Responsabilité et garantie en matière de contamination transfusionnelle : enjeux de preuve et de régularité des titres exécutoires.

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Responsabilité et garantie en matière de contamination transfusionnelle : enjeux de preuve et de régularité des titres exécutoires.

L’Essentiel : Mme [U]-[Z], née en 1972, a été contaminée par le virus de l’hépatite C après avoir reçu des transfusions sanguines entre 1977 et 1992. En 2013, l’ONIAM a reconnu l’origine transfusionnelle de sa contamination et a mis en place des protocoles d’indemnisation. AXA France, contestataire de l’ordre de recouvrement émis par l’ONIAM, a saisi le tribunal administratif. Après plusieurs procédures, le tribunal a jugé le titre exécutoire valide et a débouté AXA de ses demandes, condamnant la société à verser des intérêts à l’ONIAM. Le jugement a été rendu le 21 novembre 2024.

Contexte médical et contamination

Mme [M] [U]-[Z], née en 1972, a reçu de nombreuses transfusions sanguines entre 1977 et 1992 en raison d’une thalasso-drépanocytose. En avril 1993, elle a été diagnostiquée avec une contamination par le virus de l’hépatite C, confirmée en juillet 1997. Elle a attribué cette contamination aux produits sanguins reçus lors de ses hospitalisations.

Demande d’indemnisation

En conséquence, Mme [U] [Z] a saisi l’ONIAM pour obtenir une indemnisation. Le 25 novembre 2013, l’ONIAM a reconnu l’origine transfusionnelle de sa contamination et a mis en place plusieurs protocoles d’indemnisation. Le 10 juillet 2018, l’ONIAM a émis un ordre à recouvrer exécutoire à l’encontre de la société AXA France pour un montant total de 23 573 €.

Contestation par AXA France

La société AXA a contesté cet ordre et a saisi le Tribunal administratif de Montreuil, qui a renvoyé l’affaire au Tribunal administratif de Marseille. Le 5 juillet 2021, ce dernier s’est déclaré incompétent, arguant que les titres en litige ne pouvaient pas être considérés comme des contrats au sens du code des marchés publics.

Procédures judiciaires

Le 26 août 2022, AXA a assigné l’ONIAM pour annuler le titre de recettes n°682, le déclarant illégal. L’ONIAM a ensuite appelé la CPAM du Var en intervention forcée. Les deux procédures ont été jointes le 27 mai 2024. AXA a maintenu ses demandes et a ajouté des arguments concernant l’irrégularité du titre.

Arguments d’AXA France

AXA a soutenu que l’ONIAM n’avait pas prouvé qu’il avait indemnisé la victime avant d’émettre le titre. De plus, elle a contesté la signature du titre et l’absence de précisions sur les bases de liquidation de la créance. AXA a également affirmé que l’ONIAM n’avait pas démontré la responsabilité de l’établissement de transfusion.

Réponse de l’ONIAM

L’ONIAM a demandé au tribunal de reconnaître la compétence de son directeur pour émettre des titres exécutoires et de juger que le titre n°682 était régulier. Il a également soutenu que l’enquête transfusionnelle n’avait pas pu établir l’innocuité des produits sanguins administrés à Mme [U]-[Z].

Décision du tribunal

Le tribunal a examiné la régularité externe et interne du titre exécutoire. Il a conclu que le titre était valide, que la société AXA était bien l’assureur des établissements de transfusion concernés, et que l’ONIAM avait respecté ses obligations. AXA a été déboutée de ses demandes, et la société a été condamnée à payer les intérêts au taux légal sur la somme due à l’ONIAM.

Conséquences financières

La société AXA a été condamnée à verser à l’ONIAM la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les dépens de la procédure. Le jugement a été rendu le 21 novembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la compétence de l’ONIAM pour émettre des titres exécutoires en recouvrement de créances subrogatoires ?

L’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) a la compétence d’émettre des titres exécutoires en recouvrement de créances subrogatoires, conformément à l’article L.1221-14 du Code de la santé publique. Cet article stipule que les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l’hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins sont indemnisées par l’ONIAM.

L’alinéa 6 de cet article précise que la transaction entre l’ONIAM et la victime est opposable à l’assureur, ce qui renforce la légitimité de l’ONIAM à agir en recouvrement des sommes versées. Ainsi, l’ONIAM peut directement demander à être garanti des sommes qu’il a versées, ce qui inclut l’émission de titres exécutoires pour le recouvrement de créances subrogatoires.

En l’espèce, l’ONIAM a émis un titre exécutoire à l’encontre de la société AXA, en sa qualité d’assureur des établissements ayant fourni des produits sanguins à la victime. Cela s’inscrit dans le cadre de la solidarité nationale pour indemniser les victimes de contaminations transfusionnelles.

Quelles sont les exigences de régularité externe d’un titre exécutoire ?

La régularité externe d’un titre exécutoire est régie par l’article L.212-1 du Code des relations entre le public et l’administration. Cet article stipule que toute décision prise par une administration doit comporter la signature de son auteur, ainsi que la mention lisible de son prénom, nom et qualité.

Dans le cas présent, le titre exécutoire émis par l’ONIAM est revêtu d’un timbre humide mentionnant le nom du directeur de l’ONIAM, M. [K] [F], suivi d’une signature. Cela permet d’identifier clairement l’auteur de la décision, conformément aux exigences de l’article précité.

De plus, l’article 24 du décret du 7 novembre 2012 impose que toute créance liquidée indique les bases de sa liquidation. L’ordre à recouvrer en question mentionne explicitement que la somme correspond à celle versée à Mme [U] [Z] en vertu de plusieurs protocoles transactionnels d’indemnisation, ce qui satisfait également cette exigence.

Ainsi, le titre exécutoire n’encourt aucun grief de nullité en raison de sa régularité externe.

Quelles sont les conditions de la responsabilité d’un établissement de transfusion sanguine ?

La responsabilité d’un établissement de transfusion sanguine est engagée lorsque plusieurs conditions sont réunies, conformément à l’article 102 de la loi du 4 mars 2002. Cet article précise que, en cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le virus de l’hépatite C, le demandeur doit apporter des éléments permettant de présumer que la contamination provient d’une transfusion de produits sanguins.

Les conditions à établir sont les suivantes :

1. **Existence d’une transfusion sanguine** : La matérialité de la transfusion doit être prouvée.

2. **Origine transfusionnelle de la contamination** : Il doit être admis que la contamination est d’origine transfusionnelle.

3. **Fourniture d’un produit par l’établissement** : L’établissement en cause doit avoir fourni au moins un produit administré à la victime.

4. **Innocuité du produit non prouvée** : L’établissement doit prouver que le produit n’était pas contaminé.

Dans le cas présent, l’ONIAM a démontré que Mme [U] [Z] a reçu des produits sanguins de l’établissement de [Localité 9] et que la société AXA, en tant qu’assureur, n’a pas prouvé l’innocuité des produits. Ainsi, la responsabilité de l’établissement est engagée, et la garantie de l’assureur est due.

Quels sont les droits de l’ONIAM en matière d’intérêts sur les sommes dues ?

L’article 1231-6 du Code civil stipule que les dommages et intérêts dus en raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent en intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Dans le cadre de l’ONIAM, la demande d’intérêts sur la somme due par la société AXA ne se heurte pas au principe du non cumul de l’action juridictionnelle et de l’émission d’un titre, car les intérêts réclamés ne sont pas visés dans le titre.

Ainsi, la somme due par la société AXA en vertu du titre exécutoire produira des intérêts au taux légal à compter de la date de la requête en contestation, soit le 31 octobre 2018. De plus, conformément à l’article 1343-2 du Code civil, ces intérêts produiront eux-mêmes des intérêts dès lors qu’ils seront dus pour au moins une année entière.

Cela signifie que l’ONIAM a le droit de réclamer des intérêts sur les sommes dues, augmentant ainsi le montant total à recouvrer.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/438 du 21 Novembre 2024

Enrôlement : N° RG 22/08756 – N° Portalis DBW3-W-B7G-2JHW

AFFAIRE : S.A. AXA FRANCE IARD( la SELARL ABEILLE & ASSOCIES)
C/ ONIAM (la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS)

DÉBATS : A l’audience Publique du 26 Septembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente, juge rapporteur
BERTHELOT Stéphanie, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte

Vu le rapport fait à l’audience

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 21 Novembre 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BESANÇON Bénédicte, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

réputé contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

S.A. AXA FRANCE IARD, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

CONTRE

DEFENDEURS

ONIAM, dont le siège social est sis [Adresse 13]

représenté par Maître Patrick DE LA GRANGE de la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Var, dont le siège social est sis [Adresse 10]

défaillant

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [M] [U]-[Z], née le [Date naissance 1] 1972 a subi de nombreuses transfusions sanguines en raison d’une thalasso-drépanocytose diagnostiquée à sa naissance, sur la période située entre 1977 et 1992 lors de ses hospitalisations à l’hôpital [7] à [Localité 9], l’hôpital [11] à [Localité 12] et à l’hôpital de [Localité 4].

Le 5 avril 1993, sa contamination par le virus de l’hépatite C a été diagnostiquée, puis confirmée par un examen biologique le 25 juillet 1997.

Imputant sa contamination aux produits sanguins qu’elle a reçus, Mme [U] [Z] a saisi l’ONIAM d’une demande d’indemnisation.

Par décision en date du 25 novembre 2013, l’ONIAM a reconnu l’origine transfusionnelle de la contamination de Mme [U] [Z] et plusieurs protocoles transactionnels d’indemnisation ont été régularisés entre les parties.

L’ONIAM a émis le 10 juillet 2018 un ordre à recouvrer exécutoire n°682 à l’encontre de la société AXA France par lequel il sollicite le règlement de la somme totale de 23 573€ correspondant aux sommes versées à Mme [U] [Z].

La société AXA a contesté le titre de recettes et a saisi par requête le Tribunal administratif de Montreuil qui a renvoyé l’affaire devant le Tribunal administratif de Marseille.
Par ordonnance du 05 juillet 2021, le Tribunal administratif de MARSEILLE s’est déclaré incompétent, les titres exécutoires en litige, fondés sur un contrat conclu antérieurement à l’entrée en vigueur du décret du 27 février 1998, ne pouvant recevoir le caractère d’un contrat passé en application du code des marchés publics.

Par assignation en date du 26 août 2022, la société d’assurance AXA FRANCE IARD a assigné l’ONIAM devant le tribunal de céans aux fins de :
– Juger que le titre de recettes n°682 est entaché d’illégalité interne comme externe ;
– Prononcer l’annulation du titre de recettes n°682 ;
– Débouter l’ONIAM de sa demande reconventionnelle de condamnation à titre subsidiaire, et de sa demande de condamnation aux intérêts au taux légaux et de capitalisation des intérêts ;
– Condamner l’ONIAM à lui verser la somme de 2 000€ en application de l’article L.761-1 du Code de justice administrative.

Par assignation en doute du 12 janvier 2024, l’ONIAM a appelé la CPAM du Var en intervention forcée.

Par ordonnance en date du 27 mai 2024, les deux procédures ont fait l’objet d’une jonction.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 26 juin 2024, la société AXA FRANCE IARD maintient ses demandes ; y ajoutant, elle demande que l’ONIAM soit débouté de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que le titre est entaché d’irrégularités externes comme internes ; que sur le plan externe, l’ONIAM n’est pas recevable à émettre un titre exécutoire pour solliciter la garantie de la société AXA, faute de démontrer qu’il a indemnisé la victime ; que si l’ONIAM verse les attestations de paiement dans le cadre de la présente instance, il ne peut y avoir régularisation a posteriori du titre, cette communication tardive d’une preuve de l’indemnisation préalable ne purgeant pas la nullité du titre ; que l’avis de sommes à payer n°682 est irrégulier en ce qu’il n’a pas été signé par son auteur ; qu’en effet, si le titre de recette litigieux mentionne en qualité d’ordonnateur du Directeur de l’ONIAM le nom de M.[K] [F], ce titre ne comporte pas sa signature de sorte qu’il est privé d’une garantie d’identification de l’auteur de la décision ; que de plus, le titre de recettes émis par le comptable de l’ONIAM ne précise pas les bases de la liquidation de la créance réclamée ; que l’annexion des protocoles transactionnels n’est pas de nature à pallier cette carence ; que dès lors, la société AXA n’a pas été en mesure de discuter les bases de liquidation des sommes réclamées ; que le titre est entaché d’illégalités internes ; que l’existence même de la créance n’est pas établie dans la mesure où la responsabilité de l’assuré n’est pas démontrée ; que pour mobiliser sa garantie, il appartient à l’ONIAM de démontrer la responsabilité du centre assuré et de démontrer que les produits sanguins fournis par le centre assuré ont causé un dommage corporel à la victime ; que l’ONIAM ne démontre pas l’origine transfusionnelle de la contamination ; qu’il ne verse au soutien de son titre aucun rapport d’expertise permettant de conclure à l’origine transfusionnelle de la contamination ; que la seule pathologie de Mme [U] [Z] et les quantités de produits délivrés ne sauraient à eux seuls être suffisants pour retenir l’origine transfusionnelle de la contamination par le virus de l’hépatite C ; que de plus, l’enquête transfusionnelle produite aux débats ne démontre pas l’administration des produits sanguins délivrés par l’ex-[6] et n’a pas pu être finalisée compte tenu de l’ancienneté des produits et de l’absence de documents de matérialité ; que cette enquête transfusionnelle ne mentionne que la date de distribution, et le type de produit ; qu’en tout état de cause, la simple commande de produits sanguins de l’hôpital à l’[8], dans la perspective d’une intervention, ne peut suffire à établir la matérialité des transfusions ; qu’aucune expertise médicale n’a été diligentée dans ce dossier ; que l’ONIAM ne produit aucun élément qui permet de retenir avec certitude une contamination transfusionnelle par le VHC ; que les certificats du Professeur [S] mentionnent seulement que Madame [U] [Z] a été suivie pour sa thalasso-drépanocytose et qu’elle a reçu un certain nombre de produits sanguins depuis sa naissance ; qu’il ressort de l’enquête transfusionnelle que plusieurs centres auraient fournis des produits sanguins à Madame [U] [Z] :
• sur les périodes du 18/01/1977 au 06/08/1982 par le [6] de [Localité 9]. La délivrance de 132 produits sanguins labiles aurait été retrouvée ;
• sur les périodes du 14/01/1983 au 22/01/1992 par le [6] de [Localité 12]. La délivrance de 95 produits labiles aurait été retrouvée.
Elle considère qu’il appartient à l’ONIAM qui recherche la garantie d’un assureur d’identifier le [6] à l’origine de la contamination ; qu’il appartient au Tribunal de tenir compte de la fourniture par d’autres établissements de produits sanguins dont l’innocuité n’a pas pu être établie.
Elle soutient que le [6] à l’origine de la contamination n’ayant pu être identifié, l’ONIAM n’apporte dès lors pas la preuve qu’il serait lui-même garanti par une assurance couvrant les dommages subis par Mme [U] [Z].
Elle fait valoir qu’en tout état de cause, pour les 95 produits provenant de l’ex-[6] de [Localité 12], le [6] de [Localité 9] ne saurait être tenu pour responsable ; que dans ce contexte, si une condamnation de la société AXA devait intervenir, elle devrait être alors limitée aux seuls produits provenant du [6] de [Localité 9] soit au total : 23 573€ (montant titre exécutoire) x 132 produits fournis par le [6] de [Localité 3]/227 transfusions = 13 707.65€ ; que dans cette hypothèse, le montant de la condamnation éventuelle de la société AXA devrait être limitée aux seuls produits dont on a la certitude qu’ils proviennent bien du [6] de [Localité 9], à savoir la somme de 13 707.65€.
Elle indique par ailleurs, que l’incertitude quant à la date de contamination fait obstacle à l’action en garantie de l’ONIAM qui doit démontrer qu’un produit sanguin a été fourni par le [6] de [Localité 9] et qu’il a été bien été administré à la patiente pendant la période de garantie de la société d’assurance AXA.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 02 septembre 2024, l’ONIAM demande au tribunal :
A TITRE PRINCIPAL,
-Juger que le directeur de l’ONIAM est compétent pour émettre des titres exécutoires en recouvrement de créances subrogatoires ;
– Juger que le titre émis est motivé et indique les bases de liquidation de la créance ;
– Juger que sa créance est bien fondée ;
– Juger le bien-fondé de sa créance, objet du titre n°2018-682 ;
– Juger la régularité formelle du titre n°2018-682 émis par l’ONIAM ;
Par conséquent,
– Juger que le titre exécutoire n°2018-682 est parfaitement motivé et régulier tant sur la forme que sur le fond ;
– Débouter la société AXA de sa demande d’annulation du titre n°2018-682 ainsi qu’aux fins de décharge ;
A TITRE SUBSIDIAIRE, si le Tribunal annulait le titre contesté pour un vice de forme, sans remettre en cause son bien-fondé ;
– Condamner la société AXA à lui rembourser la somme de 23.573€, versée à Mme [U]-[Z] au titre de sa contamination par le VHC ;
EN TOUTE HYPOTHESE,
– Condamner la société AXA à titre reconventionnel aux intérêts au taux légal, pour la somme de 23.573€, à compter du 31 octobre 2018, et dire que ces intérêts seront capitalisés le 1er novembre 2019 ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts ;
– Condamner la société AXA à lui payer une somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Il fait valoir que l’enquête transfusionnelle qui a été diligentée auprès de l’[8] ([8]) n’a pas permis de contrôler l’intégralité des donneurs à l’origine des produits sanguins administrés à Mme [U] [Z] de sorte que ces produits n’ont pas pu être innocentés ; qu’il a versé au total à Mme [U] [Z] en indemnisation de son préjudice la somme de 23 573€ au titre de la contamination transfusionnelle par le VHC ; que c’est dans ces circonstances qu’il a émis à l’encontre d’AXA, en sa qualité d’assureur des [6] de [Localité 9] et de [Localité 12], le titre exécutoire n°2018-682 émis le 10 juillet 2018 pour un montant de 23 573€.
Il soutient que l’annulation d’un titre exécutoire pour des raisons de forme n’entraîne pas la décharge des sommes à payer, à la différence d’une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre, de sorte que les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre doivent être examinés avant ceux portant sur la régularité du titre; qu’il ressort de l’enquête transfusionnelle réalisée par l’[8], qui est le seul établissement à disposer d’archives en matière transfusionnelle, que les produits sanguins administrés à Mme [M] [U]-[Z] ont été fournis par le [6] de [Localité 9] et par le [6] de [Localité 12] ; que la société AXA ne nie pas être l’assureur du [6] de [Localité 9] et du [6] de [Localité 12] ; qu’afin de pallier toute difficulté sur ce point, l’ONIAM produit dans la cause les polices d’assurance :
– La police n°9.375.152 couvrant la période à compter du 6 aout 1970, souscrit par le [6] de [Localité 9] auprès de la société d’UAP, aux droits et obligations de laquelle vient la société AXA ;
– La police n°0409920 N couvrant la période à compter du 9 mars 1977, souscrit par le [6] de [Localité 9] auprès de la société d’UAP, aux droits et obligations de laquelle vient la société AXA ;
– La police n°226-4-635501, souscrite par le [6] de [Localité 12] auprès de la société PRESENCE, aux droits et obligations de laquelle vient la société AXA.
Il soutient qu’il est donc bien fondé à rechercher la garantie d’AXA en sa qualité d’assureur du [6] de [Localité 9], responsable du dommage subi par Madame [U]-[Z] du fait de sa contamination transfusionnelle par le VHC ; qu’en effet, la garantie est due à l’ONIAM lorsque l’origine transfusionnelle d’une contamination est admise, que l’établissement de transfusion sanguine assuré a fourni au moins un produit administré à la victime et que la preuve que ce produit n’était pas contaminé n’a pu être rapportée ; que l’ONIAM bénéficie d’une présomption d’imputabilité en application de l’article 102 de la loi du 4 mars 2002, d’une part et d’autre part, il faut retenir la responsabilité solidaire des fournisseurs de produits sanguins dans le cas de multiples fournisseurs de produits sanguins à la victime.
Il indique que l’organisation d’une expertise médicale n’est pas une condition nécessaire pour établir la matérialité d’une transfusion et l’origine transfusionnelle d’une contamination par le VHC ; qu’à la lecture des pièces communiquées par Mme [U]-[Z], l’ONIAM a pu admettre le caractère transfusionnel de sa contamination par le VHC sans que le recours à une mesure d’expertise ne soit utile ; qu’il est certain que Mme [U]-[Z] a bien bénéficié de l’administration de produits sanguins ; que la matérialité des transfusions n’a nullement été remise en cause par l’ordonnance du Tribunal administratif de Toulon en date du 21 juillet 2016, aux termes de laquelle l’ONIAM a été condamné à verser une provision.
Il rappelle que Mme [U]-[Z] souffrait d’une pathologie nécessitant de nombreuses transfusions sanguines et que plus d’une centaine de produits sanguins lui ont été administrés par l’ex-[6] de [Localité 9] et l’ex-[5] de [Localité 12] ; qu’il ne ressort pas du dossier médical d’autres facteurs contaminants ; qu’il y a donc lieu de retenir l’origine transfusionnelle de la contamination, au bénéfice du doute, en faisant application de la présomption d’imputabilité.
Il soutient que la société AXA tente d’inverser la charge de la preuve en exigeant de l’ONIAM qu’il démontre que les produits sanguins incriminés ont bien été délivrés à Mme [U]-[Z] ; que l’[8] a procédé à une enquête sur les produits transfusés, qui a permis de mettre en évidence la délivrance de très nombreux produits sanguins susvisés, au nom de Mme [U]-[Z] [M] : 132 produits pour le [6] de [Localité 9] entre 1977 et 1982 et 95 produits pour le [6] de [Localité 12] entre 1983 et 1992 ; que Mme [U]-[Z] a été transfusée à une époque où il n’existait aucune sécurité transfusionnelle, où les donneurs n’étaient pas testés en amont et surtout, où les tests permettant de détecter le VHC n’avaient pas encore vu le jour ; que l’enquête transfusionnelle réalisée par l’[8] précise que l’ensemble des donneurs à l’origine des produits transfusés n’ont pu être contrôlés en raison de leur très grand nombre, de sorte que le statut sérologique de la majorité d’entre eux vis-à-vis de l’hépatite C demeure inconnu ; que de plus, Mme [M] [U]-[Z] ne présentait aucun facteur de risque de contamination à l’exception des transfusions sanguines dont elle a bénéficié, ainsi que le précise très clairement le Professeur [S].

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures susvisées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 09 septembre 2024 et l’affaire renvoyée à l’audience de plaidoirie du 26 septembre 2024.

MOTIFS :

L’article L.1221-14 du Code de la santé publique dispose, dans sa rédaction issue de la modification par l’article 39 de la loi n°2020-1576 du 14 décembre 2020, applicable aux actions juridictionnelles engagées à compter du 1er juin 2010, sous réserve des décisions passées en force de chose jugée :
« Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l’hépatite […] C […] causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang […] sont indemnisées au titre de la solidarité nationale par l’office […].
L’offre d’indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis du fait de la contamination est faite à la victime […].
La victime dispose du droit d’action en justice contre l’office si sa demande d’indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans un délai de six mois à compter du jour où l’office reçoit la justification complète des préjudices ou si elle juge cette offre insuffisante […]
La transaction intervenue entre l’office et la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article est opposable à l’assureur, sans que celui-ci puisse mettre en œuvre la clause de direction du procès éventuellement contenue dans les contrats d’assurance applicables, ou, le cas échéant, au responsable des dommages, sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées […]
Lorsque l’office a indemnisé une victime ou lorsque les tiers payeurs ont pris en charge des prestations mentionnées aux 1 à 3 de l’article 29 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, ils peuvent directement demander à être garantis des sommes qu’ils ont versées ou des prestations prises en charge par les assureurs des structures reprises par l'[8] en vertu du B de l’article 18 de la loi n°98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire de produits destinés à l’homme, de l’article 60 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n°2000-1353 du 30 décembre 2000) et de l’article 14 de l’ordonnance n°2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine, que le dommage subi par la victime soit ou non imputable à une faute.
L’office et les tiers payeurs, subrogés dans les droits de la victime, bénéficient dans le cadre de l’action mentionnée au septième alinéa du présent article de la présomption d’imputabilité dans les conditions prévues à l’article 102 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Les assureurs à l’égard desquels il est démontré que la structure qu’ils assurent a fourni au moins un produit sanguin labile ou médicament dérivé du sang, administré à la victime, et dont l’innocuité n’est pas démontrée, sont solidairement tenus de garantir l’office et les tiers payeurs pour l’ensemble des sommes versées et des prestations prises en charge.».

L’alinéa 6 de l’article L.1221-14 précise que « La transaction intervenue entre l’office et la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article est opposable à l’assureur, (…), ou, le cas échéant, au responsable des dommages ».

En l’espèce, la société AXA sollicitant à titre principal l’annulation du titre exécutoire émis à son encontre, le tribunal examinera en premier lieu les critiques formulées à l’encontre de sa régularité externe.

Sur la régularité externe du titre exécutoire :

– Sur la signature du titre :

Aux termes de l’article L.212-1 du code des relations entre le public et l’administration toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur, ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.

En l’espèce l’ordre à recouvrer exécutoire produit aux débats est revêtu d’un timbre humide comportant la mention « [K] [F], directeur de l’ONIAM », suivi d’une signature. Ce denier figure également en tête de ce document comme étant l’ordonnateur.

Il résulte de ces éléments que M.[F] doit être considéré comme étant l’auteur de la décision contestée au sens de l’article L.212-1 précité, dont l’objet est de permettre au public d’identifier les personnes ayant matériellement pris les décisions qui les concernent.

Dans ces conditions le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions sera écarté.

– Sur l’absence de précision du titre quant aux bases de liquidation de la créance:

La société AXA se prévaut encore d’une violation de l’article 24 du décret du 7 novembre 2012, lequel précise que toute créance liquidée faisant l’objet d’une déclaration ou d’un ordre à recouvrer indique les bases de sa liquidation.

Or la simple lecture de l’ordre à recouvrer permet de constater que celui-ci indique que la somme correspond à celle versée à Mme [U] [Z] en vertu de trois protocoles transactionnels d’indemnisation et d’un jugement du tribunal administratif de Toulon du 21 juillet 2016.

Par ailleurs l’avis des sommes à payer joint à l’ordre à recouvrer se réfère expressément aux dispositions de l’article L.1221-14 du code de la santé publique, et distingue précisément les sommes versées à Mme [U] [Z], que ce soit au titre des protocoles et du jugement susvisés qui précisent le détail des sommes versées à la bénéficiaire.

Il apparaît dans des conditions que le titre exécutoire répond aux exigences de motivation en ce qu’il indique clairement de façon détaillée les bases de la liquidation des sommes exigées de la compagnie AXA.

Le titre exécutoire n’encourt donc aucun grief de nullité relativement à sa régularité externe.

Sur la régularité interne du titre exécutoire :

– Sur l’existence et le contenu des contrats d’assurance :

L’[8] a précisé (pièce N°12 de l’ONIAM) que 132 produits labiles avaient été délivrés par l’ex-[6] de [Localité 9] au nom de l’enfant [U] [Z] [L] pour la période allant du 18/01/1977 au 06/08/1982.

La société AXA conteste être l’assureur du [6] de [Localité 9], dont l’ONIAM a assumé l’obligation d’indemnisation.

Cependant l’ONIAM produit aux débats le contrat d’assurance conclu les 30 et 31 août 1970, avec effet au 6 août 1970, entre la compagnie UAP et le [6] de [Localité 9] ainsi que les conditions particulières de la police à effet du 09 mars 1977 au 1er janvier 1978.

Ce contrat a été conclu pour une durée d’un an avec tacite reconduction. Il était encore en vigueur au moment du traitement administré à Mme [U] [Z] en 1982, la société AXA venant aux droits de la société d’assurances UAP n’ayant pas rapporté la preuve de résiliation de la police n°313850409920 N garantissant l’activité du [6] de [Localité 9] sur la période du 1er janvier 1978 au 06 août 1982.

Ce contrat indique en son article II, 3°), que la garantie de l’assureur est acquise à l’égard de tout receveur de sang, conformément aux articles 1382 et suivants du code civil, pour les dommages corporels ou matériels dont il pourrait être victime du fait, soit d’une transfusion ou injection de sang (ou de ses dérivés) fourni par le Centre (que la transfusion ou injection soit effectuée par le personnel du Centre ou par toute autre personne), soit d’une transfusion ou injection de sang frais effectuée par un médecin extérieur au Centre par prélèvement sur les donneurs envoyés par le Centre.

La société AXA, venant aux droits de la compagnie UAP, est donc bien l’assureur du [6] de [Localité 9] pour les activités pour lesquelles sa garantie est recherchée.

– Sur la preuve de la responsabilité du [6] de [Localité 9] :

L’article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative au droit des malades et à la qualité du système de santé précise qu’en “cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le virus de l’hépatite C antérieure à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n’est pas à l’origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Le doute profite au demandeur.”

La responsabilité d’un établissement de transfusion sanguine se trouve engagée, et donc la garantie de son assureur est due, dès lors que trois conditions sont réunies :
➢ L’existence d’une transfusion sanguine est établie (matérialité),
➢ L’origine transfusionnelle de la contamination est admise,
➢ L’établissement en cause a fourni au moins un produit administré à la victime,
➢ L’établissement n’a pas été en mesure de prouver que ce produit n’était pas contaminé.

C’est donc vainement que la société AXA prétend que l’ONIAM devrait rapporter la preuve de l’origine transfusionnelle de la contamination, et ne pourrait se prévaloir de la présomption de l’article 102 de la loi du 4 mars 2002, l’article L.1221-4 du code de la santé publique disposant expressément le contraire, la société AXA n’ayant pas démontré l’innocuité des 132 produits sanguins labiles délivrés tant par l’ex-[6] de [Localité 9] que par celui de [Localité 12] assuré par la société AXA venant aux droits de PRESENCE ASSURANCES, et qui en a délivré 95 produits à [L] [U] [Z] sur la période du 14/01/1983 au 22/01/1992.

La matérialité de l’administration de ces produits est démontrée d’une part, par les courriers datés de 1984 et 1993 et le certificat médical du 18/07/2012 du Professeur [T] [S], et d’autre part, par la synthèse de l’enquête diligentée par l’[8] le 19 novembre 2012, complétée par courrier de l’[8] le 11 mai 2018. Il précisait que sur la période du 29/01/1991 au 22/01/1992, les produits sanguins labiles correspondaient à 15 donneurs, dont 8 d’entre eux avaient été revus avec une sérologie VHC négative.

Dans le cadre de la présente instance, la société AXA ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe pour renverser la présomption légale instaurée au profit de la victime, qu’au moins l’un des produits sanguins utilisés n’a pas été à l’origine de la contamination par le virus de l’hépatite C.

C’est donc en vain que la société AXA conteste son obligation de garantir les dommages causés par son assuré.

Elle sera donc déboutée de l’intégralité de ses demandes.

Sur les autres demandes :

L’article 1231-6 du code civil dispose que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

La demande de l’ONIAM au titre des intérêts ne se heurte pas au principe du non cumul de l’action juridictionnelle et de l’émission d’un titre, dès lors que les intérêts réclamés au titre de l’action ne sont pas visés dans le titre.

En conséquence la somme due par la société AXA en vertu du titre émis à son encontre produira des intérêts au taux légal à compter de la requête en contestation de l’ordre à recouvrer par devant le tribunal administratif de Montreuil le 31 octobre 2018. En application de l’article 1343-2 du code civil, ces intérêts produiront eux-mêmes des intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour au moins une année entière.

La société AXA, qui succombe à l’instance, en supportera les dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître de la GRANGE, conformément à l’article 699 du code de procédure civile. Elle sera en outre condamnée à payer à l’ONIAM la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :

DÉBOUTE la SA AXA FRANCE IARD de ses demandes ;

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD à payer à l’ONIAM les intérêts au taux légal sur la somme mise à sa charge en vertu du titre exécutoire n°2018-682 à l’encontre de la société AXA France d’un montant total de 23 573€, à compter du 31 octobre 2018;

DIT que les intérêts échus, dus pour au moins une année entière, produiront eux-mêmes des intérêts ;

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD à payer à l’ONIAM la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître de la GRANGE.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 21 Novembre 2024

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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