L’Essentiel : Dans l’affaire opposant Poiray à Ebay, le Tribunal de grande instance de Paris a statué sur la responsabilité des hébergeurs en matière de contrefaçon. Bien que le fabricant du bijou contrefait ait été reconnu coupable, la responsabilité d’Ebay a été écartée. Les juges ont souligné que la société n’avait pas été mise en demeure de communiquer l’identité du vendeur avant ou après l’instance. Selon la loi de 2004, la responsabilité des hébergeurs n’est engagée que s’ils sont saisis par une autorité judiciaire et n’agissent pas promptement. Ebay a été considérée comme un simple intermédiaire technique, exempt de responsabilité.
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Ayant constaté qu’une contrefaçon de l’un ses bijoux était commercialisé sur le site Ebay, le créateur et la société Poiray, cessionnaire des droits d’exploitation sur le bijou, ont assigné en contrefaçon, publicité mensongère et concurrence déloyale les sociétés Orphelie (fabricant du bijou), CJSF (fournisseur du moule du bijou), et Ebay France. Concernant le délit de contrefaçon, le Tribunal a considéré que le fabricant du bijou contrefait, en sa qualité de professionnel, se devait de vérifier avant d’apposer son sceau, que le modèle en cause ne faisait pas l’objet d’un droit de propriété intellectuelle. Bien que la bonne foi soit indifférente en matière de contrefaçon, les juges ont néanmoins relevé que la diffusion publicitaire du modèle dans des magazines de grande diffusion à l’échelon national ne permettait pas au fabricant de se prévaloir d’une ignorance du caractère contrefaisant du bijou. Le délit de contrefaçon était bien consommé à son encontre. Concernant la responsabilité de l’hébergeur, les juges ont retenu que la société Ebay n’avait pas été mise en demeure ni avant l’introduction de l’instance, ni postérieurement à celle-ci, de communiquer les coordonnées du vendeur du bijou contrefaisant. Or, au sens de l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004, les personnes assurant le stockage de données pour leur mise à disposition dans le cadre d’un service de communication au public en ligne, ne peuvent voir leur responsabilité (civile ou pénale) engagée du fait des contenus stockés que si, ayant été saisies par une autorité judiciaire, elles n’ont pas agi promptement pour empêcher l’accès à ces données ou en rendre l’accès impossible. La société Ebay ne se trouvait donc pas « saisie » au sens de la loi. Les juges ont également précisé que les demandeurs n’avaient pas eu recours à la procédure d’identification des vendeurs, mise en place par la société Ebay pour les titulaires de droits de propriété intellectuelle (« VERO Program »). Considérant également, que les demandeurs n’avaient pas agi promptement, et qu’ils n’avaient adressé à la société Ebay aucune demande sur l’identité du vendeur, la responsabilité de la société Ebay a été écartée. Elément clef de la décision, les juges ont rapproché l’activité de la société Ebay, fournisseur d’une plate-forme de commerce à des utilisateurs, de celle d’un organisateur de salons d’exposition et de vente, ce qui tend à conforter la qualification de simple intermédiaire technique. TGI de Paris, 3ème ch., 26 octobre 2004 Mots clés : responsabilité des hébergeurs,hebergeurs,hebergement,ebay,intermediaire,technique,illicite Thème : Responsabilite des hebergeurs A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de grande instance de Paris | 26 octobre 2004 | Pays : France |
Q/R juridiques soulevées :
Quel était le motif de l’assignation en justice par le créateur et la société Poiray ?Le créateur et la société Poiray ont assigné en justice plusieurs sociétés, dont Orphelie, CJSF et Ebay France, en raison de la contrefaçon d’un de leurs bijoux commercialisé sur le site Ebay. Cette action en justice a également inclus des accusations de publicité mensongère et de concurrence déloyale. Le créateur, en tant que titulaire des droits d’exploitation, a agi pour protéger son œuvre contre l’utilisation non autorisée et la diffusion de produits contrefaits, ce qui constitue une violation des droits de propriété intellectuelle. Comment le Tribunal a-t-il évalué la responsabilité du fabricant du bijou contrefait ?Le Tribunal a jugé que le fabricant du bijou contrefait, en tant que professionnel, avait l’obligation de vérifier que le modèle qu’il produisait ne violait pas les droits de propriété intellectuelle d’autrui. Il a été souligné que la bonne foi du fabricant n’était pas un facteur atténuant en matière de contrefaçon. De plus, la diffusion publicitaire du modèle dans des magazines de grande renommée a été considérée comme une preuve que le fabricant ne pouvait pas ignorer le caractère contrefaisant de son produit. Quelle a été la position du Tribunal concernant la responsabilité d’Ebay ?Le Tribunal a conclu que la société Ebay ne pouvait pas être tenue responsable de la contrefaçon, car elle n’avait pas été mise en demeure de communiquer les coordonnées du vendeur du bijou contrefaisant. Selon l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique, la responsabilité des hébergeurs ne peut être engagée que s’ils ont été informés par une autorité judiciaire et n’ont pas agi rapidement pour retirer le contenu illicite. Dans ce cas, Ebay n’avait pas été « saisie » au sens de la loi, ce qui a conduit à l’exclusion de sa responsabilité. Quelles procédures les demandeurs n’ont-ils pas suivies concernant Ebay ?Les demandeurs n’ont pas utilisé la procédure d’identification des vendeurs mise en place par Ebay, connue sous le nom de « VERO Program ». Cette procédure est spécifiquement conçue pour aider les titulaires de droits de propriété intellectuelle à identifier les vendeurs de produits contrefaits sur la plateforme. De plus, les demandeurs n’ont pas agi rapidement ni adressé de demande à Ebay concernant l’identité du vendeur, ce qui a également joué un rôle dans la décision du Tribunal d’écarter la responsabilité d’Ebay. Comment le Tribunal a-t-il qualifié l’activité d’Ebay dans cette affaire ?Le Tribunal a comparé l’activité d’Ebay à celle d’un organisateur de salons d’exposition et de vente, ce qui a renforcé l’idée qu’Ebay agissait en tant que simple intermédiaire technique. Cette qualification est importante car elle détermine le niveau de responsabilité d’Ebay en tant qu’hébergeur de contenu. En tant qu’intermédiaire, Ebay n’est pas responsable des contenus mis en ligne par ses utilisateurs tant qu’il n’est pas informé de leur caractère illicite et qu’il n’a pas été en mesure d’agir promptement pour les retirer. |
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