Obligation d’information du médecinLe médecin a l’obligation d’informer son patient sur les risques et les conséquences des actes médicaux qu’il envisage de réaliser, conformément à l’article L. 1111-2 du Code de la santé publique. Cette obligation d’information est essentielle pour permettre au patient de donner un consentement éclairé à l’intervention. Responsabilité médicaleLa responsabilité du médecin peut être engagée en cas de manquement à cette obligation d’information, entraînant un préjudice pour le patient. Selon l’article 1240 du Code civil, toute faute causant un dommage à autrui oblige son auteur à le réparer. En l’espèce, le défaut d’information concernant la nature provisoire de l’expandeur a été reconnu comme une faute. Erreur technique dans le choix de la prothèseLe choix inadapté d’une prothèse définitive par le médecin constitue une erreur technique, engageant sa responsabilité. Cette notion est soutenue par la jurisprudence qui impose aux praticiens de respecter les règles de l’art en matière de soins, conformément à l’article 16 du Code de déontologie médicale. Indemnisation des préjudicesL’indemnisation des préjudices subis par le patient doit être intégrale, conformément à l’article 1382 du Code civil, qui stipule que toute personne est responsable du dommage qu’elle a causé par sa faute. Les préjudices peuvent inclure les pertes de gains professionnels, les souffrances endurées, et les préjudices esthétiques, comme le précise la jurisprudence en matière de responsabilité médicale. Article 700 du Code de procédure civileL’article 700 du Code de procédure civile permet au juge d’allouer une somme au titre des frais irrépétibles exposés par la partie gagnante. Cette disposition a été appliquée pour couvrir les frais d’avocat et autres dépenses liées à la procédure. |
L’Essentiel : Le médecin a l’obligation d’informer son patient sur les risques des actes médicaux envisagés, permettant ainsi un consentement éclairé. En cas de manquement à cette obligation, sa responsabilité peut être engagée, entraînant un préjudice pour le patient. Le choix inadapté d’une prothèse définitive constitue une erreur technique, engageant également la responsabilité du praticien. L’indemnisation des préjudices doit être intégrale, incluant pertes de gains, souffrances et préjudices esthétiques, conformément à la jurisprudence en matière de responsabilité médicale.
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Résumé de l’affaire : Le 7 février 2006, une médecin psychiatre a consulté un chirurgien pour un cancer du sein gauche. Après une hospitalisation, une intervention chirurgicale a été réalisée le 23 février 2006, comprenant une mastectomie radicale et la mise en place d’un expandeur provisoire. La patiente n’a pas été informée que cet expandeur nécessitait une seconde intervention. En 2006, le chirurgien a injecté du sérum physiologique dans l’expandeur, mais en mai 2007, la patiente a constaté une diminution de son volume. Elle a été placée en invalidité totale en mai 2009.
En 2010, la patiente a consulté à nouveau le chirurgien pour la mise en place d’une prothèse définitive, mais elle a signalé un volume excessif et une asymétrie. En novembre 2011, elle a assigné le chirurgien et la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) en référé pour une expertise médicale. Un expert a été désigné, et un rapport a été déposé en 2013. En 2014, la patiente a assigné à nouveau le chirurgien et la CPAM pour obtenir réparation de ses préjudices. Le tribunal a reconnu que le chirurgien avait manqué à son obligation d’information et avait commis une erreur technique dans le choix de la prothèse. En avril 2019, il a condamné le chirurgien à verser des provisions à la patiente. En juin 2024, un jugement a été rendu, condamnant le chirurgien et son assureur à indemniser la patiente pour divers préjudices, totalisant 119 180,14 euros. La patiente a interjeté appel, demandant une réévaluation de certains postes de préjudice. Le chirurgien et son assureur ont également contesté le jugement, invoquant une perte de chance limitée. La CPAM et la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France ont également formulé des demandes d’infirmation du jugement. L’affaire a été clôturée par une ordonnance en février 2025, avec des décisions rendues sur les indemnités et les frais de justice. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le manquement d’information du médecin concernant l’expandeur ?Le médecin a manqué à son obligation d’information en ne précisant pas à la patiente que l’expandeur mis en place était une prothèse provisoire nécessitant une seconde intervention. Selon l’article 16-3 du Code civil, « le consentement de la personne doit être libre et éclairé ». En l’absence d’une information adéquate, le consentement de la patiente n’était pas pleinement éclairé, ce qui constitue une faute. Ce manquement a eu des conséquences sur la prise de décision de la patiente concernant son traitement et a contribué à son préjudice. Quel est le fondement de la responsabilité du médecin dans le choix de la prothèse définitive ?Le tribunal a retenu que le médecin a commis une erreur technique dans le choix inadapté de la prothèse définitive lors de l’opération du 4 novembre 2010. L’article 1382 du Code civil stipule que « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». En choisissant une prothèse inappropriée, le médecin a engagé sa responsabilité en raison d’une faute dans l’exercice de son art médical, entraînant des préjudices pour la patiente. Quel est le montant des préjudices reconnus par le tribunal ?Le tribunal a condamné le médecin à verser à la patiente un total de 119 180,14 € pour ses préjudices corporels, décomposés en plusieurs postes. Les articles 1240 et 1241 du Code civil prévoient que la réparation du dommage doit être intégrale. Les postes de préjudice incluent les frais divers, la perte de gains professionnels actuels et futurs, ainsi que des préjudices esthétiques et sexuels. Chaque poste a été évalué en fonction des éléments de preuve présentés, et le tribunal a veillé à ce que l’indemnisation soit proportionnelle aux préjudices subis. Quel est le rôle de l’expert médical dans cette affaire ?L’expert médical a été commis pour examiner la patiente et donner son avis sur le lien entre le défaut d’information et les préjudices subis. L’article 232 du Code de procédure civile précise que « le juge peut ordonner une expertise pour éclairer sa décision ». L’expert a ainsi contribué à établir le lien de causalité entre les fautes du médecin et les conséquences sur la santé de la patiente, ce qui a été déterminant pour l’évaluation des préjudices. Quel est l’impact de l’invalidité sur les demandes d’indemnisation ?L’invalidité de la patiente a eu un impact significatif sur ses demandes d’indemnisation, car elle a été placée en invalidité totale et définitive. L’article L. 341-1 du Code de la sécurité sociale définit l’invalidité comme une réduction de la capacité de travail. Cette situation a été prise en compte pour évaluer les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle, justifiant ainsi des demandes d’indemnisation élevées. Quel est le fondement des demandes d’indemnisation pour préjudice sexuel ?Les demandes d’indemnisation pour préjudice sexuel reposent sur l’impact des interventions médicales sur la vie intime de la patiente. L’article 1382 du Code civil, qui impose la réparation des dommages causés par une faute, s’applique également à ce type de préjudice. La patiente a démontré que les conséquences des interventions ont affecté sa vie sexuelle, justifiant ainsi une demande d’indemnisation spécifique pour ce préjudice. |
N° Portalis DBVM-V-B7I-MLTH
C1
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SELAS ABAD & VILLEMAGNE – AVOCATS ASSOCIÉS
la SCP DUNNER-CARRET-DUCHATEL-ESCALLIER
la SELARL BSV
Me Anaïs BOURGIER
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU LUNDI 31 MARS 2025
Appel d’un Jugement (N° R.G. 15/00147)
rendu par le tribunal judiciaire de Grenoble
en date du 27 juin 2024
suivant déclaration d’appel du 01 août 2024
APPELANTE :
Mme [G] [D]
née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 8]
représentée par Me Sébastien VILLEMAGNE de la SELAS ABAD & VILLEMAGNE-AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et plaidant par Me Wilfried WEBER de la SELARL CABINET D’AVOCAT WEBER, avocat au barreau d’ANNECY
INTIMÉS :
M. [X] [T]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 8]
S.A. PANACEA ASSURANCES en qualité d’assureur de la responsabilité civile du Dr [X] [T], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège situé :
[Adresse 6]
[Localité 11]
tous deux représentés par Me Isabelle CARRET de la SCP DUNNER-CARRET-DUCHATEL-ESCALLIER, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et plaidant par Me Aurélie EUSTACHE de la SELARL BOIZARD EUSTACHE GUILLEMOT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
CAISSE AUTONOME DE RETRAITE DES MÉDECINS DE FRANCE (CARMF) Prise en la personne de son représentant légal en exercice, domiciliée en cette qualité au siège situé :
[Adresse 9]
[Localité 13]
représentée par Me Laure BELLIN de la SELARL BSV, avocate au barreau de GRENOBLE, et ayant pour avocat plaidant Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS, substitué à l’audience par Me Inès Rimet, avocate au barreau de Grenoble
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE (CPAM) de l’Isère, dont le siège social est : [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, et ayant pour mandataire de gestion, la CPAM DU RHONE dont le siège social est :
[Adresse 4],
[Localité 10]
représentée par Me Anaïs BOURGIER, avocate au barreau de GRENOBLE, postulante, et ayant pour avocat plaidant Me Nicolas ROGNERUD de la SELARL AXIOME AVOCATS, avocat au barreau de LYON
Société MUTUELLE ASS GENER MEDECIN DE FRANCE PRÉVOYANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège situé :
[Adresse 1]
[Localité 12]
Non représentée
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
Mme Véronique Lamoine, conseiller
Assistées lors des débats de Mme Anne Burel, greffier
DÉBATS :
A l’audience publique du 17 février 2025 , Madame Lamoine, conseiller, a été entendue en son rapport.
Les avocats ont été entendus en leurs observations.
Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTION DES PARTIES
Le 7 février 2006, Mme [G] [D], née le [Date naissance 5] 1954, médecin psychiatre qui exerçait en libéral et comme salariée d’un centre de formation, a consulté le Dr [X] [T] pour un cancer du sein gauche.
Hospitalisée à la clinique [14], elle a rencontré de nouveau le Docteur [T], la veille de son intervention, le 22 février 2006.
Le 23 février 2006, le Dr [T] a pratiqué :
une mastectomie radicale du sein gauche avec curage axillaire et mammaire interne gauches et une exploration chirurgicale du sein droit,
la mise en place d’un expandeur de 400 cc rempli à 100 cc rétropectoral gauche en vue d’une reconstruction.
Aucun traitement adjuvant du cancer n’a été mis en place suite à l’intervention chirurgicale.
Mme [D] s’est plainte notamment de n’avoir pas été informée de ce que l’expandeur n’était qu’une prothèse provisoire nécessitant une seconde intervention.
Elle a ensuite été suivie par le Dr [T], qui a, courant 2006, injecté à plusieurs reprises du sérum physiologique dans l’expandeur, pour parvenir à 400 cc le 13 mai 2006.
En mai 2007, Mme [D] revoit le Dr [T] qui dégonfle l’expandeur ramené alors à 260 cc.
Mise en arrêt de travail renouvelé au fur et à mesure depuis l’intervention, Mme [D] a été placée en invalidité totale et définitive le 8 mai 2009.
En septembre 2010, Mme [D] a repris attache avec le Dr [T] pour mise en place de la prothèse définitive.
Le 4 novembre 2010, le Dr [T] a mis en place une prothèse de 390 cc après avoir réalisé un lambeau d’avancement pour repositionner le sillon sous mammaire gauche de façon symétrique.
Mme [D] s’est plainte du volume excessif de la prothèse et d’une asymétrie de ses deux seins.
En novembre 2011, Mme [D] a assigné le Dr [T] et la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) de l’Isère en référé pour voir désigner un expert médical pour se prononcer sur les responsabilités et évaluer ses préjudices.
Par ordonnance du 1er février 2012, le Pr [S] du service d’obstétrique, chirurgie gynécologique et cancérologique du Centre hospitalier [Localité 15] Sud a été commis en qualité d’expert ; il s’est adjoint comme sapiteur, le Dr [Z], chirurgien plasticien.
Le rapport de cette première expertise a été déposé le 26 juin 2013.
Par acte du 23 décembre 2014, Mme [D] a assigné le Dr [T] et la CPAM de l’Isère devant le tribunal de grande instance de Grenoble pour voir juger le Dr [T] responsable, et voir ordonner une nouvelle expertise pour chiffrer ses préjudices.
Par un jugement mixte du 4 avril 2019, le tribunal saisi a, en substance :
Dit que le Dr [T] a manqué à son obligation d’information concernant la mise en place de l’expandeur provisoire nécessitant une seconde intervention ;
Dit que le Dr [T] a commis une erreur technique dans le choix inadapté de la prothèse définitive lors de l’opération du 4 novembre 2010 ;
Condamné le Dr [T] à verser à Mme [D] une provision de 5 000 ‘ à valoir sur ses préjudices corporels et une provision de 2 000 ‘ au titre du défaut d’information ;
Commis le Dr [W] [H] spécialisé en oncologie, en qualité d’expert aux fins d’examiner Mme [D], de donner son avis sur le lien entre le défaut d’information préalable à la première intervention, l’erreur médicale constatée, et les préjudices de Mme [D] en proposant une estimation médico-légale de ces derniers.
Le Dr [H] s’est adjoint un sapiteur en la personne du Dr [E] [I], psychiatre.
Le Dr [H] a, le 3 avril 2021, déposé un rapport définitif auquel était annexé le rapport d’expertise du Dr [I]. La date de consolidation de la patiente a été fixée par les deux experts au 26 juin 2019, date de la dernière intervention chirurgicale en remplacement de la prothèse définitive et reconstruction mammaire par un chirurgien plasticien, le Dr [K], à [Localité 15].
Mme [D] a appelé en cause la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France (la CARMF) et la Mutuelle AssGener Médecins France Prévoyance. La société PANACEA ASSURANCES est intervenue volontairement à l’instance en qualité d’assureur du Dr [T].
Aux termes de ses dernières écritures devant le tribunal, Mme [D] réclamait l’indemnisation de ses préjudices à hauteur de la somme totale de 2’775’449,71 ‘ selon un détail ventilé poste par poste, pour lequel il est renvoyé à ses conclusions.
Par un deuxième jugement en date du 27 juin 2024, la juridiction saisie devenue tribunal judiciaire a :
– constaté l’intervention volontaire de la société PANACEA ASSURANCES,
– déclaré le jugement commun à la CPAM de l’Isère, la Caisse autonome de retraite des médecins de France, la Mutuelle AssGener Médecins France Prévoyance et la société PANACEA ASSURANCES,
– condamné le Dr [T] à payer à Mme [D] la somme de 119 180,14 ‘ au titre de son préjudice corporel se décomposant comme suit, outre intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement :
frais divers : 3.350 ‘
perte de gains professionnels actuels : 64.808,35 ‘
dépenses de santé futures : 5.654,95 ‘
perte de gains professionnels futurs : 21.504,75 ‘
incidence professionnelle : 181.068,50 ‘
déficit fonctionnel temporaire : 20.975,60 ‘
souffrances endurées : 7.000 ‘
préjudice esthétique temporaire : 9.000 ‘
déficit fonctionnel permanent : 12.100 ‘
préjudice esthétique permanent : 7.000 ‘
préjudice sexuel : 2.000 ‘
préjudice d’impréparation : 1.500 ‘
après déduction de la provision de 5 000 ‘ et des débours des organismes de sécurité sociale à hauteur de 216.782,01’,
condamné in solidum le Dr [T] et la société PANACEA ASSURANCES à verser la somme de 17 304,36 ‘ à la CPAM de l’Isère au titre de ses débours définitifs, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,
ordonné la capitalisation des intérêts,
condamné in solidum le Dr [T] et la société PANACEA ASSURANCES à verser la somme de 1 114 ‘ à la CPAM de l’Isère au titre de l’indemnité de frais de gestion ;
condamné in solidum Dr [T] et la société PANACEA ASSURANCES à verser la somme de 56 640,74 ‘ à la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France,
condamné in solidum le Dr [T] et la société PANACEA ASSURANCES à payer à Mme [D] la somme de 10 000 ‘ en application de l’article 700 du code de procédure civile,
rejeté pour le surplus les autres demandes des parties ;
condamné in solidum le Dr [T] et la société PANACEA ASSURANCES aux dépens.
ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration au greffe en date du 1er août 2024, Mme [D] a interjeté appel de ce dernier jugement, appel limité à certains chefs de préjudice ainsi qu’il sera détaillé plus avant.
Par dernières conclusions (n° 3) notifiées le 13 février 2025, elle demande la réformation du jugement déféré sur les sommes qui lui ont été allouées aux titres des :
frais divers,
pertes de gains professionnels actuels,
pertes de gains professionnels futurs,
incidence professionnelle,
préjudice sexuel,
et en ce qu’il a rejeté sa demande au titre de l’impossibilité de vendre sa patientèle,
et demande la condamnation du Dr [T] et de la société PANACEA à lui verser les sommes suivantes :
A titre principal :
– frais divers
5 014,60 ‘
– pertes de gains professionnels actuels
1 456 503,86 ‘
– perte de gains professionnels futurs
800 614,99 ‘
– incidence professionnelle
444 160,50 ‘
– impossibilité de vendre sa patientèle
45 726 ‘
– préjudice sexuel
20 000 ‘
A titre subsidiaire : si la cour, par impossible, devait appliquer un droit à indemnisation des préjudices professionnels limité à 50 % pour suivre l’avis du Dr [H], contraire en cela à l’avis du Dr [I], condamner le Dr [T] et la société PANACEA à lui payer les sommes suivantes, en faisant application du droit de préférence :
– frais divers
5 014,60 ‘
– pertes de gains professionnels actuels
802 654,39 ‘
– perte de gains professionnels futurs
400 307,49 ‘
– incidence professionnelle
222 080,25 ‘
– impossibilité de vendre sa patientèle
22 863 ‘
– préjudice sexuel
20 000 ‘
Elle demande encore la condamnation du Dr [T] et de la société PANACEA à lui payer une somme de 6 000 ‘ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens avec application, au profit de son avocat postulant, des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir, à l’appui de ses demandes :
qu’elle n’a pu reprendre aucune activité professionnelle après l’intervention du Dr [T] du 23 février 2006 et a dû être placée en invalidité à peine un peu plus de trois ans après,
que le Dr [Y] [I], médecin psychiatre sollicitée comme sapiteur par le Dr [H], a estimé que son placement en invalidité résultait uniquement des fautes commises par le Dr [T], en soulignant qu’elle n’avait présenté aucun état antérieur de type trouble psychique avant les interventions de ce médecin,
que les suites psychiques sévères qu’elle a présentées, notamment constatées en décembre 2013 soit trois ans après la seconde intervention, ne sauraient être considérés comme une conséquence habituelle d’une intervention de mastectomie totale traitée dans les règles de l’art et avec respect du patient,
qu’il n’y a donc pas lieu de considérer, comme l’a fait le Dr [H] sans suivre en cela l’avis de son sapiteur, et comme l’a retenu le tribunal, que l’arrêt prématuré de son activité professionnelle ne serait imputable qu’à hauteur de 50 % aux fautes du Dr [T], le reste résultant, selon cet expert mais à tort selon elle, de la pathologie initiale et de ses suites.
Le Dr [T] et son assureur la société PANACEA, par dernières conclusions (n° 2) notifiées le 3 février 2025, demandent l’infirmation du jugement déféré sauf en ce qu’il a rejeté la demande de Mme [D] au titre de l’impossibilité de céder sa patientèle, et, invoquant une perte de chance limitée à 10 % au titre des conséquences du défaut d’information :
le rejet des demandes de la CPAM de l’Isère et de la CARMF,
le rejet des demandes de Mme [D] aux titres :
de dépenses de santé futures,
des pertes de gains professionnels actuels,
des pertes de gains professionnels futurs,
de l’incidence professionnelle,
d’un déficit fonctionnel permanent,
d’un préjudice sexuel,
la limitation des autres postes de préjudice aux sommes suivantes :
au titre du déficit fonctionnel temporaire lié au défaut d’information : 682,50 ‘, et confirmation de celui résultant de la taille excessive de la prothèse,
au titre des souffrances endurées : 4 400 ‘,
au titre d’un préjudice esthétique temporaire : 4 000 ‘ seulement en lien avec la taille excessive de la prothèse, et rejet d’une demande à ce titre liée au défaut d’information,
au titre du préjudice esthétique permanent : 800 ‘.
Ils concluent encore :
à la réduction de l’indemnité allouée à Mme [D] en première instance au titre des frais irrépétibles,
au rejet de cette demande à hauteur d’appel,
à la condamnation, à titre reconventionnel, de la CARMF à leur payer une somme de 1 500 ‘ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire, sur les postes de pertes de gains professionnels actuels, pertes de gains professionnels futurs, incidence professionnelle et sur la créance de la CARMF, ils demandent :
que soit ordonnée une nouvelle expertise psychiatrique délocalisée hors le ressort de la cour d’appel de Grenoble, aux fins de se prononcer, au terme d’une discussion étayée, sur la cause des arrêts de travail de Mme [D] et sur celle du placement de cette dernière en invalidité,
qu’il soit sursis à statuer sur l’ensemble de ces postes dans l’attente du dépôt du rapport de cette expertise.
Il est renvoyé à leurs conclusions pour plus ample exposé.
La CARMF, par dernières conclusions d’intimée et d’appel incident (n° 3) notifiées le 13 janvier 2025, demande l’infirmation du jugement :
sur le montant qui lui a été alloué au titre des indemnités journalières et de la rente d’invalidité versées,
en ce qu’il a rejeté sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Elle demande à cette cour, statuant de nouveau et y ajoutant, de :
débouter le Dr [T] et son assureur la société PANACEA ASSURANCES de toutes leurs demandes, fins et conclusions formées à son encontre,
de les condamner in solidum à lui payer les sommes de :
199 382,60 ‘ au titre des indemnités journalières et de la rente d’invalidité versées,
1 500 ‘ au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,
2 000 ‘ au titre de ceux exposés en appel.
Il est renvoyé à ses conclusions pour plus ample exposé.
La CPAM de l’Isère, par dernières conclusions (n° 2) notifiées le 3 février 2025, demande la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à actualiser l’indemnité forfaitaire de gestion à 1 212 ‘ compte-tenu du dernier arrêté en vigueur du 23 décembre 2024, au lieu des 1 114 ‘ qui lui ont été alloués à ce titre par le tribunal.
Elle demande encore condamnation in solidum du Dr [T] et de la société PANACEA ASSURANCES à lui payer la somme de 2 500 ‘ en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
Il est renvoyé à ses conclusions pour plus ample exposé.
La société mutuelle AssGener Médecin de France, régulièrement citée à comparaître devant cette cour par acte délivré à une personne se disant habilitée, n’a pas constitué avocat. Le présent arrêt sera réputé contradictoire en application des dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.
L’instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 17 février 2025.
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement déféré seulement :
en ce qu’il a condamné le Dr [T] et son assureur la société PANACEA à payer à Mme [D] les sommes suivantes, outre intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement :
12 864,60 ‘ au titre du déficit fonctionnel temporaire consécutif à la faute du Dr [T] dans le choix de la prothèse définitive,
7 000 ‘ au titre des souffrances endurées,
9 000 ‘ au titre du préjudice esthétique temporaire consécutif à la faute dans le choix de la prothèse,
1 500 ‘ au titre du préjudice d’impréparation,
2 000 ‘ au titre du préjudice sexuel,
en ce qu’il a condamné in solidum le Dr [T] et la société PANACEA ASSURANCES à verser la somme de 17 304,36 ‘ à la CPAM de l’Isère au titre de ses débours définitifs, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,
en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts,
en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
L’infirme pour le surplus et, statuant de nouveau et y ajoutant :
Précise que la somme de 7 000 ‘ allouée au titre des souffrances endurées se décompose en :
3 600 ‘ au titre du défaut d’information sur la prothèse provisoire,
3 400 ‘ au titre de la faute dans le choix de la prothèse définitive.
Condamne le Dr [T] et son assureur la société PANACEA à payer à Mme [D] les sommes suivantes, sous déduction des provisions déjà versées :
4 847,20 ‘ au titre des frais divers,
12 000 ‘ au titre de l’incidence professionnelle touchant à la souffrance morale,
12 346,02 ‘ au titre de la perte de chance de céder sa patientèle,
134 666,46’ au titre de la perte de gains professionnels avant consolidation,
158 338,48 ‘ au titre de la perte de gains professionnels après consolidation,
117 562,38 ‘ au titre de la perte de droits à la retraite,
6 165 ‘ au titre du déficit fonctionnel temporaire consécutif au défaut d’information sur la prothèse provisoire,
3 600 ‘ au titre des souffrances endurées consécutives au défaut d’information sur la prothèse provisoire,
3 000 ‘ au titre du préjudice esthétique permanent,
5 000 ‘ supplémentaires sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne in solidum le Dr [T] et son assureur la société PANACEA à payer à la CPAM de l’Isère :
la somme de 1 212 ‘ au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion,
celle de 2 500 ‘ en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Déboute la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France (CARMF) de l’ensemble de ses demandes.
Rejette toutes demandes plus amples ou contraires des parties.
Condamne in solidum le Dr [T] et son assureur la société PANACEA aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de la procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
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