de sa volonté de faire valoir ses droits résultant de ce contrat de travail allégué, n’est pas lié à l’appréciation préalable de l’existence du dit contrat qui relève seulement du fond dont il sera question plus loin.
Son intérêt ainsi que sa qualité à agir ainsi devant la juridiction prud’hommale est donc direct et personnel.
En conséquence, la fin de non recevoir à ce titre est rejetée.
Sur les fins de non recevoir soulevées en raison du caractère nouveau des demandes
sur la recevabilité des demande de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et d’indemnité de préavis et des congés sur préavis
En application de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Selon l’article 565 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. Il en résulte que la demande subsidiaire de dommages intérêts de M. [F] pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, qui n’avait pas été formée en première instance, n’est pas une demande nouvelle en ce qu’elle tend à la réparation, comme la demande de réintégration formée devant le premier juge, des conséquences de son licenciement qu’il estime injustifié, en sorte que ces demandes de réintégration et de dommages et intérêts tendent aux mêmes fins. La demande de dommages intérêts est donc recevable. Il en est de même des demandes d’indemnités de préavis et de congés payés sur préavis.
Sur la recevabilité de la demande au titre du travail dissimulé
Cette demande est présentée dans le dispositif des écritures de l’intimée comme une nouvelle demande.
Elle doit donc être examinée comme telle, la cour étant saisie uniquement des demandes formulées dans le dispositif des écritures.
Devant le premier juge, M. [F] avait déjà formé une demande d’indemnité pour travail dissimulé. Cette demande, qui n’est pas nouvelle contrairement à ce qu’allègue l’intimée, est donc recevable.
Sur le transfert du contrat de travail de M.[F] de la société SN HÔTEL [6] à la société GÉNÉRALE SERVICE EUROPE (GSE)
L’article L. 1224-1 du code du travail dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation de fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise.
Il est constant que cet article ne s’applique qu’en cas de transfert d’une entité économique autonome, constituée d’un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre.
Le transfert d’un contrat de travail d’un employeur à un autre peut être fondé soit sur les dispositions légales précitées, soit sur une convention souscrite entre les parties.
En l’espèce, il résulte de la convention de transfert produites au débat conclue entre SN [6] et la société GSE que les parties à ladite convention ont procédé au transfert de l’activité exercée par le salarié et de son contrat de travail de chasseur bagagiste polyvalent le liant à l’hôtel au sein de la société GSE et ont fait une application volontaire de l’article L. 1224-1 du code du travail précité. Ce transfert de son contrat et de son activité a été accepté expressément par M.[F] qui a signé la convention, laquelle mentionne en outre qu’après sa signature aucune relation contractuelle ne perdure entre la société NOUVELLE [6] et le salarié.
S’agissant des transferts successifs du contrat de travail du salarié, qui travaillait en dernier lieu au sein de la société GSF, ceux-ci ne sont pas discutés.
sur le prêt illicite de main d »uvre
L’appelant soutient que’:
– la SN HÔTEL [6] a réalisé une opération de prêt de main d »uvre illicite en transférant son contrat de travail à la société GSE sans changer ses fonctions occupées au sein de l’hôtel ni ses conditions de travail. Cette opération a ainsi uniquement consisté en une mise à disposition de personnel,
– la société GSE a seulement repris une activité précédemment exercée par la SN HÔTEL [6] qui en maîtrisait la technicité,
– la société GSE et les autres sociétés qui lui ont succédé n’ont apporté aucun savoir-faire spécifique et distinct de celui de l’entreprise utilisatrice puisque le personnel mis à disposition exerçait les postes de bagagistes chasseur ou d’équipier polyvalent qui ne correspondent pas à l’activité de nettoyage des sociétés prestataires. En outre, il effectuait diverses tâches qui ne relevaient pas de l’activité d’une entreprise de propreté, tel que la gestion de la bagagerie.
L’intimée réplique que :
– le salarié ne démontre pas que les éléments cumulatifs du prêt de main d »uvre illicite sont réunis, à savoir le but exclusif et le caractère lucratif du prêt de main d »uvre,
– la convention de prestation de service conclue entre la SN HÔTEL [6] et les sociétés prestataires qui ont engagé M.[F] sont valides puisqu’il s’agit de la sous-traitance du marché de l’entretien de l’hôtel. Le contrat de travail de M.[F], affecté à ce marché, à ainsi été transféré à chaque changement d’entreprise titulaire du marché,
– la prestation effectuée par la société GSF Jupiter est conforme, en ce qu’il lui a été confié une tâche précisément définie d’entretien des locaux, distincte de l’activité hôtelière de la SN HÔTEL [6] et qu’elle justifie d’un savoir-faire spécifique en sa qualité d’entreprise spécialisée dans l’hygiène, la propreté et les services associés,
– contrairement à ce que prétend le salarié, l’activité externalisée n’était pas celle d’équipier polyvalent ou de bagagiste mais les postes d’agent de service ou de chef d’équipe, en charge de l’entretien de l’hôtel, ce qui correspond à l’activité spécifique des sociétés prestataires,
– l’autorité hiérarchique était exercée par le prestataire même lorsque les salariés se trouvaient dans les locaux de l’hôtel, les salariés de la SN HÔTEL [6] jouant uniquement un rôle d’intermédiaire, le matériel nécessaire à l’exécution de la prestation de travail était également fournit par le prestataire,
XXX
L’article L. 8241-1 du code du travail précise que toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d »uvre est interdit et que ces dispositions ne s’appliquent pas à diverses opérations, notamment le travail temporaire, le portage salarial, les agences de mannequins et la mise à disposition de salariés auprès d’organisation syndicale. Cet article précise en outre qu’une opération de prêt de main d »uvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés aux salariés, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition.
Pour que soit admise la licéité d’un contrat de sous-traitance comme celui passé entre SN [6] et notamment la société GSF, la convention passée doit porter sur l’exécution d’une tâche définie, rémunérée de manière forfaitaire, dans le cadre de laquelle la main-d »uvre, mise à disposition de l’entreprise utilisatrice, apporte à celle-ci un savoir-faire spécifique, distinct de celui des salariés de l’entreprise utilisatrice, et reste sous l’autorité et le contrôle de l’entreprise sous-traitante qui assure l’encadrement de son personnel.
En conséquence, pour que le contrat de sous-traitance entre les sociétés SN [6] et GSF JUPITER, sous-traitante et au sein de laquelle le contrat de M. [F] avait été transféré, soit licite et ne dissimule pas en réalité un prêt illicite de main d’oeuvre, il fallait que la société GSF JUPITER apporte à la SN HOTEL [6] un savoir faire distinct de celui des salariés de celle-ci et que M. [Y] exerce en outre son travail sous la subordination de la société GSF JUPITER.
Lorsque plusieurs critères relatifs à la licéité d’un tel contrat de sous-traitance sont discutés, les critères d’absence de transfert du lien de subordination et, en particulier, du pouvoir de direction sur le salarié mis à disposition et d’apport d’un savoir-faire particulier, ont un poids supérieur à celui des conditions financières pour que soit écarté le caractère illicite d’une mise à disposition et lorsqu’il n’est conservé qu’un seul critère, il s’agit de celui de l’absence de transfert du lien de subordination qui l’emporte sur tous les autres, y compris celui d’apport d’un savoir-faire particulier.
Selon sa fiche de poste d’employé polyvalent, tant au sein de l’hôtel [6] qu’au sein de GSE, M.[F] était notamment chargé de l’entretien et du nettoyage des lieux de travail du service hébergement, des salons, des couloirs et des parties communes de l’hôtel et il aidait les bagagistes en cas de besoin et pouvait les remplacer durant leurs congés.
S’agissant en premier lieu de l’apport d’un savoir faire spécifique par la société prestataire, il ressort de la convention de transfert du contrat de M.[F] et du contrat de prestations de services avec GSF JUPITER que la société SN [6] a choisi d’externaliser l’activité spécifique de nettoyage et des services polyvalents d’accueil en les confiant d’abord à la société GSE, puis à la société GSF JUPITER, dont il est constant et non contesté qu’il s’agit de sociétés spécialisées dans l’activité de nettoyage des hôtels de luxe et palaces. Aux termes du contrat de prestations de service conclu avec la société GSF cette dernière s’engage à fournir et exécuter les prestations de nettoyage des chambres et parties communes de l’hôtel [6] et à assurer des services polyvalents d’accueil, par un personnel qualifié, en fournissant les produits et le matériel nécessaires, ledit contrat précisant en page 6 que le prestataire assure en permanence sur le site la présence d’un personnel d’encadrement qui coordonne le travail avec la gouvernante, qu’il se charge du recrutement de son personnel disposant des autorisations de travail et qualifications nécessaires, ainsi que de manière générale, de toutes les obligations qui lui incombent et notamment celle de soumettre l’ensemble du personnel aux visites médicales obligatoires, d’assurer à son personnel, dans le cadre de la prestation de service, la protection prévue par les normes relatives à l’hygiène et à la sécurité et qu’il s’engage à remplacer le personnel faisant l’objet de plaintes du client. Il est en outre précisé que le prestataire s’engage à transférer sur un autre site tout personnel qui ne respecterait pas les dispositions du cahier des charges annexé.
Ce contrat précise en outre que tous les membres du personnel doivent effectuer leur travail selon les horaires convenus et quitter les locaux une fois leur travail terminé.
Il en résulte ainsi qu’est établi l’existence d’un savoir faire spécifique en matière notamment de nettoyage et de bagagerie, qui n’est pas le c’ur du métier de l’hôtellerie contrairement à ce que soutient l’appelant, qui est l’hébergement des clients, apporté par la société GSF JUPITER, par la mise à disposition à la SN [6] d’un personnel qualifié, dont M. [F], qu’elle encadrait et sur lequel elle exerçait toutes les prérogatives d’un employeur.
S’agissant en second lieu du contrat de travail de M.[F], il est rappelé qu’un tel contrat est la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération.
L’existence d’un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à la convention, mais des conditions de fait dans laquelle s’est exercée l’activité. Le contrat de travail se caractérise par l’existence d’un lien de subordination dont il résulte que l’activité est exercée sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives quant au lieu de travail, aux horaires de travail, au sein d’un service organisé, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements.
Dans la mesure où, comme vu ci-avant, la convention de transfert mentionne qu’après sa signature aucune relation contractuelle ne perdure entre la société NOUVELLE [6] et le salarié, il revient à M.[F] de rapporter la preuve que, nonobstant la dite convention, une relation de travail a perduré entre lui et la société SN [6] et que ce transfert est donc fictif.
Pour établir l’existence d’une telle relation contractuelle, M.[F] fait valoir qu’il se trouvait en réalité sous sa subordination de la SN [6] puisqu’il a continué à recevoir des directives des salariés de cette société malgré le transfert de son contrat de travail. Il était intégré à l’organisation de l’HÔTEL [6] dans la mesure où il devait suivre ses procédures sans intervention directe de la part de la société GSF Jupiter. Le matériel utilisé était également fourni par la SN HÔTEL [6].
Il affirme que« les instructions étaient toujours données par la directrice ou la gouvernante».
Il produit à cet égard un courriel du 11 octobre 2018 de Mme [H], directrice d’exploitation de la SN [6], adressé à «'[P] [W], bagagiste hôtel [6]’», faisant état de retours négatifs relatifs aux prestations du sous-traitant, critiquant les pauses prises et demandant de briefer l’équipe, des photos des salariés GSF Jupiter en tenues et badges [6], une photo d’un repas pris entre salariés GSF et [6], un courrier de l’inspection du travail en date du 24 octobre 2018 et une attestation délivrée le 28 mars 2018 par l’hôtel [6] à Monsieur [Y].
Cependant, aux termes du contrat de prestation de service conclu le 30 mai 2017 entre la SN [6] et GSF JUPITER, le prestataire sous-traitant était tenu d’un certain nombre d’obligations de nettoyage et d’assainissement et d’une obligation de résultat ( page 9). Les directives de la SN [6], en la personne de Mme [H], s’inscrivaient donc manifestement dans le cadre du contrôle de la qualité de la prestation fournie par la société GSF JUPITER, en sa qualité de sous-traitante .
A cet égard, comme le soutient l’intimée, l’ échange de mail précité rappelle uniquement la procédure à respecter dans le cadre de l’organisation de salons pour les séminaires des entreprises et il n’est pas établi, contrairement à ce qu’affirme l’appelant, que le mail dont s’agit a été adressé aux salariés de l’équipe, dont M.[F] et non, comme le fait valoir l’intimée, au chef d’équipe de la société GSF, dont il n’est pas discuté utilement qu’il faisait le lien entre l’équipe du prestataire et le client .
Le fait que certains salariés du prestataire aient arboré les badges de la SN [6], alors que les tenues et les badges étaient prévus dans le contrat de prestations de services et fournis par le prestataire, ou encore aient déjeuné avec des salariés de SN [6], alors que, comme soutenu par l’intimée, en application de l’article L8241-2 du code du travail les salariés mis à disposition ont accès aux installations et moyens de transport collectifs dont bénéficient les salariés de l’entreprise utilisatrice, n’est pas déterminant.
Il ne peut être vérifié que les plannings bagagistes du 20/08 au 26/08 produits aux débats par le salarié émanent de la société SN [6] et en outre étaient adressés au salarié concerné . En out état cause l’existence de tels plannings, à supposer même qu’ils soient établis par la SN [6] s’inscrivent de manière incontestable dans le cadre du contrôle, par la société utilisatrice, de l’exécution des obligations résultant du contrat de prestations conclu entre les deux sociétés et particulièrement de l’obligation de résultat à laquelle est tenue le sous-traitant.
Le courrier de l’inspection du travail adressé à Mme [H] en sa qualité de directrice d’exploitation fait état de ce que des salariés du personnel de l’entreprise de nettoyage, GSF, ont été embauchés par l’hôtel puis auraient été transférés à diverses sociétés sous-traitante, actuellement GSF, mais que leur lieu d’affectation a toujours été SN [6], qu’ils sont intégrés dans les équipes de l’hôtel et donc soumis à un lien de subordination à l’égard de SN [6]. Cependant l’inspection du travail n’a rien constaté par elle-même et se borne à rapporter les doléances de certains salariés et de leur avocat et il n’apparaît pas qu’une suite a été donnée à ce courrier par l’administration.
L’attestation du 28 mars 2018 de l’hôtel [4] concerne M. [Y]. Elle est donc sans rapport avec M. [F] et est donc sans utilité.
L’appelant fait encore état de l’identité des fiches de poste des équipiers polyvalents rédigées par GSE et rédigé par l’hôtel [6] et soutient que, dans les deux cas, l’équipier polyvalent est placé sous la hiérarchie de la Gouvernante. Pour autant, il résulte du contrat de prestations de services avec la société GSF que l’encadrement est assuré par la société GSF qui coordonne le travail avec la gouvernante de l’établissement. Le fait que la gouvernante coordonne le travail du salarié, dont l’encadrement reste assuré par la société prestataire, ne permet pas de retenir que la société GSF avait délégué ou transmis ses attributs d’employeur à la SN HOTEL [6] et, par suite, l’existence d’un lien de subordination entre l’hôtel client et le salarié et s’inscrit manifestement, là encore, au vu de ce qui précède, dans le cadre du contrôle, par le client, de la bonne exécution des obligations résultant du contrat de prestations conclu entre les deux sociétés concernées.
Il ressort ainsi du contrat de prestations, que la société prestataire exerçait sur ses salariés un pouvoir de direction et de contrôle. Le contrat entre la société GSF et M. [F] a été rompu par rupture conventionnelle et ce dernier ne conteste pas avoir sollicité de la société GSF la rupture conventionnelle de son contrat, lui reconnaissant par là même la qualité d’employeur.
L’ensemble de ces éléments permet de retenir un lien de subordination, tel que défini plus haut, entre le salarié et la société GSF, caractéristique essentielle du contrat de travail.
En revanche, aucune preuve suffisante d’un lien de subordination, ayant perduré après le transfert du contrat de travail du salarié, entre M.[F] et la société SN [6], n’est rapportée.
Il se déduit suffisamment de ce qui précède, sans qu’il y ait lieu de répondre aux autres arguments de l’appelant, que la convention de sous traitance entre la société SN LAZA et GSF JUPITER était licite mais qu’en revanche le prêt de main-d »uvre illicite allégué n’est pas établi.
M.[F] sera en conséquence débouté de ses demandes à ce titre, et le jugement confirmé de ce chef.
Sur les demandes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse
M.[F] soutient que la relation contractuelle ayant perduré, de fait, entre Monsieur[F] et l’hôtel [6], a pris fin lors de la fermeture pour travaux de l’hôtel et qu’il n’a pas été engagé de procédure de licenciement à son encontre.
Cependant, il résulte de ce qui précède que la relation contractuelle entre le salarié et l’intimée a pris fin après le transfert du contrat de travail de M.[F] en juillet 2011.
En conséquence, M.[F] sera débouté de sa demande à ce titre.
De même, il sera débouté en conséquence de ses demandes au titre de l’indemnité de préavis et de l’indemnité de congés payés sur préavis.
Sur le marchandage
M.[F] soutient que’:
– le prêt de main d »uvre illicite lui a causé un préjudice dans la mesure où il a perdu son statut de salarié d’un hôtel de luxe pour entrer dans une société de nettoyage,
– la SN HÔTEL [6] est l’auteur d’un délit de marchandage, puisque le transfert de son contrat de travail avait pour seul objet de conserver un effectif inférieur au seuil de 50 salariés afin d’éluder l’application des dispositions relatives aux entreprises de plus de 50 salariés,
– il justifie d’un préjudice, en ce qu’il a perdu le bénéfice des avantages de la SN HÔTEL [6], notamment un salaire plus élevé, ses indemnités repas et le bénéfice du licenciement économique engagé par cette société.
La société SN [6] objecte que’:
– aucun délit de marchandage n’est caractérisé dans la mesure où le contrat de prestation de service conclut ne s’analyse pas en un prêt de main d »uvre illicite et que M.[F] ne justifie d’aucun préjudice lié au prétendu prêt de main d »uvre, en particulier il ne peut prétendre avoir été privé des avantages de la SN HÔTEL [6] puisqu’il n’était plus salarié de cette société,
– il n’apporte aucun élément au soutien de son allégation selon laquelle l’externalisation aurait eu pour unique d’objet d’éluder les règles relatives aux entreprises de plus de 50 salariés.
XXX
Selon l’article L8231-1 du Code du Travail, constitue une opération de marchandage, prohibée par l’article L. 8231-1 du code du travail, toute opération à but lucratif de fourniture de main d »uvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail.
Il n’est pas davantage établi en l’espèce par M.[F] que la société SN [6], en externalisant la prestation de nettoyage en la confiant à d’autres sociétés dont GSE et en dernier lieu GSF, a voulu éluder l’application de dispositions légales ou conventionnelles plus favorables, lui causant ainsi un préjudice en le privant notamment des avantages auxquels il pouvait prétendre.
En effet, tout d’abord, si le salarié prétend que « par l’externalisation de l’activité d’équipier polyvalent et de chasseur-bagagiste, la SN de l’Hôtel [6] a souhaité conserver des effectifs en dessous du seuil de 50 salariés » et a ainsi éludé la mise en place de la participation des salariés aux résultats de l’entreprise, et également d’un comité d’entreprise, d’un CHSCT, il n’apporte aucune preuve des effectifs de ladite société à la date du transfert de son contrat de travail et, par conséquent, que la société SN [6] aurait dépassé le seuil de 50 salariés si elle n’avait pas opéré transfert du contrat de travail de M.[F], le privant ainsi des nombreux avantages attachés au dépassement du seuil de 50 salariés dont il fait état dans ses écritures.
A cet égard, s’il résulte de la lettre de la Direccte PACA à la SN de l’Hôtel [6], du 24
octobre 2018 et de l’arrêt de la cour de céans du 25 novembre 2021 produit aux débats qu’au 11 décembre 2018 l’effectif de la SN [6] était de 54 salariés, en comptabilisant les salariés mis à la disposition de celle-ci par la société GSF Jupiter en vertu du contrat de prestation de service du 30 mai 2017, soit 13 salariés, en y ajoutant ceux mentionnés sur le registre du personnel de la Société Nouvelle de l’Hôtel [6], soit quarante-trois salariés, il n’est apporté aucun élément permettant de connaitre les effectifs de la société intimée à la date du transfert du contrat de M.[F], soit en juillet 2011.
Au vu de l’arrêt précité de la cour de céans, il est constant que la SN HOTEL [6] n’a pas mis en place un PSE. Dès lors, même si le contrat de travail du salarié n’avait pas été transféré et s’il était resté dans les effectifs de SN [6], il n’aurait pas bénéficié d’un tel plan et ne peut donc se prévaloir d’un préjudice à ce titre.
Surtout, il n’est pas contesté comme le fait valoir la SN [6] que la société GSF JUPITER est une entreprise à dimension nationale comportant plus de 35600 collaborateurs répartis sur 126 établissements ayant enregistré sur l’année 2019 un chiffre d’affaires de 940 millions d’euros, de sorte qu’en étant intégré à cette entité, M.[F] bénéficiait nécessairement des avantages qu’il énumère dans ses écritures liés aux effectifs et notamment d’un PSE en cas de licenciement économique, dont il prétend avoir été privé par l’effet du transfert de son contrat de travail.
En outre, si le salarié avance une perte de salaires du fait du transfert de son contrat de travail, il se fonde sur le salaire de Monsieur [O], assistant gouvernant, embauché en 2007, lequel, s’il bénéficiait d’une ancienneté équivalente à la sienne, n’avait pas les mêmes fonctions que lui. Il n’en apporte donc aucune preuve.
Il n’est pas utilement contesté qu’en 2018 son salaire versé par la société GSF s’élevait à la somme de 2.019,18 €, soit une augmentation de 22% par rapport à son salaire au sein de la SN de l’Hôtel [6] en 2011, correspondant ainsi à une augmentation de salaire de plus de 3 % par an.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que, faute pour M.[F] d’apporter la preuve de son préjudice, résultant du transfert de son contrat de travail, la fictivité du dit transfert n’étant en outre pas établie, le délit de marchandage n’est pas constitué.
Par voie de confirmation du jugement déféré, M.[F] sera en conséquence débouté de sa demande à ce titre.
Il sera de même débouté de sa demande tendant à voir condamner la Société Nouvelle de l’Hôtel [6] à communiquer ses comptes de résultat depuis l’année 2011, sous astreinte de 200 € par jour à compter de la décision à intervenir et à défaut de dommages intérêts.
Sur la demande de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
Il ressort des développements précédents que la société SN [6] n’a pas exécuté de manière déloyale le contrat de travail de M.[F] en procédant à un transfert fictif de son contrat, en ayant recours à un prêt illicite de main d’oeuvre et en commettant le délit de marchandage, aucun contrat de travail n’existant plus en effet entre elle et le salarié à compter du transfert du contrat de ce dernier en juin 2011.
Dès lors, par confirmation du jugement déféré, M.[F] est débouté de sa demande à ce titre.
Sur le travail dissimulé
L’appelant fait valoir que:
– il est bien fondé à solliciter la reconnaissance d’un contrat de travail avec la SN HÔTEL [6]. Il se trouvait en réalité sous sa subordination puisqu’il a continué à recevoir des directives des salariés de cette société malgré le transfert de son contrat de travail. Il était intégré à l’organisation de l’HÔTEL [6] dans la mesure où il devait suivre ses procédures sans intervention directe de la part de la société GSF Jupiter. Le matériel utilisé était également fourni par la SN HÔTEL [6],
– dès lors que la SN HÔTEL [6] s’est comportée à son égard comme son employeur, tout en s’abstenant de rédiger un contrat de travail elle est l’auteur d’un travail dissimulé.
La société SN [6] rétorque que’:
– le salarié ne caractérise pas un lien de subordination qui aurait persisté avec la SN HÔTEL [6], il ne peut donc se prévaloir de l’existence d’un contrat de travail.
XXX
Il résulte des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur:
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’activité en application des dispositions de l’article L.8221
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