Recevabilité de l’opposition à l’injonction de payerL’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer est recevable lorsque celle-ci est formée dans les délais et selon les modalités prévues par le Code de procédure civile. En vertu de l’article 1426 du Code de procédure civile, l’opposition doit être formée dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance. La cour a confirmé la recevabilité de l’opposition de M. et Mme [K], considérant que celle-ci avait été régulièrement effectuée. Responsabilité décennale et réception des travauxLa responsabilité décennale de l’entrepreneur est engagée en cas de désordres affectant la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination, conformément à l’article 1792 du Code civil. La cour a constaté que les désordres affectant les menuiseries rendaient l’ouvrage impropre à sa destination, et a retenu que la réception tacite des travaux, bien que contestée, avait eu lieu en avril 2012, conformément à l’article 1792-6 du Code civil. Obligation de conseil de l’entrepreneurL’entrepreneur a une obligation de conseil renforcée lorsqu’il n’y a pas de maître d’œuvre, comme le stipule l’article 1147 du Code civil. En l’espèce, la société MCM a manqué à son obligation de conseil en ne fournissant pas des menuiseries adaptées aux conditions d’exposition du bâtiment, ce qui a contribué aux désordres constatés. Partage de responsabilitéLa cour a retenu que M. et Mme [K] avaient également contribué à la réalisation de leur préjudice, en raison de leur choix de ne pas recourir à un maître d’œuvre et de leur prise de risque dans la gestion du chantier. Cette contribution a été évaluée à 40 %, ce qui est en ligne avec la jurisprudence sur le partage de responsabilité en matière de construction. Préjudice matériel et préjudice de jouissanceLe préjudice matériel est évalué sur la base des travaux nécessaires pour remédier aux désordres, conformément à l’article 1149 du Code civil, qui prévoit que le débiteur est tenu de réparer le préjudice causé par l’inexécution de son obligation. La cour a fixé le montant du préjudice de jouissance à 14 400 €, tenant compte de la durée des désordres et de l’impropriété à destination des menuiseries. Intérêts et capitalisationLes intérêts dus sur les sommes condamnées sont calculés au taux légal à compter de la date de la signification de l’injonction de payer, conformément à l’article 1343 du Code civil. La cour a ordonné la capitalisation des intérêts par année entière, en application de l’article 1343-2 du même code, ce qui est une pratique courante en matière de condamnation pécuniaire. Condamnation aux dépensLa condamnation aux dépens est régie par l’article 699 du Code de procédure civile, qui prévoit que la partie perdante doit supporter les frais de la procédure. La cour a condamné la société MCM aux dépens, en raison de sa position de partie perdante dans le litige. |
L’Essentiel : L’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer est recevable si elle est formée dans le délai d’un mois suivant la signification. La cour a confirmé la recevabilité de l’opposition de M. et Mme [K]. La responsabilité décennale de l’entrepreneur est engagée en cas de désordres affectant la solidité de l’ouvrage. La cour a constaté que les désordres rendaient l’ouvrage impropre à sa destination et a retenu une réception tacite des travaux en avril 2012.
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Résumé de l’affaire : Dans cette affaire, un couple de maîtres d’ouvrage a fait construire une maison individuelle sans recourir à un maître d’œuvre ni souscrire d’assurance dommages ouvrage. Ils ont confié à une société de menuiserie la fabrication et la pose de menuiseries pour un montant de 66 772,68 €. Après la pose en mars 2012, des infiltrations ont été constatées, entraînant le remplacement des fenêtres par la société de menuiserie et une autre entreprise en 2013.
Trois factures de la société de menuiserie sont restées impayées, ce qui a conduit à une injonction de payer de 19 841,02 € contre les maîtres d’ouvrage. Ces derniers ont fait opposition et ont assigné l’assureur de la société de menuiserie en intervention forcée. Un rapport d’expertise a été établi, concluant à des désordres affectant les menuiseries, rendant le bien impropre à sa destination. Le tribunal a déclaré recevable l’opposition des maîtres d’ouvrage, a fixé la réception des travaux à avril 2012, et a condamné la société de menuiserie à indemniser les maîtres d’ouvrage pour préjudice matériel et de jouissance. L’assureur a été condamné à garantir la société de menuiserie, tandis que les demandes contre l’autre entreprise ont été rejetées. En appel, l’assureur a contesté la décision, arguant de l’absence de réception tacite et de désordres survenus en cours de chantier. Les maîtres d’ouvrage ont demandé la confirmation des jugements précédents. La cour a finalement retenu que les maîtres d’ouvrage avaient contribué à leur préjudice, fixant la responsabilité de la société de menuiserie à 60 % et confirmant les indemnités dues aux maîtres d’ouvrage, tout en rejetant les demandes de l’assureur et de l’autre entreprise. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la responsabilité décennale dans ce litige ?La responsabilité décennale est régie par l’article 1792 du Code civil, qui stipule que « tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître de l’ouvrage des dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, et ce, pendant une durée de dix ans à compter de la réception de l’ouvrage. » Dans le cas présent, le tribunal a retenu la responsabilité décennale de la société MCM, considérant que les désordres affectant les menuiseries rendaient le bien impropre à sa destination. L’expert a constaté que les désordres étaient apparus dans le mois suivant la réception tacite, ce qui a permis d’engager la responsabilité de l’entrepreneur. Il est important de noter que la réception tacite, bien que contestée par la société MCM, a été retenue par le tribunal, ce qui a permis d’appliquer la garantie décennale. En effet, l’absence d’étanchéité à l’air et à l’eau des menuiseries a été jugée suffisante pour engager cette responsabilité. Quel est l’impact de l’absence de maître d’œuvre sur la responsabilité des parties ?L’absence de maître d’œuvre a été un élément central dans l’analyse de la responsabilité des parties. Selon l’article 1792-6 du Code civil, « la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. » En l’absence de maître d’œuvre, la société MCM avait un devoir de conseil renforcé envers les maîtres d’ouvrage. Le tribunal a considéré que les époux [K] avaient pris possession des lieux après la pose des menuiseries, ce qui a été interprété comme une réception tacite. Cependant, la société MCM a soutenu que les désordres étaient apparus en cours de chantier, ce qui aurait dû exonérer l’assureur de sa responsabilité. Néanmoins, le tribunal a retenu que les désordres étaient liés à des défauts de conception et d’exécution de la part de la société MCM, et que l’absence de maître d’œuvre ne pouvait pas exonérer cette dernière de sa responsabilité. En effet, la cour a souligné que les maîtres d’ouvrage, en choisissant de ne pas recourir à un maître d’œuvre, avaient également une part de responsabilité dans la survenance des désordres. Quel est le rôle de l’expertise dans la détermination des préjudices ?L’expertise a joué un rôle crucial dans l’évaluation des préjudices subis par les maîtres d’ouvrage. Selon l’article 2276 du Code civil, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit prouver celle-ci. » Dans ce cas, les époux [K] ont produit un rapport d’expertise qui a permis de quantifier les désordres et d’évaluer les préjudices matériels et de jouissance. L’expert a constaté plusieurs désordres affectant les menuiseries, notamment des problèmes d’étanchéité et de conception. Ces constatations ont été déterminantes pour le tribunal, qui a retenu un préjudice matériel de 115 610 € TTC et un préjudice de jouissance de 16 380 €. La cour a également pris en compte le fait que les désordres étaient apparus dans le mois suivant la réception tacite, ce qui a permis de justifier la responsabilité de la société MCM. L’expertise a ainsi permis de clarifier les causes des désordres et d’établir un lien direct entre ceux-ci et la responsabilité de l’entrepreneur. Quel est le fondement des demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ?L’article 700 du Code de procédure civile dispose que « la partie perdante est condamnée aux dépens et peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » Dans ce litige, plusieurs parties ont formulé des demandes au titre de cet article. Le tribunal a condamné la société MCM à verser des sommes à M. et Mme [K] ainsi qu’à l’EURL Morera, en application de l’article 700. Ces condamnations ont été justifiées par le fait que les époux [K] avaient dû engager des frais pour faire face aux désordres constatés, ainsi que pour leur défense dans le cadre de la procédure. La cour a également pris en compte l’équité dans l’attribution des sommes, en condamnant M. et Mme [K] à verser une somme à la compagnie L’Auxiliaire, en raison de leur demande infondée à son encontre. Cela montre que l’article 700 est utilisé pour équilibrer les charges financières entre les parties en fonction de l’issue du litige. |
Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de VILLEFRANCHE SUR SAONE
au fond du 31 mars 2022
RG : 14/00915
Sté d’Assurance Mutuelle L’AUXILIAIRE
C/
[K]
[K]
S.A.R.L. M.C.M. LES MENUISIERS ET CHARPENTIES
E.U.R.L. BERNARD MORERA
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 19 Mars 2025
APPELANTE :
La compagnie L’AUXILIAIRE, assignée ès-qualités d’assureur de la société MCM, dont le siège social est à [Adresse 4], représentée par ses dirigeants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547
Ayant pour avocat plaidant Me Julie CANTON, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
Mme [N] [K]
née le 29 Mai 1959 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 5]
M. [V] [K]
né le 12 Août 1963 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentés par Me Ingrid JOLY de la SELARL JOLY – GATHERON, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE
La société MCM LES MENUISIERS ET CHARPENTIERS DE LA MONTAGNE, SARL, immatriculée au RCS de VILLEFRANCHE TARARE sous le numéro 479 941 544, dont le siège est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Eric LAVIROTTE de la SELARL SELARL ASCALONE AVOCATS, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE
EURL Bernard MORERA, Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée dont le siège social est sis [Adresse 7] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Ségolène PINET de la SELARL PINET AVOCAT, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 15 Février 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Janvier 2025
Date de mise à disposition : 19 Mars 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Bénédicte BOISSELET, président
– Véronique DRAHI, conseiller
– Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
M. et Mme [K] ont fait construire une maison individuelle en R + 1, avec un atelier en sous-sol et un atelier exterieur, à [Localité 5] (Rhône) en corps d’état séparés et sans recours à un maitre d’oeuvre.
Ils n’ont pas souscrit d’assurance dommages ouvrage.
Selon devis du 6 septembre 2011, ils ont confié à la société les Menuisiers Charpentiers de la Montagne (MCM) la fabrication et pose des menuiseries intérieures et extérieures, pour un montant de 66 772,68 €.
Les menuiseries ont été posées au mois de mars 2012.
Les époux [K] ont constaté des infiltrations au niveau des menuiseries extérieures et des portes sectionnelles.
En avril 2013 selon la société MCM et en juin 2013 selon M. Mme [K], la société MCM a remplacé ou fait remplacer l’ensemble des fenêtres dont une partie par l’Eurl Morera.
Trois factures de la société MCM sont restées impayées : 22 mai 2012, 29 avril 2013, et 11 février 2014.
A la requête de la société MCM, invoquant le non-paiement du solde de 19’841,02 € les époux [K] ont été condamnés par ordonnance du 27 mai 2014 portant injonction de payer la somme de 19’841,02 €.
M. et Mme [K] ont fait opposition puis ont assigné la SA L’Auxiliaire en intervention forcée en qualité d’assureur de la société MCM. Les instances ont été jointes.
Parallèlement, un rapport d’expertise a été établi le 22 juillet 2015 par le cabinet Cerce au titre de la protection juridique de la société MCM.
La société MCM a fait assigner l’Eurl Bernard Morera aux fins d’être relevée et garantie de toutes condamnations pouvant être prononcée à son encontre. Les instances ont été jointes.
Une expertise a été ordonnée par jugement avant-dire droit du 8 janvier 2019.
L’expert, M. [Z] a déposé son rapport le 5 août 2019.
Par jugement du 31 mars 2022, le Tribunal judiciaire de Villefranche sur Saône a :
‘ Déclaré recevable l’opposition formée par M. et Mme [K] à l’encontre de l’injonction de payer du 27/5/2014,
‘ Fixé la date de réception des travaux au mois d’avril 2012,
‘ Condamné M. et Mme [K] à régler à la Société MCM la somme de 19.841,02 €,
‘ Condamné la Société MCM à payer à la société MCM les sommes suivantes :
115.610 € TTC outre intérêts au taux légal au titre de leur préjudice matériel,
16.380 € au titre de leur préjudice de jouissance,
‘ Condamné la SA L’Auxiliaire à relever et garantir la SARL MCM au titre des condamnations ainsi prononcées,
‘ Rejeté les demandes de garanties formées à l’encontre de la Société Morera,
‘ Débouté la SARL MCM de ses plus amples demandes,
‘ Débouté M. et Mme [K] de leurs plus amples demandes au fond,
‘ Débouté la SA L’Auxiliaire de ses demandes au fond,
‘ Condamné la SARL MCM à payer à M. et Mme [K] la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
‘ Condamné la SARL MCM à payer à l’EURL Morera la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
En substance le tribunal a considéré que :
– sur la réception : les époux [K] ont pris possession des lieux après la pose des menuiseries, que seront rappelées les sommes déjà réglées et qu’au regard de ces éléments la réception de l’ouvrage doit être fixée au mois d’avril 2012, comme retenu par l’expert,
– sur les désordres : le tribunal a rappelé les désordres relevés par l’expert lequel avait retenu leur apparition dans le mois suivant la réception et conclu que les désordres affectant des éléments d’équipement rendaient le bien impropre à sa destination. Le tribunal a retenu la responsabilité décennale de MCM et a expressément écarté la garantie de parfait achèvement.
– Sur les responsabilités : le tribunal a retenu l’indifférence de l’absence de maître d »uvre, les désordres relevant de la société MCM.
– Sur le préjudice matériel : les éléments fournis par les époux [K] n’étaient pas contradictoires il convenait de s’appuyer sur l’expertise en retenant une somme de 115 610 € TTC.
Les époux [K] avaient rapporté la preuve du préjudice moral,
Même si les lieux étaient habitables, il existait un préjudice jouissance partiel en raison de l’impropriété à destination des menuiseries et des désordres à reprendre. Ce préjudice devait être fixé à 15 % de la valeur locative jusqu’au mois de mai 2020 soit 91 mois : 16’380 €.
– Sur les garanties : les désordres sont apparus dans le mois suivant la réception tacite, il n’y avait pas de preuve d’apparition de désordres pendant le chantier. La responsabilité décennale de la société MCM devait être couverte par son assureur L’Auxiliaire. Concernant l’EURL Morera, si cette entreprise avait été mandatée pour la fabrication de 12 fenêtres 12 croisés et 12 châssis plus quatre portes fenêtres, elle avait exécuté sa commande conformément au devis lequel ne renseignait pas sur la situation du bâtiment en milieu vanté. Cette entreprise ne devait pas sa garantie.
Par jugement rectificatif d’erreur matérielle rendu le 9 juin 2022, la même juridiction a ordonné la rectification du dispositif du jugement rendu le 31 mars 2022 avec remplacement de la mention :
Condamne la Société MCM à payer à la société MCM les sommes suivantes :
115.610 € TTC outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision outre intérêts au titre de la reprise des désordres, (préjudice matériel)
16.380 € au titre du préjudice de jouissance,
par la mention :
Condamne la Société MCM à payer à M [V] [K] et à Mme [N] [K] les sommes suivantes :
115.610 € TTC outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision outre intérêts au titre de la reprise des désordres, (préjudice matériel)
16.380 € au titre du préjudice de jouissance,
La SA L’Auxiliaire a interjeté appel par deux déclarations, la première enregistrée le 27 avril 2024, la seconde le 21 juillet 2022 des jugements principal et rectificatif, appels joints sous le n° RG 22/03059 par ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 février 2023.
Par conclusions régularisées au RPVA le 25 novembre 2022, L’Auxiliaire demande à la cour :
Réformer les jugements dont appel rendus le 31 mars 2022 et le 9 juin 2022 en ce qu’ils ont :
déclaré recevable l’opposition formée par M. et Mme [K],
fixé la réception des travaux au mois d’avril 2012,
condamné la société MCM à payer à M. et Mme [K] les sommes de 115 610 € TTC outre intérêts au titre des travaux et de 16 380 € au titre du préjudice de jouissance,
condamné la compagnie L’Auxiliaire à garantir la société MCM,
rejeté les demandes formées contre la société Morera,
débouté la compagnie L’Auxiliaire de ses demandes au fond,
condamné la société MCM à verser à M. et Mme [K] une somme de 5 000 € et à la société Morera une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les entiers dépens.
Confirmer les jugements dont appel rendus le 31 mars 2022 et le 9 juin 2022 en ce qu’ils ont rejeté les autres demandes de M. et Mme [K],
Et statuant à nouveau,
Constater et juger en l’état des éléments produits l’absence de réception, même tacite,
Constater et juger que les désordres allégués sont survenus en cours de chantier en mars 2012,
Juger l’absence de garantie de la compagnie L’Auxiliaire et la mettre hors de cause,
Juger que les demandes sont forcloses et mal fondées.
Par conséquent, Rejeter toute demande formulée à l’encontre de la compagnie L’Auxiliaire.
Subsidiairement,
Condamner L’EURL Bernard Morera à relever et garantir la compagnie L’Auxiliaire de toutes condamnations,
En cas de condamnation de la compagnie L’Auxiliaire, condamner la société MCM à verser à la compagnie L’Auxiliaire la franchise telle que stipulée dans les conditions particulières (pièce n° 2) à savoir 10 % du sinistre avec un minimum de 0,76 BT01 et un maximum de 3,12 BT01
En tout état de cause,
Condamner in solidum L’EURL Bernard Morera, M. et Mme [K], la société MCM aux dépens et à verser à la compagnie L’Auxiliaire la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Ordonner la distraction des dépens au profit de la SCP Baufume Sourbe du barreau de Lyon.
Par conclusions n°2 régularisées au RPVA le 11 janvier 2023, Mme [N] [K] et M [V] [K] demandent à la cour :
Confirmer les jugements entrepris en ce qu’ils ont :
Déclaré recevable l’opposition formée par M. [V] [K] et Mme [N] [K] à l’encontre de l’injonction de payer du 27 Mai 2014,
Fixé la réception des travaux au mois d’Avril 2012,
Condamné la SA L’Auxiliaire à garantir Ia SARL Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne au titre des condamnations ainsi prononcées,
Débouté la SARL Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne de ses plus amples demandes ou fond,
Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,
Condamné Ia SARL Les Menuisiers et Charpentiers de Ia Montagne à payer à M. [V] [K] et Mme [N] [K] la somme de 5.000 € à titre d’indemnisation sur Ie fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamné la SARL Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne à supporter les entiers dépens de première instance.
Réformer les jugements entrepris en ce qu’ils ont :
Condamné M. [V] [K] et Mme [N] [K] à payer à la SARL Les Menuisiers et Charpentiers de Ia Montagne la somme de 19.841,02 €,
Condamné la SARL Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne à payer à la SARL Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne les sommes suivantes :
115.610 € TTC outre intérêts au taux légal à compter de Ia présente décision outre intérets au titre de la reprise des désordres (préjudice matériel),
16.380 € au titre du préjudice de jouissance,
Et statuant à nouveau,
Infirmer ladite ordonnance portant injonction de payer en toutes ses dispositions,
En conséquence,
Débouter la société MCM de I’intégralité de ses demandes à l’encontre de Mme et M. [K],
Condamner la société MCM à payer à Mme et M. [K] :
Ia somme de 173.550,37 €, soit 191.012,81 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter du jugement du 31 Mars 2022,
Ia somme de 31.320 € au titre du préjudice de jouissance subi jusqu’au mois de février 2020, et le préjudice de jouissance à venir sur les bases de calcul susvisés (soit 30 % de la valeur Iocative) de Mars 2020 jusqu’au parfait achevement des travaux de reprise,
la somme de 10.000 € au titre du préjudice moral subi,
Subsidiairement, si la cour de céans devait considérer que la réception n’a pas eu lieu,
Juger que la Société MCM a engagé sa responsabilité sur le fondement de l’ancien article 1147 du Code civil, et retenir la responsabilité contractuelle de Ia Société MCM à l’égard des Epoux [K], et la condamner à leur payer :
la somme de 173.550,37 €, soit 191.012,81 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter du jugement du 31 Mars 2022,
la somme de 31.320 € au titre du préjudice de jouissance subi jusqu’au mois de février 2020, et le préjudice de jouissance à venir sur les bases de calcul susvisés (soit 30% de la valeur Locative) de Mars 2020 jusqu’au parfait achèvement des travaux de reprise,
la somme de 10.000 € au titre du préjudice moral subi,
En tout état de cause,
Condamner la Société L’Auxiliaire ou qui mieux Ie devra à payer à Mme et M. [K] Ia somme de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamner la Société MCM aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise, dont distraction est requise au profit de Maître Ingrid Joly, sur son affirmation de droit.
Par conclusions régularisées au RPVA le 17 octobre 2022, l’EURL Bernard Morera demande à la cour :
Confirmer le jugement dont appel.
Juger que les désordres ont pour origine un défaut de conception du profil des menuiseries et d’adaptation au support.
Juger que la responsabilité de la Société Morera n’est pas engagée.
Débouter en conséquence la Société MCM et la compagnie L’Auxiliaire de leurs demandes tendant à être relevées et garanties par l’EURL Morera de toutes condamnations.
Condamner solidairement la Compagnie L’Auxiliaire et la Société MCM ou qui mieux il appartiendra à verser à l’EURL Morera la somme de 4.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamner solidairement la Compagnie L’Auxiliaire et la Société MCM ou qui mieux il appartiendra aux entiers dépens.
Par conclusions n°2 régularisées au RPVA le 16 janvier 2023, la Société MCM Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne, demande à la cour :
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Villefranche sur Saône le 31 mars 2022 en ce qu’il a :
Condamné la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne à payer à M. et Mme [K] les sommes suivantes :
115.610 € TTC outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision outre intérêts au titre de la reprise des désordres,
16.380 € au titre du préjudice de jouissance,
Rejeté les demandes de garanties formées à l’encontre de l’EURL Bernard Morera,
Débouté la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne de ses plus amples demandes au fond,
Condamné la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne à payer à M. et Mme [K] la somme de 5.000 € à titre d’indemnisations sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamné la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne à payer à l’EURL Bernard Morera la somme de 3.000 € à titre d’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamné la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne à supporter les entiers dépens de la présente instance.
Confirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Villefranche sur Saone le 31 mars 2022 en ce qu’il a :
Fixé la réception des travaux au mois d’avril 2012,
Condamné M. [V] [K] et Mme [N] [K] à payer à la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne la somme de 19.841,02 €,
Condamné la SA L’Auxiliaire à garantir la S.A.R.L. Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne au titre des condamnations ainsi prononcées,
Débouté M. et Mme [K] de leurs plus amples demandes au fond,
Débouté la SA L’Auxiliaire de ses demandes au fond.
Par conséquent et statuant à nouveau,
A titre principal,
Dire que les intérêts attachés à la condamnation au paiement de la somme de 19.841,02 € prononcée à l’encontre des époux [K] courront au taux légal à compter du 16 mai 2014, date de la requête en injonction de payer,
Ordonner la capitalisation des intérêts par année entière par application de l’article 1343-2 du Code civil,
Déclarer M. [V] [K] et Mme [N] [K] responsables de la réalisation de leur préjudice,
Déclarer la société MCM indemne de toute responsabilité,
Subsidiairement,
Dire et Juger que M. [V] [K] et Mme [N] [K] ont concouru à la réalisation de leurs préjudices et devront en assumer les conséquences,
Ramener les sommes sollicitées par les époux [K] à de plus justes proportions,
Condamner la Société l’Auxiliaire et l’EURL Bernard Morera à relever et garantir la Société MCM de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre,
En tout état de cause,
Condamner solidairement la Société L’Auxiliaire, M. [V] [K] et Mme [N] [K] et la Société Morera à payer à la Société MCM une somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamner les mêmes aux entiers dépens.
Pour plus ample exposé des moyens développés par les parties, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, il sera fait référence à leurs écritures.
A titre liminaire, lorsque les demandes des parties tendant à voir la cour « Dire et Juger » ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du Code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.
Sur la recevabilité de l’opposition à l’ordonnance portant injonction de payer :
La cour relève que la compagnie L’Auxiliaire demande l’infirmation de la décision attaquée sur la recevabilité de l’opposition mais ne la conteste pas. La cour confirme la décision attaquée en ce que l’ordonnance portant injonction de payer a été mise à néant par l’opposition régulière de M. et Mme [K].
Sur les désordres et la garantie décennale invoquée :
La cour relève que selon le rapport d’expertise de M. [Z], une réception tacite de l’ouvrage est intervenue en avril 2012 un mois après la pose des menuiseries.
L’expert a constaté l’existence de plusieurs désordres affectant les menuiseries :
concernant les portes et fenêtres : les menuiseries portes fenêtres hors portes de garage présentaient des défauts plus ou moins marqués d’étanchéité à l’eau et à l’air donc impropres à destination. La feuillure drainante ne pouvait évacuer efficacement l’eau de pluie s’accumulant au niveau des évacuations. Ces désordres étaient apparus dans le mois ayant suivi la réception tacite, dès les premières intempéries. Ils n’avaient pas fait l’objet d’une notification dans le délai de parfait achèvement mais d’une reprise non efficace.
concernant la porte de garage : l’expert a indiqué ne pas avoir pu connaître le niveau de performance à l’air, au vent et à l’eau prescrit. La performance à l’étanchéité indiquée sur la porte était le niveau 3 sur une échelle de 9 donc très moyennement performante. L’expert n’a pas indiqué quel désordre était relevé mais il ressort de réponses aux dires, l’absence d’étanchéité en bas de porte.
concernant la porte d’entrée et les portes de service : l’eau ne s’évacuait pas des feuillures, celles-ci n’étant pas drainantes. Ces désordres étaient apparus dans le mois ayant suivi la réception tacite, dès les premières intempéries.
coffret de volets-roulant/menuiseries : le polyuréthanne visible, était exposé en extérieur et effrité et ne jouait plus son rôle d’isolant thermique. Si les volets roulants avaient été mis en ‘uvre, la retombée formée par les premières lames aurait masqué et protégé en partie cette jonction évitait d’avoir à combler le vide créer.
zinguerie : la mise en ‘uvre du dauphin en pied de descente d’eaux pluviales côté ouest et trois soudures au raccord des gouttières sur l’atelier étaient à reprendre. Les parties s’accordaient à dire que les réserves à la zinguerie étaient aisées à lever.
La cour considère que l’absence d’étanchéité à l’air et à l’eau des fenêtres, outre des portes d’entrée et de service, rend l’ouvrage impropre à sa destination.
Il est constant qu’aucune réception expresse n’est intervenue.
La compagnie l’Auxiliaire conteste l’absence de réception même tacite alors que presqu’un tiers du marché n’avait pas été payé et que la volonté d’accepter l’ouvrage n’était pas établie d’autant qu’indiquer une réception tacite en avril 2012 n’était pas de la compétence de l’expert et les éléments du dossier ne prouvaient pas la réception.
De plus, le tribunal ne pouvait pas fixer une réception tacite alors même qu’aucune demande de réception judiciaire n’avait été formulée.
Elle ajoute que comme l’ont rappelé les époux [K], les infiltrations ont lieu en cours de chantier. Or, elle ne garantit par les désordres antérieurs à la réception :
soit ils n’ont pas été réservés à réception et étant apparents, ils ont été couverts par la réception sans réserve,
soit ils ont été réservés à réception et l’assureur décennal ne garantit pas les réserves à réception.
L’appelante invoque ensuite très subsidiairement la garantie de parfait achèvement en soutenant que même si la cour confirmait une réception tacite le 12 avril 2012, les demandes sont forcloses outre que les [K] ayant assuré la maîtrise d »uvre doivent endosser la responsabilité au moins partielle des désordres. De plus, la dernière expertise dont ils se prévalent n’est pas opposable à l’assureur, car non contradictoire.
Subsidiairement le tribunal aurait dû retenir le montant des travaux fixés par le cabinet Cerec, les demandes des époux [K] étant disproportionnées.
M. et Mme [K] invoquent le constat d’importantes infiltrations d’eau au niveau des menuiseries extérieures et des portes dès leur mise en place en mars 2012, et soutiennent qu’en l’absence de maître d »uvre ou d’architecte, l’obligation de renseignement et de conseil de la société MCM était renforcée comme l’avait relevé l’expert judiciaire.
Ils ajoutent que les travaux ont été réceptionnés de manière tacite puisque c’est après la pose des premières menuiseries en mars 2012 que sont apparues les infiltrations ayant donné lieu au remplacement des menuiseries en juin 2013. Celles-ci demeuraient non étanches à l’eau et à l’air et donc impropres à leur destination.
La société MCM invoque la responsabilité des maîtres d’ouvrages qui ne se sont pas assistés d’un maître d »uvre alors que l’expert a d’ailleurs retenu évident qu’une coordination entre les corps d’état aurait amélioré le niveau de performance des ouvrages. L’intimée invoque également une faute des époux [K] en choisissant de poser des volets battants en bois au lieu et place des volets roulants initialement prévus. Ils ont également failli par le défaut de coordination entre les lots maçonnerie et menuiserie. Sur la réception, la société MCM rappelle que les époux [K] n’ont jamais contesté la réception de l’ouvrage dès la pose des menuiseries litigieuses.
Sur ce,
Aux termes de l’article 1792-6 du Code civil, ‘la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause prononcée contradictoirement.’
La cour rappelle que si la réception d’un ouvrage peut être tacite, il n’appartient pas au tribunal de la prononcer mais seulement de la constater. Par ailleurs, si en l’espèce, l’expert s’est prononcé sur une date de réception c’est parce que la mission d’expertise le lui demandait.
Il appartient cependant à la juridiction de constater si une réception tacite est intervenue.
Il est de jurisprudence constante que la prise de possession de l’ouvrage ne suffit pas à caractériser la volonté non équivoque du maître d’ouvrage de réceptionner l’ouvrage.
En l’espèce, M. et Mme [K] demandent la confirmation du jugement ayant retenu une réception tacite en avril 2012 comme proposé par l’expert tout en indiquant dans leurs conclusions avoir constaté des infiltrations dès la mise en place des menuiseries en mars 2012. Selon leur pièce numéro une, ils ont constaté des infiltrations d’eau importantes au 1er avril 2012.
Il ressort des pièces produites par MCM que les maîtres d’ouvrage ont réglé des factures jusqu’au troisième acompte facturé le 22 février 2012 réglé selon chèque déposé le 21 mars 2012 ; puis une facture du 15 mars 2012 objet d’un chèque déposé le 4 avril 2012.
La facture du 22 mai 2012 d’un montant de 17’515,42 €. Deux autres factures postérieures, l’une de 2013 et l’autre de 2014 sont restées impayées dont la dernière relative à la zinguerie.
MCM produit par ailleurs une lettre de rappel du 6 août 2012 outre une lettre de mise en demeure du 25 mars 2014 dont l’envoi en la forme recommandée n’est cependant pas démontré.
En 2012, M. et Mme [K] n’ont donc pas payé la somme de 17 515,42 € sur le total de 66 772,68 € TTC, soit plus de 25 % de la somme due.
En l’absence de preuve de la volonté non équivoque de M. et Mme [K] de réceptionner les travaux, il n’est pas démontré d’une réception tacite avec ou sans réserves.
Or aucune garantie légale ne peut être mise en jeu en l’absence de réception.
La cour infirme la décision attaquée et rejette toute demande au titre de la garantie décennale.
Sur la responsabilité contractuelle de la société MCM :
M. et Mme [K] recherchent ensuite à titre subsidiaire l’entière responsabilité de la société MCM sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
Sur ce,
Selon l’article 1147 du Code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
L’entrepreneur est normalement tenu à un devoir de conseil s’exerçant dans les limites de sa mission. En l’absence de maître d »uvre, l’entrepreneur doit remplir un devoir de conseil renforcé. Il n’est cependant pas responsable des risques pris par le maître d’ouvrage informé, ou professionnel.
Il est également tenu à une obligation de résultat qui entraîne une présomption de sa responsabilité sauf preuve d’une cause étrangère, étant rappelé que le non-respect d’un document technique unifié (DTU) ne peut engager la responsabilité de l’entrepreneur dès lors que ce document n’est pas rentré dans le champ contractuel et qu’il n’a pas été rendu obligatoire par la loi
La cour a précédemment évoqué les désordres retenus par l’expert. Il convient d’en examiner leur origine et toute responsabilité en découlant.
Concernant les fenêtres, porte fenêtres, l’expert a retenu que l’origine était due à un défaut de conception des profils face à l’exposition et la situation géographique du bâtiment (drainage insuffisant) associé à l’absence d’entrée d’air aux grilles d’aération sur les menuiseries alors qu’il était obligatoire selon la norme XP P 50-410 d’installer des entrées d’air dans les pièces principales. La S.A.R.L. MCM avait commis une erreur de conception dès la réalisation des devis en n’indiquant pas dans ceux-ci les performances à l’air, à l’eau et au vent, le DTU 36.1, P 20-201 et en ne proposant pas des menuiseries tenant compte de la situation géographique du système de ventilation notamment.
La cour relève d’une part que l’expert a indiqué retrouver systématiquement les mêmes désordres sur les 34 menuiseries, les baies alu étant donc comprises dans son constat et d’autre part qu’il ne remet pas en cause la pose en elle-même des fenêtres mais l’absence d’information du maître d’ouvrage lors des devis aux fins de proposer des menuiseries adaptées à l’exposition et la situation géographique avec au cas d’absence d’autres entrées d’air dans les pièces, la préconisation de grilles d’aération.
La société MCM, professionnel spécialisé, a manqué à son obligation de conseil.
Cependant, le respect du DTU n’a pas été démontré être convenu par les parties.
En effet, la seule pièce contractuelle est le devis du 6 septembre 2011 non signé que les maîtres d’ouvrage reconnaissent avoir accepté. Ce devis ne se réfère à aucune autre pièce, DTU ou norme.
Par ailleurs, si M. et Mme [K] invoquent un devoir de conseil renforcé de l’entreprise de menuiserie, ni leur constitution, ni leurs conclusions, ni leurs pièces ne mentionnent malgré les exigences des textes, leur profession ou absence de profession, ne démontrant ainsi pas de leur absence d’information au regard des travaux confiés.
Or, la cour constate qu’ils ont entrepris de construire une maison de taille conséquente puisque comportant 34 fenêtres/portes fenêtres/ baies vitrées et 4 portes de garage sans souscrire à l’assurance dommage ouvrages, sans recourir à un maître d’oeuvre, en contractant par lots, sans descriptif de leurs exigences, sur un simple devis non signé. Ils se sont manifestement considérés comme informés.
Si M. et Mme [K] produisent une note ‘Résumé étude thermique RT 2005’ datée de mai 2011, ils n’établissent pas avoir sollicité de la société MCM, la prise en compte de cette étude pour l’établissement du devis.
Ils ont par leur prise de risque, commis une faute exonérant pour partie la responsabilité du professionnel dans une proportion que la cour fixe à 40 %.
Concernant la porte d’entrée, les portes de garage et les portes de service, l’expert considérait que le traitement technique des seuils n’avait pas été conçu correctement par la société MCM et par le lot maçonnerie, la première ayant pris le risque de mettre en ‘uvre des menuiseries et seuils en réceptionnant un support sans conception vis-à-vis de l’eau liquide provenant des intempéries. Il a également, concernant plus particulièrement les portes de garage, relevé un manque de conception et de coordination entre le lot maçonnerie et menuiserie.
L’expert a par ailleurs répondu dans un Dire que l’entreprise en charge de la maçonnerie n’avait pas manqué à ses obligations.
La société MCM affirme qu’il était convenu avec les époux [K] de réaliser un seuil décalé pour éviter une marche afin de faciliter la circulation des véhicules, et que des pénétrations d’eau n’étaient donc pas complètement anormales.
La cour n’a pas été renseignée par M. et Mme [K] sur leurs demandes vis-à-vis de l’entreprise de maçonnerie.
L’entrepreneur en menuiserie n’était tenu que dans les limites de sa mission propre.
La société MCM ne peut se voir imputer le choix du support sans conception vis-à-vis de l’eau en provenant de l’extérieur mais en tant que professionnel, elle a accepté de poser les menuiseries et seuils sur un support ne garantissant pas ensuite l’étanchéité des menuiseries posées. Elle a manqué aux obligations que les maîtres d’ouvrage pouvaient attendre d’elle. Sa faute a contribué au préjudice auxquelles les maîtres d’ouvrage ont également participé dans la proportion de 40 % en l’absence de la coordination à leur charge entre le maçon et le menuisier.
Concernant la frontière entre le coffre des volets-roulant et les menuiseries, l’expert a retenu un problème de conception initiale de l’ouvrage et de mise en ‘uvre, relevant un problème de coordination avec la maîtrise d’ouvrage en raison de la suppression des volets roulants, un problème de conception et de mise en ‘uvre de l’ensemble coffrets menuiseries.
La cour relève que le manquement de la société MCM est établi dans la mise en oeuvre mais les maîtres d’ouvrage maître d »uvre ont fait le choix de prévoir des coffres pour des volets roulants avant d’opter pour des volets extérieurs. Or si les premiers avaient été posés, l’isolation thermique n’aurait pas été défectueuse. Si la faute de la société MCM a contribué au préjudice, les maîtres d’ouvrage y ont également participé dans la proportion de 40 %.
Concernant la zinguerie, l’expert relevait une malfaçon de MCM dans leur mise en ‘uvre mais facilement réparable. La cour considère qu’une malfaçon par une entreprise professionnelle est un manquement contractuel engageant son entière responsabilité.
Sur les préjudices :
M. et Mme [K] sollicitent la réactualisation des travaux de reprise à la somme de 191 012,81 € TTC en produisant à l’appui de leurs demandes un récapitulatif financier général du 4 janvier 2023 établi par [L] [O], cabinet d’expertise et de maîtrise d »uvre.
La société MCM fait valoir concernant les menuiseries aluminium que les époux [K] n’avaient pas constaté d’infiltrations d’eau mais se plaignaient de difficultés de fermeture et d’une mauvaise étanchéité à l’air. Il semblait que la cause des désordres était un problème de réglage de la porte pour la fermeture et l’absence d’entrée d’air pour la MMC qui favorisait le passage d’air. Le remplacement de menuiseries était injustifié.
MCM s’en remettait à la sagesse de la cour sur la reprise des conceptions des seuils des portes d’entrée de service sur la zinguerie. Concernant les portes de garage, elle considérait suffisant le remplacement des joints de seuils caoutchouc et préparation du support préconisé par le cabinet Cerce. Elle ajoute que la facturation des portes de garage aurait été plus élevée si les clients avaient choisi dès le départ de meilleures performances, que l’actualisation du préjudice par les époux [K] représente une augmentation de 135 % sans pièces contradictoires et sans justificatif.
Sur ce
La cour relève en premier lieu que le récapitulatif financier général de M. [L] [O], expert assistant les maitres d’ouvrage, comporte des honoraires de maîtrise d »uvre et de consultation d’entreprises, ainsi que d’honoraires d’expertises qui doivent être écartés.
Par ailleurs, le récapitulatif fixant les reprises à 191 012,81 € est l’actualisation du devis du 24 mai 2019 qui avait été produit à l’expert.
L’expert a donc pu étudier le chiffrage des maîtres d’ouvrage. Il a d’ailleurs indiqué avoir évalué les coûts de reprise sur la base des devis fournis par les conseils techniques des parties, par l’étude de prix personnalisés pour ouvrage de bâtiment et par son expérience et intime conviction.
Aucune indexation des coûts des reprises n’a été sollicitée. La seule réévaluation selon des pourcentages non appuyés sur l’évolution connue des prix ne peut justifier les augmentations sollicitées.
La cour considère que les travaux préconisés par l’expert sont bien des travaux nécessités par les désordres constatés.
Elle confirme la décision attaquée en ce qu’elle a repris l’évaluation proposée par l’expert judiciaire portant sur la totalité des menuiseries y compris en alu puisque non étanches sauf à retirer les frais de maçonnerie qui ne sont pas de la responsabilité du menuisier.
Le préjudice est donc de 42 000 € HT au titre des menuiseries bois, 4 600 € au titre des menuiseries alu, 33’000 € HT au titre des frais de plâtrerie peinture soit un total de 79 600 € HT et 87 560 € TTC.
La société MCM est tenue à hauteur de 60 % soit à la somme de 52 536 € TTC.
La cour retient au titre du désordre affectant les portes du garage, le chiffrage de l’expert, lequel a retenu la nécessité de dépose, remaniement et autres réglages, repose sur forme de seuils de façons seuils suisse ou autres sur la base d’un prix HT de 9 000 € outre la TVA. La société MCM est tenue à hauteur de 60 % soit 5 940 € TTC.
Au titre de la reprise de la zinguerie, la cour retient le coût de reprise HT de 500 € soit 550 € avec la TVA.
La société MCM est condamnée au paiement de cette somme, aucune faute des maîtres de l’ouvrage n’étant démontrée au titre de ce désordre.
Si M. [O], a retenu en son estimation, des travaux de maçonnerie à hauteur de 16’000 €, ce coût n’a pas à être supporté par la société MCM, les maîtres d’ouvrage ne recourant pas à une maîtrise d’oeuvre.
Il est ainsi dû au titre du préjudice matériel la somme totale de 59 026 € TTC (52 536 + 5 940 + 550).
M. et Mme [K] sollicitent par ailleurs la somme de 31’320 € au titre du préjudice de jouissance subi jusqu’au mois de février 2020 et le préjudice de jouissance à venir, soit 30 % de la valeur locative jusqu’au parfait achèvement des travaux de reprise.
La cour considère que si M. et Mme [K] ont, de par les carences d’étanchéité des menuiseries, subi un préjudice de jouissance, la cour fait sienne l’observation de l’expert selon laquelle la maison est habitable.
Par ailleurs le préjudice de jouissance n’est pas uniquement imputable aux manquements de la société MCM mais également aux choix des maîtres d’ouvrage. La société MCM est tenue à hauteur de 60 % de ce préjudice.
La cour considère que la réalité du préjudice est établie depuis août 2012, date selon laquelle la société MCM, et M. et Mme [K] se sont plaints d’infiltrations, et jusqu’à la réception par les maîtres d’ouvrage de la somme allouée par le premier juge permettant la reprise des menuiseries défectueuses. Le trouble a duré dix ans.
La cour infirme la décision attaquée et fixe le préjudice de jouissance subi annuellement à la somme de 2 400 € soit au total 24 000 €.
La société MCM est condamnée au paiement de 60 % de cette somme, soit 14 400 €.
M. et Mme [K] sollicitent ensuite la somme de 10’000 € au titre d’un préjudice moral.
La cour considère que ce préjudice n’est aucunement caractérisé. La cour confirme la décision attaquée.
Sur les appels en garantie :
La société MCM invoque la garantie de la société L’Auxiliaire mais ne justifie que d’une garantie s’appliquant aux dommages susceptibles de mettre en jeu la garantie décennale et ceux susceptibles de mettre en jeu la garantie de bon fonctionnement.
Les garanties légales ne sont pas mobilisables en l’espèce. La demande de la société MCM doit être rejetée.
La société MCM invoque également la garantie de l’Eurl Morera.
L’expert a certes retenu la responsabilité de cette entreprise mais en considérant à tort qu’elle avait changé la totalité des fenêtres. La cour relève que tant les fenêtres fabriquées posées par l’entreprise Morera que celles de la société MCM étaient défectueuses.
La société MCM n’est pas fondée à lui reprocher de ne pas avoir tenu compte de l’exposition du bâtiment et d’adapter la conception des fenêtres alors que l’artisan les a fabriquées conformément au bon de fabrication du 7 janvier 2013 portant non sur la totalité des fenêtres mais sur 12 d’entre elles et 4 portes fenêtres comme facturé.
La cour rejette l’appel en garantie de la MCM à l’encontre de l’Eurl Morera en l’absence de preuve de manquement à ses obligations ayant effectué une prestation conforme à celle demandée et alors que le désordre provient de la conception choisie, non adaptée aux exigences des lieux.
La demande de garantie présentée par la société L’Auxiliaire à l’encontre de l’Eurl Morera est sans objet.
Sur la demande reconventionnelle de la société MCM :
Il est non contesté que M. et Mme [K] n’ont pas réglé à la société MCM les trois dernières factures. S’ils ont subi des désordres, ils sont indemnisés à ce titre et doivent à l’entreprise le règlement de ses prestations. La cour confirme la décision attaquée en ce qu’elle les a condamnés à payer la somme de 19 841,02 € y ajoutant les intérêts au taux légal à compter non comme demandé de la requête en injonction de payer mais de la signification de celle-ci le 20 juillet 2014. En effet, cette demande avait été présentée devant le premier juge ainsi qu’une demande de capitalisation des intérêts par année entière à laquelle rien ne s’oppose. La cour y fait droit.
Sur les demandes accessoires :
La cour confirme la décision déférée sur les dépens et sur l’application de l’article 700 du Code de procédure civile en première instance.
La cour condamne également la société Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne (MCM) partie perdante, aux dépens à hauteur d’appel avec application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de Maître Ingrid Joly et de la SCP Baufume Sourbe, Avocats, pour les dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision.
En équité la cour condamne M. et Mme [K] à payer la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile à la compagnie L’Auxiliaire qu’ils ont attrait en la procédure.
En équité, la cour condamne la société Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne (MCM) à payer à M. et Mme [K] la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et une somme du même montant à l’Eurl Morera qu’elle a attrait en la procédure.
Sa propre demande sur le même fondement ne peut qu’être rejetée.
Statuant dans les limites de l’appel,
La cour d’appel,
Confirme le jugement du 31 mars 2022 rectifié par jugement du 9 juin 2022 en ce qu’il a :
Déclaré recevable l’opposition injonction de payer,
Condamné M. et Mme [K] à payer à la société MCM la somme de 19 841,02 €,
Rejeté les demandes de garantie formée à l’encontre de l’Eurl Bernard Morera,
Débouté M. et Mme [K] de leurs plus amples demandes,
Débouté L’Auxiliaire de ses plus amples demandes.
L’infirme sur le surplus et statuant à nouveau,
Dit que M. et Mme [K] ont contribué au préjudice subi par les désordres affectant les menuiseries,
Déclare la société Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne (MCM) tenue à réparer le préjudice des désordres affectant les menuiseries à hauteur de 60 %,
Condamne la société Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne (MCM) à payer à M. [V] [K] et Mme [N] [K] :
la somme de 59 026 € TTC au titre de la reprise des désordres,
la somme de 14 400 € au titre du préjudice de jouissance,
Condamne M. et Mme [K] à payer sur la somme de 19 841,02 € les intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2014,
Ordonne la capitalisation des intérêts sur cette somme par année entière par application de l’article 1343-2 du Code civil
Rejette les demandes à l’encontre de L’Auxiliaire,
Y ajoutant,
Condamne la société Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne (MCM) aux dépens à hauteur d’appel avec application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile au profit de Maître Ingrid Joly pour les dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision,
Condamne la société Les Menuisiers et Charpentiers de la Montagne (MCM) à payer à M. et Mme [K] la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne la société MCM à payer à L’Eurl Morera la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne M. et Mme [K] à payer la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile à la compagnie L’Auxiliaire,
Rejette toute autre demande.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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